LES BIOCARBURANTS DE PREMIERE GENERATIO

LES BIOCARBURANTS DE PREMIERE GENERATION

Les limites des biocarburants de première génération

En 2005, un rapport-bilan de la politique de soutien aux biocarburants a montré des résultats économiques mitigés (Prévot et al., 2005). Cette étude montre en effet que depuis de nombreuses années l’exonération de la TIC compensait les producteurs bien au-delà des surcoûts de production révélant une politique bien coûteuse. A ceci s’ajoute la faible création d’emplois dans le secteur agricole qui s’apparentait en fait plus à un maintien du nombre d’emplois qu’à une création pure et simple d’emplois en zones rurales prévue initialement (Prévot et al., 2005). Au bilan économique plus que moyen s’ajoute un bilan environnemental très controversé. De récentes études réalisées de par le monde (ADEME 2010) annoncent une réduction d’émissions de GES allant de 30 à 60% par rapport à leurs équivalents fossiles alors que les prévisions initiales tablaient sur une réduction de 60 à 80% avant 2002. Pour certaines filières il y même des incertitudes sur l’existence d’un vrai gain environnemental. En fait aucun biocarburant n’est véritablement « vert » puisqu’ils sont tous encore mélangés à la pompe avec les carburants d’origine fossile qu’ils sont censés remplacer. C’est surtout la phase de production qui pose problème. Pour avoir des rendements suffisants, il est nécessaire d’avoir des sols fertiles et de faire de l’agriculture intensive. Ceci s’accompagne inévitablement de l’utilisation d’engrais azotés qui conduit à la formation de protoxyde d’azote 200 fois plus « réchauffant » que le CO2 ! Ainsi, même si les gaz à effet de serre sont globalement réduits par rapport à l’utilisation de carburants fossiles, les biocarburants ne produisent au final que 1,5 à 5L de biocarburants pour 1L de pétrole fossile utilisé (Fery, 2011). En fait, seule la production d’éthanol à partir de cannes à sucre au Brésil fait l’unanimité en présentant un bilan environnemental positif à condition bien sûr qu’elle n’engendre pas un changement d’affectation des terres. La canne à sucre, cultivée sur 1% du territoire brésilien, comblerait 50% de la consommation brésilienne de carburants. Les impacts sur la biodiversité, les sols et la ressource en eau d’une intensification des cultures énergétiques ne sont également pas négligeables (FAO, 2008). Des limites apparaissent également au niveau géopolitique. L’objectif fixé par l’Europe d’accroître son indépendance énergétique en limitant les importations d’énergies fossiles semble délicat à atteindre. Une substitution importante de ce type d’énergie par des biocarburants de première génération nécessiterait en effet une quantité de terres largement supérieure aux surfaces disponibles (Prévot et al., 2005). D’autre part, la substitution des cultures alimentaires en cultures énergétiques implique une compétition directe entre ces deux modes de cultures possibles. Le développement et l’expansion du secteur des biocarburants contribuent alors à faire monter le prix des denrées alimentaires à Chapitre 1 10 moyen terme et à accroître l’insécurité alimentaire des catégories de population les plus défavorisées des pays en développement (OCDE, 2008). Finalement, le bilan mitigé des biocarburants de première génération a contribué à reporter tous les espoirs vers ceux de seconde génération. De meilleurs bilans environnementaux, des rendements plus élevés et surtout la non compétition entre usage alimentaire et non alimentaire des produits agricoles sont les principaux avantages attendus.

