Intégrale sur l’ensemble des matrices hermitiennes

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Modeles de matrices et combinatoire

Pour bien comprendre comment le modele qui nous interesse a vu le jour, il est necessaire de rappeler comment un resultat de Chromodynamique Quantique (QCD) s’est aver ^etre fondamental dans le cadre des matrices aleatoires. Cette theorie est une theorie des champs ou les particules sont des quarks portant une charge de couleur qui est un objet tridimensionnel. Ils interagissent donc a travers des matrices de jauge de taille 3 3, les gluons, presentant une symetrie SU(3). La resolution de cette theorie est un probleme extremement complexe et si l’on peut obtenir des resultats perturbatifs aux petites echelles ou la constante de couplage est faible, l’etude aux grandes echelles ne peut ^etre decrite de la m^eme facon. En 74, ’t Hooft [100] a propose d’aborder le probleme di eremment en le generalisant : au lieu de considerer seulement trois couleurs, on peut etudier le m^eme probleme avec un nombre de couleurs arbitraire N.
On peut alors faire tendre ce nombre N ! 1 et exprimer les observables du modele a travers leur developpement en N1 pour obtenir nalement des informations sur la valeur N = 3. ’t Hooft a alors decouvert que les graphes de Feynman contribuant a un ordre donne dans ce developpement ont une topologie xee.
Le type de modeles que nous allons etudier dans ce memoire a et introduit bien plus tard. Partant des techniques classiques de theorie des champs, Brezin, Itzykson, Parisi et Zuber [22] ont interpret les integrales matricielles issues de la theorie des matrices aleatoires comme des fonctions generatrices de graphes epais lorsque la taille des matrices tend vers l’in ni. Pour cela, ils ont developp les integrales considerees autour d’un col pour se ramener au calcul de valeurs moyennes d’operateurs par rap-port a une mesure gaussienne. L’application du theoreme de Wick (voir l’appendice 1) permet alors de representer le resulat comme une somme sur un ensemble de graphes ou les vertex sont orientes. Nous reviendrons plus precisement sur cette construction dans le debut du chapitre 2 puisqu’elle est la base des objets etudies ici.
L’etude des modeles de matrices a connu un regain d’inter^et quelques annees plus tard gr^ace a une simple observation. Plusieurs domaines tres di erents de la physique, tels que la theorie des cordes, la gravitation quantique ou bien l’etude de membranes, necessitent de pouvoir caracteriser des surfaces et, plus particulierement, de pouvoir mettre une mesure sur cet ensemble. En 1985, plusieurs chercheurs etudiant de telles surfaces ont observ que l’interpretation introduite par [22] permet d’approcher ce type de probleme a partir des integrales de matrices [9, 30, 65]. En e et, considerant un graphe epais, il existe une procedure tres simple permettant de remplacer tout vertex a k pattes par un polyg^one a k c^otes. A un graphe consistant en un recollement de vertex, on fait donc correspondre une surface formee de polyg^ones colles entre eux par leurs ar^etes. La theorie des matrices aleatoires permet ainsi de calculer des objets de la forme : Z = P(S) (1-2) ou S est une surface discretisee construite comme un recollement de polyg^ones et P est un poids associe a toute surface de ce type. Pour passer a de « vraies » surfaces, c’est-a-dire continues, il faut alors faire tendre le nombre de polyg^ones vers l’in ni et reduisant leur taille de maniere a garder l’aire de la surface consider nie.
Dans ce cadre, la propriet decouverte par ’t Hooft en QCD signi e que, lorsque la taille des matrices tend vers l’in ni, le developpement en N1 permet de selectionner le genre des surfaces generees. Ainsi, on peut ecrire Z = N2 2g P(Sg) = N2 2gZ(g) g=0 Sg g=0 = N2 + +N−2 + … (1 3) ou l’on somme maintenant sur l’ensemble des surfaces Sg de genre g donne pour obtenir chaque terme de ce developpement topologique. Cette propriet s’est averee fondamen-tale dans l’etude des matrices aleatoires et a permis de faire de grands progres.

Matrices aleatoires et surfaces continues.

