Historique et statut de la géothermie HFR à travers le monde

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Outils de calcul et travaux de modélisation quantitative antérieurs

En raison de la difficulté et des coûts expérimentaux impliqués par les programmes de recherche « in situ », dès que des forages profonds sont nécessaires, les programmes de recherche incluent très souvent l’outil de simulation numérique. Il reste vrai que l’analyse numérique des couplages thermo-hydro-méca-chimiques (THMC) est encore très coûteuse en temps et moyens de calculs, et que l’efficacité des codes existants est encore limitée à des problèmes simplifiés (Wang et al., 2009). Néanmoins on remarque que la plupart des efforts dans ce domaine d’EGS a porté sur la prise en compte plus ou moins explicite des fractures qui occupent les milieux rocheux. Ainsi, la modélisation de l’écoulement par des réseaux de fractures discrètes a été appliquée au système EGS depuis plus de 20 ans. Pour ce qui est de la simulation les couplages des processus hydrauliques mécaniques et thermiques lors de l’extraction de la chaleur dans le système de type HDR, Elsworth (1987) et Hopkirk et al. (1981) ont suggéré en faisant un couplage thermo-hydraulique que la contraction due à l’effet thermique est très importante sur le comportement du réservoir à long terme. Depuis, plusieurs modèles capables de faire des couplages hydrauliques, mécaniques, thermiques et chimiques ont été mis successivement au point. L’analyse des couplages THM est simulée par plusieurs codes, par exemple les codes FRACTure (Kohl et al., 1995), GEOTH3D (Yamamoto et al., 1997), FRACSIM-2D (Willis-Richards et al., 1996), FRACSIM-3D (Hossain, 2002), Geocrack2D (Swenson et Hardeman, 1997), HEX-S (Kohl et Megel, 2005), FRACAS (Bruel, 1995), GMRS (Yoshioka et al., 2008), OpenGeoSys (Wang et al., 2009), utilisé par Blöcher et al. (2010), 3DEC (Rachez et Gentier, 2010) et un modèle sans titre par Rahman et Rahman (2002). Plus récemment, des effets chimiques ont été inclus dans l’analyse couplée (Kuhn, 2004 ; Kiryukhin et al, 2004 ; Bachler et Kohl, 2005 ; Rutqvist, 2011 ; Kim et al., 2012).
Il existe aussi des codes de calculs commerciaux qui peuvent être appliqués à la modélisation des systèmes EGS. On constate alors que les couplages sont souvent effectués par des échanges entre plusieurs outils ou plateformes de calculs, l’un des outils pouvant être commercial. On peut mentionner les associations gOcad /FracaFlow (Sausse et al., 2008) et Petrel (Schlumberger) (Kovac et al., 2009), TOUGH-FLAC (Rutqvist, 2011). Ces couplages dits faibles qui reposent sur des échanges de champs calculés à diverses étapes de temps, donc séquentiellement, sont remis en question car ils ne parviennent pas à reproduire les observations sur des milieux aux géométries réalistes, et en particulier ne peuvent pas faire évoluer leur géométrie. C’est aussi cette raison qui justifie le nouveau programme de recherche du « Lawrence Livermore National Laboratory » (LLNL), soutenu par le « Departement of Energy » (DOE) aux Etats Unis (Carrigan et al., 2009) pour le développement de codes couplés intégrant rigoureusement les écoulements et la mécanique dans des fractures aléatoires au sein d’une matrice perméable, pouvant se propager et interagir entre elles. Fu et al. (2011) développent les progrès récents effectués en deux dimensions par cette équipe. La simulation des processus thermiques, mécaniques et hydrauliques nécessite donc des modèles plus réalistes afin d’étudier la science souterraine (dissolution des minéraux, refroidissement du réservoir, sismicité induite), d’où l’utilisation des modèles décrivant l’aspect géométrique selon une approche stochastique (Bruel, 1995b, 2002, 2007 ; Willis-Richards et al., 1996 ; Kolditz, 2001) pour le réservoir de Soultz. Des approches de type milieux poro-élastiques considérant trois phases, le squelette solide et deux types de pores échangeant masse et énergie, des pores classiques et des fractures remplies de fluide à des températures distinctes, ont également été proposées. L’application sur des données extraites des premiers projets HDR aux Etats-Unis et en Grande-Bretagne est fournie par Gelet et al. (2012) et les conclusions rapportent en particulier le rôle du paramètre d’espacement des fractures sur les contraintes de traction induites par les effets de baisse de la température au cours du temps.
Ce bref inventaire des différents modèles existant dans la littérature et visant à décrire les écoulements en milieu fracturé n’est pas exhaustif mais donne une idée de la variété des méthodes employées : elle est l’image de l’hétérogénéité du milieu. Comme on peut le constater, les explications fournies dans la littérature admettent qu’il existe une relation entre la contrainte thermique et la sismicité induite, mais peu des modèles sont capables de faire le couplage THM pour simuler ce mécanisme. Nous avons soit des modèles 2D qui illustrent ce principe, soit des modèles 3D mais avec une seule fracture ; ce qui limite la possibilité de confrontation avec la réalité du terrain.

