L’innovation et la croissance économique

L’innovation et la croissance économique

L’étude du dynamisme des pays réalisée par le Boston Consulting Group (Andrew, Stover De Rocco, et Andrew Taylor 2009), place la France sur le plan mondial en 20ème position. Ce classement est obtenu par le biais d’un indicateur : l‟« Index International d’Innovation » calculé en fonction des facteurs et de la performance des innovations : Facteurs d’innovation : – Politique fiscale : * Exonérations fiscales sur la R&D * Niveaux d’impositions * Aides gouvernementales – Environnement d’innovation : * Niveau d’instruction * Qualité de la main d’œuvre * Qualité des infrastructures * Densité du réseau industriel Performance de l’innovation : – Résultats de la R&D : * Montants des investissements R&D * Dépôt de brevets * Niveaux d’impositions * Aides gouvernementales – Performances industrielles : * Exportations technologiques * Niveau de productivité * Capitalisation boursière – Influence de l’innovation : * Progression de l’emploi * Investissement * Implantation d’entreprises étrangères * Croissance économique Comme nous pouvons le constater au regard de cette liste de critères, le dynamisme d’un pays en matière d’innovation ne se limite pas seulement dans sa capacité à déposer des brevets, mais prend en considération l’ensemble des facteurs ayant une influence sur l’activité économique d’un pays.

L’étude confirme le retard déjà constaté de la France au niveau international. Certes, la concurrence très vive de la Chine n’est pas favorable à notre dynamisme économique, mais l’étude souligne que le succès des USA (Californie) ou de l’Asie (Corée, Japon) est directement lié aux investissements massifs réalisés par ces pays dans les secteurs des nouvelles technologies. Comparativement, le retard français trouverait son origine dans la timidité de nos investissements dans le domaine des nouvelles technologies et de la R&D, malgré les mesures d’incitations fiscales mises en place par l’Etat français. Dans « La Recherche et l’Innovation en France : Futuris 2008 » (Lesourne, Randet, et Collectif 2008), les auteurs insistent ainsi sur la nécessité de budgets d’investissements cohérents par rapport à la taille des entreprises ; il soulignent ainsi que des grandes entreprises Positionnement de la recherche 6 telles que Danone, Veolia Environnement et Lafarge totalisent des budgets de R&D à hauteur de 275 millions d’euros, un montant deux fois inférieur à celui du budget consacré par l’américain Micron Technology (550 millions d’euros) et quatre fois moins que des poids moyens de l’électronique tels que l’américain Honeywell ou le japonais Sharp (environ 1 milliard d’euros chacun). D’autre part, en 2009, la France ne possède plus à la tête de ses grandes entreprises, d’entrepreneurs fondateurs, la plupart des entreprises sont dirigées à présent par des gestionnaires et non par des « visionnaires-innovateurs » tel que cela à pu être le cas sur la période 1945-70.

Il est, par exemple, légitime de s’interroger sur les raisons de l’immobilisme en matière d’innovation dans le secteur automobile et de constater la situation de crise que le secteur rencontre dès les années 2000. Pierre Langlois (Langlois 2008) invoque notamment la crainte des grands groupes face aux bouleversements des équilibres financiers qui seraient occasionnés par l’adoption de carburants alternatifs. Sur le plan de la conception même des véhicules, force est de constater que le secteur automobile n’a pas pris en compte l’évolution chez les clients de la notion même de véhicule individuel qui en cette période de crise est associé à des valeurs négatives : coût des carburants, coût de l’entretien, pollution etc. Alors que dans le même temps, on prône des valeurs de développement durable, on incite (parfois de manière coercitive6 ) l’usage des transports en communs, du vélo7 , ou à la pratique du covoiturage pour les commutations journalières.

Charles Wassmer responsable de l’innovation et de la prospective chez PSA revendique pourtant la prise en compte du « renversement de paradigme de société » dès 1996 dans son travail de conception du « Berlingo » de Citroën. « Pendant des années, le progrès économique, le progrès technique étaient perçus comme synonyme de confort, de progrès humain ; la société de consommation de masse, s’est ainsi construite avec des standards de consommation qui progressaient… On assiste à un retour de l’humain, à une importance extraordinaire du symbolique, alors que nous, nous sommes plutôt des industriels et des ingénieurs, vous imaginez le virage de pensée qu’il faut faire ». Ce retard en terme d’innovation est partagé par l’ensemble des pays européens qui se sont inscrits dès 2000 dans le « processus de Lisbonne » 8 afin de dynamiser la compétitivité économique de leurs entreprises à l’horizon 2010. L’axe central de la « stratégie de Lisbonne » est de « repenser les conditions de la compétitivité dans le cadre d’une économie de la connaissance, dans laquelle l’innovation joue un rôle majeur, où le capital humain et sa qualité sont décisifs pour la croissance, une économie qui a besoin d’un environnement favorable pour se développer pleinement ». Ainsi il faut « veiller à ce que la connaissance et l’innovation deviennent le moteur de la croissance européenne ».

