Maladies du pied des vaches laitieres dans la region du vakinankaratra

Les boiteries constituent par leurs fréquences et leurs impacts économiques le troisième trouble de santé en élevage laitier après les troubles de la reproduction et les infections intra-mammaires [1]. Les boiteries sont dues dans 90 % des cas à des maladies des pieds dont les plus fréquentes sont : le panaris, la dermatite digitée, le fourchet et la fourbure. Le panaris, la dermatite digitée et le fourchet sont d’origine infectieuse et affectent les tissus mous, l’épiderme de la région digitale et interdigitale de pied des bovins [2]. La fourbure est une inflammation du pododerme survenant à la suite de troubles systémiques chez les bovins [3].

En moyenne, en Angleterre et aux Pays des Galles 37% des vaches d’un troupeau boitent [4] et la prévalence au sein d’un troupeau peut atteindre 79%. L’incidence annuelle de ces boiteries au Québec varie de 5 à 60% [5].

La prévalence de boiterie estimée par les chercheurs Mishamo S et Abebe Fdans les exploitations bovines laitières était de 3.5% en Hawasa [6]. Au Nigeria dans la région Karu, les boiteries représentent 4.3% des bovidés de races White Fulani dont 23.8% sont des femelles. Au Keffi les vaches boiteuses atteignent jusqu’à 66.6% de cas [7]. Concernant les maladies de pied d’origine infectieuse, ses prévalences étaient de 4.7% [8].

Définitions du pied des bovins
Le pied du bovin est la partie distale du membre. Il compte 5 parties de haut en bas ; le canon, le boulet, le paturon, la couronne et le sabot. Chaque pied comprend deux doigts fonctionnels ; le doigt III, externe ou latéral et le doigt IV, interne ou médial, ainsi que deux doigts accessoires, non fonctionnels, situés en face palmaire du pied, en regard de la deuxième phalange. Ils sont appelés ergots et sont les vestiges des doigts II pour l’interne et V pour l’externe .

Les os de pied sont constituées par : la phalange proximale (P1), la phalange moyenne ou intermédiaire (P2), la phalange distale ou troisième phalange ou encore l’os pédieux (P3) et l’os sésamoïde distal ou os naviculaire [11].

Rappels anatomiques des onglons 

L’onglon est formé de l’étui corné, situé à l’extrémité distale de chaque doigt des bovins, ainsi que de formations vivantes qu’il recouvre (derme, épiderme, hypoderme, troisième phalange…). Il a un rôle majeur dans le soutien du poids du corps de l’animal et assure également la protection des tissus vivants qu’il renferme.

Un onglon a quatre faces : dorsale (ou antérieure), palmaire/plantaire, axiale (c’est-à-dire interne) et abaxiale (c’est-à-dire externe). Chaque onglon est constitué de structures rigides, os et sabot (ou enveloppe cornée, appelée également épiderme), solidarisés entre eux par des tissus mous formant un ensemble dénommé couramment « vif » .

Le vif est constitué de différentes couches, au nombre de trois, qui sont de l’intérieur vers l’extérieur : le tissu sous-cutané ou hypoderme, le pododerme et l’épiderme (représenté exclusivement par sa couche germinative) [13]. Le pododerme et le tissu sous-cutané sont les deux richement vascularisés et innervés .

Maladies des pieds identifiables lors du parage 

Dermatite digitée 

Définition et épidémiologie
Il s’agit d’une inflammation subaiguë et superficielle de la peau de la couronne, localisée entre les bulbes des talons dans 90% des cas (fig.05), les lésions étant parfois en face dorsale de la couronne (fig. 06), ou encore en région interdigitale [15, 16]. Diagnostiquée pour la première fois en 1974 par MORTELLARO et al. (1985) dans le nord de l’Italie, cette affection est souvent appelée « maladie de Mortellaro » [17]. Depuis sa découverte en Italie, elle a été découverte dans plusieurs pays européens dans les années 80 : Tchécoslovaquie, Grande-Bretagne, Allemagne et Irlande. En France elle est décrite par les pédicures bovins des grandes régions laitières de l’Ouest, puis en 1990, par Navetat, dans l’Allier. Elle est aussi connue aux États-Unis et au Canada [18].

