Pylorotomie endoscopique par méthode du G-POEM versus injection intrapylorique de toxine botulique

Pylorotomie endoscopique par méthode du G-POEM versus injection intrapylorique de toxine botulique

Introduction

La gastroparésie est une pathologie fonctionnelle définie par un ralentissement de la vidange gastrique sans obstacle mécanique (1). Les études épidémiologiques sont rares mais une étude américaine réalisée en population générale estime la prévalence de la gastroparésie à environ 24,2 personnes sur 100000 (IC95, 15.7– 32.6) (2) avec une prédominance féminine. Cette pathologie bien que rare altère significativement la qualité de vie des patients. Le diagnostic de la gastroparésie repose sur une association de signes cliniques évocateurs dits cardinaux (nausées, vomissements, ballonnements, sensation de plénitude gastrique, satiété précoce et douleurs abdominales) et d’une augmentation du temps de vidange gastrique après vérification de l’absence d’obstacle au cours d’une endoscopie digestive haute (1). Il existe différents examens pour évaluer la vidange gastrique, le plus fréquemment utilisé est la scintigraphie de vidange gastrique. Elle consiste à ingérer un aliment radio-marqué le plus souvent par du Technétium ( 99mTc) puis à mesurer la radioactivité intra-gastrique et intra-intestinale à intervalle régulier à l’aide d’une gamma-caméra. Ces mesures vont permettre de déterminer le pourcentage de vidange gastrique à H1, H2 et H4 ainsi que le temps de demi-vidange gastrique (figure 1). La scintigraphie de vidange gastrique est une technique fiable et reproductible (3) et est la méthode la plus utilisée en France et que nous utiliserons donc dans notre étude. De nombreuses étiologies sont décrites mais les gastroparésies diabétiques et idiopathiques représentent environ ¾ des cas de gastroparésie. Le reste des étiologies inclue les gastroparésies post-chirurgicales par lésion du nerf vague et les maladies de système (2). Les explications physiopathologiques de la gastroparésie sont complexes et débattues mais peuvent être résumées par une altération plus ou moins combinée de deux systèmes : une atteinte de la motricité antrale par diminution du nombre de cellules interstitielles régulant les contractions gastro-intestinales (4,5) et/ou une atteinte de la myorelaxation pylorique avec entrainant des pylorospasmes ralentissant la vidange gastrique (6). Classiquement, le traitement de première intention de la gastroparésie repose sur des règles diététiques. Les recommandations américaines (7) préconisent une éviction de tous les facteurs allongeant le temps de vidange gastrique (aliments riches en graisse, tabac (8), alcool (9), boissons gazeuses) ainsi qu’un fractionnement des repas. Les possibilités thérapeutiques sont peu efficaces dans leur ensemble. Les traitements médicamenteux prokinétiques favorisant la vidange gastrique reposent principalement sur le métoclopramide, le domperidone et l’érythromycine. Les études concernant leur efficacité ne mettent pas en évidence d’amélioration significative de la symptomatologie des patients (10–12). Cette inefficacité associée à des effets secondaires fréquents et à une tachyphylaxie chez 1/3 des patients traités par érythromycine (26) ne font pas des traitements prokinétiques per os une option thérapeutique viable au long terme. Les traitements chirurgicaux reposent sur la gastrostomie de décharge qui présente un taux de récidive élevé chez 2/3 des patients après retrait du dispositif (13), la gastrectomie partielle avec une amélioration symptomatique chez uniquement 43% des patients (14) et la pyloroplastie qui comporte un taux non négligeable de complications malgré des résultats intéressants sur l’amélioration clinique et scintigraphique des patients (15,16). La neurostimulation gastrique a également été proposée et largement évaluée. Elle permet une amélioration significative de la symptomatologie des patients ainsi que du temps de vidange gastrique, prouvée par deux méta-analyses (17,18) . Cependant un taux élevé de complications d’environ 10% (17) associé à prix élevé du dispositif n’en fait pas un traitement de première intention en France. Dans la physiologie de la gastroparésie il a été démontré qu’une partie du ralentissement de la vidange gastrique était expliquée par des spasmes du pylore gastrique (6). Une option thérapeutique envisageable est donc de lever l’obstacle pylorique pour améliorer la symptomatologie des patients. Cette hypothèse 3 physiopathologique est étayée par les résultats encourageant de deux études chirurgicales (15,16) qui démontrent l’amélioration symptomatologique et du temps de vidange gastrique de patients atteints de gastroparésie réfractaire ayant bénéficié d’une pyloroplastie par voie laparoscopique. Cependant cette prise en charge chirurgicale est associée à des risques opératoires élevés que la possibilité de réalisation d’une myotomie par voie endoscopique moins morbide rend injustifié. Ainsi, concernant les traitements qui ciblent spécifiquement le pylore, et notamment l’hypertonie pylorique, on retrouve l’injection de toxine botulique intra-pylorique par voie endoscopique. Différentes études préliminaires (19–26) mettaient en évidence une amélioration de la symptomatologie des patients, cependant elles étaient réalisées avec de faibles effectifs et dans des essais ouverts. Ces résultats contrastent avec deux études randomisées (27,28) qui ne mettaient finalement pas en évidence de supériorité de l’injection intra pylorique de toxine botulique à l’injection de sérum salé isotonique. Deux méta-analyses confirment également l’absence de supériorité de l’injection intra pylorique de toxine botulique en comparaison à l’injection de sérum salé isotonique (29,30). Les progrès endoscopiques récents ont permis l’avènement de la technique endoscopique dite du « POEM » (Per Oral Endoscopic Myotomy) permettant une section de la couche musculeuse digestive par voie endoscopique après formation d’un tunnel sous-muqueux. La myotomie endoscopique est une technique dont le premier cas chez l’homme a été réalisé en 2008 (31). Cette technique a déjà démontré son efficacité et son innocuité dans le traitement de l’achalasie (32). Un premier cas de pylorotomie endoscopique par tunnel sous muqueux a été rapporté en 2013 (33) avec une bonne efficacité clinique sans complication. Depuis des études avec de faibles effectifs rapportent une efficacité sur la symptomatologie des patients sans complication notable (34–36). Deux méta-analyses récentes (37,38) ont mis en évidence une bonne efficacité clinique du G-POEM dans le traitement de la gastroparésie réfractaire avec peu de complications. Cependant aucune étude ne compare l’efficacité de cette méthode à une autre, encore moins dans un design prospectif et randomisé. Nous avons donc souhaité proposer une étude de ce traitement expérimental paraissant à la fois efficace et peu morbide en comparaison avec l’injection intra pylorique de toxine botulique.

