Simulations aux grandes échelles de panaches libre et impactant

Simulations aux grandes échelles de panaches libre et impactant

Etude de sensibilité à des   paramètres de simulations d’incendie

Les codes de CFD sont de plus en plus utilisés dans les études de sécurité incendie. Or plusieurs études [2, 5, 35, 61, 62] ont montré que ces codes étaient sensibles à certains paramètres d’entrée. Ce chapitre s’intéresse à étudier la sensibilité des paramètres d’entrée des simulations d’incendie et propose une méthode pour analyser cette sensibilité. Ce chapitre a fait l’objet d’un article (voir l’annexe D) en cours de publication dans le Journal of Fire Science.

Méthode proposée

L’ingénieur du désenfumage, qui va réaliser l’étude de sécurité incendie, va chercher à répondre à la question suivante :  est-ce que l’air, à une hauteur utile à l’évacuation, est suffisamment bon afin de permettre la bonne évacuation des personnes en localisant les sorties de secours et en n’étant pas intoxiqué ? . Pour répondre à cette question, l’ingénieur vérifie généralement que les champs de température et des gaz sont uniformes à une hauteur de 2m (excepté dans la zone du panache d’incendie) en réalisant des moyennes temporelles sur les différentes grandeurs étudiées. Pour cela, l’ingénieur va utiliser différents outils mis à sa disposition, à savoir, les modèles de zones et les codes à champ. Comme il a été expliqué dans l’introduction, les modèles de champ (codes CFD) sont de plus en plus utilisés dans les études du désenfumage étant donné qu’ils permettent la modélisation de cas plus complexes, l’obtention de grandeurs physiques supplémentaires et une meilleure visualisation des résultats vis-à-vis des modèles de zone. Ce chapitre s’intéresse uniquement au cas des modèles de champ. Le lecteur, intéressé par une étude similaire avec des codes à zone, est invité à lire l’analyse réalisée dans [12]. Le présent travail analyse la sensibilité des résultats, issus de simulations CFD, en faisant varier un à un les paramètres, autour d’une simulation de référence. Une distinction est faite entre les paramètres implicites et les paramètres explicites. On appelle paramètres explicites, tous les paramètres qui ont un sens physique et dont la valeur a été discutée en concertation entre le bureau d’ingénierie et les décideurs du projet (puissance du foyer, débit d’extraction. . . ). On appelle paramètres implicites, tous les autres paramètres qui ont été définis par le bureau d’ingénierie et également les paramètres par défaut du modèle (maillage, modèle de sous maille, coefficient d’échanges thermiques. . . ). Les résultats sont analysés par une variable unique, qui permet de donner un score à la simulation. Ce score permet de savoir si la pièce est sécurisée, d’un point de vue du désenfumage, ou si un risque existe. Dans le présent travail, cette variable est appelée variable d’intérêt. Dans 83 Etude de sensibilit é´ a des param ` etres de simulations d’incendie ` Figure 4.1 – Configuration de la pièce ; les portes cyan, bleue, verte and jaune sont respectivement numérotées portes 1, 2, 3 et 4. les parties suivantes, la méthode présentée est mise en application sur un cas d’étude défini.

