Anesthésie des coronariens pour une chirurgie non cardiaque

Matériel d’étude

C’est une étude de cas clinique observé à la Clinique et Maternité d’Anosibe en juin 2008 chez un patient coronarien angioplasté en 2004, sous ASPIRINE ® et TENORMINE ® opéré pour une prothèse totale de la hanche.

Observation médicale et consultation pré-anesthésie

Il s’agit d’un homme de 78ans admis le 28 juin 2008 pour une douleur coxofémorale droite avec raccourcissement du membre inférieur droit. Il est programmé pour une mise en place d’une prothèse totale de la hanche le 29 juin 2008.

Il a comme antécédents médicaux 

– deux infarctus de myocarde en 1990 et en 2004 avec deux angioplasties de reperméabilisation (sans stent), stables sous ASPEGIC ® 125mg par jour.
– une hypertension artérielle traitée sous TENOR MINE ® 80mg ½ comprimé le soir.

Commentaires discussions et suggestions

Commentaires discussions

Pour la préparation préopératoire

Dans notre cas clinique, la consultation préanesthésique est faite quatre semaines avant la date de l’intervention pour évaluer le risque de l’intervention et le risque de l’anesthésie sur un terrain âgé, coronarien stable angioplasté moins de cinq ans et sous aspirine ®125 mg, ß bloquant et IEC.
La prothèse de la hanche est une chirurgie orthopédique majeure avec risque hémor ragique et thromboembolique important. Ce qui suppose une évaluation du rapport benefice-risque avant d’inter rompre l’antiagrégant plaquettaire pour les coronariens. Notre patient a cessé de prendre de l’Aspirine ® dix jours avant l’intervention. Le Lovenox ® a été prescrite comme relais à la dose préventive de 40mg par jour. Senard M (21), SFAR 2001.
L’Aspirine ® est un antiagrégant plaquettaire agissant de façonir réversible sur le cyclooxygenase qui est un enzyme indispensable à lasynthèse de la thromboxane A2, agent agrégant plaquettaire et vasoconstricteur. L’ar rêt plus de 10 jours d’Aspirine ® permet d’avoir 100% de plaquettes ad integrum car la durée de vie des plaquettes est de 8 à 10 jours.
Le Lovenox® est un anticoagulant qui agit comme anti-Xa pour empêcher la formation de thrombose. Son action s’éteint avec sa durée d’élimination donc permet une chirurgie après 24 heures de son ar rêt. Les héparines de bas poids moléculaire majorent le saignement periopératoire par thrombopénie si elles sont utilisées plus de dix jours.
L’arrêt d’antiagrégant plaquettaire doit tenir compte du risque thrombotique et du risque hémor ragique périopératoire si on continue. Une étude faite sur 17444 patients sous Aspirine 160 mg par jour (seule) pour prévention de maladie thromboembolique montre que la poursuite de Aspirine n’augmente pas le taux de morbidité, ni le taux de mortalité. Elle majore cependant l’incidence d’hémorragie digestive et le besoin de transfusion.L’association avec héparine de bas poids moléculaire augmente le risque d’hémor ragie. Avec le Clopidogrel le risque hémor ragique est certain en périopératoire avec 50% de complication hémor ragique sévère. Actuellement, dans les dernières recommandations de SFAR, on n’ar rête la prise d’Aspirine ® que la veille de l’intervention. Le Lovenox ® prend un relais si l’Aspirine ® est associé au Clopidogrel ® ; la prise de ce dernier est inter rompue cinq à six jours avant l’intervention.
La période periopératoire constitue une période à haut risque de thrombose artérielle. La décision sera prise au cas par cas pour la poursuite des antiagrégants plaquettaires Samana et al ont montré qu’après une chirurgie majeure, il y a une hypercoagulabilité plaquettaire, une hypofibrinogenemie, et une diminution de la fib rinolyse, soit un risque élevé d’accident thromboembolique
– l’ar rêt temporaire de courte durée d’antiagrégant plaquettaire chez les patients coronariens à risque modéré ne présente pas de risq ue thrombotique.