LES BIOCARBURANTS DE SECONDE GENERATION COMME ALTERNATIVE A L’UTILISATION DES CARBURANTS D’ORIGINE FOSSILE

Deux grandes filières de production de biocarburants de seconde génération sont envisagées. La voie biochimique qui permet d’obtenir du bioéthanol selon un procédé relativement proche de celui utilisé dans la fabrication de bioéthanol de première génération et la voie thermochimique permettant d’obtenir du gazole de synthèse, du kérosène, du méthanol, de l’éthanol ou encore du diméthy-ether (DME). Les procédés de synthèse y sont différents de ceux utilisés dans la production de biogazole de première génération. Ces deux procédés ont l’avantage de convertir l’intégralité de la biomasse et notamment la partie ligno-cellulosique de grands nombres de végétaux. 1.3.1. Les types de biomasses envisagés et les problèmes liés Dans le domaine énergétique, la biomasse se définit comme l’ensemble des matières d’origine végétale, animale ou fongique pouvant devenir source d’énergie. Cependant, seule la biomasse végétale, parce qu’elle contient de la cellulose, est adaptée à la production de biocarburants de seconde génération. Les trois principales filières d’approvisionnement en biomasse sont la filière des déchets industriels, des résidus agricoles et sylvicoles et des cultures énergétiques dédiées. De manière à ne pas retomber sur les écueils soulevés par la production des biocarburants de première génération, cette dernière filière devra être utilisée en dernier recours. La quantité importante de la ressource et son faible coût sont des avantages indéniables au développement de ce type de carburants. Dans la filière « déchets industriels » ce sont surtout les résidus provenant de la transformation du bois et les co-produits des industries agro-alimentaires qui peuvent être mobilisés. Cette ressource est facilement mobilisable et pour partie utilisée par d’autres Revue de littérature 11 filières déjà matures comme les filières bois énergie ou papetières. La mobilisation de cette ressource pour la production de biocarburants entrainerait donc une concurrence inévitable entre les filières qui peut, à plus ou moins long terme, être préjudiciable. En fait, dans ces déchets industriels seuls les bois de rebus ne sont pas utilisés. Mais à cause de leur très grande dispersion et de leur pollution (une partie de ces bois est traitée chimiquement) cela nécessiterait la mise en place d’un système de collecte et de traitement coûteux qui n’existe pas à l’heure actuelle. Il est cependant intéressant de noter que des recherches ont lieu dans ce domaine. Girods (2008) a ainsi étudié la valorisation énergétique des déchets de panneau de particules. Grâce à un procédé multi-étagé, l’azote présent dans les colles est dans un premier temps éliminé par pyrolyse. Le produit alors formé est converti en un gaz riche en hydrogène et monoxyde de carbone utilisable dans divers procédés de valorisation énergétique. La filière des résidus agricole et sylvicole représente une ressource disponible de 15,7 millions de tonnes de matière sèche. Globalement, les résidus agricoles sont constitués de toute la matière végétale qui est laissée sur le sol après la récolte (paille de céréales, cannes de maïs…), cela représente 6.6 millions de tonnes disponibles (Departe, 2010). Les résidus forestiers quant à eux sont essentiellement constitués de résidus dits « hors forêt », majoritairement issus de l’élagage de haies ou d’arbres isolés, et de résidus forestiers (rémanents, bois d’éclaircie), cela représente 9,1 millions de tonnes disponibles (Departe, 2010). Théoriquement, cette filière permettrait la production de 2,7 Mtep de biocarburant si ces résidus étaient utilisés en totalité. Mais compte tenu des objectifs en terme de biocarburants fixés pour 2020 et en faisant l’hypothèse que les quantités de biocarburants de première génération n’augmenteront pas, les gisements en résidus agricole et sylvicole ne suffiront pas. La mise en place de cultures énergétiques dédiées semble donc inévitable et nécessaire. Différentes espèces végétales sont envisagées à ce propos. Elles présentent toutes les mêmes caractéristiques générales. Ce sont des espèces robustes à hauts rendements en matière sèche pouvant se développer sur des terres marginales avec peu d’engrais. Cela permet d’obtenir des rendements de biomasse à l’hectare important et donc des rendements énergétiques surfaciques élevés bien supérieurs à ceux obtenus grâce à la première génération de biocarburants. Actuellement, des espèces annuelles comme le