Participation des femmes à une consultation préconceptionnelle

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Sur la santé physique

Versant parental

Cette consultation a pour but d’évaluer au mieux le projet du couple et de délivrer des informations et des messages de prévention fondamentaux liés à la grossesse. Cela permet aux professionnels de santé d’anticiper certaines situations et de donner des informations aux couples leur permettant ainsi de mieux différencier physiologie et pathologie (notamment en début de grossesse avec les modifications corporelles et les maux habituels).
L’âge moyen des mères au premier enfant augmente ces dernières années et est passé de 29,3 ans en 2000 à 30,7 en 2019 en France (44). La première maternité ayant lieu à un âge de plus en plus avancé, les facteurs de risques et les comorbidités augmentent, comme en témoignent les résultats de l’Enquête Nationale Périnatale de 2016 (5). Cette consultation, en antéconceptionnel, permet ainsi l’identification de facteurs de risques pouvant interférer avec l’obtention d’une grossesse, le maintien de celle-ci ou son déroulement (altération de la fertilité, pathologies chroniques, pathologies avec complications gravidiques, addictions). Et de cette façon, elle permet la mise en place de thérapeutiques adaptées et la transmission de messages de prévention fondamentaux permettant de limiter l’impact de ces facteurs de risques.
De plus, la période préconceptionnelle est une période favorable à l’initiation de changements sur le mode de vie. Les femmes sont en général plus à l’écoute de leur corps et réceptives aux informations reçues et aux conseils des professionnels (ex : arrêt du tabac ou de consommation de drogue, perte de poids, adoption d’une alimentation plus saine et plus équilibrée, initiation d’une activité physique et sportive, suppression de comportements à risques…).
Elles sont plus attentives aux modifications physiques et psychologiques qui s’opèrent et prennent plus soin d’elle. Ainsi il s’agit d’une période propice pour introduire l’importance d’un suivi gynécologique, et plus largement médical, en dehors de la grossesse (frottis cervico-utérin, examen sénologique).
A l’issue de cette consultation, le professionnel de santé peut orienter la femme et/ou le couple vers une consultation plus spécifique en fonction des éléments soulevés, si celui-ci le souhaite.

Versant fœtal

C’est également en antéconceptionnel que la transmission des messages fondamentaux concernant le développement physique de l’embryon puis du fœtus doit se faire. Cette période est déterminante pour l’organogénèse et pour la santé future des enfants, ce qui est souvent méconnu des parents.
En effet, de très nombreuses molécules passent la barrière placentaire et ont, en plus des effets maternels souhaités, des effets sur l’embryon et plus tard le fœtus.
Trois phases différentes sont à considérer et le risque ainsi que les conséquences évoluent de façon importante au cours de ces trois phases (45).
Les périodes de développement. D’après Bayot D, Faron G. Pharmacologie pour les sages-femmes. 2ème édition. Deboeck; 2014.
La première phase est la phase pré-implantatoire. Elle s’étend de la fécondation de l’ovule par le spermatozoïde au 14ème jour de grossesse. Pendant cette phase, on parle de « la loi du tout ou rien », les échanges sont minimes entre la mère et l’embryon. Pour les molécules nocives, il y a donc soit un passage entrainant un avortement spontané, soit une absence de passage et aucune séquelle résultante.
Du 14ème jour au 56ème jour (de la deuxième à la huitième semaine de grossesse), s’étend la période embryonnaire. C’est pendant cette période que se mettent en place les organes et donc que le risque de malformation est maximal, c’est la phase dite tératogène. On peut citer principalement comme agent tératogène l’acide valproïque (cardiopathie, anomalie de fermeture du tube neural), le thalidomide (anomalie des membres) et l’isotrétinoine (cardiopathie, atteinte du système nerveux central) entre autres (46).
Au 56ème jour, débute la phase fœtale qui durera jusqu’à l’accouchement. Pendant cette période, les organes sont déjà en place. Le risque de malformation est donc beaucoup plus faible, néanmoins, c’est à ce moment que débute le développement, la maturation et la croissance des structures en place. Les différentes molécules agissent donc différemment mais peuvent avoir des répercussions importantes et être responsables d’anomalies. On peut citer notamment les anti inflammatoires non stéroïdiens (AINS), qui causent une fermeture prématurée du canal artériel et une atteinte rénale, et les inhibiteurs de l’enzyme de conversion (utilisé dans le traitement de l’HTA) qui peuvent causer une toxicité rénale et une hypoplasie des os de la voute crânienne (46).
Ainsi, les effets dépendent du moment d’exposition et de la molécule. Certains traitements contre-indiqués en début de grossesse peuvent être utilisés en fin de grossesse et inversement.
Par conséquent il faut être très vigilant quant à la durée de vie des molécules. Certaines peuvent avoir une durée de vie très longue, et l’embryon ou le fœtus peut y être exposé alors que celles-ci ont été consommées en dehors de la période dite « à risque » (47).
Ces risques sont valables qu’ils s’agissent de médicaments ou de produits toxiques tels que les drogues. Il faut donc informer les couples des risques existants afin qu’ils puissent prendre toutes les précautions en connaissance de cause.
De nombreuses hypothèses ont également été formulées quant à la possibilité d’une origine fœtale à de nombreuses maladies de l’adulte telles que des maladies métaboliques (diabète et HTA entre autres). Cette hypothèse dite « de Barker » est fondée sur la possibilité que des perturbations du développement intra utérin (par des comportements maternels notamment) auraient des conséquences irréversibles, comme l’augmentation du risque de développer des pathologies métaboliques, voire psychiques (48). De nombreuses études animales ont corroboré cette éventualité. Ainsi, informer les couples limitera les comportements à risques et par conséquent les impacts in utero puis les conséquences chez l’adulte.
Bien que les informations délivrées aux couples doivent concerner toute la grossesse, il faudra toutefois cibler la prévention sur la phase préconceptionnelle et la période embryonnaire.