– pour les coronariens stables, l’ar rêt de l’antiagrégant plaquettaire motivé par un acte médical ou chirurgical programmé est associé à un risque d’événement thrombotique.
– pour l’ASPIRINE ® , son ar rêt de courte durée associe à une faible risque thrombotique et sa poursuite dans le cas de stent associe un risque intermédiaire d’hémor r agie.
La reprise précoce des antiplaquettaires en postopé ratoire est idéal pour prévenir l’événement cardiovasculaire ; en tenant compte du risque hémor ragique de la chirurgie et de la période postopératoire (drain). Olivier BASTIEN et al (23) Albaladejo et al (24), L’inter ruption de l’Aspirine ® est justifiée seulement quand le risque hémor ragiq ue est nettement supérieur au risque cardiovasculaire. Il faut tenir compte de la technique chirurgicale et anesthésique du contrôle de l’hémostase et du risque cardio-vasculaire spécifique.
Cette inter ruption doit tenir compte du mode d’action et de la durée d’action très différente des antiagrégants plaquettaires. Sa reprise post-opératoire précoce (dés 6 ème heure) réduit les risques cardio-vasculaires. Actuellement, aucun traitement substitutif n’a été validé de façon prospective. Mais dans la pratique, on fait le relais avec la Flurbiprofène : Cebutid ® (1cp de 50mg deux fois par jour qui possède un AMM comme AAP dans la maladie coronaire ou avec héparine de bas poids moléculaire administrée en deux injections par jour à dose curative. Cette substitu tion doit être ar rêtée 24 heures avant l’intervention.
La prévention de l’hémor ragie peri-opératoire chez un patient sous AAP consiste à :
– choisir la meilleure voie d’abord chirurgicale avecmaîtrise de l’hémostase
– assurer une hypotension contrôlée pendant l’intervention
– maintenir une normothermie
– limiter l’hémodilution avec maintien d’une hématocr ite au environ de 30 % (viscosité sanguine permettant une hémostase biologique et un transport maximal d’oxygène)
– proscrire les corticoïdes et les AINS pour ne pas majorer le saignement
– éviter la transfusion de plaquette à titre préventif
La poursuite periopératoire du ß bloquant surtout de l’Atenolol et de Metoprolol est conseillée chez les coronariens pour son effet modulateur de l’hyperactivité sympathique (générateur de tachycardie). Le ß bloqu ant est à poursuivre pendant et en postopératoire pour réduire l’incidence des poussées tensionnelles, des troubles du rythmes (en particulier l’arythmie vent riculaire), et de l’infarctus du myocarde (qui est divisée en 6). Pour l’Aténolol le taux de mortalité est réduit de 0 à 8% à six mois, de 3% à un an, de 10% à deux ans.
– Pour l’inhibiteur d’enzyme de conversion la litté rature prévoit son ar rêt 24 à 48heures avant l’intervention car il majore l’hypotension de l’induction. Mais certains auteurs vont au delà de cette prescription si l’hypertension est stable et qu’il y a une indication bien précise. Le Captopril est prescrit jusqu’au jour de l’intervention dans notre étude car on a prévu une induction avec l’ Etomidat qui n’entraîne pas de modification hémodynamique et permet de garder une stabilité tensionnelle préopératoire. Le bilan préopératoire montre une bonne crase sanguine avec hématocrite à 40% considérant que la PTH est une chirurgie à risque élevé d’hémor r agie, c’est mieux de prévoir des poches de sang pour entamer la transfusion quand le saignement peropératoire n’est plus jugulé par l’hémostase, car l’hypoxie par manque d’hémoglobine peut générer une ischémie pournotre patient.
Dans les pays plus avancés, la transfusion est indiquée lors de la consultation pré-anesthésique après évaluation du saignement, de la perte sanguine autorisée (PSA), de la numération formule sanguine immédiat et du rendement de la transfusion. L’autotransfusion estpréférentiellement choisie.
Le seuil transfusionnel est fixé à 30% d’hématocrite pour un sujet âgé PSA (ml) = volémie (hématocrite initial – hématoc rite seuil) Volémie = (60 à 65 ml x poids).

