Un statut juridique spécial

Un statut juridique spécial

Juridiquement, chacun des membres du Parlement bénéficie d’une protection particulière en ce qu’elle tend à lui assurer une liberté d’action dans l’exercice de ses fonctions. Dans cette perspective, le député se voit accorder un régime d’immunité particulièrement avantageux. Fortement inspirée du droit parlementaire britannique, et consacrée par la Révolution française, l’immunité a pour but de protéger le parlementaire contre les actions judiciaires pouvant provenir de l’Exécutif ou des électeurs. Ainsi, le député est « irresponsable » et « inviolable » : irresponsable, au motif que l’élu se soustrait à toute poursuite pour les actes et opinions émis par lui dans l’exercice de ses fonctions ; inviolable, en ce qu’il est protégé de toute mesure privative de liberté qui l’empêcherait de participer aux travaux parlementaires. De surcroît, et par une tradition qui remonte à nos anciens États généraux, le député a droit à une indemnité afin de répondre aux besoins de la vie matérielle. Qu’il s’agisse de l’immunité ou de l’indemnité, ces deux mécanismes partagent le même objectif, à savoir garantir l’indépendance du député. Toutefois, par le comportement de quelques-uns de nos élus ou par simple fantasme et méconnaissance populaire, ces deux mécanismes sont controversés. C’est pourquoi, il apparaît nécessaire d’étudier chacun de ces droits et garanties d’indépendance (Section 1), avant d’envisager la modernisation du statut au regard des nouvelles exigences démocratiques des Français et des élus (Section 2).

Pour assurer le libre exercice de sa fonction de représentant, le député dispose de deux garanties qui lui assurent une protection pénale (§ 1) et une autonomie financière (§ 2). d’irresponsabilité426 – en des termes qui n’ont guère évolué depuis 1789. « Aucun membre du Parlement ne peut être poursuivi, recherché, arrêté, détenu ou jugé à l’occasion des opinions ou votes émis par lui dans l’exercice de ses fonctions » (art. 26 al. 1 C°). Très clairement, est ici garantie au rang constitutionnel la nécessité de la liberté de parole et de vote du député. D’ailleurs, il faut relever que depuis sa consécration, ce privilège « essentiel à toute assemblée  Néanmoins, il est à préciser qu’à l’heure actuelle, une seule entorse au principe d’irresponsabilité a eu lieu : ce fut au cours de la Seconde Guerre Mondiale. Fort justement, Christophe De Nantois relève dans sa thèse qu’à la Libération en 1944, le principe a fait l’objet d’applications contradictoires selon le pays. Il note : « les deux cas de votes législatifs les plus emblématiques de cette période, à savoir le vote des pleins pouvoirs à Adolf Hitler et le vote des pleins pouvoirs constituants au Maréchal Pétain, ont fait l’objet de décisions a posteriori contraires : l’une [la France] condamnant les députés, l’autre [l’Allemagne] reconnaissant leur Allemagne pour les parlementaires qui votèrent en faveur de Hitler en 1933430. Or, en refusant d’appliquer à la lettre le privilège constitutionnel, la France a nié aux parlementaires d’alors le statut protecteur dont ils bénéficiaient pour les actes accomplis dans l’exercice de leurs devoirs parlementaires. Il s’agit, encore aujourd’hui, d’une conception du privilège difficilement compréhensible au regard de la lecture allemande. Mais surtout, cette entorse est ouvertement contraire à l’un des caractères de l’irresponsabilité, à savoir le caractère perpétuel431. En ce sens, l’irresponsabilité couvre les actes pris en cours de mandature, mais elle dure au-delà du mandat lui-même. Aussi, c’est en totale contradiction avec ce privilège admis en régime parlementaire que la France d’après-guerre a agi. On ne peut que déplorer que l’émotion suscitée par les ravages de la guerre ait eu raison du droit ancien… Refermons cette parenthèse pour revenir sur l’étendue de cette immunité. Traditionnellement, donc, l’irresponsabilité a pour but d’assurer au député une totale liberté d’action et d’expression vis-à-vis de l’Exécutif et de ses électeurs. Il y a en effet nécessité de le sauvegarder de leurs atteintes car il « ne remplit pas un mandat qui l’enchaîne, mais il exerce une fonction libre. Il n’exprime pas la volonté de ses électeurs, mais il se décide par lui-même et sous sa propre appréciation. Il ne parle, ni ne vote, au nom et de la part de ses électeurs, contenir un délit faisant corps avec l’exercice de ces fonctions ».

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