Cette maladie affecte principalement les vaches laitières en péri-partum [15]. Son mode de transmission n’est pas bien défini, mais la contagiosité est indiscutable [12]. La morbidité intra élevage varie de 6 à 80% selon les auteurs [16, 15,19 ,20]. Contrairement à la majorité des autres affections des pieds, la maladie de Mortellaro touche davantage les 1ere lactations que les multipares [19,20]. D’après une étude sur plus de 3000 vaches laitières, la prévalence des lésions passe de 15% en L1 à 6% en L5 [21]. Cette diminution de la prévalence s’explique par le développement d’une réponse immunitaire : les vaches présentant des lésions actives produisent des anticorps circulants. L’immunité semble incomplète et temporaire [22]. La guérison spontanée est rare [22]. Le pronostic individuel est bon en présence d’un traitement approprié. Dans les élevages infectés, 52% des nouveaux cas seraient des récidives [16].

Etiopathologie
A l’heure actuelle, l’étiologie est inconnue. L’allure contagieuse, l’efficacité des inoculations expérimentales sont en faveur d’une origine infectieuse. L’hypothèse virologique n’a jamais été prouvée et les succès de traitements antibiotiques tentés sur le terrain ont fait penser à une étiologie bactérienne [23]. Le premier micro organisme isolé fut une bactérie mobile à G- : un spirochète. Mais l’inoculation de ce seul agent, en présence de lésions, n’a pas permis de reproduire la maladie [16]. Les spirochètes sont des bactéries anaérobies particulièrement difficiles à cultiver : les recherches les plus convaincantes actuelles se basent sur une technique d’amplification (PCR) de l’ARNr de l’unité 16S des ribosomes. Plus de 82% des échantillons prélevés de lésions de dermatite digitale révèlent ainsi la présence de spirochètes, en particulier Treponema denticola [24]. Les corps bactériens sont visibles dans les coupes histologiques de la lésion [25]. En plus des spirochètes (genres Treponema et Borrelia [19] ont été identifié de façon sporadique d’autres espèces bactériennes (Dichelobacter nodosus, Bactéroides fragilis, Fusobacterium sp, Peptococcus sp, Campylobacter sp, Corynebacterium pseudotuberculosis [16,19]. Le rôle de chacun de ces germes est mal connu.

Description des lésions
Il s’agit d’un ulcère circulaire ou ovale de 1 à 5 cm de diamètre, dépilé en son centre charnu et rouge, avec un liseré blanc en périphérie bordé de poils qui paraissent longs et hérissés (ou collés par un exsudat séreux) (fig.05). Une odeur aigrelette se dégage de la lésion, bien que non systématiquement rapportée [22]. La richesse de l’épiderme en terminaisons nerveuses donne un caractère parfois très douloureux et localisé à cette lésion [16,15]. Le plus souvent, la lésion est bilatérale. La boiterie sera donc variable en fonction de la taille et la maturité de la lésion [22], mais touche 82% des animaux porteurs de lésions [26].

La maladie peut s’étendre en surface sur tout le pâturon voire les ergots, en restant toujours superficielle, et entrainer dans les cas chroniques une érosion du talon [20]. Voire un décollement de l’onglon et une exongulation [27]. Dans des stades avancés (mais aucun délai n’est connu [22], la dermatite devient proliférative et papilliforme, caractérisée par une réaction d’hyperkératose. La surface de la lésion devient convexe, gris-blanc, avec des doigts filamenteux rugueux de kératine [16]. Ces papilles mesurent 1 à 30 mm avec un diamètre de 1mm [22]. Lors de la cicatrisation de la lésion, on observe un bourrelet blanc et fibrosé « en fer à cheval ». Le diagnostic de la maladie est aisément réalisable par la seule vue des lésions, rendant l’histopathologie accessoire [22]. Tous les membres peuvent être atteints mais les membres postérieurs le sont plus fréquemment [28].

