La simulation dans le domaine de la santé

 LA SIMULATION

 La simulation est utilisée en pédagogie depuis de très nombreuses années et touche tous les domaines, notamment dans des domaines où les activités sont dites à risque, afin d’améliorer la sécurité tout en limitant le coût. La simulation se prête bien au contexte économique et matériel puisque l’utilisation de moyens technologiques permet de reproduire des incidents graves, des lieux spécifiques…tout en limitant les dépenses et les risques pour l’homme. Selon le Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales (CNRTL), la simulation est définie ainsi : « Au niveau technologique, la simulation est la reproduction artificielle du fonctionnement d’un appareil, d’une machine, d’un système, d’un phénomène, à l’aide d’une maquette ou d’un programme informatique, à des fins d’études, de démonstration ou d’explication.

Au niveau des sciences humaines, la simulation est une technique permettant de produire de manière explicite (en général formalisée) un processus quelconque. » Une des classifications que l’on retrouve dans la littérature sur la simulation est la distinction entre la notion de simulation de l’activité (souvent retrouvée sous la catégorie de basse-fidélité) et la simulation de pleine activité où la reproduction d’une situation professionnelle dans sa globalité avec la dimension technique, gestuelle, procédurale, diagnostique, communicationnelle et coopérative est introduite (là aussi nous retrouvons souvent la catégorie de haute-fidélité).

La simulation est utilisée dans de nombreux domaines et notamment dans l’industrie, les transports ou la défense. Les premiers simulateurs de vol sont apparus au début du XXe siècle, et c’est dans le domaine de l’aéronautique que leur utilisation est la plus développée pour la formation initiale ainsi que pour la certification des pilotes et des aiguilleurs du ciel (Arrêté du 27 juillet 2006 modifiant différents arrêtés relatifs aux membres d’équipage de conduite d’avions, s. d.). Pour les pilotes, les simulateurs de vol peuvent prendre différentes formes, soit la forme de jeu électronique (Lepinard & Martin, 2015), soit un simulateur informatique d’apprentissage LA SIMULATION 62 (Yongliang, Hu, Jiao, Mingqiang, & Guanghui, 2015), soit un simulateur simple (par exemple, la reproduction d’un cockpit), soit d’un simulateur de pleine échelle, soit des jeux de rôles pour travailler dans la gestion des conflits d’équipages.

L’agence européenne de la sécurité aérienne a décrit dans un rapport de 2012, les spécifications de certification pour les dispositifs de formation simulant le vol d’avion (European Aviation Safety Agency, 2012). Pour les aiguilleurs du ciel, la simulation est utilisée dans un module d’enseignement obligatoire, « situations habituelles et dégradées », d’une journée et demie, à renouveler tous les trois ans. Dans les années 1980, la simulation a été introduite pour l’entrainement à l’utilisation du radar dans le domaine des transports maritimes. Ces simulateurs d’actes techniques se sont peu à peu transformés vers des simulateurs de pleine échelle, prenant en compte la dimension humaine. Ce passage à la simulation fait partie intégrante de la validation de savoir-faire dans la formation professionnelle maritime (Arrêté du 30 juin 1999 relatif à l’utilisation des simulateurs dans les formations conduisant à la délivrance de titres de formation professionnelle maritime).

Dans le domaine de l’industrie nucléaire, où la sécurité et la sureté sont des impératifs incontournables, et où la formation, mais aussi le maintien du savoir-faire et l’actualisation deviennent essentielles, la simulation prend une place importante. On retrouve dans ce domaine, soit des simulateurs partiels avec seulement des parties de la salle de commande, soit des simulateurs « pleine échelle » où la totalité de la salle de commande a été reproduite. Et enfin, le dernier domaine où la simulation est devenue l’outil privilégié, c’est le domaine de la défense pour l’entrainement des forces militaires. Les premiers simulateurs apparaissent vers la fin des années 1950, mais depuis les années 1990, ils sont en plein essor. Le ministère de la Défense justifie cette utilisation par « la complexité du combat interarmées moderne, la diversité des missions à exécuter dans des dispositifs toujours différents et la variété des lieux, dont autant de conditions nouvelles. Comme il est peu envisageable de mener des exercices réels sur tous les théâtres extérieurs pour en appréhender les caractéristiques et tester tous les paramètres opérationnels pour en optimiser l’efficacité, le recours à la simulation est incontournable pour parcourir un spectre de scénario le plus vaste possible. » (Centre des hautes études de l’armement (Chear, 2009, p.112).

