Approche des notions «rire» et «comique/plaisanterie»

Approche des notions «rire» et «comique/plaisanterie»

L’analyse sémantique du rire

Le rire se définit comme une caractéristique propre à l‟homme. Il lui permet de : « manifester un sentiment de gaité soudaine par une contraction du visage accompagnée d‟expirations plus ou moins γειάλ ησλ δψσλ άλζξσπνλ /to monon gelan ton zoon anhtropos = l‟homme est le seul animal capable de rire194. » (Traité des parties des animaux, 673a 8) Cependant pour les anciens Grecs, le mot « o γέισο » ou « ην γέινο » = rire avait également d‟autres significations que l‟expression de la gaieté : Tout comme les mots γαιήλε/galini et γαιελφο/galinos = apaisement et  Selon Cornelius Castoriadis, le mot qualifiant Zeus de γειέσλ = Zeus de lumière, tout comme le nom du peuple ionien Γειένληεο (Geleontes), qui signifie brillants, illustres, rend probable une parenté étymologique avec le substantif γέιαο(gelas) = éclat, étincelle198. On retrouve aussi cette expression en grec moderne : Σί γειαζηή απηή ε κέξα! / Ti gelasti avti i mera ! = Quelle belle journée !, γειαζηή (rieuse), parce qu‟elle est ensoleillée et lumineuse. : πνληίσλ ηε θπκάησλ αλήξηζκνλ γέιαζκα199/pontion te kymaton anirithmon gelasma= les innombrables ondulations de la mer (Prométhée enchaîné, vers89). Dans le dictionnaire de Souda, l‟une des significations du terme γέιωο Dans l‟Iliade, Homère utilise l‟expression : « ἐγέιαζζε δέ νἱ θίινλ ἦηνξ (egelasse de i filon itor ) = Son cœur en lui riait, c‟est-à-dire se réjouissait » (Iliade, F, 389). Mais aussi :

makaressi theisin texnas isoroosi polifronos Ifestio203 = aussitôt un rire inextinguible éclate au sein de la troupe immortelle lorsque les habitants de l’Olympe aperçoivent les chaînes forgées par Héphaïstos » (Odyssée, chant 8, 325). Nous constatons que dans l‟Iliade et dans l‟Odyssée, le même qualificatif άζβεζηνο (inextinguible) est utilisé dans un même contexte et ce uniquement en relation avec Héphaïstos. Bien qu‟il soit impossible de le prouver, peut-être Homère voulait-il ainsi donner une dimension différente à ce rire. Les spécialistes de l‟œuvre d‟Homère l‟ont appelé.

Théories sur les notions de rire et de comique

Dans Les Deipnosophistes (Le Banquet des Sophistes), Athénée205 évoque la comédie Gérontomanie d‟Anaxandride206, où il est écrit que les inventeurs du rire furent Radamanthe207 et Palamède208. Ceux-ci ont offert le rire aux hommes pour rendre plus supportable leur vie pleine de souffrance : « θαίηνη πνιινί γε πνλνῦκελ. ηὸλ ἀζύκβνινλ εὗξε γέινηα ιέγεηλ Ῥαδάκαλζπο θαὶ Παιακήδεο / Kaiti polli ge ponoumen ; ton asymbolon evre gelia legin Radamanthis ke Palamidis = Puisque les hommes souffrent beaucoup, Radamanthe et Palamède imaginèrent qu‟Asymvolos les ferait rire en disant des blagues. » (Deipnosophistes, livre XIV, 614c) On appelait Asymvolos ou Parasitos celui qui ne payait pas son écot dans un dîner et qui était donc obligé de distraire les convives par des plaisanteries209. Athénée raconte aussi la mésaventure, relatée dans le 5e livre de La Déliade de Semus210, qui était arrivée au philosophe Parménisque211 de 205 Αζήλαηνο, Γεηπλνζνθηζηέο, introduction, traduction, commentaires Θεόδσξνο Μαπξόπνπινο, éd. Κάθηνο, Athènes, 1998, p. 17.

Métaponte. Il était riche et issu d‟une grande famille de cette ville. Après avoir rendu visite à l‟oracle de Trophonios dans son antre construit sous terre, une fois remonté à la surface, il était incapable de rire. La Pythie consultée à ce sujet lui dit : «Ton beau rire te sera rendu chez toi par ta mère ». Il espérait qu‟une fois de retour dans sa patrie il parviendrait à retrouver le rire. Mais comme il restait mélancolique, il crut que la Pythie l‟avait trompé. Un jour qu‟il visitait par hasard Délos, il espéra y voir une remarquable statue de Léto, la mère d‟Apollon. Mais il vit que la statue n‟était qu‟un morceau de bois informe et il se mit à rire. Comprenant alors l‟oracle, il rendit de grands hommages à la déesse212. Trophonios était, selon la mythologie, un fils d‟Apollon et un grand architecte. Avec son frère Agamède, il construisit des monuments en utilisant la pierre à la place du torchis et du bois. Parmi les monuments qui leur sont attribués figure le temple d‟Apollon à Delphes. Trophonios, seul, construisit le temple d‟Apollon à Pagasai et son propre sanctuaire oraculaire à Livadia, où il était vénéré comme dieu chtonien et comme devin. Les témoignages littéraires sur cet oracle sont inhabituellement nombreux et proviennent de différents auteurs. Hérodote, Aristophane, Pausanias, Plutarque et Strabon en parlent. Celui de Pausanias est considéré comme particulièrement important. Selon lui, la visite à l‟oracle de Trophonios suivait une curieuse procédure et était une expérience pénible pour les consultants213 : « Après être monté hors de l‟antre de Trophonios, le demandeur est conduit par les prêtres sur un siège appelé siège de Mnémosyne (déesse de la mémoire), non loin du sanctuaire, où les prêtres lui demandent tout ce qu‟il a vu ou appris. Après avoir obtenu ces informations, ils le confient à ses proches. Ils le soulèvent, paralysé par la peur et inconscient … Mais ensuite, il reprend ses esprits et retrouve la capacité

Les érudits s‟accordent sur le fait que le rire ne se produit pas sans un facteur extérieur et que ce facteur n‟est autre que le comique215. Mais qu‟est-ce que le comique ? En recherchant les interprétations du comique dans divers dictionnaires, nous pouvons remarquer que le comique est tout ce qui provoque le rire. Nous trouvons ainsi le comique de l‟aspect et des gestes, le comique de situation et des mots, le comique des caractères, etc.216. Vladimir Propp observe que le rire est un réflexe propre à l‟homme et qu‟il a sa propre histoire. Nous ne rions pas aujourd‟hui comme hier. Une définition du comique ou du rire ne peut donc être qu‟historique217. Et Alain Vaillant remarque qu‟après 1830 « le rire est à la fois le rire du bourgeois (supposé normatif et répressif) et le rire de celui qui conteste le bourgeois. C’est de cette ambivalence que découle une mauvaise conscience idéologique, qui se traduit en de sempiternels débats sur le bon rire ou le mauvais rire, le premier ou le deuxième degré, etc.218. » Tous deux soutiennent que les motifs qui provoquent le rire diffèrent selon l‟époque et dépendent des circonstances historiques propres à chaque époque. En tout cas, le fait est que les interprétations données tant par les philosophes que par les érudits sur la valeur du rire et sur ce qui le provoque ont différé dans le temps.

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