Introduction au questionnement la définition de « description terminologique bilingue de qualité »

Introduction au questionnement la définition de « description terminologique bilingue de qualité »

Définition des critères de qualité

Avant de pouvoir décrire un terme, il convient de poser la définition de terme. Nous avons déjà vu que le débat autour de la définition de terme est loin d’être clos et que, en raison de l’interdisciplinarité de la science terminologique, ce débat a intéressé et continue d’intéresser non seulement des terminologues, mais aussi des linguistes, des logiciens et des informaticiens, surtout ceux des milieux du TAL (Traitement Automatique des Langues). Pour ce qui nous concerne, nous rejoignons la position de ces auteurs (M. GROSS 1982, 1985, 1989 ; CABRÉ 2000, 2003) qui considèrent que le terme est une unité lexicale et qui, en tant que telle, obéit aux mêmes dynamiques que les autres unités de la langue (comme la variation, la polysémie et la synonymie). Cette unité est dans la plupart des cas une unité de la langue générale qui acquiert une valeur spécialisée dans le cadre d’un certain type de discours. Comme le terme ne comporte pas uniquement une composante linguistique, mais également une composante logique, la linguistique peut contribuer à la description terminologique en prenant en charge les aspects linguistiques des termes. Dans une optique linguistique, le terme doit être décrit en relation aux autres unités de la langue avec lesquelles il se combine dans le cadre d’un discours spécialisé. De plus, il ne faut pas sous-estimer le fait que les termes sont insérés dans des types de discours qui ont une forte tendance à la phraséologie, ce qui se traduit dans l’étude des phrases dans lesquelles les termes s’insèrent. L’étude de la distribution syntaxique d’un terme en discours peut apporter des informations fondamentales à sa description. Introduction au questionnement la définition de « description terminologique bilingue de qualité » – 80 – La définition de description terminologique peut varier en fonction de l’application visée : un terminologue chargé de la confection d’un dictionnaire spécialisé aura une approche différente par rapport à un traducteur/terminologue chargé de la traduction de corpus spécialisés. Les deux se concentreront sur des aspects différents. Le premier pourrait privilégier le recensement des termes, surtout de nature nominale. Le deuxième, quant à lui, serait plutôt intéressé par le repérage d’habitudes stylistiques propres à un type de discours. De plus, cette description peut porter sur une ou plusieurs langues. Il n’existe donc pas un seul type de description terminologique, en raison de la variété des pratiques terminologiques. Néanmoins, il existe des critères qui peuvent être appliqués à différents types de pratiques et qui portent sur plusieurs aspects, tant au niveau des méthodes d’analyse linguistique qu’au niveau des outils informatiques. Pour ce qui concerne les premières, elles doivent se fonder sur des critères qui découlent de l’observation empirique, accordant une attention particulière à la combinatoire syntaxique spécifique à chaque discours et à chaque langue, dans le cas de travaux bi- ou plurilingues. La description terminologique ne doit pas se limiter aux mots qui ont un statut terminologique dans un type de discours. Elle doit s’étendre également aux mots qui ne sont pas des termes à proprement parler mais qui sont pertinents à la description des termes. Le recours à des ressources linguistiques comme les dictionnaires est indispensable mais se révèle souvent insuffisant. La qualité de l’analyse linguistique dépend largement des types de textes utilisés : si l’on vise une description terminologique de qualité, il faut s’appuyer sur des textes de qualité, provenant de sources fiables et rédigés de préférence par des locuteurs natifs pour la langue étudiée. Les critères de qualité que sont censés respecter les outils informatiques utilisés pour la description terminologique touchent plusieurs aspects. La prise en compte de l’utilisateur est, d’après nous, un de ces critères. Un logiciel d’analyse de corpus peut être défini comme logiciel de qualité s’il est capable de s’adapter à un public varié d’utilisateurs, pouvant aller de l’étudiant en sciences humaines peu habitué à la manipulation d’outils informatiques jusqu’au professionnel chevronné possédant des compétences informatiques poussées (telles que la capacité de travailler sous divers systèmes d’exploitation). La prise en compte de l’utilisateur prévoit ainsi le développement d’interfaces ergonomiques, accessibles et intuitives, outre la possibilité d’utiliser le logiciel sous plusieurs systèmes d’exploitation. De même, un logiciel libre d’accès est plus accessible qu’un logiciel payant. Du point de vue des caractéristiques techniques, la souplesse est un des premiers critères de qualité d’un outil, car très souvent elle correspond à une plus grande marge de liberté laissée à l’utilisateur. Parmi les éléments à considérer dans la conception d’outils informatiques d’analyse de corpus spécialisés, BOURIGAULT et JACQUEMIN (2000) citent : l’aide à l’extraction terminologique, l’aide à la structuration de terminologie, les moyens d’accès au texte et la robustesse. Plus un logiciel est complet – du point de vue des tâches qu’il permet d’accomplir – plus il est éligible comme outil de qualité. Le logiciel peut exploiter différents types de ressources et de critères pour mener son analyse : la qualité de ces ressources et de ces critères n’est pas sans conséquence sur la qualité des résultats de l’analyse. Dans le cadre de travaux bi- ou plurilingues, les outils informatiques multilingues sont privilégiés par rapport aux outils monolingues. D’une façon générale, – nous dirions qu’un outil informatique adapté à une description terminologique de qualité est un outil capable de prendre en charge le texte dans toute sa complexité, indépendamment de la taille des corpus et de la diversité des domaines. 

