Cellules NK et fièvres hémorragiques virales

Cellules NK et fièvres hémorragiques virales

Un autre virus responsable de FH : le virus Ebola

Aspects moléculaires  Morphologie et organisation du génome EBOV est un Ebolavirus de la famille des Filoviridae appartenant à l’ordre des Mononegavirales. Comme LASV, c’est un virus enveloppé à ARN simple brin de polarité négative mais son génome est non segmenté [288]. La morphologie filamenteuse des particules virales a donné son nom à cette famille de virus à partir du latin filum. Le diamètre des virions est de l’ordre de 80 nm et la longueur peut atteindre 14 000 nm. Le génome code pour 7 protéines dans le sens 3’ vers 5’ : la NP, la protéine du virion (VP) VP35, la VP40, la GP, la VP30, la VP24 et une polymérase ARN ARNdépendante L. Le génome viral comporte des séquences Leader et Trailer aux extrémités 3’ et 5’ respectivement qui ont un rôle dans la réplication, la transcription et l’encapsidation. Comme pour LASV, ces séquences comportent des motifs consensus conservés parmi les autres Ebolavirus. Elles peuvent s’associer et former une structure secondaire en épingle à cheveux. Les séquences des gènes encodés par le génome d’EBOV sont séparées soit par des régions intergéniques soit par des zones de chevauchements. L’ARN est encapsidé par la NP et associé aux protéines VP35, VP30 et L pour former le complexe RNP. Ce complexe est ensuite attaché à l’enveloppe virale par les protéines de matrice VP24 et VP40. La GP s’associe en trimères pour former des projections à la surface des virions. En plus de leur rôle structural, les protéines d’EBOV ont des fonctions multiples décrites ci-dessous. Un schéma de la structure des particules virales et de l’organisation du génome est présenté dans la figure 14.  Les protéines des Ebolavirus et leurs fonctions  Le complexe RNP Les protéines NP, VP35, VP30 et L jouent un rôle fondamental dans la formation des complexes RNP et dans la transcription et la réplication virale. La NP est encodée par l’extrémité 3’ du génome. C’est une protéine de 739 acides aminés qui peut être phosphorylée. La VP35 est une protéine de 35 kDa, constitué de 321 acides aminés. Elle se lie à l’ARN au sein des nucléocapsides et peut également former des homo-oligomères. La VP35 joue également un rôle fondamental dans l’inhibition de la réponse antivirale et de la réponse IFN, lequel sera détaillé dans la partie suivante. La VP30 est une protéine phosphorylée de 288 acides aminés Introduction 86 de 32 kDa qui a peu d’analogues parmi les protéines des autres Mononegavirales. Elle peut former des homo-oligomères et interagir aussi avec la NP au sein des complexes RNP. Le gène L encode une grosse protéine fortement conservée de 2212 acides aminés (252,2 kDa). C’est une ARN polymérase ARN-dépendante similaire à la protéine L de LASV et des autres polymérases des virus à ARN simple brin de polarité négative, qui permet la réplication et la transcription du génome virale. Elle est aussi responsable de la polyadénylation des ARNm et de l’édition de la GP. Figure 14. A. Première photographie d’EBOV dans une culture cellulaire obtenue par microscopie électronique en 1976 (Murphy FA, CDC). Organisation des particules virales (B) et du génome (C) d’EBOV. D’après [288].  Les protéines de matrice VP40 et VP24 Le cadre de lecture de la VP40 d’EBOV chevauche celui de la VP35 et la VP40 est transcrite en retard par rapport à la VP35. C’est une protéine de 35 kDa, constituée de 326 acides aminés, la plus conservée de tous les gènes et la plus abondante des virions. Comme la protéine Z de LASV, la protéine VP40 est une protéine de matrice et elle permet le bourgeonnement des particules virales [289]. La VP40 possède des domaines tardifs impliqués dans cette étape du relargage des VLP et virions. La VP40 s’associe à la GP à la membrane cellulaire par son extrémité C-terminale par des interactions hydrophobiques au sein de radeaux lipidiques, lesquels facilitent les interactions Introduction 87 protéines/protéines et protéines/lipides, le bourgeonnement et l’entrée des virus. La VP40 seule est suffisante pour le transport de la nucléocapside à la membrane plasmique par le biais des interactions avec le réseau des microtubules. La protéine VP24 est constituée de 251 acides aminés (28,3 kDa). Elle joue un rôle structural de matrice et s’associe à la membrane plasmique comme VP40, mais ne semble pourtant pas interagir directement avec cette dernière. Plusieurs études suggèrent que la VP24 n’est pas impliqué dans le bourgeonnement des particules virales, ni dans l’entrée dans la cellule cible mais pourrait participer à l’assemblage des nucléocapsides à l’intérieur des cellules infectées. Elle interagit avec la NP et joue un rôle suppresseur dans la réplication et la transcription virale. Comme la VP35, la VP24 interfère aussi avec la réponse IFN et le mécanisme sera décrit dans la partie suivante.  