Sur la santé mentale

Versant parental

Ce type de consultation permet de montrer aux couples qu’ils sont soutenus par l’équipe médicale pendant cette étape qui est si importante pour eux. Une attitude rassurante et adaptée de la part du professionnel de santé est à favoriser et confortera ainsi les couples dans la bienveillance portée par l’équipe médicale autour de leur projet (49).
Ils seront guidés par les professionnels et ne se sentiront pas livrés à eux-mêmes, et ce dès le début, avant même la concrétisation de ce désir de grossesse.
Il s’agira également d’un moment privilégié pour donner aux couples une plus grande confiance en eux, et plus largement, en l’équipe médicale. En effet, c’est une période où ils sont très souvent en proie aux doutes, aux inquiétudes, avec toujours en pensée le souci de bien faire. De ce fait, une attitude rassurante et un soutien du corps médical influenceront le vécu de la grossesse de diverses manières.
Cette période sera vécue de façon moins anxiogène s’ils ont reçu des informations éclairées et ont connaissance des principaux risques et comportements dangereux. Ils pourront ainsi adopter des gestes limitant certains impacts négatifs.
L’évocation de sujets de la vie quotidienne tels que la sexualité ou les activités sportives peut paraître inattendue, mais néanmoins montre aux couples que cette consultation n’est pas faite uniquement pour parler des risques. Elle aborde tous les éléments essentiels au bon vécu de la période préconceptionnelle et de la grossesse.
L’apprentissage de la parentalité est à évoquer si les couples en sont désireux et s’ils semblent inquiets à ce sujet.

Versant fœtal

Au-delà du versant médical, cette consultation pourrait apporter beaucoup d’informations aux couples sur la santé globale des enfants. En prenant appui sur la définition de l’organisation mondiale de la santé (OMS) de 1946 : « La santé est un état de complet bien-être physique, mental et social et ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d’infirmité », il semble que les informations à délivrer doivent aller plus loin que le développement embryofoetal et doivent également concerner le bien-être affectif et émotionnel du futur enfant (50).
Une perturbation du développement au cours de la vie intra utérine peut favoriser la constitution de certains troubles psychiques. De nombreuses études montrent que les enfants de mères plus anxieuses au cours de leur grossesse ont plus de risques de développer des problèmes comportementaux (51). Cette consultation, en fonction de la façon dont elle est menée, rassure les couples, les apaise, lève les craintes sur le déroulement de la future grossesse, et limite ainsi le stress causé par celle-ci (49). Un effet bénéfique sur le développement psychomoteur de l’enfant semble ainsi évident.
De plus, le milieu affectif dans lequel sera accueilli le nouveau-né est essentiel. C’est pour cette raison que le couple doit être préparé à cette arrivée qui va chambouler leur vie. L’enfant a besoin d’évoluer dans un milieu sécurisant, où les personnes qui l’entourent sont attentives et soutenantes. Ces éléments, accompagnés de l’éviction des violences et des comportements destructeurs favoriseront le développement psychomoteur de l’enfant.
C’est avant la grossesse que les couples doivent commencer à préparer un milieu favorable permettant l’épanouissement complet, physique, mental et social, d’un enfant, ce qui renforce l‘importance de la réalisation d’une consultation préconceptionnelle.