Diversité des domaines, diversité des corpus

Les traducteurs/terminologues travaillent sur des discours spécialisés, qui réfèrent à un domaine de la connaissance. Bien que la notion de domaine ait fait l’objet de dures critiques dans les vingt dernières années, comme nous avons déjà eu l’occasion de le voir (GAMBIER 1991, GAUDIN 1993, 2003 : §I.2.4.1.)84, les travaux en terminologie et terminographie se basent sur la description d’un domaine de référence (par exemple, l’énergie nucléaire, la métallurgie, la linguistique, la biodiversité). Bien que, déjà depuis l’expérience des banques de terminologie, la répartition en domaines ait démontré plusieurs limites, les pratiques lexicographiques et terminographiques courantes continuent à classer les unités terminologiques sous des étiquettes renvoyant à un domaine d’appartenance : cela pour des fins de praticité. L’hétérogénéité des connaissances se reflète concrètement même dans l’expression linguistique des connaissances des différents domaines. Chaque discours spécialisé a une façon propre de structurer les connaissances. De plus, en raison de l’interpénétration des connaissances, il arrive très souvent que les termes utilisés pour exprimer les connaissances d’un domaine appartiennent également à d’autres domaines. Exception faite des néologismes, ces termes sont dans la plupart des cas des mots de la langue générale qui acquièrent une valeur spécialisée dans un discours spécialisé, par le biais de procédés comme la composition ou par une différence de distribution. Les pratiques courantes de description terminologique d’un domaine s’appuient sur des corpus textuels qui regroupent des textes ayant trait à un domaine spécialisé et qui sont analysables par des outils informatiques. Dans les travaux bi- ou plurilingues, les terminologues peuvent exploiter des corpus parallèles (ou bi-textes) ou des corpus comparables. Dans le premier cas, il s’agit d’un ensemble textuel disponible en plusieurs langues. Dans le second cas, il s’agit d’ensembles textuels ayant trait à un même sujet dans deux ou plusieurs langues. Les textes législatifs de pays ayant deux ou plusieurs langues officielles – tels le Canada ou la Suisse – sont un exemple de corpus parallèles, tout comme la documentation d’une entreprise multinationale ayant des sièges dans différents pays. Le travail sur des corpus comparables présente des défis supplémentaires pour le terminologue/traducteur, notamment en ce qui concerne l’alignement des termes. Suivant les domaines et leur degré de spécialisation, les corpus peuvent être de tailles différentes. 

Terminologie et phraséologie dans les discours spécialisés

Les discours spécialisés sont organisés autour de deux composantes fondamentales et indissociables entre elles : la terminologie et la phraséologie (ROUSSEAU 1993). La terminologie est l’ensemble des termes qui véhiculent les connaissances spécialisées d’un 84 La répartition de la connaissance en domaines – nous le rappelons – véhiculerait une image de la connaissance trop idéaliste et réductionniste. – 82 – domaine. La phraséologie est un secteur de la linguistique visant l’étude du phénomène complexe du figement, qui intéresse de nombreuses unités de la langue à plusieurs niveaux de description : lexical, sémantique, syntaxique, pour n’en citer que les plus étudiés. L’attention de la phraséologie porte donc sur l’aspect combinatoire de ces unités qui est figé à différents degrés. Parmi ces unités figurent par exemple les expressions idiomatiques et les locutions (verbales, adverbiales, etc.) : il s’agit d’unités dont le sens n’est pas compositionnel, c’est-à-dire qu’il n’est pas déductible en faisant la somme des sens de chaque unité composant l’unité phraséologique. Un discours à part méritent les proverbes, qui sont étudiés par la parémiologie, avec les adages, les maximes et les citations. Cela pour ce qui concerne la langue dite générale. Dans les discours spécialisés, la phraséologie intervient au moins à deux niveaux. Tout d’abord au niveau purement lexical, par le biais du procédé de la composition, qui est très exploité dans la création de nouveaux termes à partir de mots déjà existant dans la langue dite générale. Ensuite, au niveau discursif, par l’utilisation d’habitudes stylistiques qui se rapprochent du stéréotype, incluant des collocations et des formules discursives qui souvent ne sont pas perçues comme « naturelles » du point de vue linguistique de la part d’un non-spécialiste d’un secteur donné. La prise en charge des deux volets du discours spécialisé – le volet terminologique et le volet phraséologique – doit également comporter des instruments de travail adaptés. Pour GOUADEC (1997), un de ces instruments est le concordancier du traducteur : « En contexte professionnel comme en contexte pédagogique, la traduction fait appel à des outils spécifiques, au nombre desquels doit figurer en bonne place le concordancier du traducteur : concordancier terminologique et phraséologique vu ici comme une condition nécessaire, quoique non suffisante, de la traduction. Ce concordancier, qui porte aussi le nom de répertoire terminologique et phraséologique ou encore de dictionnaire de la traduction joue un rôle prépondérant dans l’assurance de qualité. Il constitue en effet un gisement de matière première terminologique e phraséologique exploitable sans réserve par le traducteur. De sa qualité dépend, pour une très large part, la qualité de la traduction. […] Le concordancier du traducteur […] doit permettre de maîtriser le premier maillon de la chaîne de l’assurance de qualité : le zéro défaut en terminologie et en phraséologie. » (1997 : 1) L’attention accordée à la phraséologie d’un discours spécialisé figure donc aussi parmi les critères indispensables d’une description terminologique bilingue de qualité.

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