Gestion de l’insulinothérapie automatisée en boucle fermée chez le patient avec DT1

Gestion de l’insulinothérapie automatisée en boucle
fermée chez le patient avec DT1

Historique de la boucle fermée

 Depuis plus de 40 ans, la boucle fermée, appelée par abus de langage par certains, pancréas artificiel est un concept, aujourd’hui une entité réelle, qui fait rêver les patients diabétiques ainsi que les professionnels du diabète depuis de longues années. L’avènement de la technologie ainsi que les progrès scientifiques et technologiques récents semblent enfin amener une solution concrète aux patients diabétiques, notamment les diabétiques de type 1. En 1993 les résultats de l’étude Diabetes Control and Complications Trial (DCCT)[1] sont rendus. Il est expliqué que la lutte contre l’hyperglycémie chronique devra être réalisé en se basant sur l’HbA1c (hémoglobine glyquée = reflet de l’équilibre glycémique sur les trois mois précédant le prélèvement), méthode de choix pour prévenir les complications du diabète de type 1 (DT1). Par ailleurs, les données épidémiologiques actuelles indiquent qu’à peine 21 % des adultes diabétiques de type 1 atteignent l’objectif cible d’HbA1C inferieure à 7 % [2] soit 90 000 sur les 500 000 diabétiques de type 1 en France. L’étude DCCT a aussi démontré que le risque induit par la correction trop rapide de l’hyperglycémie est la survenue d’hypoglycémies, dont les formes sévères peuvent avoir des conséquences immédiates très délétères, mais également à long terme par leur répétition [3]. Devant ce postulat, un consensus international a eu lieu afin d’homogénéiser les prises en charge et lutter contre ces variations glycémiques qui semblent tout aussi délétères que l’hyperglycémie chronique. Ce consensus s’est appuyé sur la mesure continue du glucose interstitiel (MCG) qui définit des objectifs de temps de maintien de la glycémie dans une 7 fourchette-cible, en tant qu’objectif thérapeutique, afin de concilier une prévention efficace des complications de l’hyperglycémie chronique et un risque minimal d’hypoglycémies [4]. Pour la plupart des patients adultes, un TIR (Time In Range : 70-180 mg/dL) > 70 %, un TBR (Time Below Range : < 70 mg/dL) < 4 %, avec en particulier un TBR (< 54 mg/dL) < 1 %, sont les objectifs àatteindre. Cependant, on constate que ces objectifs sont difficiles à atteindre et/ou à maintenir en condition de vie réelle. L’obtention de ce niveau de contrôle et son maintien au long cours se révèlent rarement réalisables, lorsque l’adaptation des doses d’insuline est faite par le patient àpartir de ses données glycémiques et de son expérience personnelle qui peut parfois comporter des stratégie erronées ou obsolètes. Ces objectifs ne peuvent être approchés qu’au prix d’un investissement du patient qui altère considérablement sa qualité́de vie et majore grandement sa charge mentale. La suppléance de l’absence de sécrétion de l’insuline chez les DT1, est rendue particulièrement compliquée par la variabilité́des besoins en insuline au cours de la journée et d’un jour àl’autre, surtout chez les enfants, en raison des nombreux facteurs qui influent sur la glycémie [5]. L’automatisation de l’apport d’insuline en fonction des variations actuelles et prédites de la glycémie interstitielle, couramment dénommée « insulinothérapie en boucle fermée (BF) » ou délivrance automatisée de l’insuline (communément nommé « pancréas artificiel ») apparait comme le moyen technologique capable d’obtenir avec certitude, la sécurité́ainsi que le contrôle glycémique souhaité en réduisant la charge thérapeutique et donc la charge mentale. Vu le nombre grandissant de personne atteinte par le diabète de type 1, les constructeurs ont travaillé en coordination avec les ingénieurs, les patients, les médecins afin de pouvoir mettre au point ces systèmes de pointe. Après plusieurs années de recherches [6], un certain nombre de systèmes matures sont désormais mis en circulation et donc àdisposition des patients. Historiquement, les premiers systèmes d’insulinothérapie automatisée sont apparus dans les années 1970. Ils se composaient d’une perfusion intraveineuse d’insuline associée à un capteur intraveineux mesurant la glycémie veineuse en temps réel. Les premiers algorithmes sont alors apparus, de type