Les théories d’initiation de la maladie de Parkinson

Les théories d’initiation de la maladie de Parkinson

La théorie de Braak Heiko Braak est un anatomopathologiste allemand né en 1937 et spécialisé dans la morphologie du système nerveux central. Toujours en activité et coauteur de plusieurs publications au cours de l’année 2017, ses recherches lui ont valu l’attribution d’une théorie éponyme. La classification de Braak (Braak et al., 2003) Par l’étude de la distribution des corps de Lewy dans le cerveau de patients atteints ou non de la MP, Braak propose une classification des stades de la MP en fonction des zones cérébrales présentant ces corps de Lewy. Faisant le rappel du constat que la présence de dommages et d’altérations dans la SN est le marqueur majeur de la MP, mais que d’autres zones extra-nigrales du cerveau sont elles aussi atteintes, Braak s’interroge alors sur les voies d’initiation et d’évolution des pathologies parkinsoniennes. La question qu’il se pose alors est : « la pathologie évolue-t-elle de façon simultanée dans toutes les zones nigrales et extra-nigrales ou alors ces sites atteints ont-t-ils des susceptibilités différentes permettant l’apparition des corps de Lewy de façon séquentielle ? ».Suite à l’analyse post mortem de cerveaux provenant de 41 patients diagnostiqués avec la MP, Heiko Braak propose alors une classification en différents stades, en fonction de l’avancement de la distribution des corps de Lewy et des neurites de Lewy dans le cerveau de ces patients. Braak remarque alors que les cas les plus faiblement affectés ont une distribution de corps de Lewy restants confinées dans le noyau dorsal IX/X ou dans la formation réticulée. De plus, il décrit qu’il n’est pas possible d’avoir des lésions corticales sans présence de corps de Lewy dans le tronc cérébral, ce qui suggère une possible progression ascendante des corps de Lewy vers les autres structures cérébrales. Braak et son équipe définissent alors 6 stades d’évolution de la MP, visible dans la figure 23. 

Stade 1

Le premier stade correspond à la détection de corps de Lewy dans deux lieux distincts du SNC : dans le tronc cérébral au niveau du noyau dorsal moteur du nerf vague et de la zone réticulée intermédiaire. D’un point de vue structurel, le noyau dorsal du nerf vague projette de longs axones préganglionnaires et amyélinisés reliant de façon directe, principalement par le nerf vague, le SNC aux cellules nerveuses postganglionnaires du SNE. L’autre zone atteinte par les corps de Lewy est le système olfactif, dont le noyau antérieur olfactif et le tractus nerveux présentent eux aussi des corps de Lewy et des neurites de Lewy. Le nombre de corps et de neurites de Lewy est relativement faible à ce stade, notamment dans le noyau dorsal du nerf vague et dans la zone réticulée intermédiaire. 

Stade 2

 Dans ce deuxième stade, les atteintes vues au stade 1 s’intensifient et progressent vers de nouvelles structures, les lésions se propagent au niveau de la formation réticulée, notamment des neurites de Lewy puis des corps de Lewy sont retrouvés au niveau des noyaux proximaux (noyau raphé caudal, noyau réticulaire gigantocellulaire, locus coeruleus et subcoeruleus). Ces noyaux contrôlent des fonctions somatosensorielles, viscerosensorielles et motrices par des projections faiblement myélinisées projetant dans les centres limbiques. Les symptômes associés aux phases 1 et 2 ne sont pas moteurs et apparaissent une à deux décennies avant l’apparition des signes cliniques moteurs associés à la MP. En effet, seuls des troubles gastriques ou sensoriels (tels que des anosmies) sont présents dans ces phases, ce qui rend difficile le diagnostic de la MP à ce stade, hormis l’analyse de la substance noire. Il faudrait développer un test prenant en compte tous les symptômes nonmoteurs, pour mieux diagnostiquer la MP chez les patients à ce stade bien avant les premiers signes moteurs.