sorgho fibre (Sorghum bicolor) ou le triticale (Triticosecale), des espèces fourragères comme la luzerne (Medicago sativa) et la fétuque (Festuca) ou encore des espèces pérennes herbacées comme le miscanthus ou ligneuses provenant des taillis à courte rotation (TCR) ou des taillis à très courte rotation (TtCR) sont envisagées. Les différents types de biomasse pouvant être utilisés montrent bien que la matière première nécessaire à la fabrication des biocarburants de seconde génération est, de par sa provenance variée, très hétérogène, dispersée et énergétiquement peu concentrée. Il serait donc peu rentable aussi bien sur le plan économique que énergétique de l’utiliser Chapitre 1 12 directement. Une étape de prétaitement est indispensable avant son utilisation dans les processus de fabrication de biocarburants. En fonction des voies de synthèse choisies cette étape peut prendre différentes formes. La nature de la biomasse mobilisée a une influence sur le rendement des procédés (Ballerini, 2006). Il est pour finir intéressant de noter que des matières d’origine animale peuvent aussi être utilisées dans la production de biocarburants de seconde génération (gazeification des résidus d’élevage). Dans ce travail, seul le bois a été étudié. Il est cependant important de noter qu’un travail similaire à celui présenté ultérieurement peut être réalisé avec d’autres types de biomasse. 1.3.2. La voie biochimique De manière générale, la production de bioéthanol de seconde génération suit les mêmes étapes que celle de première génération (figure I-1). Cependant, de par la nature très différente de la biomasse utilisée, de nouvelles étapes de production doivent être ajoutées et d’autres, déjà existantes, doivent être modifiées. Une étape de prétraitement (mécanique, physico-chimique ou chimique) est nécessaire afin de rendre accessible les molécules de cellulose, majoritairement utilisées lors de la production de bioéthanol de seconde génération. A ce jour, l’explosion à la vapeur est le procédé de prétraitement le plus mature. Il consiste à porter le matériau à haute température (entre 160 et 270°C) par injection de vapeur saturée sous haute pression (10 à 50 bar) pendant un temps court puis à pratiquer une détente brutale jusqu’à pression atmosphérique. Il se produit alors une déstructuration de la matrice ligno-cellulosique, une hydrolyse partielle des hémicelluloses et un début de transformation de la lignine rendant finalement les molécules de cellulose bien plus accessibles (Broust et al., 2008). L’étape d’hydrolyse enzymatique doit être modifiée afin de permettre la dégradation de la cellulose en hexoses et des enzymes spécifiques doivent être utilisées. C’est également le cas lors de l’étape de fermentation des hexoses qui nécessite des levures particulières. Pour finir, le mélange obtenu en fin de procédé permet, comme dans le procédé de première génération, d’obtenir du bioéthanol. Il est cependant plus dilué ce qui rend l’étape de distillation finale bien plus énergivore. A l’heure actuelle, ces étapes font encore l’objet de recherches principalement menées par l’Institut National de la Recherche Agronomique (INRA) et l’IFP Energies nouvelles. 1.3.3. La voie thermochimique La voie thermochimique de production de biocarburants de seconde génération est composée de deux grandes étapes : une étape de gazéification de la biomasse suivie d’une synthèse du carburant à partir du gaz obtenu. A partir du gaz obtenu deux voies de synthèse Revue de littérature 13 de carburant sont possibles, elles permettent d’obtenir des carburants gazeux d’une part (DME, méthanol et éthanol) et d’autre part des carburants liquides (diesel et kérosène). Alors que les carburants gazeux ne peuvent pas encore être utilisés dans les moteurs classiques, la voie la plus prometteuse est celle de la production de gazole par la voie liquide dite BtL (Biomass to Liquids). Elle présente l’énorme avantage de produire du gazole directement compatible avec les moteurs diesel actuels et de nécessiter de plus faibles investissements dans les systèmes de distribution. C’est cette voie qui est présentée dans ce travail. La figure I-3 présente les deux grands procédés de production de biogazole de seconde génération. Globalement, ces procédés suivent les mêmes étapes. Ils ne diffèrent que par le type de prétraitement de la biomasse et par la source énergétique utilisée pour la production du dihydrogène nécessaire dans l’étape d’ajustement du ratio H2/CO.

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