Efficacité clinique définie par une différence de GCSI > 1 

Après modification de la définition du succès clinique par une différence de GCSI entre l’inclusion et M3 supérieure à 1, 65% des patients du groupe G-POEM (n = 13/20) et 47,1% des patients du groupe toxine botulique (n = 8/17) remplissaient les critères de succès clinique sans différence significative entre les deux groupes (p=0,272) (tableau 5) Efficacité clinique à M12 18 patients du groupe G-POEM (90%) et 14 patients du groupe toxine botulique (70%) ont réalisé le suivi jusqu’à M12, parmi ces patients 66,7% des patients du groupe G-POEM et 57,1% des patients du groupe toxine botulique ont rempli les critères de succès clinique à un an (p=0,581). Le delta entre le GCSI à l’inclusion et le GCSI à M12 était de 1,19 ± 1,07 dans le groupe G-POEM et 0,93 ± 1,13 dans le groupe toxine botulique (p=0,62) (tableau 5). Nous ne retrouvons pas de différence significative entre les 2 groupes dans les items et les sous-scores du GCSI (tableau 6) 7 Scores de qualité de vie Concernant le score SF-12, les patients du groupe G-POEM (n=19) présentait un score moyen de 37,89 ± 4,82 contre 39,20 ± 3,63 dans le groupe toxine botulique (n=15) sans différence significative entre les deux groupes (p=0,38). Nous ne retrouvons pas non plus de différence à 12 mois avec des scores moyens respectivement à 39,0 ± 1,73 pour le groupe G-POEM (n=3) et 36,5 ± 9,06 pour le groupe toxine botulique (n=4) (p=0,463). Concernant le score GIQLI, nous rapportons une amélioration des scores dans les deux groupes à 3 mois avec un score moyen à 78,20 ± 29,12 dans le groupe G-POEM (n=20) ainsi qu’un score moyen de 79,59 ± 32,336 dans le groupe toxine botulique (n=17) sans différence significative entre les deux groupes (p=0,463). Cette amélioration est retrouvée dans le groupe toxine botulique à 12 mois avec un score moyen à 93,00 ± 29,017 et non dans le groupe G-POEM avec un score moyen à 67,33 ± 16,503. Il faut cependant noter que le suivi à 12 mois n’était réalisé que chez 7 patients au total (3 du groupe GPOEM et 4 du groupe toxine botulique). Complications Nous ne rapportons qu’une complication per-opératoire dans le groupe G-POEM (5%) et aucune dans le groupe toxine botulique (p= 0,131). Il s’agissait d’un patient ayant eu une mucosotomie per-opératoire prise en charge dans le même temps opératoire sans manifestation clinique. Nous retrouvons deux complications post-opératoires dans le groupe G-POEM (10%) et aucune dans le groupe toxine botulique (p=0,147). Le premier patient a présenté des épigastralgies sans signe de gravité ayant nécessité un prolongement d’hospitalisation de 24h, le second patient a présenté des épigastralgies fébriles à J2 avec un œdème péri-pylorique sans perforation visualisée sur la tomodensitométrie. L’évolution a été favorable sous antibiothérapie per os. Efficacité scintigraphique Concernant la scintigraphie de vidange de vidange gastrique (SVG), le temps de demi-vidange moyen à l’inclusion était de 233 ± 133 min, le taux de rétention à H2 de 72,8 ± 20 min et à H4 de 41,31 ± 24 min. Les paramètres de la SVG préopératoire n’étaient pas significativement différents entre les deux groupes. A 3 mois, 72% patients du groupe G-POEM (n=13/18) présentait un succès scintigraphique dans le groupe G-POEM contre 50% dans le groupe toxine botulique (n=9/18) sans différence significative dans les deux groupes (p= 0,171) Les paramètres des SVG (temps de demi-vidange gastrique, pourcentage de résidu alimentaire à H2 et H4) à 3 mois n’étaient pas significativement différents dans les deux groupes. L’ensemble des résultats est présenté dans le tableau 7. Efficacité métabolique Concernant l’IMC nous ne retrouvons pas de différence significative entre les groupes G-POEM et toxine botulique à M3 (24,54 ± 2,87 vs 20,11 ± 4,04, p = 0,131) ainsi qu’à M12 (24,47 ± 3,05 vs 21,01 ± 5,20, p = 0,111). Concernant l’albuminémie et la pré-albuminémie nous ne retrouvons pas de différence significative entre les groupes G-POEM et toxine botulique à M3 (respectivement 40,49 ± 4,01 vs 41,11 ± 5,19 p = 0,491 et 0,24 ± 0,04 vs 0,26 ± 0,05 p = 0,131) ainsi qu’à M12 (41,78 ± 5,28 vs 42,04 ± 2,58 p = 0,915 et 0,25 ± 0,05 vs 0,24 ± 0,36 p = 0,655).

Table des matières

I. Introduction
II. Matériel et méthodes
1. Design de l’étude et critères d’inclusion
2. Déroulement de l’étude
3. Objectifs
4. Méthodologie statistique
III. Résultats
1. Population d’étude
2. Efficacité clinique à 3 mois (critère de jugement principal)
3. Objectifs secondaires
IV. Discussion
V. Conclusion
VI. Bibliographie
VII. Annexes

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