Proportionnel-Dérivé en se calquant sur la glycémie veineuse à l’instant T, la glycémie cible ainsi que la vitesse de changement de cette glycémie. Cette technique n’était pas réalisable en ambulatoire. Dans les années 1980, les premières pompes miniatures apparaissent mais ce n’est qu’à partir de 1999 qu’elles ont eu plus grand intérêt. En effet, cette année-là, les capteurs de glucose interstitiel ont permis une mesure 8 assez précise du glucose en temps réel, et en ambulatoire. Ils ont ainsi pu être intégrer dans les schémas thérapeutiques d’insulinothérapie. Au début, les pompes à insuline implantées dans la cavité péritonéale ont été testées mais délaissées par les industriels et peu développées au fur et à mesure des années. Ce sont les pompes à insuline sous cutanée ainsi que les capteurs qui ont été développés de manière importante au fil des années avec l’aide financière de plusieurs sociétés comme la Fondation pour la Recherche sur le Diabète Juvénile (JDRF) ou la Communauté Européenne. La première tentative d’utilisation de boucle fermée a été menée à l’hôpital et promue par Minimed-Medtronic. Il s’avérait que des pics hyperlgycémiques importants survenaient au moment des repas du fait de l’apport brutale d’une grande quantité de glucose que l’algorithme ne pouvait anticiper. On a alors rajouté les bolus manuels, permettant ainsi d’éviter ces pics postprandiaux. On parle alors de « boucle semi-fermée ». Les premières études sont alors apparues pour mettre en pratique ces nouveaux systèmes. Il fallait valider scientifiquement les hypothèses sous-jacentes qui avaient mené à l’invention de ces pompes, à savoir une amélioration de la glycémie globale et une diminution des variations glycémiques intra et inter journalières [7] [8]. La première étude prouvant l’efficacité en termes de glycémie moyenne est l’étude menée par le Dr Marc BRETON, publiée en 2012 [9]. L’étude « AP at home », menée par un groupement d’experts européens a également mis en évidence une amélioration significative des paramètres glycémiques notamment le nombre d’hypoglycémies. Le temps passé dans la cible n’a pas été significativement amélioré mais il n’a pas été détérioré. Ce qui implique que la boucle semi-fermée est une solution non dangereuse . La transition de l’utilisation de la boucle fermée a été progressive. On est passé d’une utilisation extrêmement encadrée, en milieu hospitalier, avec de nombreuses contraintes physiques pour le patient, permettant de maximiser la sécurité de l’étude. Une première étape a été d’étudier l’effet de ces systèmes dans des camps de vacances, chez des enfants et des adolescents. On a mis en comparaison, d’un côté la boucle fermée, de l’autre, une pompe couplée à un capteur de glucose interstitiel [11] avec plus ou moins la fonction ‘Hypo Minimizer » permettant un arrêt automatique avant hypoglycémie [12]. L’utilisation ambulatoire a définitivement été réalisable par l’amélioration des technologies et en pouvant utiliser les algorithmes sur des tablettes/smartphones, connectés sans arrêt à la pompe. La première étude mettant en évidence cela est l’étude pilote mené par le Dr COBELLI en 2012 . Par la suite, les choses se sont accélérées. D’autres études de plus grande amplitude sont venues confirmer ces 9 résultats. Logiquement, des études en condition de vie réelle ont été mené avec des temps d’utilisation de plus en plus long. Une des premières études qui a montré un réel bénéfice de ces systèmes sur le temps passé dans la cible et sur l’hémoglobine glyquée est l’étude du Dr KOPFF menée en 2015 [14]. Des études au sujet de l’effet de ces systèmes sur des périodes de plus en plus longues ont été mené par la suite, et dans des conditions se rapprochant toujours plus de la vie réelle des personnes diabétiques de type 1. L’ensemble de ces études ont permis de créditer ces dispositifs en termes de sécurité initialement mais également en termes d’efficacité sur l’équilibre glycémique. A plus grande échelle, deux méta-analyses ont été réalisées sur l’utilisation de la pompe à insuline, en dehors de l’hôpital. Il s’agit de la méta-analyse, de Weisman et al. [15], qui a inclus 24 études et rassemblaient 585 participants. La méta-analyse de Bekiari et al. [16] a inclus 40 études comprenant au total 1027 participants. 

Intérêt métabolique de ces dispositifs

 Pour ces méta-analyses, l’objectif principal était de comparer le temps passé dans la cible (TIR) au cours des 24 heures par des patients utilisant un système d’insulinothérapie automatisée et par ceux utilisant un traitement classique par pompe à insuline et CGM en boucle ouverte avec ou sans accès en temps reel aux ́ données de glucose interstitiel du capteur. Des éléments sous-jacents ont été étudié en tant que critère de jugement secondaire avec le TBR (<70 mg/dL), le TAR (>180 mg/dL) et les besoins quantitatifs en insuline au cours des 24 heures. Dans la seconde méta-analyse, Bekiari et al. ont également comparédans les 2 groupes les taux glycémiques moyens sur 24h par MCG, le taux d’hémoglobine glyquée, l’indice de glucose bas (LBGI) qui quantifie la fréquence et la profondeur des évènements hypoglycémiques mesures par CGM et l’incidence des hypoglycémies sévères. Les 2 méta-analyses ont rapporté́les comparaisons faites sur la période des 24h et sur la période nocturne définie selon des critères propres à chaque étude. Des analyses en sousgroupes ont précisé les résultats obtenus en fonction de l’âge des patients, adultes ou pédiatriques, du type d’algorithme, MPC, PID, Fuzzy Logic, de la présence ou pas d’une télésurveillance, de l’utilisation de la BF pendant 24h ou uniquement la nuit et du type de BF, mono- ou bi- hormonale. Ces deux méta-analyses concluent à une augmentation 10 significative du temps passé dans la cible pour le groupe traité par insulinothérapie en boucle fermée. Concernant les critères de jugement secondaire, il a également été retrouvé une franche diminution du temps passé en hypoglycémie. Pour résumé, ces études de forte puissance sont venues confirmer les idées déjà présentes concernant la pertinence, la sécurité et l’efficacité de la boucle fermée en conditions de vie quasi réelle. C’est pourquoi les pompes à insuline, boucle ouverte et fermée, ont suscité toujours plus d’intérêt, que ce soit pour les patients ou pour les professionnels de santé. 

Arsenal thérapeutique actuel 

La communauté scientifique et médicale a donc compris l’intérêt thérapeutique de ces dispositifs. Les constructeurs se sont alors multipliés. Des investissements importants ont pu être débloqué afin de perfectionner au fur et à mesure des années ces pompes à insuline dites en boucle fermée. De nombreuses pompes à insuline boucle semi-fermée existent (Omnipod, Minimed 640G, Ypsopomp….). Il en existe uniquement trois dites en « boucle fermée » . Premièrement, nous pouvons citer le système Minimed 670G de MEDTRONIC qui se compose d’une pompe avec tubulure, d’un transmetteur, un capteur, un lecteur de glycémie et le logiciel web Carelink. Le capteur détecte le glucose interstitiel sous cutanée grâce à un cathéter millimétrique. Le capteur transmet les informations à la pompe grâce au transmetteur. Elle peut également recevoir les informations en mode manuelle par glycémie capillaire avec le lecteur glycémique associé afin d’effectuer les calibrations du capteur de glucose interstitiel. Sur l’écran de la pompe, on peut suivre en continue l’évolution du glucose interstitiel. Sa caractérisation en boucle fermée fait que l’algorithme permet une adaptation continuelle de l’insuline basale, par anticipation, ainsi qu’une aide de plus en plus précise au calcul des bolus d’insuline au moment des repas ou en cas de pic hyperglycémique isolé. Le bénéficiaire de la pompe n’intervient plus dans le calcul de ses doses d’insuline que ce soit la délivrance de l’insuline basale ou de l’insuline rapide. Il est sollicité pour valider et donc actionner la délivrance du bolus de l’insuline rapide mais le calcul de la dose est réalisé par l’algorithme. Une version actualisée de cette pompe est 11 désormais disponible, le système Minimed 780G permettant une utilisation toujours plus personnalisée. 

Table des matières

TITRE
I INTRODUCTION
A. HISTORIQUE DE LA BOUCLE FERMEE
B. INTERET METABOLIQUE DE CES DISPOSITIFS
C. ARSENAL THERAPEUTIQUE ACTUEL
D. CONTRAINTES
E. APPROCHE QUALITATIVE ET ETUDES DEJA REALISEES
F. OUTIL D’EVALUATION : LE QUESTIONNAIRE
G. LES DIFFERENTS QUESTIONNAIRES DISPONIBLES
II METHODOLOGIE
A. CARACTERISTIQUES DES PATIENTS
B. ENTRETIENS TELEPHONIQUES INITIAUX
III RESULTATS
A. IMPACT PSYCHOLOGIQUE
B. IMPACT PHYSIQUE
C. IMPACT SUR L’EQUILIBRE GLYCEMIQUE ET SES DETERMINANTS
D. RELATIONS SOCIALES
IV DISCUSSION
V CONCLUSION
VI BIBLIOGRAPHIE
ANNEXE 1 : TRAME QUESTIONNAIRE QUALITATIF EN VUE D’ELABORER LES ITEMS DE L’OUTIL DE MESURE
ANNEXE 2 : EXEMPLE D’ENTRETIEN TELEPHONIQUE ANALYSE

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