La transmission du paludisme dans une future zone d’essais cliniques

La transmission du paludisme dans une future zone d’essais cliniques

Généralités sur les vecteurs du paludisme

Position systématique

Les vecteurs du paludisme humain appartiennent tous au genre Anopheles et à la famille des Culicidae. Celle-ci comprend près de 3300 espèces regroupées en 37 genres (Carnevale & Robert, 2009). Parmi les 484 espèces décrites dans le genre Anopheles (Harbach, 2004), une soixantaine sont des vecteurs dont seulement une vingtaine sont connus comme de bons vecteurs. En Afrique, au sud du Sahara, une douzaine d’espèces sont connues comme bons vecteurs parmi lesquels An. gambiae, An. coluzzii, An. arabiensis, An. funestus, An. nili et An. moucheti.

Morphologie

Les anophèles sont des insectes à métamorphose complète (insectes holométaboles) : l’adulte, la larve et la nymphe ont des morphologies très différentes et adaptées à leurs modes de vie. Le cycle de vie des anophèles se déroule dans deux milieux (Figure 1). En milieu aquatique, le développement se fait en trois étapes avec trois stades qui se succèdent: œuf, larve et nymphe. Les œufs sont pondus isolément à la surface de l’eau. Ils possèdent des flotteurs latéraux qui leur permettent de rester à la surface de l’eau grâce à un phénomène de tension superficielle. Ils ne résistent pas à la dessiccation et éclosent en général 48 heures après la ponte de la femelle et donnent naissance à des larves. Les larves sont caractérisées par l’absence de pattes et de siphon respiratoire et la présence d’un thorax globuleux. Au cours du développement, la larve d’anophèle subit 4 mues et passe ainsi par quatre stades. À la fin de la vie larvaire survient une métamorphose complète. La larve se transforme en nymphe qui diffère morphologiquement de la larve. Cette nymphe est caractérisée par la 4 fusion de la tête et du thorax pour donner naissance à un céphalothorax globuleux et par une respiration à travers deux trompettes respiratoires. A maturité, la nymphe est l’objet de modifications internes très importantes qui permet la transformation en adulte ailé. L’adulte possède une morphologie particulière avec trois parties bien individualisées. La tête porte deux yeux composés, deux antennes avec des soies (longues et nombreuses chez les mâles), une trompe ou proboscis et deux palpes maxillaires situés de part et d’autre de la trompe. Le thorax comprend trois segments soudés (prothorax, mesothorax et metathorax) et porte une paire d’ailes, une paire de balanciers et 3 paires de pattes. L’abdomen comporte 10 segments dont 8 sont visibles. A son extrémité se trouvent les organes de reproduction (génitalia chez les mâles et cerques chez les femelles).

Biologie

Chez les anophèles les mâles ne sont pas hématophages, ils se nourrissent de sucs d’origine végétale et leur longévité est relativement faible. Les femelles se nourrissent également de sucs d’origine végétale mais ont besoin de sang pour assurer la maturation de leurs œufs. En général, chaque prise de repas sanguin est suivie d’une ponte dans les 2 à 3 jours qui suivent (cycle gonotrophique). Après chaque ponte, le moustique se met à la recherche d’un nouvel hôte. La ponte ainsi que les deux stades suivants (larve et nymphe) se font en milieu aquatique et durent en tout entre 7 jours et 5 semaines selon l’espèce et, surtout la température ambiante. Le stade adulte se déroule en milieu aérien et dure environ une semaine pour le mâle et jusqu’à deux mois pour la femelle. Les gites larvaires sont presque toujours des collections d’eau calme (les larves sans siphon se noient dans les eaux agitées): mares permanentes ou temporaires, anses de rivières, bords de lacs, empreintes de pas…. 5 Figure 1 : Cycle biologique de l’anophèle (d’après Hervy et al., 1998) Les femelles sont attirées par différents stimuli dégagés par l’hôte: le CO2, la sueur, la taille entre autres. Les préférences trophiques varient suivant les espèces de moustiques et la disponibilité des hôtes vertébrés. Les moustiques zoophiles se nourrissent exclusivement sur des animaux et les moustiques anthropophiles presque exclusivement sur homme. Selon le lieu de la prise du repas sanguin on distingue des moustiques endophages (piquant à l’intérieur des habitations) et des moustiques exophages (piquant à l’extérieur des habitations). De la même façon, selon le lieu de repos après la prise du repas sanguin on distingue des moustiques endophiles c’est à dire ceux qui une fois gorgés restent à l’intérieur des habitations pour digérer leurs repas de sang (faune résiduelle), et des moustiques exophiles, qui restent hors des habitations humaines pour digérer leurs repas de sang. 

