Adaptation du protocole de culture et d’observation des biofilms

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Introduction

Les microorganismes représentent la majeure partie de la biomasse totale de la matière vivante de notre planète. Ils regroupent les levures, les algues, les champignons, les protozoaires ainsi que l’ensemble des bactéries. Ces dernières sont une composante essentielle de notre environnement et de notre organisme. Cependant certaines bactéries peuvent être néfastes et sont capables de déployer des mécanismes de résistance afin de survivre à des conditions environnementales défavorables. Deux de ces mécanismes de résistances sont la formation de spores et la génération de biofilms.
La majorité des bactéries (80% de la biomasse bactérienne (Davies, 2003, Richards and Melander, 2009)) est capable de survivre en formant des biofilms. Les bactéries sous forme planctonique adhèrent sur une surface ou se mettent à une interface air/liquide où elles forment alors des amas structurés et produisent une matrice protectrice d’exopolysaccharides (EPS). Ces biofilms sont présents sur de nombreuses surfaces biotiques ou abiotiques de notre quotidien comme les parois de la douche ou même sur les dents (Fernandes, Bhavsar et al., 2018). Dans le domaine hospitalier, les biofilms se développent sur le matériel médical (cathéters, pacemakers, prothèses, sondes, …) et deviennent un réservoir de bactéries à l’origine de maladies dites nosocomiales (Santos, Watanabe et al., 2011). Dans celui de l’agroalimentaire, ils se développent sur les surfaces en contact avec les aliments tout au long de la chaine de production provoquant de graves toxi-infections (Galie, Garcia-Gutierrez et al., 2018).
Certaines bactéries appartenant notamment aux genres Bacillus et Clostridium, ont la capacité de déclencher un processus appelé sporulation. Elles vont alors passer dans un état de dormance (activité métabolique quasi inexistante) et s’entourer de couches protectrices leur permettant de survivre plusieurs années dans des milieux défavorables sous forme de spores (Postgate, 1990). Elles retrouvent un état actif dit végétatif, grâce au processus de germination en retournant dans un milieu plus propice à leur croissance. Ces spores sont un enjeu majeur dans l’agroalimentaire où elles peuvent être à l’origine de toxi-infections sévères car certaines peuvent résister aux températures de stérilisation. Dans le domaine de la Défense, les spores sont classées comme potentielles armes biologiques. Elles ont déjà été utilisées lors d’attentats terroristes comme celui de 2001 aux Etats-Unis, où des lettres
contenant des spores de Bacillus anthracis (agent responsable de l’anthrax) ont causé la mort de 5 personnes et environ 300 millions de dollars de coût en décontamination (Schmitt and Zacchia, 2012).
Garantir l’efficacité d’inactivation de ces agents bactériens est donc l’objectif lors d’une opération de décontamination (réduction de 7 à 4 logs suivant le domaine). Cependant, les spores bactériennes sont capables de résister aux traitements physiques tels que la chaleur et les radiations UV, ainsi qu’aux traitements chimiques usuels, grâce à des moyens de protections qui leurs sont propres, comme une faible perméabilité et une forte protection de l’ADN (Nicholson, Munakata et al., 2000, Young and Setlow, 2003, Reineke, Mathys et al., 2013). De même, les bactéries au sein du biofilm sont protégées par une matrice d’EPS, leur permettant d’acquérir une résistance aux antibiotiques et aux désinfectants (Ghafoor, Hay et al., 2011). Les professionnels des secteurs touchés par ces contaminations doivent donc disposer de techniques de décontamination efficaces et facilement employables sur ces micro-organismes résistants. La contamination ne se restreint pas aux surfaces horizontales et faciles d’accès (sols), ces nouvelles techniques de décontamination doivent permettre de décontaminer tous les types de surfaces (verticales et obliques) d’infrastructures (wagons, bureaux, cuves, systèmes de ventilation, …). L’utilisation de sprays liquides désinfectants présente l’inconvénient d’avoir un temps de contact limité (quelques minutes) sur ces formes de résistances pour décontaminer entièrement les surfaces verticales. De même, l’emploi d’outils nécessitant un contact direct avec la contamination (lingettes) est inutilisable en cas de contamination de zones difficiles d’accès.