La GP Le gène de la GP d’EBOV présente un site d’édition qui permet la traduction de trois polypeptides différents. Le premier est une protéine structurale qui est d’abord traduite en tant que précurseur de façon similaire à la GPC de LASV. Elle est ensuite clivée en deux sous-unités GP1 et GP2 par une proprotéine convertase furine, lesquelles s’associent pour former des hétérotrimères à la surface des cellules. La GP2 d’EBOV possède le domaine transmembranaire nécessaire à l’ancrage à la membrane et aussi un peptide de fusion important pour l’entrée du virus. Le gène encode également deux formes non structurales de GP par édition, qui sont solubles et sécrétées en grande quantité par les cellules infectées car elles ne possèdent pas de domaine transmembranaire. Une forme de 324 acides aminés est sécrétée en homodimère après clivage d’un petit peptide soluble également à l’extrémité C-terminale. Une autre forme secondaire monomérique est directement sécrétée. Toutes les formes de GP partagent 295 acides aminés. Il est à noter que les hétérodimères GP1/GP2 peuvent également être sécrétés de façon similaire à ce qui est observé pour LASV, après clivage de l’ectodomaine de surface par une sheddase de la famille des métalloprotéases [290]. La GP d’EBOV joue de façon certaine un rôle dans la pathogenèse de la FH Ebola, lequel sera décrit dans la partie suivante.  Le cycle viral Le cycle viral d’EBOV est similaire à ceux de la plupart des virus à ARN simple brin de polarité négative. Après la liaison avec un récepteur, le virus entre dans la cellule par endocytose et/ou fusion directe avec la membrane plasmique. Le génome viral est relargué dans le cytoplasme de la cellule, dénudé par les nucléocapsides puis transcrit et répliqué. Les ARNm sont traduits, les protéines s’associent pour former les complexes RNP avec l’ARN génomique, puis avec les protéines Introduction 88 de matrice et les GP. Les particules virales bourgeonnent à la surface des cellules infectées et sont libérées. Le mécanisme d’entrée d’EBOV est constamment rediscuté. Il s’attache à la cellule cible par des lectines ou d’autres molécules. EBOV est endocyté dans des vésicules recouvertes de clathrine ou peut également entrer dans la cellule par un mécanisme de macropinocytose. Il est ensuite transporté jusqu’aux endosomes acides par les microtubules et les microfilaments, puis fusionne avec la membrane endosomale. De façon similaire à LASV, le mécanisme de fusion de l’enveloppe d’EBOV avec les membranes de la cellule infectée est médié par la GP2 et son peptide de fusion. L’enveloppe virale peut aussi directement fusionner avec la membrane cellulaire. Les protéines d’EBOV sont ensuite transcrites de façon séquentielle de l’extrémité 3’ du génome vers 5’. La réplication du génome ARN viral nécessite la synthèse d’un ARN antigénomique de polarité positive pour servir de matrice. La plupart des virions bourgeonnent ensuite de façon horizontale à la surface des cellules. L’expression de VP40 dans des cellules suffit à induire le bourgeonnement des VLP. La présence des GP et de la VP40 permet le relargage des particules avec une morphologie filamenteuse. Epidémiologie  Découverte des Ebolavirus Les Ebolavirus ont été décrits pour la première fois à l’occasion de deux épidémies en 1976, l’une au sud du Soudan (284 cas, 51% de mortalité), et la seconde au nord de la République Démocratique du Congo (RDC, ex-Zaïre) (318 cas, 88% de mortalité) [24, 25]. Deux espèces ont été ainsi isolées : le virus Ebola (EBOV) anciennement appelé Zaïre, et le virus Soudan (SUDV). En 1994, une troisième espèce appelée Côte d’Ivoire puis virus Taï Forest (TAFV) a été découverte. Elle a été isolée chez une scientifique qui s’était infectée en travaillant sur un chimpanzé trouvé mort dans la forêt Taï en Côte d’Ivoire. TAFV a d’ailleurs été responsable de la disparition de la moitié de la population de chimpanzés