Stade 3 

Le troisième stade marque le début de la détection des agrégats intracytoplasmiques dans la substance noire, marqueur principal de la maladie de Parkinson. Ces inclusions colonisent aussi plusieurs zones aux alentours, comme l’amygdale ou le noyau gris Page | 63 non-thalamique. La cinétique d’apparition des corps et neurites de Lewy dans la SN est particulière, des neurites de Lewy sont d’abord observées dans le noyau postérolatéral, puis ces inclusions intracytoplasmiques sont retrouvées dans les neurones dopaminergiques. Certains types neuronaux particuliers sont touchés à ce stade comme les neurones noradrénergiques du locus coeruleus, les neurones GABAergiques du noyau tubéromammilaire hypothalamique, les neurones cholinergiques du noyau pédonculo pontin, les neurones sérotoninergiques du noyau du raphé. Dans la suite du noyau dorsal du nerf vague et du système nerveux entérique, le complexe amygdalien (projetant dans ces structures et recevant des connexions par le cortex temporal) présente lui aussi des lésions de type Lewy, en revanche, aucune lésion corticale n’est présente. Au stade 3, la dégradation de la substance noire n’engendre pas encore l’apparition des premiers troubles moteurs associés à la MP, de plus, à ce stade, les lésions n’engendrent pas une dépigmentation de la substance noire 

Stade 4

 Cette phase marque la frontière entre la phase pré-symptomatique et la phase symptomatique, marquée par une perte de plus de 70% de neurones dopaminergiques de la substance noire. Le quatrième stade reprend toute la cartographie des lésions des stades précédant, tout en étant plus intense, notamment dans la substance noire, mais aussi dans le noyau sous-coeruleus, où il y a une forte dégénération. Ce stade est marqué aussi par la présence d’inclusions de type Lewy dans le cortex, plus précisément dans le mésocortex antéromédial temporal. 

Stades 5 et 6

 Les deux dernières phases cliniques de la MP sont marquées par l’évolution des lésions dans presque toutes les zones cérébrales épargnées jusqu’alors. Notamment dans les cortex frontaux, pariétaux et temporaux. À ces stades les symptômes de la maladie s’intensifient à mesure que les zones déjà touchées se saturent de corps et de neurites de Lewy. Dans ces phases symptomatiques avancées, la substance noire est particulièrement atteinte d’une dégénérescence des neurones pigmentés, d’ailleurs visible à l’œil nu. Plusieurs zones sont atteintes de façon sévère, comme le néocortex mais aussi les bulbes Page | 64 olfactifs. Au stade 6, la totalité du néocortex présente des lésions, ainsi que les aires prémotrices, motrices et sensorielles. Dans les deux derniers stades de la maladie, les lésions atteignant le cerveau dans une grande majorité des aires cérébrales engendrent des troubles moteurs et cognitifs forts. Notamment, les démences sont des troubles fréquents dans les derniers stades de la MP. 

Vulnérabilité des neurones non myélinisés

 Cet article publié par Braak et ses collègues (Braak et al., 2003) ouvre la voie à des recherches plus fines sur l’D-syn, soulignant le fait que la substance noire n’est pas la première zone cérébrale présentant des lésions de type corps de Lewy ou neurites de Lewy. Les premières lésions visibles dans le système nerveux central apparaissent au niveau du tronc cérébral, dans le noyau dorsal du nerf vague. La publication en question détaille donc la cinétique de progression des lésions de type Lewy. Ainsi, les neurones les plus susceptibles de développer des corps de Lewy ou des neurites de Lewy présentent deux caractéristiques : Ce sont des neurones ayant des projections disproportionnellement longues par rapport à la taille de leur soma (Fig 24 C, adaptée de Braak 2004) Ce sont des neurones dont les axones sont peu ou pas myélinisés À l’inverse, les neurones les plus résistants aux inclusions intra-cytoplasmiques auront les caractéristiques suivantes : Des projections courtes et ramifiées (Fig 24 A) Une gaine de myéline épaisse (Fig 24 B) Les facultés neuro-protectives de la myéline seraient dues aux propriétés intrinsèques des neurones myélinisés : plus le neurone comporte une gaine de myéline épaisse, moins la transmission du signal demande d’énergie ; ceci pourrait réduire la vulnérabilité du neurone.

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