Revenons maintenant a une eventuelle procedure permettant d’atteindre des sur-faces continues a partir des modeles de matrices. Une telle limite est atteinte en faisant tendre le nombre moyen de polyg^ones constitutifs des surfaces vers l’in ni. Ceci est en general obtenu en approchant un point critique dans l’espace des parametres du modele. En e et, on peut montrer [47] que le nombre moyen de polyg^ones < n > est donne par une relation de la forme < n >= g @ ln Z (1-4) ou g est un parametre du modele de matrices et Z la fonction generatrice de surfaces discretisees issue de ce modele. Il faut donc atteindre une singularite de ln Z comme fonction de g pour faire diverger cette quantite. On determine ainsi un point critique gc tel que pour tout terme du developpement topologique Z(h) de ni dans Eq. (1-3), il existe un exposant critique h tel que Z(h) = (g gc) h Zsing(h) + termes sous dominants: (1-5)
On peut alors de nir une constante cosmologique liant l’aire moyenne des polyg^ones 2 et la distance au point critique : 2 := (g gc): (1-6)
La fonction generatrice totale est alors donnee par le comportement Z = X gc) h Zsing(h) N2 2h(g (1-7) h=0 au voisinage de la singularite gc. Il a et montre [23, 39, 55] que l’exposant critique h est lineaire en le genre h : il existe un exposant tel que h = ( 2)(1 h): (1-8)
Les exposants de 1 et (g gc) sont donc comparables et ceci permet de de nir une N gc)1 variable combinant les deux := N(g permettant d’exprimer : Z = X 2hZsing(h) 2 (1-9) h=0 et ainsi de melanger les contributions des surfaces de genres di erents a travers une double limite d’echelle obtenue par N ! 1 et g ! gc en gardant ni. Cette double limite d’echelle est interessante puisqu’elle permet d’avoir acces aux surfaces continues depuis les modeles de matrices et de melanger les surfaces de genres di erents ce qui est un element fondamental de la theorie des cordes ou ces dernieres interagissent en se separant et se recollant creent des surfaces de genre plus elev . Nous reviendrons sur ce point dans la partie suivante dediee aux applications des matrices aleatoires.

Applications des modeles de matrices aleatoires.

Les matrices aleatoires sont un outil formidable tant ses applications sont nom-breuses aussi bien en physique qu’en mathematiques. Dans cette partie nous presentons seulement une petite partie de celles-ci plus particulierement reliees aux resultats presentes dans ce memoire.

Volume symplectique de l’espace des modules de surfaces de Riemann.

En mathematiques, on peut ^etre interess par decrire et compter des surfaces par-tageant une m^eme topologie. Lorsque ces surfaces sont discretisees, ceci se ramene a de la pure combinatoire mais lorsque les surfaces sont continues, on ne peut plus aborder le probleme de la m^eme maniere. Il faut de nir un certain nombre de parametres, ap-peles modules, dont la valeur permet de caracteriser chaque surface ou type de surface. L’ensemble des surfaces est donc mis en bijection avec l’espace de toutes les valeurs possibles de ces parametres : l’espace des modules [31]. Un premier ensemble de mo-dules peut ^etre identi comme le genre g et le nombre de bords k d’une surface. On peut alors decouper l’ensemble des surfaces en des sous-ensembles Sk(g) contenant toutes les surfaces de genre g donne et ayant k bords. A chacun de ces ensembles on peut associer un ensemble de modules tels que la longueur de chaque bord par exemple dont les di erentes valeurs forment un espace M(kg). Alors que dans le cas des surfaces discretisees, on les compte en associant a chaque assemblage de polyg^ones un poids et en e ectuant la somme de ces poids, l’equivalent continu consiste a munir l’espace des modules d’une mesure et a calculer le volume de ce dernier par rapport a cette mesure. En e et, chaque point de l’espace des modules correspond a une surface et imposer une mesure sur cet espace consiste a associer un poids a chaque surface, l’integration remplacant alors la somme discrete.
Dans l’etude de ces espaces, Riemann lui-m^eme a et le premier a etudier l’espace Mg de toutes les structures complexes sur une surface orientee de genre g modulo l’ensemble des di eormorphismes preservant l’orientation. Il a ainsi pu montrer que l’espace Mg a pour dimension reelle 6g 6. Beaucoup plus recemment, demontrant ainsi une conjecture precedement etablie par Witten [108], Kontsevich [72]a montre que l’on pouvait calculer le volume de tels espaces par le calcul d’integrales de matrices du type ( ) = R M2 (2-1) dM exp Tr M2 i M3 Z R dM 2 6 ou est une matrice de champ exterieur en utilisant la propriet disant que les volumes vn(g) := Vol M(ng) satisfont les equations de Korteweg-de Vries (KdV).
Le fait que cette hierachie integrable d’equations apparaisse dans l’etude des ma-trices aleatoires est connu depuis longtemps et beaucoup de travaux ont montre que de telles hierarchies integrables sont fondamentalement liees a di erents modeles de ma-trices aleatoires [23, 55, 39, 13]. Au contraire, l’emergence de telles contraintes dans le cadre de l’etude de l’espace des modules de surfaces continues etait plus surpenante et n’est toujours pas comprise et fait l’objet de nombreux travaux. Tres recemment, Mir-zakhani [87, 88] a propose une relation de recurrence permettant de retrouver la valeur de ces volumes avec une approche melangeant geometrie algebrique et geometrie hyper-bolique. Ces relations semblent ^etre un premier pas vers une meilleure comprehension de ce lien entre hierarchies integrables et espaces de modules.

