Analyse des résultats expérimentaux et de modélisation sur la colonne Lysimètre

 Analyse des résultats expérimentaux et de modélisation sur la colonne Lysimètre

Infiltration – drainage au scanner médical sur la colonne de sol Lysimètre à capacité au champ. En effet, c’est la seule expérimentation à ne pas avoir infiltré sur la durée de l’expérience (~2h), mais l’imagerie fonctionnelle quasi 4D a été tout de même réalisée. L’extraction des informations concernant la structure de la macroporosité montre que le profil de macroporosité « percolante » présente une zone quasi nulle de la macroporosité détectable au scanner (>400µm). Cela se traduit par une très faible infiltration de la colonne de sol, avec une vitesse d’infiltration de l’ordre de 10−7𝑚. 𝑠 −1 , soit une valeur comprise dans l’intervalle de valeurs de la conductivité hydraulique à saturation des deux couches estimées par ESPAS 1.0 (horizon supérieur = 10−6 𝑚. 𝑠 −1 ; horizon inférieur = 10−8 𝑚. 𝑠 −1 ). Cette expérience d’infiltration d’eau n’a pas engendré d’écoulement préférentiel, cependant elle apporte des informations complémentaires sur la capacité du modèle à reproduire les données expérimentales. En effet, la simulation après inversion des paramètres pour les deux versions du modèle n’a pas abouti. L’estimation a convergé uniquement pour la version n’utilisant pas les profils extraits des images, à savoir en estimant : 𝑎, 𝑏, 𝜈, d et 𝜃𝑚𝑎𝑥−𝑚𝑎𝑐. Elle échoue dès lors que les paramètres du terme d’échange : la distance intermacropores et la macroporosité 𝜃𝑚𝑎𝑥−𝑚𝑎𝑐 sont fixés par les profils mesurés. La simulation a été tentée avec des valeurs de paramètres non estimées par DREAM mais n’engendrant pas d’erreur « grave » c’est-à-dire aboutissant à l’arrêt du calcul. Les sorties du modèle ainsi générées montrent que la simulation avec les profils mesurés engendrent des conditions d’écoulement particulières. Le test a été fait avec les paramètres du tableau IV – 1. La valeur du paramètre 𝑎 est fixée à 3, la valeur de 𝑏 est calculée comme expliqué à la section II.3.3.2.3. Le flux, 𝑞, d’infiltration dans les macropores est calculé ici à 4 cm de profondeur avec la valeur de la macroporosité (𝜃𝑚𝑎𝑥−𝑚𝑎𝑐) mesurée à cette profondeur et qui correspond à la zone de faible infiltration dans la colonne de sol. macropores est de 2,43.10−7𝑚. 𝑠 −1 avec ces paramètres et, notamment, le profil de macroporosité mesuré présentant un resserrement autour de 4 cm de profondeur. Dans ce cas, l’infiltration dans cette colonne de sol à capacité au champ s’apparente plus à un écoulement lent et matriciel qu’un écoulement préférentiel. Le flux d’eau non « infiltrable » devrait être stocké sous la forme d’une lame d’eau en surface. Le potentiel matriciel calculé pour ce jeu de paramètres (tableau IV – 1) présente des valeurs aberrantes (fig. IV – 1) avec des valeurs atteignant 50 m à 2160 s et 15 m à 5400 s en surface du sol due à des erreurs de calculs à ces pas de temps. Le modèle Darcy-Richards – KDW ne génère aucun stock sous forme de lame d’eau. En parallèle, les images tomographiques montrent la saturation progressive de la surface de la colonne durant l’infiltration dans le temps (fig. IV – 2) dans les 30 premières minutes de l’infiltration. Sur ces illustrations on peut voir que la surface se sature et que l’on ne voit pas d’eau ou très peu dans la profondeur de la colonne. Le temps auquel le potentiel matriciel simulé devient très positif indiquant un problème de calcul varie selon les paramètres testés (exemple valeurs du tableau IV – 1). Mais ce temps est autour de 30 min après le début de la pluie, ce qui semble correspondre grossièrement au temps réellement mis dans l’expérience pour saturer la surface du sol. Cet exemple d’infiltration sur une colonne de sol montre des résultats ne répondant pas au but fixé c’est-à-dire aboutissant à une estimation de paramètres erronés afin de modéliser l’infiltration – drainage par l’équation Darcy-Richards – KDW couplé. Le modèle ne parvient pas à infiltrer correctement l’eau dans ce cas, ce qui correspond à la réalité observée aussi bien sur les balances qu’au scanner médical. Dans ce cas, l’écoulement d’eau ne satisfait pas les conditions des équations du modèle et se rapproche plus d’un écoulement très lent et capillaire correspondant aux conditions de Darcy-Richards. Ainsi on peut dire que le modèle d’écoulement préférentiel, KDW, ne gère pas des conditions où la macroporosité n’a pas la capacité d’infiltrer l’entièreté du flux d’eau refusé par la matrice. En condition réelle, le flux d’eau refusé par la matrice est transféré dans les macropores. Si ces derniers n’ont pas la capacité à infiltrer ce flux, il se forme un stock d’eau dans le sol voire jusqu’en surface. Pour l’heure, l’équation KDW ne permet pas de reproduire ce cas de figure : un refus d’infiltration des macropores. En n’utilisant que l’équation de Darcy-Richards avec les mêmes paramètres de la matrice, la simulation se passe correctement : peu d’eau est drainée en bas du sol, une partie est stockée dans la matrice et le reste d’eau qui ne peut pas être infiltrée est stockée sous forme d’une lame d’eau en surface (voir bilan de masse de la fig. IV – 2b). A la fin de l’expérience, la hauteur d’eau stockée en surface vue sur les images est d’environ 2,5 à 3 cm, ce qui est proche de la simulation avec Richards uniquement. Ainsi, pour ce cas, le couplage Darcy-Richards avec KDW entraine des incohérences numériques.