Cas d’étude

Le cas représente un feu dans une pièce carrée de 15m de cˆoté et 5, 5m de hauteur. Quatre portes, représentant les amenées d’air, sont réparties de manière à ce qu’il n’y ait pas de symétrie au sein de la pièce. Le compartiment est équipé d’une extraction des gaz chauds, réalisée à la périphérie du plafond, imposée à 5, 9m3/s. La solution de désenfumage retenue est donc une amenée d’air naturelle et une extraction mécanique des gaz chauds et produits de combustion. Le foyer est situé au centre de la pièce, sur le sol, et sa puissance est de 1MW, définie par une analyse d’expert. Les simulations ont été réalisées par la version 5 de FDS, avec une modélisation de la turbulence réalisée par une Simulation aux Grandes Echelles. Malgré les résultats obtenus dans la partie précédente, ´ le modèle Smagorinsky constant a été choisi comme modèle de sous maille. En effet, ce dernier est très largement utilisé par la communauté incendie étant donné qu’il donne des résultats acceptables et qu’il met peu de temps à tourner. De plus, dans cette étude, nous sommes intéressés à étudier des résultats relatifs et non à modéliser la réalité de manière à appliquer la méthode proposée. Le maillage est réalisé par des volumes de contrˆole uniformes et cubiques, de 25cm de cˆoté. La configuration du cas d’étude est représentée sur la figure 4.1. Comme il a été expliqué dans la partie précédente, de manière à appliquer la méthode proposée, une variable d’intérêt doit être définie. Dans la plupart des études, la hauteur de l’interface entre la couche des gaz chauds (couche chaude) et la couche de l’air frais (couche froide) est prise comme critère de sécurité. Selon l’IT 246, cette hauteur ne doit jamais être inférieure à 1, 80m. La figure 4.2 représente l’évolution avec la hauteur de la température moyenne, hors du panache. Cette figure montre qu’il est difficile de définir une hauteur d’interface entre les couches chaude et froide. C’est pourquoi, le critère retenu pour ce cas d’étude est la température moyenne à une hauteur de 2m. La figure 4.3 représente une carte de la température moyenne à 2m. La zone du panache d’incendie a été gardée dans le calcul de la température moyenne à 2m, étant donné que la retirer induit une part d’arbitraire, alors que la laisser ne modifie pas beaucoup le résultat. La variable de sensibilité choisie est : T 2m c =< Txx > +δTxx, (4.1) 84 Resultat de l’analyse de sensibilit é´ 0 1 2 3 4 5 20 40 60 80 100 120 140 160 z (m) T (C) Figure 4.2 – Evolution de la température, moyennée temporellement durant le régime ´ stationnaire, le long de l’axe (x, y) = (7.5, 2.25), pour la simulation de référence. avec xx représentant le label d’une simulation, < Txx > la moyenne temporelle prise entre 600s (début du régime statistiquement établi) et 3 600s (fin de la simulation) et δTxx correspondant à deux fois l’écart-type, calculé sur le même intervalle de temps, de la température moyenne à 2m. La variable d’intérêt est un indicateur de la sécurité au sein de la pièce. Cette variable permet de calculer une coefficient de sensibilité γq, pour n’importe quel paramètre q, pour lequel on cherche à étudier la sensibilité : γq = qref T 2m c (qref ) × ∂T2m c ∂q . (4.2) 4.3 Résultat de l’analyse de sensibilité 4.3.1 Sensibilité aux paramètres explicites Les paramètres explicites qui ont été étudiés sont la puissance convective, Q˙ c, et le débit extrait au niveau de l’exutoire, Q˙ e. Pour le premier paramètre, seule la part convective de la puissance a été étudiée. Celle-ci est égale à 70% de la puissance totale Q˙ , c’est-à-dire à 700kW. Pour étudier la sensibilité de ce paramètre, la puissance convective a été variée de 600 à 800kW, les modèles de combustion et de rayonnement étaient désactivés et le débit d’extraction des gaz chaud fixé à 5.9m3/s. Le coefficient de sensibilité obtenu pour ce paramètre est 35%. Concernant le second paramètre, le débit d’extraction des gaz chauds a été varié de 4.4 à 7.9m3/s, en gardant un puissance convective de 700kW, avec les modèles de combustion et de rayonnement désactivés. Le coefficient de sensibilité obtenu est de −28%. Ces deux pourcentages n’ont aucune valeur physique. Ils servent uniquement de référence pour les paramètres implicites. Si jamais le coefficient de sensibilité d’un des paramètres implicites était aussi élevé que ceux des paramètres explicites, alors cela signifierait que ce 85 Etude de sensibilité a des parametres de simulations d’incendie ` ’./local00_temp2m.txt’  Figure 4.3 – Carte de la température, moyennée temporellement durant le régime stationnaire, à 2m de hauteur pour la simulation de référence. paramètre implicite est aussi influent que les paramètres explicites. Celui-ci nécessiterait alors d’être traité comme un paramètre explicite. 