Theorie de la gravitation quantique bidimensionnelle.

La gravitation est s^urement la force fondamentale la plus facilement observable a l’echelle macroscopique puisqu’elle a toujours et ressentie par tout le monde et a et formalisee tres t^ot a travers les lois de Newton. Cependant son comportement a petites echelles est plus problematique. Il para^trait en e et naturel de vouloir quanti er cette interaction fondamentale comme l’electromagnetisme et les autres forces, mais les techniques de theorie des champs utilisees ne peuvent s’appliquer dans ce cas la puisque la gravitation est une theorie non renormalisable. Comment quanti er cette theorie en pratique ? On peut tenter d’imiter ce qui se fait deja dans les autres theories en utilisant les integrales de chemins, c’est-a-dire sommer sur tous les chemins d’etats possibles entre un etat initial et un etat nal donne. On sait depuis Einstein que le champ gravitationnel est un champ courbant l’espace temps. Pour le caracteriser il faut donc se donner une variet E de dimension 4, des coordonnees fxig4i=1 sur celle-ci et une metrique gij donnee par une matrice 4 4. Son action est alors donnee par la courbure de E : S := c3 ZE dx1dx2dx3dx4 p det gR (2-2) ou R est la courbure scalaire de la metrique g et G un nombre appel constante gravi-tationnelle. Une integrale de chemin sera alors de la forme : Z = X exp iS(~E) (2-3) ou la somme porte sur toutes les varietes E satisfaisant les conditions initiale et nale. Le calcul d’une telle somme est extremement complique et un tel probleme n’a pas encore pu ^etre resolu, en particulier parce qu’on ne sait pas bien decrire les di erentes topologies de E intervenant dans cette somme. On peut cependant essayer de simpli er le probleme pour tenter de le resoudre en diminuant la dimension de l’espace temps : on peut considerer l’espace temps comme une variet de dimension 2 : une dimension d’espace et une dimension de temps. On va egalement faire une rotation de Wick t ! it, faisant passer dans l’espace des temps complexes et rendant la metrique Euclidienne. Dans ce cas la, le probleme se rapproche d’un probleme de calcul de volume d’espace de modules de surfaces continues decrit plus haut. On doit en e et calculer des integrales de chemin de la forme : Z=XE exp R dx 2p ( + GR ) (2-4) ou la somme porte sur toutes les surfaces satisfaisant les conditions aux limites et est la constante cosmologique. En fait, le symbole de somme est ici un peu abusif puisqu’il sous entend une somme discrete alors que l’espace des surface n’est pas a priori discret. En fait, il faudrait plut^ot reecrire Z comme une integrale sur l’espace des modules des surfaces de Riemann E.
C’est justement sur ce point que les integrales de matrices s’averent e caces a condition de donner un sens precis a cette somme discrete. Une idee naturelle pour decrire une surface, frequemment utilisee par exemple en mecanique dans les methodes de modelisation en elements nis, consiste a discretiser cette derniere en la remplacant par une surface « proche » composee uniquement de polyg^ones colles entre eux par leurs ar^etes. La somme Z consiste alors a sommer sur de telles surfaces discretisees en don-nant un poids particulier a chacun des polyg^ones les composant ainsi qu’a l’operation de recollement d’ar^etes : on peut donc voir Z comme une fonction generatrice de telles surfaces. Or comme nous le verrons, c’est exactement le type de fonctions generatrices que l’on peut obtenir a partir des integrales de matrices. Notons qu’il faut alors faire tres attention a cette discretisation des surfaces et pouvoir caracteriser son impact sur les observables du modele.
Pour la suite, remarquons que l’on peut egalement introduire des champs de « matiere » scalaires Xi : E ! C couples a la gravite, par exemple a travers l’action modi ee : S = Z dx2 det g( + GR + i g @ Xi@ Xi): (2-5)

Theories des cordes.