Analyse de l’évolution de la structure macroporeuse et de l’eau détectée

Les données tomographiques permettent d’observer les phénomènes induits par le passage de l’eau et par le séchage dans les colonnes de sol. Ces observations notamment temporelles sont, à notre connaissance, les premières à permettre de mieux comprendre les processus engagés durant le passage de l’eau dans des colonnes décimétriques. Cette partie vise à analyser l’évolution structurale initiale et l’évolution temporelle durant les expériences. IV.2.1. Impact de la teneur en eau initiale sur la structure initiale Les données globales montrent que la macroporosité initiale de chaque sol tend à augmenter (volume de macroporosité) avec la diminution de la teneur en eau initiale. Cela est confirmé par la connectivité qui est également plus élevée, pour la partie percolante de la macroporosité, avec la diminution de la teneur en eau initiale (voir section III.2.2). Le fait que la macroporosité percolante de Lysimètre n’a pas pu être générée sans la bordure PVC indique qu’aucun macropore n’est connecté en surface avec les réseaux plus profonds. Cela peut s’expliquer par le travail du sol qui fragmente la grande macroporosité (larges fissures, biopores) et par la résolution du scanner qui ne permet pas d’imager les plus petits macropores qui pourraient connecter la surface et les réseaux plus profonds. La teneur en eau initiale a un effet marqué sur les profils de macroporosités percolantes initiaux. Les profils des sols argileux, Verger et Lysimètre, montrent que la macroporosité percolante augmente avec la diminution de la teneur en eau initiale. L’augmentation du pourcentage de macroporosité est de 2 à 3 fois la valeur du profil mesuré en condition à capacité au champ selon les colonnes. Le sol de Collias ne montre pas cette évolution à l’exception de la partie inférieure de la colonne, entre 10 et 14 cm de profondeur, mais l’effet est moins marqué que dans les sols argileux. Cette augmentation de la macroporosité percolante peut s’expliquer par des mouvements de retrait de la matrice qui s’assèche, et qui permettent une plus grande ouverture de la macroporosité, voire une ouverture de nouveaux macropores inter-agrégats. Ces mouvements sont liés à la nature des argiles présentes et à la teneur en argiles de ces sols qui se situe autour de 30 à 35% (Jong and Warkentin, 1965). En effet, la teneur en argile présente dans un sol favorise les mouvements de retrait – gonflement, le sol de Collias ayant moins d’argiles, ne montre pas ces variations et présente une structure beaucoup plus stable. Les profils de macroporosité varient, parfois fortement, sur les 15 cm de hauteur du sol. Des zones ont été identifiées comme ayant plus 1,5 à 2 fois plus de macroporosité percolante, comme pour Verger et Lysimètre par exemple. Collias montre des profils beaucoup moins variables selon la profondeur. Ces différences de macroporosité peuvent être expliquées par la teneur en argiles, mais aussi par le travail du sol et l’historique des cultures. Verger est un sol cultivé en arboriculture, les arbres ont des racines plus grandes et plus grosses que les herbacées présentent sur Collias. Le sol de Lysimètre est de même composition que celui de Verger (aux différences décimétriques pédologiques près) mais c’est un sol utilisé en grandes cultures (blé). Le travail du sol et les racines de blé peuvent induire des modifications de la structure de ce sol en réduisant la taille moyenne de la macroporosité naturelle de ce sol et surtout les grandes structures macroporeuses (galeries de lombrics, racines)(Strudley et al., 2008). Vogel et al. (2005) a mesuré les fonctionnelles de Minkowski durant le séchage d’échantillons remaniés formés à partir de proportions différentes de sable et de bentonite (argile). Les auteurs suivent l’évolution temporelle des fissures en surface, avec des images sur lesquelles les indices de Minkowski sont mesurés. Ils voient qu’entre un échantillon 100% sableux et 100% argileux, celui avec le plus d’argile montre une augmentation de la densité de surface fissurée la plus abrupte et la plus rapide. L’échantillon sableux est celui fissurant le moins, avec une moins grande densité de surface créée. Le nombre d’Euler de l’échantillon sableux est d’abord le plus positif au début de l’expérience signifiant des fissures isolés. Puis, au cours du temps, ce nombre devient de plus en plus négatif surtout pour l’échantillon argileux, indiquant pour les auteurs, une interconnexion entre les fissures se faisant plus tardivement durant le séchage. Cette étude est l’une des rares analysant l’évolution des fonctionnelles de Minkowski dans le temps pendant une phase de séchage, ce qui peut s’apparenter aux trois conditions initiales utilisées dans ce travail de thèse. On constate que la macroporosité argileuse est « instable » selon l’humidité initiale, c’est-à-dire qu’elle varie le plus. On constate également que pendant le séchage des sols, le nombre d’objets isolés augmente, tout comme dans l’étude de Vogel. Cela montre que (i) la structure des sols n’est pas stationnaire, (ii) sa dynamique n’est pas linéaire, et (iii) la texture des sols influence cette dynamique.