Sensibilité aux paramètres implicites

La sensibilité de plusieurs paramètres implicites a été étudiée. Cette partie présente les résultats obtenus. Dans un premier temps, c’est l’aire du foyer, AS, qui a été variée, gardant une puissance convective de 700kW, un débit d’extraction à 5.9m3/s et avec les modèles de combustion et de rayonnement désactivés. Le coefficient de sensibilité obtenu est de 0.4%. Ce dernier étant très faible par rapport à ceux des paramètres explicites, on peut en conclure que le paramètre  aire du foyer  n’influe pas beaucoup sur les résultats des simulations. Le paramètre  coefficient d’échanges thermiques , he, a également été étudié, variant de 5 à 30W/m2/K. Pour ces simulations, la simulation de référence a changé. En effet, dans la simulation de référence, labellisée 10, les parois de la pièce sont adiabatiques (he = 0W/m2/K), impliquant que le coefficient de sensibilité serait toujours égal à 0. De manière à pouvoir comparer les simulations entre elles, une nouvelle simulation de référence (uniquement pour étudier ce paramètre) a été mise au point, fixant un coefficient d’échanges thermiques de référence : href = ρcpQi AS . (4.3) Ce coefficient de référence est égal à 6.3W/m2/K, donnant un coefficient de sensibilité de −11.6%. Le paramètre  coefficient d’échanges thermiques  est donc plus influent que le paramètre  aire du foyer . Cependant, il est toujours plus faible que ceux des paramètres explicites. 86 Necessit é d’aller au-del ´ a de cette analyse ` La simulation de référence, labellisée 10, a été menée avec une extraction des gaz chauds, imposée à 5.9m3/s, et avec une amenée d’air frais calculée par FDS. Cette configuration a un avantage puisqu’on ne se pose pas de question sur la répartition des amenées d’air, mais a des inconvénients puisque les pertes de charge au niveau des portes sont très difficiles à estimer par les logiciels. Il est donc nécessaire d’analyser la sensibilité de la répartition des débits insufflés entre les différentes portes. Pour cela, une nouvelle simulation de référence, labellisée 00, a été crée o`u l’on impose une insufflation totale de 4m3/s au travers des portes, avec une évacuation des fumées naturelle à la périphérie du plafond. L’insufflation est répartie de manière égale entre les quatre portes, soit une insufflation de 1m3/s par porte. Cette simulation impose toujours une puissance convective de 700kW avec les modèles de combustion et de rayonnement désactivés. Pour évaluer la sensibilité de la distribution d’air au travers des portes, plusieurs simulations ont été créées o`u le débit d’air de la porte 1 a été varié entre 0.85m3/s et 1.20m3/s. La différence entre le débit total d’air insufflé (4m3/s) et celui imposé au niveau de la porte 1, est réparti de manière uniforme entre les portes 2, 3 et 4. Le coefficient de sensibilité obtenu pour ce paramètre est de 30%. Cette valeur étant de l’ordre de grandeur de celles obtenues pour les paramètres explicites, elle nécessite une étude plus fine de manière à comprendre comment la répartition de l’air insufflé au niveau de la porte 1 change les résultats de la simulation. Cette partie est détaillée dans la partie suivante. La sensibilité du maillage a également été étudiée sur la simulation de référence labellisée 00. La taille des mailles a été variée de 0.25m à 0.125m, donnant un coefficient de sensibilité de −2.8%. Ce coefficient étant faible par rapport aux coefficients de sensibilité des paramètres explicites, le paramètre  taille des mailles  est peu influent sur les résultats (à condition d’avoir au préalable pris un maillage suffisamment fin). La valeur de la constante du modèle de sous maille Smagorinsky constant a été variée de 0.15 à 0.25. Le coefficient de sensibilité obtenu est de −5%. Ce dernier étant faible par rapport à ceux des paramètres explicites, le paramètre  constante du modèle de Smagorinsky constant  est peu influent sur les résultats.

Nécessité d’aller au-delà de cette analyse 

Influence du débit d’air insufflé au travers de la porte

Le coefficient de sensibilité du paramètre  répartition du débit d’air insufflé au niveau de la porte 1  étant aussi important que ceux des paramètres explicites, il nécessite une étude particulière afin de comprendre comment il change les résultats de la simulation. Plusieurs simulations ont donc été créées o`u le débit d’air insufflé au niveau de la porte 1 a été varié entre 0.0m3/s et 4.0m3/s. Comme pour les précédentes simulations, la différence entre le débit total d’air insufflé (4m3/s) et celui imposé au niveau de la porte 1, a été réparti de manière égale entre les portes 2, 3 et 4. La figure 4.4 montre l’évolution de la variable de sensibilité T 2m c en fonction du débit d’air insufflé au niveau de la porte 1. La valeur centrale indique la température moyenne à 2m et les barres d’erreur indiquent plus ou moins deux fois l’écart-type de la température moyenne (δTxx). La valeur supérieure des barres d’erreur indique donc la variable de sensibilité T 2m c . On observe sur cette figure que le paramètre  répartition du débit d’air insufflé au niveau de la porte 1  fait varier la variable de sensibilité de 65˚C à 120˚C, et que la variable d’intérêt est très sensible pour un débit d’air insufflé Qi1 compris entre 0.5m3/s et 1.5m3/s. Or c’est dans cet intervalle que la valeur de la simulation de référence labellisée 00 a été prise. La variation de la température moyenne à 2m est due à la création d’un tourbillon au centre de la pièce. Ce tourbillon est formé à cause de la non symétrie de la pièce. La figure 4.5 montre les coupes horizontales du champ de vitesse à 2m pour un débit d’air 87 Etude de sensibilit é´ a des param ` etres de simulations d’incendie ` 50 60 70 80 90 100 110 120 0 0.5 1 1.5 2 2.5 3 3.5 4 temperature at 2m volume flux through door 1 (m3/s) Figure 4.4 – Evolution de la température moyenne à 2 ´ m en fonction du débit d’air insufflé au niveau de la porte 1 (Qi1 ) ; les barres d’erreur indiquent plus ou moins 2 fois l’écart-type de la température moyenne (δTxx). insufflé Qi1 égale à 1.25m3/s (figure 4.5(a)) et 0.85m3/s (figure 4.5(b)). On observe sur cette figure que le tourbillon créé est plus important pour un débit d’air insufflé Qi1 de 1.25m3/s, que pour Qi1 égal à 0.85m3/s. La figure 4.6 montre l’évolution de la circulation de la vitesse le long de la ligne c englobant la région du panache à une hauteur de 2m : Γc = Z c u · dl. (4.4) La circulation Γc est liée aux tourbillons par le théorème de Kelvin, établissant que Γc est égale au flux de vorticité à travers la surface incluse par la ligne c. La circulation est calculée le long des lignes formant un carré de cˆoté 2a, exprimé en mètre, et centré au niveau du centre de la pièce. La figure 4.6 confirme que les tourbillons changent rapidement avec le débit d’air insufflé au niveau de la porte .