Une autre theorie peut se mettre sous une forme similaire et se ramener au m^eme probleme consistant en une integrale sur l’espace des modules des surfaces de Riemann : la theorie des cordes [54]. Celle-ci est une generalisation des theories des champs ha-bituelles ou les particules ne sont plus des points de l’espace temps mais des objets a une dimension, i.e. des cordes parametrees par des coordonnees Xi(s; t)i=1;:::;3 ou s est une abscisse curviligne sur la corde. Pour de nir une integrale de chemin il faut alors integrer sur tous les etats Xi(t) entre une corde initiale Xi(s; t0) et une corde nale Xi(s; tf ). Or, lorsqu’une corde evolue dans le temps, elle dessine une surface (bi-dimensionnelle) dans l’espace temps. L’integrale de chemin correspond donc comme dans le paragraphe precedent a sommer sur toutes les surfaces entre les etats initiaux et naux : Z = X exp iS(~E) : (2-6)
Plusieurs actions S(E) peuvent alors ^etre choisies et plusieurs mesures pour la somma-tion. Nous n’alllons pas nous attarder sur toutes les actions possibles. Notons que parmi toutes celles-ci, Polyakov [94] a propose une action invariante sous les changements de coordonnees de la surface : S := 2 Z dsdt det g( i G g @ X @ X ) (2-7) ou G est la metrique de Minkowski sur l’espace-temps et g la metrique induite sur la feuille d’univers (i.e. la surface dessinee par l’evolution de la corde dans le temps). Notons que l’on reconnait ici exactement la m^eme somme sur les surfaces que celle introduite dans le paragraphe precedent dans le cadre de la gravitation quantique bidimensionnelle dans Eq. (2-5).
Cependant, cette theorie des cordes presente de nombreux defauts. Non seulement, elle ne peut ^etre veri ee experimentalement mais au niveau theorique, les symetries necessaires impliquent de fortes contraintes. En e et, on ne peut pas construire une telle theorie dans un espace temps de dimension 4 mais 26 ! Il faut donc eliminer 22 di-mensions. Une partie du chemin a deja et fait par Ramond [95] et Neveu et Schwarz [92] en introduisant la supersymetrie : ils ont ramen le probleme a une theorie a dix dimen-sions. Il reste donc 6 dimensions a eliminer pour revenir aux 4 dimensions de l’espace temps reel. Ceci peut ^etre fait en reduisant la taille des 6 directions supplementaires, en les compacti ant. Les nombreux travaux dans ce domaine font appara^tre une tres riche structure interessante au moins au niveau mathematique si ce n’est pour retrouver les proprietes physiques du monde reel.
Remarque 2.1 Nous n’avons evoqu ici qu’un exemple parmi bien d’autres de modele de theorie des cordes lie aux modeles de matrices aleatoires. Nous verrons un autre exemple dans le chapitre 5 qui lui est totalement dedi : les theories des cordes topologiques. Ce cas correspond a une theorie des cordes ou seule la topologie de la feuille d’univers (i.e. la surface generee par l’evolution temporelle de la corde) entre en compte dans le calcul de la fonction de partition. Si deux types de theories des cordes apparaissent dans ce cadre, tous deux sont fortement relies aux modeles de matrices [81] : que ce soit par les proprietes de variation de la fonction de partition du type A sous les deformation de la feuille d’univers ou par la conjecture de Dijkgraaf et Vafa [36] identi ant directement un modele de matrice equivalent au type B, les points communs entre modeles de matrices et theories des cordes topologiques sont frappants.

Theories conformes et modeles minimaux.