Conduite anesthésique

Pour l’anesthésie d’une chirurgie non cardiaque d’un coronarien il faut informer le patient sur le risque opératoire.
La prothèse de la hanche est une chirurgie qu’on peut faire sous anesthésie générale ou sous anesthésie locorégionale (rachianesthésie et ou péridurale). Le choix est fonction du traitement et de la stabilitéde la coronaropathie, de la durée de l’intervention. Mais aucune étude n’a démontré la supériorité de l’une par rapport à l’autre.
Pour l’anesthésie générale d’un coronarien en chiru rgie non cardiaque :
– L’intérêt de l’Halothane® réside sur la dépression de l’inotropisme cardiaque et l’effet sympathoplégie qu’il induit. Cet effet est valable pour les autr es agents anesthésiques volatiles. A l’exception de la Sevoflurane ® , sa limite réside sur la bradycardie qui est réversible dès qu’on diminue lafraction inhalée. Dans les pays développés, on utilise la Sévoflurane ® pour ses moindres variations hémodynamiques et sa demi vie d’élimination rapide
– La Pancuronium ® n’est pas le curare de choix car il est tachycardisant et peut entraîner l’infarctus du myocarde chez le coronarien. Actuellement, on conseille le Vécuronium ®
– Il faut prendre en considération chez le coronarienque le propofol induit une hypotension plus marquée dans les 15 minutes après l’induction par son action vasoplégique et une tachycardie réflexe à cette hypovolémie relative. Et il faut s’abstenir des vasopresseurs qui accentuent la tach ycardie et la vasoconstriction coronarienne.
– Le choix des produits se base sur le maintien de la stabilité hémodynamique (surtout diastolique) et d’éviter la tachycardie. L’Etomidate ® est un hypnotique de choix pour l’induction. Mais l’Etomidate ® pour l’entretien risque d’entraîner une insuffisance sur rénalienne aigue.
– L’association du Midazolam ® potentialise l’effet du Fentanyl ® (il faut réduire sa dose), et vue son effet curare-like il convient également de diminuer la posologie du Pancuronium ® pour une bonne myorelaxation.
– Actuellement le monitorage avec le cathéter artériel pulmonaire permet de détecter précocement les variations tensionnelles. Il a son intérêt chez les coronariens subissant une intervention longue et hémor ragique comme la prothèse de la hanche. Mais vue son caractère invasif il est actuellement moins prescris. Et l’échographie transoesophagienne a son indication en peropératoire pour détecter la dégradation segmentaire de la contractilité myocardique.
– Il faut assurer un réchauffement progressif pendant l’opération pour minimiser les contraintes hémodynamiques lié à l’hypothermie (vasoconstriction et augmentation demande en oxygène

Antibioprophylaxie pour la prothèse totale de la hanche C.Martin (25), Mapar 2004

Dans la classification d’Altemeier, la classe 1 englobe les chirurgies propres et ne nécessite pas d’antibioprophylaxie sauf pour la chirurgie cardiaque et la chirurgie orthopédique avec prothèse .Ainsi l’antibiotique sera fonction des indicateurs.
Le score de NNISS (National Nosocomial Infection Surveillance System) est un indicateur de risque infectieux.
Les situations à risque nécessitant une antibioprophylaxie à large spectre sont :
– une hospitalisation et un alitement préopératoire de plus de 48 heures
– une épidémie locale à germe multiresistant
– un antécédent d’infection à germe multiresistant
– une antibiothérapie au long cours
– une immunodépression, un transplanté, un diabétique
– une réintervention en moins d’un an
L’antibiotique idéal est actif sur les germes contaminants potentiellement dangereux, à diffusion tissulaire avec concentration efficace au tissu cible, ayant une demi-vie longue permettant de maintenir des taux d’antibiotique efficace jusqu’à la fermeture, à toxicité faible, pas d’inte rférant aux produits anesthésiques, et ayant un coût abordable .
Pour les prothèses articulaires, le groupe d’expert recommande une antibioprophylaxie de 48 heures à visée efficace su r les staphylocoques et les streptocoques.
Pour notre patient, classe 1 Altemeier, score de NNISS 0, ayant bénéficie une prothèse articulaire, l’antibiothérapie devrait être seulement prophylactique. Mais vu le coût de la prothèse totale de la hanche et les difficultés de la reprise d’une prothèse totale de la hanche pour une surinfection et sur ce ter rain coronarien une attitude d’antibiothérapie curative est néanmoins entamée pour minimiser l’échec.

Prise en charge de la douleur

Pour notre patient, c’est mieux d’opter pour les blocs plexiques et paracétamol que la morphine vu son effet dépresseur respiratoire, qui peut être majoré en postopératoire par l’effet résiduel des produits d’anesthésie générale. Mais il faut être vigilant car le Bupivacaine® a une toxicité ca rdiaque élevée. La prothèse totale de la hanche est une chirurgie douloureuse et la morphine en PCA et l’APD lombaire sont aussi indiquées

Prise en charge postopératoire immédiate

Vu que le patient est coronarien et âgé, la transfusion est primordiale pour assurer un hématocrite plus de 30 % et pour avoir dans l’immédiat plus d’hémoglobines pour le transport d’oxygène. Puis ultérieurement, stimuler l’hématopoïèse par l’apport de fer et de vitamine B12.
Dans notre cas clinique c’était mieux de commencer la transfusion dès la phase peropératoire et diminuer l’apport de cristalloïde.
La hantise de la période postopératoire d’un corona rien est la survenue d’une ischémie myocardique, avec une incidence maximale entre deuxième et septième jour postopératoire.
Devant la douleur thoracique de notre patient au deuxième jour postopératoire, le dosage de Troponine I devrait être demandé pour éliminer une ischémie avant d’entamer la kinésithérapie. Le dérivé conseillé actuellement est le DILTIAZEM pour limiter l’évolution vers l’infarctus. L’extubation à la quatrième heure diminue la stimulation sympathique induite par la présence de la sonde mais aggrave l’hypoxie surtout si patient est âgé, non decurarisé et non demorphinisé complètement. Une sédation avec aide ventilatoire jusqu’à élimination des produits anesthésiques semble efficace pour assurer une normoxie

SUGGESTION 

Nous suggérons à travers cette étude de dossier qu’on peut indiquer une anesthésie locorégionale pour ce cas clinique. D’abord voyons la littérature concernant les particularités du sujet âgé puis l’anesthésie locorégionale et les antiagrégants pla quettaires
On parle de sujet âgé pour les patients plus de 65ans. On note une forte corrélation entre l’accident anesthésique cardiorespiratoire, l’age, la classe ASA du patient.

