Influence des propriétés physiques des granulats sur la zone d’interphase

Influence des propriétés physiques des granulats sur la zone d’interphase

Comme on l’a présenté dans la partie précédente, la formation de la zone d’interphase est contrôlée par l’effet de paroi et les échanges d’eau entre les granulats et la pâte de ciment. C’est pourquoi il est nécessaire d’étudier les influences des propriétés physiques des granulats comme leurs capacités d’absorption d’eau et leurs porosités en termes de volume poreux et distributions poreuses sur la formation de la zone d’interphase. Les matériaux utilisés et leurs états de saturation en eau sont très variables selon les auteurs. Certains utilisent des granulats naturels de faible porosité et de faible coefficient d’absorption d’eau. D’autres s’intéressent particulièrement aux granulats artificiels poreux qui possèdent des capacités d’absorption d’eau très importantes. Les granulats sont souvent utilisés à l’état humide (l’état humide-surface sèche, l’état humide-surface mouillée) et mis en comparaison avec le cas des granulats à l’état sec. Influence des propriétés physiques des granulats sur la zone d’interphase .

Granulats naturels peu poreux

Cortas et al. (2010) ont étudié l’effet de la teneur en eau des granulats naturels sur le comportement du béton. Le béton de rapport Eeff/C visé de 0,45 est formulé à partir de granulats silico-calcaires dont le coefficient d’absorption d’eau à 24 heures est de 2,4%. Leurs teneurs en eau par rapport à la masse à l’état saturé-surface sèche sont très élevées (de 1,61 à 9,42%). Leurs résultats montrent une diminution importante de la résistance en traction et en compression en remplaçant les granulats secs par les granulats humidessurfaces mouillées en raison d’une zone d’interphase plus poreuse (Figure I.22). Figure I.22. Résistance en compression et en traction du béton de granulats à l’état sec et humide-surface mouillée (Cortas et al. 2010) L’écart de la résistance en compression à 28 jours est de l’ordre de 20 MPa. Le comportement est similaire pour la résistance en traction avec un écart de 25% à 28 jours. L’auteur suppose que l’auréole de transition est moins développée dans le béton de granulats secs ce qui explique cet écart significatif et que la liaison pâte – granulats joue un rôle très important au niveau du comportement mécanique des deux bétons. Des observations au MEB ont été réalisées et montrent que la liaison pâte-granulats est différente dans les deux bétons. En effet, dans le cas des granulats humides-surfaces mouillées, le rapport E/C local à l’interphase est très élevé et il existe autour des granulats, une zone plus poreuse de couleur sombre sur les images au MEB (Figure I.23). La liaison pâte-granulats dans ce cas est donc plus faible, et le phénomène d’auréole de transition est assez marqué autour des granulats. L’auteur a montré aussi des zones denses qui sont remplies par des produits d’hydratation (couleur grise) au voisinage des granulats. Cependant, ces produits n’ont pas été identifiés.  Figure I.23. Image au MEB du béton de granulats humides-surfaces mouillées (Cortas et al. 2010) Dans le béton avec granulats secs, la liaison pâte-granulats est de bonne qualité, avec moins de zones poreuses aux abords des granulats. Ces observations confirment les résultats de résistance en traction et en compression obtenus, et permettent d’interpréter l’écart de la résistance par la qualité de la liaison pâte-granulats. Il faut remarquer que dans cette étude la teneur en eau du sable à l’état humide est largement supérieure à son coefficient d’absorption d’eau ce qui peut créer des incertitudes sur les mélanges. En accord avec Cortas et al. (2010), Hemavibool (2007) a trouvé une zone d’interphase très poreuse en utilisant des granulats naturels à l’état humide-surface mouillée. Ce sont des granulats de quartzite de très faible coefficient d’absorption d’eau (WA24 = 0,8%). Ils sont immergés dans l’eau pendant 24 heures puis séchés avec une serviette jusqu’à ce qu’ils atteignent l’état saturé-surface sèche. Toutefois, le granulat de quartzite possède une forme angulaire, il est donc très difficile de contrôler l’état d’humidité de chaque particule. C’est pourquoi, un film d’eau accumulé autour des granulats de quartzite est inévitable. L’existence de ce film d’eau engendre une augmentation du rapport E/C au voisinage des granulats. Le phénomène d’accumulation d’eau autour des granulats naturels de faible porosité a été également observé par Amir Elsharief et al. (2005). L’auteur a considéré que, lorsque les granulats sont mélangés avec du ciment et de l’eau, l’eau a tendance à s’accumuler autour les granulats. La quantité d’eau de ressuage est plus élevée sur la surface du granulat et diminue progressivement en s’éloignant de la surface du granulat. Dans le cas des granulats de faible capacité d’absorption d’eau, ce film d’eau ne peut pas être enlevé.