Limites

De nombreux freins à la réalisation de ce type de consultation existent, tant du côté des professionnels de santé que du côté des patients.
Un manque de temps pour se consacrer à une consultation préconceptionnelle (52), ainsi qu’un manque de formation font partie des limites à la réalisation de cette consultation d’après des médecins généralistes (53). Pour pouvoir aborder tous les sujets cités ci-dessus au cours d’une consultation, celle-ci doit être longue. Se pose alors également la question de la valorisation du temps passé en termes de rémunération (la consultation préconceptionnelle ne disposant pas de cotation spécifique).
Du côté des patientes, il est probable que la méconnaissance de la population sur cette consultation soit un des principaux freins.
Dans certains cas, bien que les patientes aient consulté un professionnel de santé pouvant réaliser cette consultation avant leur grossesse, elles n’ont pas forcement exposé leur projet, soit par souhait, soit par crainte du regard du professionnel (52).
De plus, prendre la décision de concevoir est une étape clé dans la vie d’un couple. L’anxiété est donc très souvent présente, causée par la peur de l’échec, et la projection est difficile. Ce type de consultation peut amplifier l’état de stress en montrant aux couples la médicalisation et les risques associés à la grossesse. L’afflux conséquent d’informations peut être plus anxiogène que rassurant pour certains couples, qui peuvent se sentir confus et inquiets. Une adaptation des informations à la situation du couple ainsi qu’à ses antécédents est essentielle.
Enfin il semble intéressant de se demander si le contenu de cette consultation est adapté aux attentes des patientes. En effet, en fonction du type de professionnel médical et de sa formation, certains sujets risquent de ne pas être abordés.

Méthodologie

Problématique

Après avoir constaté que seul un faible nombre de femmes avait réalisé cette consultation alors que celle-ci comporte de nombreux bénéfices, notamment en termes de prévention primaire en santé publique ainsi qu’en termes de bien-être maternel et plus largement conjugal, il nous a semblé pertinent de réaliser un état des lieux global concernant cet entretien.
Une évaluation de la fréquence de réalisation de ce type de consultation auprès de femmes ainsi que de la connaissance des femmes sur celle-ci permet d’apporter des éléments de réponse à ce paradoxe. On peut se poser la question suivante : qu’en est-il de la connaissance et de la participation des femmes à la consultation préconceptionnelle actuellement en région parisienne ?

Objectifs et hypothèses

Objectifs de l’étude

L’objectif de l’étude est de faire un état des lieux des connaissances des femmes sur la consultation préconceptionnelle et d’en évaluer leur participation actuellement en région parisienne. Il y a deux critères de jugement principaux : le taux de femmes connaissant cette consultation et le taux de participation des femmes à celle-ci. Il sera alors pertinent de développer un outil permettant d’informer toutes les femmes de cette possibilité et de leur en exposer les bénéfices et le contenu.

Hypothèses de recherche

Les hypothèses sont les suivantes :
− moins de 50% des femmes en âge de procréer connaissent l’existence de la consultation préconceptionnelle ;
− moins de 30% des femmes participent à cette consultation ;
− plus de 50% des femmes souhaiteraient y participer.

Méthodologie de l’étude

Type d’étude et organisation

Afin de répondre à la problématique, nous avons réalisé une étude observationnelle, descriptive, transversale et multicentrique à l’aide d’un questionnaire au format papier, destiné à des femmes en âge de procréer ayant accouché en maternité parisienne. Il devra permettre d’évaluer la participation des femmes à cette consultation et de déterminer leurs connaissances à ce sujet.
Au préalable, le questionnaire a été testé auprès de 8 femmes répondant aux critères d’inclusion en septembre 2020. Les réponses et la compréhension des questions ont été analysées et ont permis d’en évaluer la pertinence et d’apporter quelques modifications.
Le questionnaire final comporte 28 questions portant sur :
− une présentation générale des femmes interrogées ;
− leurs connaissances générales concernant la consultation préconceptionnelle ;
− leur participation à cette consultation ;
− leur avis sur celle-ci.

Population

Population étudiée et critères d’inclusion

L’étude porte sur des femmes en âge de procréer, car il s’agit de la population directement concernée par la consultation préconceptionnelle.
Les critères d’inclusion à l’étude étaient :
− femme majeure en âge de procréer ;
− ayant accouché récemment ;
− grossesse désirée et spontanée ;
− étant hospitalisée en service de suites de couches ;
− parlant français ;
− pas d’autres critères spécifiques.