Les particularités respiratoires du sujet âgé

Le nombre des alvéoles mal ventilées et non ventilées augmente avec l’âge et ceci varie aussi en fonction de la position du patient. En décubitus latéral le poumon supérieur est mieux ventilé que l’autre. PaO2 théorique= 100 – 0,3 (âge en année)
La ventilation et l’intubation pour le contr ôle des voies aériennes supérieures peuvent être difficile à cause de la fréquence d’ar throse cervicale ou temporomandibulaire et de l’édentation chez cette population.
La sensibilité laryngée, les réflexes laryngés et la clairance mucociliaire sont diminués chez les sujets âgés ; ce qui explique l’apparition des pneumopathies d’inhalation qui est la cause la plus fréquente de mortalité postopératoire. Celle ci est encore majorée par la diminution de la défense immunitaire (diminution de lymphocyte B).
En postopératoire, le sujet âgé se comporte comme un patient ayant un syndrome restrictif avec une capacité résiduelle fonctionnelle (CRF) diminuée et une résistance bronchique élevée. Ces complications peuvent s’améliorer avec :
• une oxygénothérapie avec une FiO2 = 1 sur masque facial à haute concentration
• un monitorage respiratoire (capnographie, oxymétriede pouls)
• une kinésithérapie respiratoire précoce
• une reprise de boisson seulement après test de déglutition positif

Les particularités cardiovasculaires

La fonction cardiovasculaire du sujet âgé est caractérisée par le vieillissement du cœur et l’incidence élevée des maladies cardiovasculaires.
Le vieillissement du cœur est marqué par :
a) la réduction de l’élasticité artérielle et la diminution du nombre de myocytes à l’origine de
– une hypertrophie ventriculaire gauche même en absence d’hypertension artérielle
– une diminution de la compliance ventriculaire
– une importante contraction auriculaire pendant le remplissage du ventricule gauche diminuant ainsi la tolérance du sujet âgé à la tachycardie
b) l’hyporéactivité au agoniste β-adrénergique à l’origine de la diminution des réponses aux catécholamines
c) l’altération de l’automaticité du tissus nodal source de la baisse de la fréquence cardiaque et de la réserve chromotrope.
Les maladies cardiovasculaires associées représentent un facteur de risque important. Les incidents anesthésiques type hypotension artérielle seront une source d’accident avec des séquelles grave comme d’ischémie coronarienne ou cérébrale.
Et éviter les vasodilatateurs qui majorent la diminution de la compliance artérielle existante

Les particularités de la fonction cérébrale

Chez les sujets âgés, la dégénérescence axonale des nerfs périphériques, la dépression des neurotransmetteurs (Alzheimer et Par kinson) et l’attrition sélective des neurones corticaux devraient être prise en compte.
La désorientation postopératoire est fréquente quelque soit le type d’anesthésie, et avec un pic au milieu de la première semaine. Elle est favorisée par des épisodes d’hypoxémie et des troubles du sommeil. Cette confusion est à l’origine de dénutrition et d’escar r e. Un soutien de l’entourage plus rapproché sera un atout pour sa réinsertion sociale.

Table des matières

INTRODUCTION
1. RAPPELS page 
1.1 Le coronarien
1.1.1 Le syndrome coronarien
1.1.2 Anesthésie des coronariens pour une chirurgie non cardiaque
1.2 Hémostase et anticoagulants
1.2.1 Hémostase
1.2.2 Anticoagulants
1.3 La prothèse totale de la hanche
1.3.1 La chirurgie de la prothèse totale de la hanche
1.3.2 La configuration de l’implant
1.3.3 L’anesthésie d’une prothèse totale de la hanche
2. NOTRE TRAVAIL 
2.1 Matériels d’étude
2.2 Observation médicale
2.3 Conclusion après consultation préanesthésique
2.4 Déroulement de l’intervention
2.5 Surveillance en salle de soins post-interventionnelle
2.6 Suites postopératoires
3. DISCUSSIONS ET SUGGESTION 
3.1 Discussions
3.2 Suggestion
4. CONCLUSION 
BIBLIOGRAPHIE

projet fin d'etude

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *