Évaluation des services écosystémiques rendus par les écosystèmes agricoles

Évaluation des services écosystémiques rendus par les écosystèmes agricoles

Une contribution au programme EFESE

Un cadre d’analyse des services écosystémiques adapté aux écosystèmes anthropisés

Du point de vue des écologues comme de celui des agronomes, le terme « écosystème agricole » désigne le système « sol-plante » de la parcelle, incluant les êtres vivants qui y circulent (animaux d’élevage au pâturage, biodiversité animale sauvage), et les éléments semi-naturels (haies, arbres isolés, mares, bords de parcelle…). Du point de vue géographique, les écosystèmes agricoles correspondent à l’ensemble des parcelles cultivées ou en herbe exploitées majoritairement pour l’agriculture. L’agriculteur agit sur cet écosystème au moyen de pratiques dans le but principal de produire de la biomasse1. L’un des enjeux associés à l’analyse des SE rendus par ces écosystèmes est la conception de systèmes de production reposant davantage sur les SE, moins consommateurs en intrants exogènes et répondant aux enjeux de société (conservation de la biodiversité, limitation des impacts environnementaux, etc.). Pour être opérationnel et servir cet objectif, le cadre d’analyse des SE rendus par les écosystèmes agricoles doit donc permettre de clarifier le statut et de spécifier les rôles respectifs des SE – liés au fonctionnement du système « sol-plantes-animaux » et du paysage – et des pratiques dans la production agricole. De nombreux cadres d’analyse des SE reposent sur l’explicitation d’une chaîne, ou cascade, reliant le fonctionnement d’un écosystème au bien-être de bénéficiaires humains en articulant les notions de structure et processus biophysiques de l’écosystème, de SE et d’avantage. Deux grands types de définition du concept de SE coexistent dans la littérature scientifique : (i) celle dans laquelle les SE sont des composantes biophysiques de l’écosystème dont sont dérivés des avantages, retenue par les auteurs de la Common international classification for ecosystem services (CICES) et (ii) celle dans laquelle les SE sont les avantages tirés par l’Homme des écosystèmes, retenue dans le rapport du Millennium ecosystem assessment – MEA). En cohérence avec la CICES, les SE sont définis ici comme les processus écologiques ou les éléments de la structure de l’écosystème dont l’Homme dérive des avantages, parfois en mobilisant du travail, du capital matériel ou cognitif, 1 Le terme « agroécosystème » désigne l’ensemble formé par l’écosystème agricole (compartiment écologique) et les personnes qui y interviennent (ainsi que les moyens qu’elles mettent en œuvre). 2 https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/levaluation-francaise-desecosystemes-et-des-services-ecosystemiques 3 http://www.ecoserv.inra.fr/ dans le but d’améliorer son bien-être. Les avantages retirés des SE, déconnectés de l’écosystème sur le plan fonctionnel, peuvent être matériels (des biens) ou immatériels (des services4). Un SE peut être à l’origine de plusieurs avantages.

Les SE « intrants » rendus à l’agriculteur

La principale finalité de l’écosystème agricole est de produire des biens végétaux (production primaire) et animaux (production secondaire, élaborée à partir de la production végétale). Au cours du cycle de production (cycle cultural), un certain nombre de SE interviennent dans l’élaboration du rendement en agissant sur le niveau d’expression des facteurs qui le pénalisent (manque d’eau, carences en nutriments, déficit de pollinisation, dommages causés par les bioagresseurs). Ces SE de régulation qui déterminent la production végétale peuvent être considérés comme des facteurs de production tout comme les intrants exogènes (eau d’irrigation, engrais de synthèse, produits phytosanitaires, etc.). En tant que gestionnaire de l’écosystème agricole, l’agriculteur est le bénéficiaire direct de ces SE dits « intrants ». Du fait de leur substitution à l’usage d’intrants de synthèse, certains de ces SE contribuent à la réduction des pollutions environnementales, ce qui constitue un avantage indirect pour la société dans son ensemble. 

L’évaluation du niveau absolu des SE « intrants »

Les SE « intrants » se répartissent en deux grands types selon leur rôle dans l’élaboration du rendement végétal. (i) Les SE qui régulent les stress abiotiques fournissent au couvert végétal (prairie ou culture) les conditions propices à la croissance racinaire, et limitent le déficit hydrique et les carences en éléments nutritifs : SE de « structuration du sol », de « fourniture de nutriments aux plantes cultivées », de « stockage et restitution de l’eau aux plantes cultivées », et de « stabilisation des sols et contrôle de l’érosion ». Ces SE reposent fortement sur les composantes biotiques et abiotiques du « sol » – faune du sol, systèmes aérien et racinaire des plantes, taux de matière organique, réserve utile en eau, etc. –, avec un rôle central du SE « structuration du sol » qui détermine lui-même les autres SE. Les SE en lien avec le cycle de l’eau, de l’azote (N) et du carbone (C) ont été évalués via le dispositif de simulation dynamique du système sol-plante présenté dans l’Encadré 1. La quantification des SE de « fourniture d’N minéral », de « stockage et restitution de l’eau aux plantes cultivées » et de « stabilisation des sols et contrôle de l’érosion » met en évidence, outre le rôle important du climat, celui de la nature de la séquence de culture, notamment la saisonnalité du cycle de culture (printemps versus hiver) et l’implantation ou non d’un couvert pendant l’interculture. Les indicateurs permettent d’estimer le niveau absolu des SE et d’en observer la distribution spatiale, mais pas de qualifier les gammes de valeurs en termes de niveau « faible » ou « fort » de SE. Pour éclairer la prise de décision des bénéficiaires des SE, il est nécessaire d’évaluer dans quelle mesure l’écosystème répond aux besoins des cultures, notamment en N minéral et en eau, compte tenu du contexte pédoclimatique dans lequel ces SE s’expriment. Autrement dit, ces indicateurs doivent être retravaillés de sorte à exprimer le niveau de fourniture de ces SE relativement aux enjeux de production agricole (cf. infra).  

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