Explicitons un peu plus comment ces dimensions critiques pour l’espace temps sont obtenues. Au niveau local, l’action de Polyakov a une symetrie sous le changement de la metrique : g ! e’g ; (2-8) la symetrie conforme. Cependant cette symetrie est brisee par la quanti cation : la som-mation sur les surfaces introduit une anomalie. On peut caracteriser cette anomalie par un unique scalaire : la charge centrale c. Celle-ci s’annule lorsque la theorie quantique est invariante conforme. Pour la de nir, il est necessaire d’etudier plus precisement les transformations conformes de la metrique. Ce sont les transformations qui changent la metrique par un facteur scalaire et donc laissent invariante l’action de la theorie [62] : elles sont donnees par z ! z(1 + f(z)) (2-9) ou f est une fonction analytique de la variable complexe z = x + iy avec x et y des coordonnees sur la surface consideree. Elles sont donc generees par les operateurs ln := zn+1 @z@ . En fait, comme souvent, pour obtenir les bons generateurs des transformations conformes, on doit introduire un ordre normal pour preciser l’ordre dans lequel les di erents operateurs agissent. On obtient ainsi les generateurs Ln :=: ln : qui satisfont les relations de commutation : [Ln; Lm] = (m n)Lm+n + c (n3 n) m+nId; (2-10) c’est-a-dire qu’ils forment une extension de l’algebre de Virasoro avec une charge cen-trale c.
On peut construire une representation de cette algebre en partant d’un operateur primaire j0 > : L0j0 >= hj0 > et 8n > 0 ; Lnj0 >= 0 (2-11) consider comme le vide de la representation. L’ensemble des etats engendres par les autres operateurs L n : jn1n2 : : : nk >:= L n1 L n2 : : : L nk j0 > (2-12) engendrent alors, en general, une representation de dimension in nie irreductible de l’algebre de Virasoro. Cependant ceci n’est plus vrai dans certains cas particuliers ou la representation engendree est reductible puisque les etats engendres ne sont pas lineairement independants. En e et, pour les valeurs de h particulieres : hr;s = 1 12(r s)2 + (1 c)(r2 s2 2) + (r2 s2)p (25 c)(1 c) (2-13 ou r et s sont entiers, on obtient de telles representations reductibles.
Remarque 2.2 Certains modeles ne font intervenir qu’un nombre ni de representations reductibles de ce type et sont ainsi entierement solubles : les modeles minimaux indexes par deux entiers p et q premiers entre eux. Dans ce cas, la charge centrale est de la forme : c = 1 6 (2-14) et les dimension des champs primaires sont donnees par la table de Kac [62] : (rq sp)2 (p q)2 hr;s = (2-15) 4pq ou s et r sont deux entiers strictement positifs et strictement inferieurs respectivement a q et a p.
Nous verrons comment resoudre ces modeles gr^ace aux modeles de matrice dans le chapitre 4 de cette these.
On peut montrer que l’on peut associer une telle charge centrale a chaque champ suivant sa statistique : a un boson, on associe une charge 1 tandis qu’a un fermion on associe une charge 12 . On peut egalement montrer que le champ de jauge g a une dimension negative egale a 26 due, entre autres choses, a l’introduction de fant^omes de Fadeev-Popov. La charge totale d’une theorie des cordes D dimensionnelle avec l’action de Polyakov est donc egale a : c = D 26 (2-16) puisqu’il y a D champs bosoniques dans cette theorie. On voit ainsi qu’il est necessaire d’avoir une theorie avec un espace temps de dimension D = 26 pour que la symetrie conforme soit preservee au niveau quantique. Pour reduire la dimension critique, on peut introduire la supersymetrie et donc D fermions. Ceci induit de plus de nouveaux fant^omes de Fadeev-Popov avec une charge +11. On a alors la charge centrale c = D 26 + D + 11 (2-17) ce qui donne une dimension critique D = 10 comme annonce plus haut.
En fait, les modeles de matrices permettent non seulement d’avoir acces aux theories des cordes critiques mais egalements a celles qui ont une dimension non critique et donc une charge centrale non nulle. En particulier, les modeles minimaux correspondent a une charge centrale c < 1.
Dans tous les cas, pour comparer les resultats des theories conformes introduites ici et des modeles de matrices vus comme fonctions generatrices de surfaces discretisees, il faut pouvoir trouver un language commun. Dans les deux cas on peut se ramnener a une unite de comparaison possible : l’aire des surfaces generees. On peut se demander comment se comportent les observables de ces di erents modeles en termes de l’aire A des surfaces considerees. Plus particulierement comment divergent ces observables quand A ! 1. En general, pour les theories conformes, on peut montrer que pour un genre h et une aire A xee pour les surfaces E, on a un comportement du type [71] : Z(h) = XE exp i S(E) A!1 A h 3 (2-18) ou l’exposant h est lineaire en le genre et donne par1 : h = 2h + string(1 h): (2-19)
Le coe cient string, appel susceptibilit de corde depend de la theorie consideree. Par exemple, pour un modele minimal de type (p; q), on peut montrer q’il vaut : string = 2 jp qj : (2-20)
On peut calculer un tel exposant critique pour n’importe quelle autre observable < O > du modele et ainsi le comparer avec les resultats de modeles de matrices.
Nous verrons ainsi que la comparaison de ces exposants, a condition de bien nor-maliser les observables et variables, permet de montrer que les modeles de matrices donnent acces aux theories conformes (en particulier en prenant certaines limites ou les surfaces discretisees deviennent continues).

