Les capacités de mapping chez les T21 

Etudes sur le « sens du nombre » et le mapping entre représentations numériques dans la trisomie 21

Les capacités de mapping chez les T21 

Cadre général et hypothèses

Par le biais de cette première étude, nous cherchons à analyser les capacités de mise en correspondances entre représentations symboliques et non symboliques chez les enfants T21. Pour cela, nous comparons les performances des enfants T21 avec celles d’enfants typiques appariés sur l’âge mental et sur l’âge chronologique à une tâche de mapping numérique. Les études antérieures n’évaluent pas ce type de compétence chez les personnes atteintes de trisomie 21. Comme nous l’avons vu précédemment, les recherches s’attardent davantage à étudier les compétences de comparaison relative de quantités (Camos, 2009 ; Paterson, Girelli, Butterworth et Karmiloff-Smith, 2006 ; Sella, Lanfranchi et Zorzi, 2013). Ansari et ses collaborateurs (2009) se sont plutôt intéressés à ce type de capacité chez les personnes atteintes du syndrome de Williams.

Toutefois, ils n’ont analysé les performances des participants que pour des numérosités de 5, 7, 9 et 11 points. La pertinence d’un programme d’apprentissage numérique basé sur l’estimation et le mapping entre représentations n’a de sens que si les personnes atteintes de trisomie 21 sont en mesure d’apparier les petites et moyennes quantités avec le nombre symbolique correspondant. Dans cette étude, nous nous attendons à ce que les enfants T21 performent aussi bien que le groupe d’enfants typiques apparié sur l’âge mental, indiquant alors que cette compétence de mapping est seulement retardée par rapport à leur âge chronologique. Ainsi, envisager un programme d’apprentissage tel que nous le concevons serait possible pour aider au développement des connaissances numériques dans cette population.

Participants

Le groupe expérimental est constitué de 18 enfants et adolescents T21 âgés de 8,2 à 17,2 ans (âge moyen = 13,4 ans). La trisomie est de type libre, forme la plus fréquemment rencontrée. Aucun n’est scolarisé en milieu ordinaire ; ils ont été recrutés auprès d’institution d’accueil diverses (IME, GEIST, …). Leur âge mental moyen est de 5,8 ans (de 4,5 à 7 ans). Etudes sur le « sens du nombre » et le mapping entre représentations 110 Pour effectuer les comparaisons, deux groupes contrôles sont constitués. Le premier équivalent à l’âge chronologique (AC) moyen est composé de 18 enfants et adolescents typiques de 9 à 20 ans (âge moyen= 13,4 ans). Le second, équivalent à l’âge mental moyen (AM), est composé de 18 enfants âgés de 4 à 7 ans (âge moyen= 5,8 ans). 1.2.1. Matériel et procédure Un consentement éclairé a été obtenu auprès de tous les participants et de leurs responsables légaux au début de l’étude.

Afin d’évaluer leur âge mental, les enfants du groupe T21 ont réalisé le subtest Matrices de la Nouvelle Echelle Métrique d’Intelligence 2ème version (NEMI 2, Cognet, 2006) Le test ZAREKIR (Von Aster et Dellatolas, 2006) leur a également été administré afin de vérifier qu’ils connaissent la suite des nombres. Les enfants typiques des deux groupes contrôle ne présentaient pas de difficultés d’ordre cognitive ou numérique. Ils connaissaient également tous la suite des nombres. Tous les participants ont réalisé une tâche de mapping entre deux représentations numériques (Figure 14). Il s’agit d’une épreuve informatisée permettant d’évaluer la capacité des participants à faire le lien entre une grandeur analogique et le nombre symbolique écrit qui correspond en le désignant sur une ligne numérique externe graduée de 1 à 23. Par défaut, une réponse orale peut également être acceptée.

Après la présentation d’une croix de fixation durant une seconde, une quantité est présentée dont la magnitude varie de 2 à 19 durant une seconde. Ensuite, un masque visuel apparaît en attendant la réponse orale ou de pointage du participant. Au total, les 17 quantités sont présentées à chaque participant dans un ordre aléatoire. L’expérimentateur enregistre dans le programme le nombre désigné par l’enfant pour chaque item. Si le participant ne donne pas de réponse, ou s’il a fait preuve d’un manque d’attention, l’expérimentateur enregistre sur le clavier une absence de réponse du sujet. Les réponses aux quantités 2, 3 et 4 ont été utilisées afin de vérifier les capacités de subitizing des participants. Ces réponses ne sont pas considérées pour l’analyse des résultats à la tâche de mapping.

Résultats

A la tâche de mapping, nous obtenons pour chaque participant deux indicateurs de réussite : la réponse donnée et l’écart avec la réponse attendue (cf. Annexe A, B et C). Avec ces indicateurs, nous pouvons calculer un pourcentage global de réponses exactes ainsi que la variabilité globale avec l’écart-moyen de chaque participant pour l’ensemble des numérosités. Analyse des réponses données à chaque numérosité et pourcentage de réponses exactes Une analyse qualitative rapide permet de voir que les pourcentages de réponses exactes varient au niveau intra-groupe mais aussi intergroupes avec un pourcentage de réussite plus élevé pour le groupe contrôle apparié sur l’âge chronologique (Figure 15).

Plus précisément, quand on s’intéresse à la réponse moyenne par numérosités de chaque groupe, on observe des différences selon la numérosité concernée. Par exemple, les réponses sont moins précises pour les numérosités plus importantes. Ce constat est valable dans les trois groupes. Ce résultat montre un effet lié à la taille des nombres, traduisant une représentation moins fine des plus grandes quantités. Puisqu’il est observé dans les trois groupes, il ne peut être lié à un déficit spécifique au groupe T21. Etant donné la taille de nos échantillons et l’absence d’homogénéité des variances des réponses brutes, nous avons utilisé le test non-paramétrique de Mann-Whitney pour analyser les résultats. Quand on compare les réponses brutes en fonction de la numérosité de chaque participant du groupe T21 et du groupe contrôle AC, on trouve une différence significative pour 6 (U=244,5 ; p<.,01), pour 9 (U=230,5 ; p<.,05), pour 11 (U=233,5 ; p<.,05), pour 12 (U=241 ; p<.,05), pour 14 (U= 225 ; p<.,05), pour 17 (U=248,5 ; p<.,001), pour 18 (U=253,5 ; p<.,001) et pour 19 (U=246 ; p<.,001). Quand on compare le groupe T21 et le groupe contrôle AM, on trouve une différence significative pour les numérosités 6 (U=255 ; p<.,001), 7 (U=245 ; p<.,001), 11 (U=228,5 ; p<.,05), 12 (U=225 ; p<.,05), 17 (U=251,5 ; p<.,001), 18 (U=295,5 ; p<.,001) et 19 (U=240,5 ; p<.,05).

L’analyse indique qu’il n’y a pas de différence significative dans le pourcentage de réponses exactes à la tâche de mapping entre le groupe contrôle AC et le groupe T21 (U=174,5 ; p=.,69). La différence dans le pourcentage de réponses exactes entre le groupe contrôle AM et le groupe T21 n’est pas significative non plus, bien qu’une légère tendance se dégage (U= 114,5 ; p=.,13). Il n’y a donc pas de différence entre les groupes contrôles et les participants T21 dans les compétences de mapping pour les quantités de 5 à 19. En définitive, les personnes T21 répondraient de manière aussi précise que les participants appariés sur l’âge mental et l’âge chronologique. Il n’y a pas de retard au niveau de cette habileté dans la trisomie 21.

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