Recrutement de la population

Il était préférable de questionner des femmes venant juste d’accoucher et étant encore hospitalisées dans le service de suites de couches. Ces femmes sont en effet particulièrement sensibilisées au déroulement et au suivi de la grossesse et peuvent répondre facilement aux questions et émettre des suggestions sur les informations qu’elles auraient jugées utiles de recevoir lors de cette consultation (avant leur grossesse ou en tout début de grossesse, que ces informations concernent la grossesse, l’avant ou l’après-grossesse). Afin d’obtenir des résultats les plus significatifs possible et ainsi plus représentatifs de la population générale, nous avons interrogé des femmes sans distinction de milieux socio-culturels.

Lieux d’étude et durée

Nous avons choisi de réaliser l’étude dans différentes maternités de région parisienne. En effet, il y existe une grande diversité des populations et il paraît évident que le type de population dépend du lieu d’habitation. Ainsi, interroger les femmes dans des maternités de localisation variable permet d’avoir un échantillon plus représentatif de la population générale. J’ai donc distribué les questionnaires dans 13 maternités situées dans chaque département francilien.
Au vu du contexte sanitaire complexe au moment de la réalisation de l’enquête, il était impossible de se rendre à plusieurs reprises dans les hôpitaux concernés. Par conséquent, il a été décidé de distribuer le questionnaire aux femmes hospitalisées lors de mon passage dans la maternité et de les récupérer quelques heures après.
L’étude s’est déroulée du 1er octobre 2020 au 31 janvier 2021 (soit un total de 4 mois).

Table des matières

Revue de la littérature
I. Préambule
II. Définition
A. Contexte en France
B. Pour qui ?
C. Par qui ?
D. Quand ?
E. Comment ?
III. Contenu de la consultation
A. Interrogatoire
1. Situation
2. Antécédents personnels
3. Antécédents familiaux
4. Traitements
5. Addictions
6. Risque psycho-sociaux
B. Examen clinique
1. Examen général
2. Examen gynécologique
𝛼. Examen sénologique
𝛽. Examen vulvaire et vaginal
C. Examens paracliniques
1. Biologie
2. Examens
D. Prescriptions
1. Acide folique
2. Supplémentation ferrique
3. Vaccins
E. Informations, conseils, prévention
1. Alimentation
𝛼. Alimentation équilibrée
𝛽. Toxoplasmose
𝛾. Listéria
2. Hygiène
𝛼. Corporelle
𝛽. Pratique sportive
3. Consommation de substances psychoactives
𝛼. Alcool
𝛽. Tabac
𝛾. Drogues
𝛿. Automédication
4. Situation sociale (législation, prestation sociale, risques professionnels)
5. Déroulement de la grossesse
IV. Bénéfices
A. Sur la santé physique
1. Versant parental
2. Versant foetal
B. Sur la santé mentale
1. Versant parental
2. Versant foetal
V. Limites
Méthodologie
I. Problématique
II. Objectifs et hypothèses
A. Objectifs de l’étude
B. Hypothèses de recherche
III. Méthodologie de l’étude
A. Type d’étude et organisation
B. Population
1. Population étudiée et critères d’inclusion
2. Recrutement de la population
C. Lieux d’étude et durée
D. Echantillon obtenu
E. Analyse des résultats
Résultats
I. Caractéristiques de la population étudiée
A. Généralités : Données socio-démographiques
B. Données concernant la consultation préconceptionnelle
II. Connaissances des recommandations par les femmes
A. Femmes connaissant les recommandations
B. Femmes ne connaissant pas les recommandations
III. Participation des femmes à une consultation préconceptionnelle
A. Femmes ayant participé
B. Femmes n’ayant pas participé
Analyse & Discussion
I. Limites de l’étude
A. Points forts
B. Points faibles
II. Représentativité de la population de l’étude par rapport à la population générale
III. Connaissance des recommandations par les femmes
A. Hypothèse de départ
B. Facteurs pouvant avoir une influence sur la connaissance des recommandations
C. Elargissement des connaissances
IV. La participation des femmes à la consultation
A. Hypothèses de départ
B. Facteurs pouvant avoir une influence sur la participation des femmes à la consultation
C. Ouverture de la participation
D. Contenu de la consultation
V. Propositions d’actions
Conclusion
Lexique
Références bibliographiques
Annexes
Annexe I – Déclaration CNIL
Annexe II – Feuille d’explication
Annexe III – Questionnaire
Annexe IV – Proposition d’un document d’informations

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