Les vecteurs du paludisme au Sénégal

Une vingtaine d’espèces anophéliennes ont été décrites au Sénégal (Diagne et al., 1994). Parmi ces espèces, six sont connues pour leur implication dans la transmission du paludisme : An. gambiae s.s, An. arabiensis, An. funestus , An. melas, An. nili et An. pharoensis (Dia, 2007). An. gambiae s.s, An. arabiensis et An. funestus sont les trois vecteurs majeurs alors que An. melas, An. nili et An. pharoensis sont considérés comme des vecteurs secondaires du fait 6 de leur implication faible et localisée. An. gambiae s.s et An. arabiensis sont sympatriques dans toutes les zones climatiques du Sénégal (Faye et al., 2011). Leurs fréquences relatives dépendent des conditions climatiques (Fontenille et al., 2003). An. gambiae s.s est prédominant dans les zones de savanes humides alors que An. arabiensis est plus abondant en zones sahéliennes et soudano-sahéliennes (Dia et al., 2008). Leurs gîtes larvaires sont constitués principalement par des collections d’eau peu profondes et ensoleillées : empreintes de pas, de sabots, petites mares, marécages aménagés, rizières … (Gillies & De Meillon, 1968). An. melas est localisé le long du littoral mais également à l’intérieur des terres le long des cours d’eau du Sine Saloum et de basse Casamance jusqu’aux limites atteintes par la remontée des eaux marines. An. funestus a été absent auparavant des zones sahéliennes suite à la sécheresse des années 70. Il est actuellement présent dans toutes les zones biogéographiques du Sénégal (Konaté et al., 2001; Dia et al., 2003, 2008). Ses gîtes caractéristiques sont des collections d’eau profondes permanentes ou semi-permanentes avec une végétation émergente ou dressée. An. pharoensis est présent dans toutes les régions climatiques du Sénégal mais avec une faible abondance, à l’exception du delta et de la moyenne vallée du fleuve Sénégal particulièrement dans les zones de riziculture irriguée. An. nili est connu surtout dans la zone du sud-est du Sénégal où son rôle dans la transmission du paludisme a été décrit (Dia et al., 2003). 2. Méthodes d’estimation de la transmission Le taux d’inoculation entomologique (TIE) est le principal paramètre utilisé en entomologie du paludisme pour estimer la transmission du paludisme. Il exprime le nombre de piqûres d’anophèles infectés que reçoit un individu pendant une période donnée. Il est calculé par la formule: TIE = ma x s avec ma = taux d’agressivité et s = indice sporozoitique.

Le taux d’agressivité (ma)

Il correspond au nombre de piqûres reçues par homme durant une période considérée (nuit, semaine, mois, saison, année…). Plusieurs méthodes permettent de l’évaluer dont la plus connue (méthode «gold standard») est la méthode de capture sur homme (OMS, 1975). Dans 7 la pratique, les moustiques venant se poser sur les jambes ou bras dénudés d’un homme qui sert à la fois d’appât et de «captureur» sont collectés dans des tubes à hémolyse. Bien qu’elle soit une méthode de mesure directe du taux d’agressivité, cette méthode pose des problèmes éthiques dus à l’utilisation des «captureurs» comme appât ce qui les expose à la transmission d’autres affections. C’est ainsi que plusieurs méthodes alternatives ont été proposées pour estimer le taux d’agressivité: – la méthode de collecte au repos dans les habitations humaines : le taux d’agressivité est estimé dans ce cas par le produit entre le nombre moyen de moustiques collectés par dormeur et l’indice d’anthropophilie (Toure et al., 1996 ; Dia et al., 2011). C’est cette méthode qui a été utilisée au cours de cette étude. – l’utilisation des pièges CDC couplés à des dormeurs sous moustiquaires non imprégnées (Mathenge et al., 2005). – le piège à odeur (Costantini et al., 1993). – le Mbita trap (Mathenge et al., 2004). L’utilisation de ces méthodes dans plusieurs contextes a cependant montré que la méthode de capture sur homme reste encore la méthode de référence pour évaluer le contact hommevecteur.

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