Cette étude s’inscrit dans le cadre d’un projet du Commissariat à l’Energie Atomique de Marcoule (CEA). Le CEA a commencé les recherches en 2000, sur des techniques de décontamination radioactives par des mousses à faible humidité contrôlée permettant à la fois de réduire la quantité de liquide utilisée et d’augmenter le temps de contact sur les surfaces (Faure, Fournel et al., 2002). Plus récemment, des formulations de mousse biocide ont fait l’objet d’un brevet (Faure, Le Toquin et al., 2016), puis d’un financement de thèse pour une approche plus duale. L’objectif est de pouvoir cibler aussi les domaines de la santé et de l’agroalimentaire avec l’ajout du modèle des biofilms dans les études d’efficacité de décontamination. La mousse biocide peut être employée en talochage sur des surfaces contaminées ou en remplissage dans des espaces clos ou mi-clos difficilement accessibles à l’homme (tuyaux, bouches d’aération, grandes cuves …). Les mousses sont adaptées aux opérations de décontamination des sites où l’accès est difficile (tuyaux, plafonds, murs avec ou sans fissures, zones situées derrière les équipements, …) grâce à leur stabilité en remplissage, leur récupération facilitée après utilisation et leur besoin faible en matières premières nécessaires. Dans ce contexte, le travail de thèse doit permettre d’approfondir les connaissances sur les mécanismes d’action de ces mousses de décontamination biocides sur les formes de résistance bactérienne tels que les spores et les biofilms. Le travail est réalisé entre le Laboratoire de Microbiologie Signaux et Microenvironnement (LMSM) d’Evreux et le CEA. De plus, au sein même du CEA, deux équipes collaborent au projet de thèse : le Laboratoire d’Innovations technologiques pour la Détection et le Diagnostic (LI2D) de la Direction de la Recherche Fondamentale (DRF) et le Laboratoire des Procédés Supercritiques et de Décontamination (LPSD) de la Direction de l’Energie Nucléaire (DEN).
Ce manuscrit débute par une synthèse bibliographique sur les spores, les biofilms et les moyens de décontamination existants en détaillant les propriétés physico-chimiques des mousses. Dans un premier temps est décrit la structure, le mode de vie, l’impact et les moyens de résistance de la spore bactérienne puis du biofilm. Une partie sur les moyens de décontaminations existants permet d’introduire les deux désinfectants utilisés dans cette l’étude (le peroxyde d’hydrogène et l’hypochlorite de sodium). Ces désinfectants ont été choisis suivant différents critères de performance comme la vitesse d’efficacité du produit ou son efficacité de décontamination comme la diminution des bactéries de 7 logs et sa compatibilité avec les matériaux de construction. Enfin, le chapitre termine sur une présentation des notions physico-chimiques des mousses abordées dans ce travail.
Le deuxième chapitre expose les matériels et les techniques employés afin d’étudier les modes d’action des mousses biocides et répondre aux questions posées en début de thèse : quelles sont leur efficacité, comment réagissent-elles sur les surfaces, à quelle vitesse et quels sont les facteurs influençant leur efficacité ? Ce chapitre recense les protocoles et matériels ayant permis la production et l’évaluation de l’efficacité de décontamination des spores et des biofilms. Cette évaluation a été réalisée avec des supports traités en position horizontale ou en position verticale, ainsi que des essais où le support contaminé est placé à la verticale dans de la mousse (remplissage). La microscopie confocale permet de compléter l’utilisation du comptage bactérien pour mesurer l’efficacité de décontamination des mousses

Table des matières