pendant cette période dans cette région de la Côte d’ivoire [291]. En 2007, une autre espèce d’Ebolavirus pathogène appelée virus Bundibugyo (BDBV), proche de TAFV, a été découverte en Ouganda [29]. Enfin, le virus Reston (RESTV) a été isolée en 1989 à partir d’un singe cynomolgus importé des Philippines et a ensuite réémergé à plusieurs occasions aux Philippines [292], y compris chez le cochon [293]. Aucun cas humain de FH à RESTV n’a été déclaré. De plus, certains éleveurs de cochons aux Philippines ont présenté des anticorps contre ce virus ainsi qu’un Introduction 89 animalier en 1996 aux Etats-Unis [292]. Ces observations suggèrent que RESTV ne serait pas pathogène pour l’homme. Les espèces EBOV et SUDV réémergent régulièrement en Afrique centrale (Gabon, République du Congo, RDC, Soudan et Ouganda) causant des épidémies avec un taux de mortalité élevé [294]. Ces virus ont aussi été responsables de l’extinction d’une grande partie de la population de chimpanzés et gorilles. De plus, EBOV a été importé en Afrique du Sud du Gabon en 1996 et un second patient a été contaminé par la suite à Johannesburg. Les épidémies de FH Ebola sont listées dans le tableau V.  Réservoir du virus et transmission à l’homme De nombreuses études ont tenté d’identifier le réservoir animal. Du matériel génétique d’EBOV et des anticorps anti-Ebolavirus ont été retrouvés chez certaines espèces de chauves-souris frugivores mais aucune particule virale n’a encore été isolée chez ces animaux [295]. Le virus Marburg a lui, pu être isolé chez une espèce de chauve-souris, Rousettus aegyptiacus [296]. Les mécanismes de contamination de l’homme restent en suspens. Les périodes de chasse des chauves-souris coïncident avec l’occurrence des épidémies [297]. De plus, la consommation de chimpanzés trouvés morts dans la forêt ou chassés a été à l’origine de l’épidémie de Mayibout au Gabon en 1996, et c’est probablement le cas pour d’autres épidémies survenues entre 1994 et 1996 [298]. Ces données suggèrent que l’homme pourrait contracter le virus en consommant de la viande de chauve-souris ou de singe infectés, ou des fruits ou plantes contaminés par des excrétas provenant de ces animaux porteurs du virus. Le virus se propage ensuite par contact direct avec d’autres patients infectés ou avec les cadavres. De l’ARN viral ainsi que des particules virales infectieuses ont ainsi été isolés dans le sperme, les sécrétions génitales, les fluides corporels, les sécrétions nasales et à partir d’échantillons de peaux des patients infectés et de PNH [24, 25, 299]. La transmission du virus est amplifiée avec les rites funéraires et la médecine traditionnelle dans ces régions d’Afrique. Une infection est également possible lors des utilisations multiples de seringues mais les contaminations par aérosols sont à priori rares voire peu probables

Table des matières

REMERCIEMENTS
TABLE DES ILLUSTRATIONS
RESUME
ABSTRACT
ABREVIATIONS
INTRODUCTION
LES FIEVRES HEMORRAGIQUES VIRALES .
Les Bunyaviridae
Les Flaviviridae
Les Arénaviridae
Les Filoviridae
LE VIRUS LASSA
Epidémiologie
 Découverte et premières épidémies observées
 Réémergence de LASV : de nouvelles épidémies
 Importation de LASV dans les pays développés
Transmission et propagation de LASV .
Séroprévalence.
Diagnostic
Signes cliniques et physiopathogenèse
Modèles animaux d’étude de la fièvre de Lassa38
 Rongeurs38
 Primates non humains
Aspects moléculaires.
 Morphologie.
 Organisation du génome
 Les protéines virales
 La nucléoprotéine
 Les glycoprotéines 1 et 2
 La polymérase L
 La protéine Z
 Le cycle viral.
 Entrée du virus dans la cellule.
 Transcription et réplication virale
 Bourgeonnement
 Les outils
Traitements de la fièvre de Lassa
 La ribavirine
 Recherche de nouveaux traitements
Un arénavirus non pathogène : le virus Mopeia
LES REPONSES IMMUNITAIRES LORS DE LA FIEVRE DE LASSA
La réponse innée
 Infection des cellules présentatrices d’antigène
 Activation des CPA
 Conséquences sur la réponse immunitaire innée et adaptative
 La reconnaissance de l’antigène
 Notion de PRR et de PAMP
 La reconnaissance de LASV : hypothèses
 Inhibition de la synthèse d’IFN : rôle des protéines virales
 Réponse IFN de type I
 La réponse inflammatoire
La réponse adaptative
 La réponse humorale
 Sécrétion d’anticorps
 Essais de traitement par injection de sérum immun
 La réponse T
 Activation des cellules T
 Rôle dans la pathogenèse
Vers un vaccin ?