Le « rapport Kok » (Kok 2004) souligne un bilan du processus de Lisbonne à mi-parcours plutôt mitigé : « Qu’il s’agisse des demandes de brevets, du nombre de chercheurs scientifiques, du classement des universités au niveau mondial, du nombre de prix Nobel ou des citations dans les revues scientifiques, l’Europe est toujours à la traîne des États-Unis. En Europe, le secteur des TIC représente 6 % du PIB contre 7,3 % aux États-Unis et ces dernières années, les investissements européens en biens d’équipement TIC sont invariablement restés inférieurs d’environ 1,6 % du PIB à ceux des États-Unis ». Et de conclure : « Ce qu’il faut à présent, c’est reconnaître l’importance de la société de la connaissance pour l’avenir de l’Europe et être déterminé à la bâtir. ». Le processus de Lisbonne est avant tout incitatif, il interpelle chaque état membre de la communauté européenne dans la projection de leur politique économique respective au regard des enjeux futurs. Chaque état peut donc définir sa propre stratégie en matière d’innovation. 

Inciter les entreprises françaises à innover

Le rapport du Sénat « Recherche et innovation en France : surmonter nos handicaps au service de la croissance » (Kergueris et Saunier 2008) montre « qu’aujourd’hui les pays qui tiennent le haut du pavé sont ceux qui consacrent le plus d’investissements à leur système de recherche et d’innovation et qui déposent le plus de brevets » et propose la projection suivante : « En 2020, les pays qui seront maîtres de leur économie seront ceux qui maitriseront la production d’innovations. »  Le rapport souligne la nécessité d’apporter un soutien à l’enseignement supérieur et à la recherche tout en accompagnant l’effort d’innovation des entreprises par l’intermédiaire d’initiatives publiques. En plus d’un ensemble de mesures fiscales10, il existe aujourd’hui 3 organismes principaux dont l’objet est de stimuler et d’accompagner l’innovation en France : Les CRI, l’OSEO et les Pôles de Compétitivité. a. Les CRI : « Centre Relais Innovation » ont été créé par la Commission Européenne en 1995. Les Centres Relais Innovation (CRI) favorisent les transferts de technologies innovantes en Europe. Ils aident à valoriser les brevets des entreprises et à leur faciliter l’acquisition de compétences ou d’une technologie innovante. Le rôle du CRI est d’accroître l’innovation et la compétitivité par le développement d’un réseau entre des connaissances, des technologies et des personnes.

Le CRI construit des partenariats et représente aujourd’hui le plus grand réseau de transfert de technologies au monde en impliquant 71 consortiums, 230 partenaires et en employant 2.000 personnes dans 33 pays. Par exemple, dans le cadre du développement de haut-parleurs ultraplats destinés à équiper des lieux publics, le CRI d’Ile de France a favorisé la mise en place d’un accord de coopération entre la société Plansonor11 et la société espagnole Accustel12 spécialisée dans la modélisation de vibrations acoustiques. b. OSEO : Créé en 2005 de la fusion de l’Agence Nationale de Valorisation de la Recherche (ANVAR) et de la Banque du Développement des PME, OSEO est « un guichet unique » proposant une gamme complète d’aides et de conseils en financement destiné aux projets innovants des PME. OSEO est placé sous la tutelle du ministère de l’Economie, de l’Industrie et de l’Emploi, ainsi que du ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche. OSEO « innovation » intervient dans les phases amont des projets d’innovation en proposant des financements aux entreprises tout en favorisant l’implication d’autres financeurs lorsque les investissements privés sont à ce stade du projet les plus difficiles à trouver. Ainsi, Exalead13 société française spécialisée dans les solutions d’indexation et de recherche de documents numérisés, qui équipe aujourd’hui les intranets de l’Air Liquide, BNP Paribas ou encore de Sanofi, a bénéficié, dès sa création en 2000, du soutien d’OSEO pour développer sa technologie de moteurs de recherches.

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