Impact du passage de l’eau sur la structure pendant l’expérience

L’une des innovations de cette thèse est d’avoir étudié l’évolution temporelle globale et en profil des structures macroporeuses pour tous les sols et pour des conditions initiales différentes. Afin de valider les observations de la dynamique rapide de perte et ressaut de macroporosité et afin d’être sûr que la nouvelle méthode de seuillage de la macroporosité (ajustement par la loi de Weibull, voir II.2.2.2.2) ou que le traitement des images n’entraine pas d’artéfacts, nous avons réalisé des essais en rétractométrie en insérant une phase de réhumectation des échantillons. Ces expériences nous ont permis de mettre en évidence que la dynamique rapide de variation de la macroporosité était une réalité et non un artéfact du traitement d’image. L’étude des paramètres globaux 3D des structures macroporeuses « totale » et « percolante » et en prenant en compte ou pas les macropores connectés aux bordures, permettent de savoir si les structures sont différentes entre elles, ce qui les distingue et si la macroporosité de bordure influence la structure interne de chaque colonne. Les macropores en contact avec la bordure PVC influencent uniquement les quantifications et ne jouent absolument pas sur les dynamiques temporelles observées, sauf pour le sol de Lysimètre. Ainsi les données globales temporelles montrent que l’eau s’infiltre et ré humecte le sol réduisant la macroporosité (pour tous les sols et toutes les teneurs en eau initiales). Et au contraire, le drainage de l’eau dans la structure entraine un ressaut de macroporosité. La teneur en eau initiale influence l’amplitude des variations pendant les deux phases de l’expérience. Plus la teneur en eau initiale est faible plus la chute de macroporosité pendant l’infiltration est grande. Et au contraire le ressaut pendant le drainage présente moins d’amplitude aux teneurs en eau les plus faibles. Les données globales montrent une chute de la connectivité pendant l’infiltration soit par perte de volume de macropores et / ou de nombre de macropores. L’étude conjointe de l’évolution du volume de macroporosité en fonction de la densité de macropores illustre ces pertes en nombre et / ou volume de macropores. On peut voir qu’avec les indices géométriques de Minkowski d’une part et le nombre d’objets macropores détectés d’autre part, que les structures sont différentes entre les trois sols. La densité de macropores détectés est plus grande dans le sol de Collias (15 objets.cm-3 ), intermédiaire dans le sol de Verger (7 objets.cm-3 ) et le plus bas est pour le sol du Lysimètre (4 objets.cm-3 ). Le volume global de la macroporosité initiale est sensiblement identique entre les trois sols, le volume de sol moyen est de 1695,7 cm3 , avec une différence entre volume minimum et maximum de 149 cm3 . Cela semble nous indiquer que dans le sol de Collias, les macropores sont petits et plus nombreux que dans le sol de Lysimètre et Verger est intermédiaire (figure III – 13). Ce graphique peut nous aider à comprendre la dynamique de la macroporosité et émettre des hypothèses : – dans le cas de sols sableux (Collias), on suppose que le passage de l’eau dans le sol, entraine la fermeture de macropores qui se ré-ouvrent pendant le drainage de façon quasi identiques. Ceci pourrait indiquer une certaine stabilité de la structure ; – dans les sols argileux (Lysimètre et Verger), on peut supposer que les macropores se rétrécissent (diminution du volume) sans se refermer totalement (nombre de macropores constant). Si on observe les images de la macroporosité au temps initial, à 90 min (arrêt infiltration) et à 120 min (arrêt drainage et du suivi au scanner) et en délimitant un macropore sur l’image à 0 min (fig. IV – 5, contour violet) et en reportant cette délimitation sur les deux autres images à 90 et 120 min, on observe : – une perte de pixels « macropores » (en noir entre 0 et 90 min) ; – une augmentation de pixels « macropores » entre 90 et 120 min ; Ces pertes et gains sont localisés sur les bordures des macropores, et sont en règle générale observés sur une épaisseur de 1 pixel. Les contours du macropore à 120 min sont assez proches