 Vecteur arénavirus
 Vecteurs ADN
 Conclusion : quelles méthodes pour un vaccin efficace ?
UN AUTRE VIRUS RESPONSABLE DE FH : LE VIRUS EBOLA
Aspects moléculaires
 Morphologie et organisation du génome
 Les protéines des Ebolavirus et leurs fonctions
 Le cycle viral
Epidémiologie
 Découverte des Ebolavirus
 Réservoir du virus et transmission à l’homme
Signes cliniques et pathogenèse
 Modèles animaux utilisés
 Signes cliniques
 Pathogenèse
Réponses immunes lors de la FH Ebola
 Infection des CPA et conséquences
 La réponse inflammatoire
 La réponse IFN de type I
 La réponse humorale
 Réponse T
 Inhibition des réponses immunes par les protéines virales
Diagnostic et traitements
LES CELLULES NATURAL KILLER, CARREFOUR ENTRE IMMUNITE INNEE ET ADAPTATIVE
Biologie des cellules NK
 Développement des cellules NK et sous-populations.
 Le répertoire NK
 Transduction du signal d’activation des cellules NK
 Récepteurs reconnaissant le CMH-I4
 Récepteurs activateurs
 Récepteurs de cytokines et chemokines
 Les fonctions effectrices des cellules NK
 Les fonctions cytotoxiques
 La production de cytokines
Régulation des réponses des cellules NK
 Activation des cellules NK
 Activation des DC
 Lyse des DC
Rôle des NK dans les infections virales
 Conséquences de l’infection virale sur les cellules NK
 Coopération avec les DC et macrophages
 Rôle immunopathologique des cellules NK.
 Un exemple : rôle des cellules NK lors de l’infection par LCMV
PROBLEMATIQUE
RESULTATS
INFECTION DES CELLULES NK PAR LASV ET MOPV
PRESENTATION DU MODELE IN VITRO DE COCULTURE NK/CPA
COCULTURE NK/CPA ET INFECTION PAR LASV ET MOPV
Etat d’activation des DC et macrophages en présence de cellules NK
Activation/prolifération des cellules NK en présence de CPA infectées par LASV et MOPV.
Production de cytokines par les cellules NK
Fonctions cytotoxiques
ETUDE DE L’IMPORTANCE DU CONTACT CELLULAIRE DANS LES INTERACTIONS NK/MACROPHAGES
ETUDE DU ROLE DES FACTEURS SOLUBLES DANS LES INTERACTIONS NK/MACROPHAGES
UTILISATION DE LASV RECOMBINANTS POUR L’ETUDE DU ROLE DES IFNDE TYPE I
Etat d’activation des DC t macrophages infectés par des LASV recombinants
Activation des cellules NK par les CPA infectées par des LASV recombinants
Fonctions effectrices des cellules NK
Contact cellulaire
Neutralisation des IFN de type I.
ACTIVATION DES CELLULES NK LORS DE L’INFECTION PAR EBOV
Effet d’EBOV sur les cellules NK
Coculture NK/CPA lors de l’infection par EBOV
 Activation des CPA
 Activation des cellules NK
DISCUSSION
LE MODELE DE COCULTURE NK/CPA
LES CELLULES NK NE SONT PAS INFECTABLES NI ACTIVEES EN REPONSE A LASV ET MOPV.
LES CELLULES NK NE S’ACTIVENT PAS EN PRESENCE DE DC INFECTEES PAR LASV ET MOPV
LES CELLULES NK S’ACTIVENT EN PRESENCE DE MACROPHAGES INFECTES PAR LASV ET MOPV
LES CELLULES NK ACTIVEES PAR LES MACROPHAGES INFECTES NE PRODUISENT PAS DE CYTOKINES
LES CELLULES NK ACTIVEES PAR LES MACROPHAGES INFECTES PAR LASV ET MOPV ONT DES CAPACITES
CYTOTOXIQUES AUGMENTEES
LES CELLULES NK ACTIVEES NE LYSENT PAS LES CELLULES INFECTES
LES CELLULES NK S’ACTIVENT EN PRESENCE DE DC ET DE MACROPHAGES INFECTES PAR DES LASV MUTANTS
NI LES CELLULES NK, NI LES CPA NE SONT ACTIVEES LORS DE L’INFECTION PAR EBOV
CONCLUSIONS GENERALES/PERSPECTIVES
MATERIELS & METHODES
RÉFÉRENCES
ANNEXES

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