Table des matières

Introduction
1 Généralités sur les écoulements avec fortes variations de masse volumique
1.1 Equations de Navier-Stokes à faible nombre de Mach
1.1.1 Forme générale des équations
1.1.2 Approximation du faible nombre de Mach
1.1.3 Réduction de l’équation d’enthalpie
1.1.4 Forme finale du système d’équations
1.2 Equation de Poisson sur la pression
1.3 Prise en compte de la turbulence
1.3.1 Equations filtrées au sens de Favre
1.3.2 Fermeture des équations
1.4 Logiciel de simulation : Fire Dynamics Simulator
1.4.1 Présentation générale du logiciel
1.4.2 Les différents modèles physiques
1.4.3 Validation de Fire Dynamics Simulator
2 Les panaches d’incendie
2.1 Aspects phénoménologiques d’un panache flottant
2.2 La théorie des panaches
2.2.1 Approches des grandeurs gaussiennes et homogénéisées
2.2.2 Le nombre de Richardson au sein du panache
2.2.3 L’entrainement au sein des panaches
2.3 Spécificités des panaches d’incendie
3 Etude des panaches
3.1 Présentation des cas expérimentaux simulés
3.1.1 Cas expérimental d’un panache créé par une injection d’air chaud
3.1.2 Cas expérimental d’un panache créé par une plaque chauffante
3.1.3 Cas expérimental d’un panache créé par un bac de cylcohexane enflammé
3.1.4 Objectifs des simulations réalisées
3.2 Panaches créés par une injection d’air chaud
3.2.1 Visualisation des panaches
3.2.2 Analyse des profils radiaux de vitesse verticale et température
3.2.3 Evolution de la vitesse verticale et température le long de l’axe de la source
3.2.4 Conclusions sur les panaches simulés par une injection d’air chaud
3.3 Panaches créés par une plaque chauffante
3.3.1 Validation de la simulation de référence
3.3.2 Les flux au sein du panache
3.3.3 Les grandeurs homogénéisées
3.3.4 Le nombre de Richardson du panache et le coefficient d’entrainement
3.3.5 Influence de certains paramètres d’entrée du code FDS
3.3.6 Conclusions sur les panaches simulés par une plaque chauffante
3.4 Vers la simulation de cas réalistes
3.4.1 Présence d’un plafond
3.4.2 Source combustible
4 Etude de sensibilité à des paramètres de simulations d’incendie
4.1 Méthode proposée
4.2 Cas d’étude
4.3 Résultat de l’analyse de sensibilité
4.3.1 Sensibilité aux paramètres explicites
4.3.2 Sensibilité aux paramètres implicites
4.4 Nécessité d’aller au-delà de cette analyse
4.4.1 Influence du débit d’air insufflé au travers de la porte 1
4.4.2 Sensibilité globale des paramètres
4.5 Conclusions sur la sensibilité de certains paramètres d’entrée du code FDS
Conclusion
Bibliographie
Annexes
A Caractéristiques des différentes simulations et de leur maillage
B Exemple d’un fichier d’entrée du code FDS : la simulation P00S04C
C Développement analytique du flux turbulent de masse
C.1 Flux de masse moyen
C.2 Flux de masse total
D Sensitivity to boundary conditions for simulations of fires in enclosure
Abstract
1 Introduction
2 Fire in an enclosure : the problem and the method used for sensitivity analysis
2.1 Fire in an enclosure
2.2 Method used for sensitivity analysis
2.3 Reference simulation
3 Sensitivity of the simulations
3.1 Explicit and implicit parameters
3.2 Sensitivity to direct parameters
3.3 Sensitivity to indirect parameters
4 Beyond local analysis
4.1 Influence of volume flux through door
4.2 Global sensitivity to parameters
5 Discussion and perspectives

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