de ceux à 0 min dans le cas de Collias, mais pas pour les deux sols argileux. Pour expliquer les différences observées, on doit prendre en compte la texture et le contexte structural de ces sols : Lysimètre est un sol argileux avec des argiles gonflantes et travaillé régulièrement ; Verger est également argileux mais non travaillé avec des racines d’arbres très présentes, et Collias est un sol limono-sableux non cultivé avec des herbacées. Le travail du sol régulier de Lysimètre pourrait expliquer les différences de structure (moins de macropores) par rapport à Verger qui n’est pas travaillé. La faune du sol et la quantité de matière organique dans ce dernier pourrait le structurer de façon plus pérenne que Lysimètre. En effet, les différents passages d’engins agricoles vont modifier les conditions de vie de la faune du sol qui verra ses galeries modifiées régulièrement, par fragmentation des macro-agrégats (Bronick and Lal, 2005). Les différences observées pour Collias peuvent s’expliquer par sa texture différente. Dans un limon sableux on peut supposer que la fraction sableuse entraine une moins grande structuration que dans un sol argileux, dû à la moins grande cohésion entre les particules de sables comparée aux argiles. Cette hypothèse peut être en partie vérifiée en analysant la granulométrie des sols, en déterminant la nature minéralogique des argiles (diffraction des rayons X), et en mesurant la stabilité des agrégats (méthode de Le Bissonnais and Le Souder, 1995). Cela donnerait des  indications sur la stabilité structurale des sols, avec en plus une étude de la distribution des tailles de pores de chaque sol qui permettrait de valider les observations. Il faut pondérer les observations faites ici en rappelant que l’imagerie tomographique réalisée dans ce travail présente une résolution spatiale très grossière (400 µm). La résolution temporelle est également relativement faible : une image toutes les 2 à 5 min. Il est donc nécessaire de poursuivre la caractérisation des variations structurales mais à plus fine échelle, voire même pour commencer en simplifiant le milieu. Ainsi une étude dans des milieux modèles simples, puis de plus en plus complexes, afin de se rapprocher d’un sol « naturel » permettrait d’en apprendre d’avantage sur les variations structurales. En effet, l’échelle d’étude décimétrique ici ne permet pas de tout percevoir. Toutes ces considérations et limites de ce travail ne permettent pas de proposer des hypothèses plus poussées quant au(x) processus régissant les mouvements de la structure observés à fine échelle. Cependant, on peut proposer comme première hypothèse que l’eau d’infiltration déstabilise fortement les parois des macropores et provoque ce qu’on peut appeler « le foisonnement des parois » (Favre et al., 1997). Favre et al. (1997) ont travaillé sur les mouvements d’eau dans des vertisols et les mouvements de matières associées en réalisant des infiltrations d’eau sur des sols fissurés avec le suivi de la teneur en eau. Ils ont pu observer la propagation du front d’infiltration dans les fissures et notamment que les parois des fissures sont ré humectés rapidement et elles se referment alors que la matrice demeure insaturée, même 24h après l’arrêt de l’essai. Les fissures ont une taille de l’ordre 2 m de profondeur et 1 à 2 cm d’ouverture. Les résultats de cette étude montrent que le gonflement des sols tels que les vertisols est lié à des processus très locaux et temporellement rapides. Le foisonnement des parois peut être qualifié de « sur-gonflement » des matériaux qui peuvent être déstructurés. Après le passage de l’eau, pendant le drainage, ces matériaux déstabilisés reprennent leur place initiale ou non. L’eau circulant dans le sol n’est pas à l’équilibre, nous sommes dans un régime transitoire et les redistributions d’eau (ou de pression) s’opèrent durant le drainage. Ces hypothèses sont à relier aux courbes de retrait réalisées sur les échantillons de sols. Ces données couplées aux variations volumiques observées précédemment permettent seulement une ébauche d’hypothèse sur les mouvements des sols au passage de l’eau

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