De l’emergence de la geometrie algebrique et des systemes integrables.

Si les applications presentees jusqu’ici ont toutes un lien avec la combinatoire de surfaces discretisees ou continues, les modeles de matrices sont lies a de nombreux autres problemes qui ne seront pas ou tres peu abordes dans cette these. Si elle ne semble pas aussi directement reliee a notre probleme, l’une des proprietes des modeles de matrices qui semble fondamentale dans toutes les construction introduites ici est son integrabilit . En e et, cette propriete, que l’on retrouve sous di erentes formes suivant l’aspect des modeles de matrices etudies, assure que le probleme est soluble : cela signi e que l’on est en principe capable de calculer toutes les observables du modele consider (ce qui ne signi e pas que l’on puisse le faire facilement en pratique).
Il a et observ que les observables des modeles de matrices sont, en general, solu-tions d’equations di erentielles appartenant a des hierarchies integrables telles que les hierarchies KP, la hierarchie de Toda 2 dimensionnelle, celle de Whitham … En fait, lorsque l’on integre sur une matrice de taille nie N, on trouve un systeme integrable quantique caracteris par ~ N1 . On s’attend donc a retrouver un systeme integrable classique lorsque la taille N ! 1 et ainsi tous les ingredients le caracterisant comme une courbe algebrique appelee courbe spectrale ou la fonction satisfaisant des rela-tions bilineaires.
Nous verrons que nous retrouvons e ectivement tous ces ingredients dans le cadre des integrales formelles qui sont liees a la limite des integrales de matrices convergentes lorsque la taille des matrices tend vers l’in ni. On ira m^eme plus loin puisque nous montrerons que ces elements classiques permettent de calculer toutes les corrections en N1 , i.e. toutes les corrections semi-classiques2.
Si le lien entre integrabilit et modeles de matrices semble bien compris a present, le lien direct entre combinatoire de surfaces et integrabilit restait jusqu’a recemment as-sez obscur. Pourtant cet outil semble fondamental dans l’etude de l’espace des modules de surfaces de Riemann. En e et, si l’approche de Kontsevich a et de reinterpreter ce probleme en termes d’integrales matricielles, ceci est principalement d^u au fait que les volumes d’espaces de modules sont solutions d’equations di erentielles de la hierarchie KdV et donc a l’integrabilit . Si des travaux recents [93, 79, 91] ont permis de com-prendre un peu mieux ce lien a la lumiere de l’etude de partitions aleatoires et leur lien avec les fonctions tau de systemes integrables, j’espere que cette these permettra de donner de premiers elements de comprehension utilisant le formalisme des matrices aleatoires.