La simulation dans le domaine de la santé

C’est dans le domaine de la santé que nous retrouvons le plus large panel d’outils de simulation. La définition de la simulation dans la formation des professionnels de santé est la suivante : « le terme de simulation en santé correspond à l’utilisation d’un matériel (comme un mannequin ou un simulateur procédural), de la réalité virtuelle ou d’un patient standardisé pour reproduire des situations ou des environnements de soin, dans le but d’enseigner des procédures diagnostiques et thérapeutiques et de répéter des processus, des concepts médicaux ou des prises de décision par un professionnel de santé ou une équipe de professionnels. » (Granry & Moll, 2012, p.7). « La simulation est souvent décrite comme un moyen d’apprendre sans mettre en danger le patient. Elle donne une place à l’erreur comme faisant partie du processus d’apprentissage. Elle offre un espace de travail différent du temps de stage, avec la possibilité de profiter de la réflexion du groupe, de mettre en lumière des gestes erronés, de s’attarder sur le questionnement dans une situation protégée. » (Darris & Quebre, 2016, p.8). L’évolution des mannequins de simulation au cours du temps est assez spectaculaire et s’appuie sur les progrès technologiques pour évoluer.

En France, Angélique-Marguerite Du Coudray (1741-1789), sage-femme, inventa le premier mannequin de simulation, pour l’apprentissage de l’obstétrique aux matrones. Elle construit en 1778, une « machine », un mannequin d’enseignement pour l’art de l’accouchement sur lequel les élèves s’exerçaient durant deux mois. Ce mannequin, de taille réelle, se compose de la partie basse du corps féminin, d’une poupée de la taille d’un nouveau-né, ainsi que de différents accessoires (anatomie de femme, fœtus de sept mois, des jumeaux…). Derrière ce mannequin, rembourré de coton, recouvert de tissu teinté en rose, se cache un véritable bassin osseux humain de femme. Et c’est par un ingénieux système de ficelles et de lanières à manipuler au travers des divers orifices que ce mannequin pouvait simuler la dynamique de l’accouchement avec notamment le processus de dilatation du périnée et du vagin.

La simulation en sciences infirmières

Dans le domaine des sciences infirmières, la simulation prend un essor important depuis presque 10 ans, en raison du développement des dispositifs « haute-fidélité ». L’apprentissage par la simulation permet de mettre en œuvre les compétences acquises dans un environnement qui accorde le droit à l’erreur et donc facilitera la prise de confiance de l’étudiant, mais aussi le développement de ses compétences et de son raisonnement clinique. Cet apprentissage par la simulation développera également les habiletés techniques, le leadership, le travail d’équipe, la communication interdisciplinaire, l’appel à l’aide, la prise de décision, l’utilisation de supports cognitifs, la prévention des biais cognitifs, la gestion des risques ainsi que l’assurance et les connaissances théoriques en lien avec la situation.

(Truchot-Cardot, 2011,p. 57-65). Depuis 2002, un modèle théorique nommé NESF (Nursing Education Simulation Framework) a été élaboré afin de guider le développement pédagogique de la simulation dans le domaine des soins infirmiers (Delmas & Saint-Pierre, 2013, p.43). L’enseignant devient un facilitateur et un guide dans l’apprentissage des soins infirmiers. Pour cela l’enseignant devra créer un environnement d’apprentissage qui soit le plus favorable possible à l’étudiant. L’auteur de ces travaux propose donc cinq postures nécessaires dans la simulation selon les acteurs impliqués. 71 La première posture, l’enseignant, détenteur du savoir, devient l’accompagnateur, le soutien et le facilitateur de l’étudiant. Cette expertise du formateur face à ce savoir à transmettre est aussi un facteur dans l’utilisation et la réussite de la séance de simulation. La deuxième posture concernant l’étudiant.

Celui-ci doit connaitre les attendus de la séance de simulation, les règles de fonctionnement et son droit à l’erreur au cours de celle-ci. Il sera aussi important de prendre en compte le niveau de formation de l’étudiant au moment de la simulation afin d’élaborer un scénario en phase avec le niveau de compétences atteint par les étudiants et au plus près de situations réelles du terrain professionnel. Le troisième postulat concerne les pratiques éducatives. Cette dimension reprend les éléments essentiels de la pratique de la simulation, à savoir un apprentissage actif et immersif, une rétroaction afin de favoriser l’acquisition de compétences et de pouvoir les transposer dans de nouvelles situations. Dans cette rétroaction, la posture du formateur, de non-jugement, de favoriser l’expression orale du processus de pensée et favoriser la confiance en soi, est préciser au cours de cette phase. Les interactions, qui se produisent au cours des échanges entre le formateur et entre les étudiants, accentuent la motivation et l’engagement des étudiants au cours de la séance de simulation. Au cours de séance de simulation, les étudiants apprennent à collaborer et à communiquer collectivement face à un problème de santé.

Il est important que les objectifs de la simulation se situent au niveau de la zone proximale de développement, c’est-à-dire la zone dans laquelle l’étudiant pourrait comprendre, avec l’aide d’un guide permettant ainsi l’apprentissage des habiletés. Cette notion de zone proximale de développement sera reprise dans le chapitre 5 sur les bases théoriques de la recherche. Au cours de séances de simulation, il est important de prendre en compte la diversité qui pourrait y avoir dans un groupe d’étudiants afin de prendre ces paramètres en compte dans la construction du scénario. Et enfin, il est important de fixer un temps pour chacune des trois parties de la simulation : le briefing, la simulation et le débriefing.

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