Méthode de résolution pour les outils utilisés

Parmi les méthodes numériques utilisées, nous avons en particulier les techniques classiques suivantes :
 Méthode de différences finies (MDF) et Multiple Interacting Continua (MINC) qui est une méthode approximative permettant de modéliser le transport de fluide et de chaleur dans un milieu poreux fracturé, tout en gardant un formalisme de type différence finie pour la discrétisation des équations. Le concept de MINC a été développé par Pruess et Narisimhan (1982, 1985) dans le cadre du développement des outils de la famille TOUGH. La méthode MINC est une extension du concept de double porosité décrit précédemment. Les auteurs la justifient parce que l’approximation du milieu fracturé à un milieu poreux se révèle en général insuffisante pour le processus de transport dans les systèmes fracturés (Pruess, 1983). Elle est basée sur la notion que la fracture dispose d’une large perméabilité et d’une porosité faible, tandis que la matrice rocheuse dispose de propriétés opposées. Le principe des différences finies est également utilisé pour les résolutions des équations de conservation de la masse dans les réseaux de fractures dans l’approche FRACAS. Nous verrons les détails dans le chapitre 2.
 D’autres codes ont été mis au point selon la technique des Eléments Finis, par exemple ROKFLOW (Kolditz et al., 1997) FRACTURE (Khol et Megel, 2005). Pour ces codes les fractures sont discrétisées en fonctions continues, morceau par morceau, soit avec des fonctions à base linéaire pour des éléments triangulaires, soit avec des fonctions de base bi-linéaires ou bi-quadratiques sur les éléments quadratiques des problèmes à trois dimensions avec des fractures à deux dimensions (Kolditz et al., 1997).
 Dernièrement, la technique des particules discrètes est apparue dans le domaine de la géothermie EGS. Il s’agit de codes de calculs simulant un massif rocheux par un assemblage d’éléments (particules) ayant un ensemble de propriétés mécaniques, interagissant entre elles, et transmettant des forces, les liens entre particules pouvant même être brisés. L’intérêt est d’accéder à des propriétés macroscopiques à l’échelle d’un volume de réservoir à partir de propriétés locales (Potyondy and Cundall, 2004). Les applications initiales concernaient l’étude de la propagation d’une fracture isolée, mais les progrès numériques permettent de proposer l’étude de l’évolution de la perméabilité des structures fracturées de plus grande extension (Deng et al., 2011).
 Indépendamment des méthodes numériques spécifiques, le calcul des problèmes de couplage THM sont très coûteux. Ceci est principalement dû à deux raisons : le degré de liberté (c’est-à-dire le nombre de variables de champ) et un fort couplage entre les processus non linéaires. Il existe plusieurs façons d’améliorer l’efficacité du calcul, par exemple par l’utilisation d’algorithmes de maillages de l’espace, plus adaptés à la description des milieux fracturés (maillages non structurés), par des algorithmes numériques efficaces, par l’optimisation de la gestion de la mémoire dans le code, ou par les techniques de résolutions parallèles qui offrent la plus puissante amélioration.

Conclusion du chapitre 1

Comme nous avons pu le constater dans cette partie il existe plusieurs types de géothermie, mais il y en a une où l’injection de fluide froid est inévitable, la géothermie EGS. Cette injection de fluide sert la pressurisation et parfois la création des nouveaux chemins d’écoulement pour réapprovisionner le réservoir géothermique, ce qui permet donc l’exploitation et la valorisation future de la chaleur en électricité. L’injection de ce fluide dans le réservoir peut s’avérer très défavorable au succès d’un projet lorsque les magnitudes dues à la sismicité induite sont trop fortes. Pour anticiper sur le risque lié à la sismicité induite, différentes hypothèses ont été soulevées, mettant l’accent sur la quantité de débit d’injection, la présence de fractures proches d’un régime mécanique instable, les changements des propriétés chimiques des fluides mais aussi sur l’effet de refroidissement à long terme de la roche.
Pour mieux corréler ces mécanismes, il est donc nécessaire de faire des couplages (THMC), et donc de mettre en place des outils de calculs adéquats. Dans le chapitre suivant nous introduisons le code FRACAS, et le développement nécessaire pour faire le couplage (THM) pour étudier la sismicité induite due à la contrainte thermique.