Table des matières

1 Introduction
1 Petit historique des modèles de matrices
1.1 Matrices aléatoires et physique nucléaire
1.2 Modèles de matrices et combinatoire
1.3 Matrices aléatoires et surfaces continues
2 Applications des modèles de matrices aléatoires
2.1 Volume symplectique de l’espace des modules de surfaces de Riemann
.2 Théorie de la gravitation quantique bidimensionnelle
2.3 Théories des cordes
2.4 Théories conformes et modèles minimaux
2.5 De l’émergence de la géométrie algébrique et des systèmes intégrables
2 Modèle à deux matrices hermitiennes
1 Définition du modèle
1.1 Intégrale sur l’ensemble des matrices hermitiennes
1.2 Intégrale sur un chemin de valeurs propres
1.3 Intégrale formelle
2 Combinatoire des cartes, surfaces discrétisées
2.1 Génération de surfaces discrétisées bicolores fermées
2.2 Surfaces ouvertes et conditions de bord
3 Développement topologique
4 Cas particulier : modèle d’Ising
5 Double limite d’échelle et limite continue
6 Equations de boucles
6.1 Dérivation des équations de boucles
7 Limite planaire
7.1 Equation de boucle maitresse et courbe spectrale
7.2 Limite planaire des fonctions de corrélation mixtes
8 Développements topologiques et géométrie algébrique
8.1 Rappels de géométrie algébrique
8.2 Propriétés de la courbe spectrale du modèle à deux matrices
9 Développement topologique du modèle à deux matrices
9.1 Définitions, solutions des équations de boucles et feuillet physique
9.2 Quelques propriétés des fonctions de corrélation
9.3 Courbe spectrale complète
9.4 Fonctions de corrélation simples et représentation diagrammatique
9.5 Développement topologique de l’énergie libre
9.6 Développement topologique des fonctions de corrélation mixtes
10 Solution générale des équations de boucles
10.1 Représentation diagrammatique
10.2 Retour sur le développement topologique des traces simples
10.3 Retour sur la limite planaire des traces mixtes
10.4 Interprétation des relations de récurrence
11 Conclusion du chapitre
3 Autres modèles de matrices
1 Modèle à une matrice
1.1 Interprétation combinatoire
1.2 Courbe spectrale classique
1.3 Solution des équations de boucles
1.4 Lien avec le modèle à deux matrices
2 Modèle de matrices en champ extérieur
2.1 Définition et interprétation combinatoire
2.2 Résolution du modèle
3 Conclusion du chapitre
4 Invariants algébriques
1 Définition des modules de la courbe
2 Déformation par
3 Fonctions de corrélation et énergies libres
3.1 Définitions
3.2 Représentation diagrammatique
3.3 Propriétés
3.4 Cas particuliers : genres 0 et 1
4 Déformations de la courbe
4.1 Invariance symplectique
4.2 Variation par rapport aux modules de la courbe
4.3 Opérateur d’insertion de boucle et son inverse
4.4 Transformations modulaire
4.5 Variation par rapport à
5 Limite singulière
6 Applications
6.1 Double limite d’échelle et modèles minimaux des théories conformes
6.2 Application à l’intégrale de Kontsevich
6.3 Exemple : courbe d’Airy
6.4 Exemple : la gravité pure (3,2)
7 Intégrabilité des invariants algébriques
7.1 Fonction de Baker-Akhiezer
7.2 Relation de Sato
7.3 Equations de Hirota
8 Conclusion du chapitre
5 Modèles de matrices et théorie des cordes
1 Théorie des cordes critiques et doubles limites d’échelle
2 Théories de cordes topologiques
3 Conjecture de Dijkgraaf-Vafa et modèle B local
3.1 Variétés de Calabi-Yau locales
3.2 Conjecture de Dijkgraaf-Vafa
3.3 Miroirs de géométries toriques
4 Théorie de Kodaira-Spencer et anomalie holomorphe
5 Conclusion du chapitre
6 Conclusion
1 Résultats principaux : du développement topologique des modèles de matrices à la théorie des cordes topologiques
1.1 Calcul d’intégrales à deux matrices formelles
1.2 Invariants et déformations de courbes algébriques
1.3 Théories conformes et intégrabilité
1.4 Conjecture de Dijkgraaf-Vafa
2 Perspectives
2.1 Etude d’autres modèles de matrices
2.2 Lien avec l’intégrale de matrice convergente
2.3 Lien avec un système intégrable quantique
2.4 Interprétation des invariants algébriques : calcul du volume de l’espace des modules de surfaces
2.5 Symétrie miroir, théories topologiques de type A et courbe de Seiberg-Witten
7 Appendices
1 Modèle Gaussien et théorème de Wick
2 Fonction de partition formelle et surfaces discrétisées
3 Intégrale formelle et équations de boucles
4 Variations de F(0) par rapport aux modules
4.1 Dérivées premières de F(0)
4.2 Dérivées secondes de F(0)

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