Anamnèse et symptômes de la dermatite digitale
Une perte de poids et une chute de production laitière de 20 à 50 % [29,30] sont relatés mais ces signaux d’alerte sont inconstants et discutés [31]. Le symptôme le plus évident et le plus précocement remarqué par l’éleveur est une boiterie franche, non constante, mais particulière à la dermatite digitale lorsqu’elle est présente. Elle est due à la douleur très vive de la lésion située en général sur le talon. L’animal se soulage en reportant l’appui en pince en mouvement et le paturon est en semi flexion au repos [32]. On parle de « marche sur des œufs » pour décrire parfois l’allure de l’animal, mais la boiterie peut être plus fruste.

Table des matières

INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : RAPPELS
I. Définitions du pied des bovins
II. Rappels anatomiques des onglons
III. Maladies des pieds identifiables lors du parage
III.1 Dermatite digitée
III.1.1 Définition et épidémiologie
III.1.2 Etiopathologie
III.1.3 Description des lésions
III.1.4 Anamnèse et symptômes de la dermatite digitale
III.1.5 Facteurs de risque
III.1.6 Traitement
III.1.6.1 Traitement topique individuelle
III.1.6.2 Traitement topique collective
III.2 Fourchet
III.2.1 Définition et épidémiologie
III.2.2 Etiopathologie
III.2.3 Description des lésions
III.2.4 Anamnèse et symptômes du fourchet
III.2.5 Facteurs de risque
III.2.6 Traitement
III.3 Panaris
III.3.1 Définition et épidémiologie
III.3.2 Etiopathologie
III.3.3 Description des lésions
III.3.4 Anamnèse et symptômes de panaris
III.3.5 Facteurs de risque
III.3.6 Traitement
III.4 Fourbure chronique
III.4.1 Définition et épidémiologie
III.4.2 Etiopathologie
III.4.3 Description des lésions
III.4.4 Anamnèse et symptômes de la fourbure
III.4.5 Facteurs de risque
III.4.5.1 Le logement
III.4.5.2 Hygiène et humidité
III.4.5.3 Alimentation
III.4.5.4 L’hérédité
III.4.5.5 Le vêlage
III.4.6 Traitement
III.4.6.1 Le parage
III.4.6.2 Traitement médical
III.4.6.3 Traitement chirurgical de la fourbure
DEUXIEME PARTIE : METHODES ET RESULTATS
I. Méthodes
I.1 Caractéristiques du cadre de l’étude
I.2 Type d’étude
I.3 Période de l’étude
I.4 Durée de l’étude
I.5 Populations d’étude
I.6 Mode d’échantillonnage
I.7 La taille de l’échantillon
I.8 Variables à étudier
I.9 Modes de collecte des données
I.10 Modes d’analyse des données
I.11 Limite de l’étude
I.12 Considérations éthiques
II. Résultats
II.1 Description de l’échantillon
II.1.1Taille
II.1.2 Races
II.2 Prévalence des maladies
II.2.1 Prévalences, tout élevage confondu
II.2.2 Prévalence inter élevages des maladies
II.2.3 Prévalence des maladies aux niveaux des districts et des communes
II.3 Etude descriptive des maladies du pied des vaches
II.3.1 Description des maladies du pied de vache en fonction des membres atteints
II.3.2 Description des maladies du pied de vache selon les caractéristiques des vaches
II.3.3 Description des maladies du pied de vache selon le bâtiment
II.3.4 Description des maladies du pied de vache selon l’entretien du sol
II.4 Etude analytique des facteurs de risque
II.4.1 Maladies du pied de vache selon les caractéristiques des vaches
II.4.2 Maladies du pied de vache selon le bâtiment
II.4.3 Maladies du pied de vache selon l’entretien du sol
II.5 Systèmes des traitements des maladies du pied de vache pratiquées par les éleveurs
II.6 Calcul du coût économique des maladies du pied
TROISIEME PARTIE : DISCUSSION
I. DISCUSSION SUR LA METHODOLOGIE
II. DISCUSSION SUR LES RESULTATS
II.1 Prévalence des maladies
II.2 Description et évaluation des facteurs de risque
II.2.1 Maladies du pied de vache en fonction des membres atteintes
II.2.2 Maladies du pied de vache selon les caractéristiques des vaches
II.2.3 Maladies du pied de vache selon le bâtiment
II.2.4 Maladies du pied de vache selon l’entretien du sol
II.3 Pratiques des éleveurs face aux traitements des maladies du pied de vaches
CONCLUSION 

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