Table des matières

Chapitre 1 – Introduction et présentation du sujet
Problématique
Plan de la thèse
Le contexte général
1.1 – La géothermie
1.2 Définitions
1.2.1 Place de la géothermie dans le monde
1.2.2 La géothermie à haute énergie
1.2.3 La géothermie à basse énergie
1.2.4 La géothermie à très basse énergie
1.2.5 Place de la géothermie en France
1.2.6 Les ressources géothermales françaises
1.2.7 La géothermie HFR (Hot Fractured Rock) et la production d’électricité
1.2.8 Petit lexique de la géothermie HFR
1.2.9 Historique et statut de la géothermie HFR à travers le monde
1.3 Modélisation des milieux fracturés
1.3.1 Milieu poreux équivalent
1.3.2 Double porosité
1.3.3 Approche « milieu discontinu »
1.4 Sismicité induite
1.4.1 Définition
1.4.2 Sismicité induite d’origine anthropique
1.4.3 Sismicité induite par injection de liquides
1.4.4 Couplage Thermo-Hydro-mécano-Chimique (THMC)
1.4.5 Effets d’une perturbation thermique
1.4.6 Mécanisme de la rupture le long d’une fracture
1.4.7 Loi de frottement de roches
1.4.8 Outils de calcul et travaux de modélisation quantitative antérieurs
1.4.9 Méthode de résolution pour les outils utilisés
1.5 Conclusion du chapitre 1
Chapitre 2 – Le code FRACAS
2.1 Le modèle géométrique des fractures
2.1.1 Les propriétés des familles de fractures en forme de disques
2.1.2 Le modèle hydrodynamique
2.1.3 Loi d’écoulement dans une fracture – Conductivité hydraulique intégrée
2.1.4 L’écoulement permanent dans un réseau de fractures
2.1.5 L’écoulement transitoire dans un réseau de fractures
2.1.6 Hydro-mécanique dans FRACAS
2.2 Le modèle de transport et d’échange de chaleur
2.2.1 Spécificités du modèle initial
2.2.2 Description de l’approche « double milieu discret » pour les transferts de chaleur
2.2.3 Calcul de la contrainte thermique
2.2.4 Mise à jour de la modélisation de la stimulation hydraulique et des processus de friction
2.3 Premiers tests de vérification du code actuel incluant les développements du module thermique
2.3.1 Vérification du module de calcul thermique sur une solution analytique en écoulement radial
2.3.2 Vérification du couplage thermo-hydraulique et de la prise en compte du comportement conductif à l’échelle globale
2.3.3 Application à un système multi-fractures: cas de plusieurs fractures d’extension finies parallèles
2.3.4 Application à un système de réseau aléatoire de fractures
2.3.5 Illustration du couplage thermo-hydro-mécanique
2.4 Conclusion du Chapitre 2
Chapitre 3 – Application de l’approche numérique à un site expérimental le réservoir EGS de Rosemanowes (UK). Analyse de l’effet de la contrainte induite par le refroidissement sur la stabilité mécanique des fractures
3.1 Introduction : présentation de la base de données utilisée
3.1.1 Présentation du site HDR de Rosemanowes
3.1.2 Bref historique du programme expérimental
3.1.3 Inventaire des données disponibles en vue d’une modélisation du site
3.1.4 Détails hydromécaniques sur l’essai de longue durée Août 1985 – Décembre 1988
3.2 Première approche numérique : un modèle à géométrie explicite, formé d’un assemblage de quelques grandes fractures
3.2.1 Géométrie retenue
3.2.2 Scénario et paramètres d’injection
3.2.3 Propriétés Mécaniques du massif rocheux et des fractures
3.2.4 Conditions aux limites hydrauliques
3.2.5 Principales différences entre le modèle actuel et celui de Kolditz et al. (1998)
3.2.6 Mise en oeuvre du modèle et résultats obtenus
3.2.7 Discussion sur le modèle simplifié de factures parallèles
3.3 Deuxième approche numérique: un modèle stochastique
3.3.1 Introduction : prise en compte de tests de stimulations antérieurs
3.3.2 Géométrie et paramétrisation du modèle stochastique
3.3.3 Résultats de la calibration sur la première étape de simulation : le test RT2046
3.3.4 Simulation de l’essai de longue circulation Phase 2B/2C
3.3.5 Discussion sur les résultats obtenus
3.3.6 Tests de sensibilité effectués pour guider les divers essais lors de la calibration des modèles
3.4 Conclusion sur l’application à un jeu de données historiques Conclusion et perspectives Bibliographie
Liste des Figures et des Tableaux
Annexe – Ebauche d’un modèle 3D du réservoir géothermique d’Asal
A1 Généralités
A1.1 Aspect géologique
A1.2 Aspect hydrogéologique
A1.3 Tectonique
A1.4 Sismiques
A1.5 Contraintes
A2 Champs géothermique d’Assal
A2.1 Forages
A3 Caractérisation du réseau de fractures observé à grande échelle
A3.1 Détermination d’une loi de longueur des fractures
A3.2 Distance inter-fracturale
A3.3 Densité des fractures
A3.4 Echelle du site d’étude et hypothèses
A4 Description du modèle conceptuel proposé pour une future étude du site d’Assal
A4.1 Géométrie
A4.2 Ecoulement général et conditions aux limites du bloc
A4.3 Travaux à effectuer
Liste des figures et Tableau de l’Annexe

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