Granulats artificiels poreux

Dans l’étude de Amir Elsharief et al. (2005), un schiste expansé de 150 à 300 µm est utilisé comme un granulat léger poreux. Deux séries de mortier sont préparées avec le granulat léger, l’une à l’état sec, l’autre à l’état humide. Ce dernier est pré-mouillé avec de l’eau de gâchage pendant 24 heures avant le malaxage. Pour le mortier de granulat léger sec, la quantité d’eau absorbée par le granulat est calculée en se basant sur son coefficient d’absorption à 15 heures de 7% (Norme ASTM C 128). Cette quantité d’eau est ajoutée à l’eau du gâchage pour un rapport Eeff/C de 0,55. La microstructure de la zone d’interphase du mortier de ces granulats est comparée à celle des granulats naturels de base de granite et de quartzite. Les résultats de Amir Elsharief et al. (2005) indiquent que le mortier de granulats légers à l’état sec a une interphase moins poreuse que celle de granulats légers à l’état humide et que celle de granulats naturels secs bien que l’auteur est cherché à viser une même qualité de pâte à travers un rapport Eeff/C visé censé être équivalent (Figure I.24). Ce phénomène est attribué selon l’auteur à la capacité d’absorption des granulats. Lors du malaxage, l’eau a tendance à s’accumuler autour des granulats et elle est absorbée par les granulats ainsi l’eau de ressuage autour des granulats poreux secs est moins importante. Le mouvement de l’eau à l’intérieur du granulat se poursuit jusqu’à ce que le granulat soit totalement saturé. Ce processus conduit à une réduction du rapport E/C local à proximité de l’interface. Le granulat léger à l’état sec possède une capacité d’absorption plus élevée que celui à l’état humide et que le granulat normal. Tout se passe comme si les granulats légers secs et partiellement saturés absorbaient plus d’eau que l’eau absorbée prise en compte pour le calcul de l’eau efficace.  Figure I.24. Porosité dans la zone d’interphase des mortiers avec Eeff/C=0,55 à 7 jours (Amir Elsharief et al. 2005) Cependant, malgré l’absorption d’eau des granulats à proximité de l’interface, la porosité de ces trois mortiers est plus élevée que celle de la pâte de ciment dans la première zone de 10 µm traduisant ainsi l’effet de paroi. À une distance comprise entre 10 et 40 µm de la surface des granulats, le mortier de granulats légers secs est plus dense que le mortier de granulats normaux. Sa porosité est même plus faible que celle de la pâte de ciment pure. Une autre étude d’Hemavibool (2007) a montré qu’un granulat poreux à l’état sec présente une meilleure liaison avec la pâte par rapport au granulat à l’état humide. L’auteur a utilisé des granulats artificiels à phases silico-alumineuses dont le coefficient d’absorption d’eau à 24 heures est de 5,74%. Une série de béton est préparée avec des granulats secs. La quantité d’eau ajoutée pour le granulat sec correspond à son absorption d’eau pendant une demiheure. L’auteur a trouvé que plus de 70% de l’absorption d’eau à 24 heures est absorbée pendant les 30 premières minutes. La deuxième série est préparée avec des granulats à l’état humide – surface sèche. Ces granulats sont immergés dans l’eau pendant 24 heures avant le malaxage. Les résultats d’Hemavibool (2007) montrent clairement que, quelle que soit l’échéance, le béton de granulats secs présente une zone d’interphase plus compacte par rapport à celui à l’état humide –surface sèche. L’auteur a constaté que l’absorption d’eau par des granulats légers poreux peut conduire à une réduction de la porosité de la zone d’interphase. 

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