Introduction
1. Etude bibliographique
1.1. Premier mode de résistance bactérien étudié : La spore bactérienne
1.1.1. Structure et composition des différentes parties de la spore
1.1.1.1. L’exosporium
1.1.1.2. Le manteau
1.1.1.3. La membrane externe
1.1.1.4. Le cortex et la paroi cellulaire germinative « germ cell wall »
1.1.1.5. La membrane interne
1.1.1.6. Le core
1.1.2. La sporulation, mécanisme et étapes d’un mode de résistance
1.1.2.1. Induction de la sporulation
1.1.2.2. Formation de la spore bactérienne
1.1.3. Etapes et mécanismes de la germination
1.1.3.1. Activation
1.1.3.2. La germination
1.1.4. Les spores bactériennes dans notre environnement et leurs impacts
1.1.5. Outils de résistance des spores bactériennes à la décontamination
1.1.5.1. Les parois de la spore comme barrière de résistance
1.1.5.2. Faible hydratation, faible perméabilité et composition minérale du core
1.1.5.3. Le rôle protecteur de l’acide dipicoloinique (DPA)
1.1.5.4. Protection de l’ADN par les protéines SASP et son système de réparation
1.1.5.5. Acquisition des résistances durant la sporulation
1.1.5.6. Différences de résistance suivant le terrain génétique et les conditions de sporulation
1.2. Les biofilms bactériens
1.2.1. Une composition à la fois variée et structurée
1.2.1.1. Les bactéries au sein du biofilm
1.2.1.2. L’exopolysaccharide (EPS)
1.2.1.3. Architecture d’un biofilm
1.2.2. Une formation en plusieurs étapes
1.2.2.1. Colonisation de la surface par les bactéries :
1.2.2.2. L’adhésion
1.2.2.3. La maturation
1.2.2.4. Le détachement et la recolonisation
1.2.3. Les biofilms bactériens nous entourent et nous impactent
1.2.4. La résistance des biofilms bactériens à l’environnement et aux désinfectants
1.3. Les nouveaux procédés de décontamination sous forme de mousse
1.3.1. Les moyens de décontamination existants
1.3.2. La mousse
1.3.2.1. Généralités sur les mousses aqueuses
1.3.2.2. La formulation de la mousse
1.3.2.3. Structure d’une mousse aqueuse
1.3.2.4. Vie d’une mousse
1.3.2.5. Rhéologie des mousses
1.4. Conclusion de l’étude bibliographique et problématiques de la thèse
2. Matériels et méthodes
2.1. Matériels
2.1.1. Les souches bactériennes employées au cours de l’étude
2.1.1.1. Les spores
2.1.1.2. Les bactéries végétatives.
2.1.2. Formulation et génération des mousses biocides de l’étude
2.1.2.1. Formulation de la solution moussante
2.1.2.2. Génération de la mousse
2.1.3. Inventaire des surfaces servant de support de test
2.1.4. Substances interférentes
2.1.5. Substances neutralisantes
2.2. Méthodes
2.2.1. Techniques de culture
2.2.2.1. Production de spores
2.2.2.2. Production de biofilm
2.2.2. Protocole de décontamination des spores et des bactéries végétatives
2.2.2.1. Evaluation de l’efficacité de décontamination en position horizontale
2.2.2.2. Evaluation de l’efficacité de décontamination en position verticale (protocole V)
2.2.2.3. Evaluation de l’efficacité de décontamination et sa cinétique en remplissage
2.2.1.4. Tableau récapitulatif des protocoles d’évaluation de l’efficacité de décontamination des spores et bactéries végétatives par les mousse ou solutions liquides
2.2.4. Protocole d’évaluation de l’efficacité de décontamination des mousses sur des biofilms bactériens
2.2.4.1. Protocole de mesure de l’efficacité de décontamination par détachement et comptages des bactéries composant les biofilms
2.2.4.2. Protocole d’observation de l’efficacité de décontamination par la microscopie
fluorescence et confocale
2.3. Etude des propriétés physico-chimiques de la mousse
2.3.1. Etude de la mouillabilité
2.3.1.1. Etude de l’angle de contact d’une goutte posée sur une surface
2.3.1.2. La tension superficielle de la solution
2.3.2. Etude de la stabilité des mousses générées
2.4. Traitement statistique des données
2.4.1. Comptage des bactéries viables pour l’évaluation de l’efficacité de décontamination 92
2.4.2. Détermination de la constante d’inactivation et de la loi d’Arrhenius
3. Résultats et discussions
3.1. Etude des mécanismes d’action biocide des mousses sur les spores bactériennes suivant leurs différentes mises en oeuvre
3.1.1. Efficacité de décontamination des surfaces contaminées en position horizontale
3.1.1.1. Sur différents matériaux d’infrastructure (protocole H)
3.1.1.2. Substances interférentes (protocole Hsali)
3.1.2. Efficacité en position verticale (protocole V)
3.1.3. Efficacité en remplissage
3.1.3.1. Cinétique de décontamination de spores libres injectées dans la solution liquide ou
mousse (Rinjectées)
3.1.3.2. Cinétique de décontamination suite à l’immersion d’un support contaminé avec
spores dans la solution liquide ou la mousse (protocole Rsupport)
3.1.3.3. Efficacité de décontamination des mousses à différentes températures
3.1.3.4. Efficacité de décontamination suite à l’immersion d’un support contaminé avec
spores et salis par des substances interférentes dans la mousse (portocole Rsali)
3.1.4. Conclusion de l’étude de l’efficacité de décontamination des mousses biocides sur les spores bactériennes suivant les différentes mises en oeuvre
3.2. Etude des mécanismes d’action biocide des mousses biocides sur les biofilms bactériens155
3.2.1. Adaptation du protocole de culture et d’observation des biofilms
3.2.1.1. Choix de la technique de lavage et de la technique de détachement du biofilm
3.2.1.2. Choix du support
3.2.1.3. Choix de la souche
3.2.1.4. Choix des conditions de formation du biofilm
3.2.1.5. Mise au point de la technique de dépôt des microorganismes pour effectuer
comptages bactériens
3.2.1.6. Mise au point de la technique de coloration et d’utilisation du microscope confocal
3.2.2. Efficacité des procédés de décontamination sur les biofilms bactériens
3.2.2.1. Différence d’efficacité entre le traitement par la solution liquide et celui par la
3.2.2.2. Transfert des bactéries du biofilm dans la mousse
3.2.2.3. Evaluation du temps de contact entre la mousse et le biofilm
3.2.2.4. Efficacité de décontamination de la mousse NaOCl sur différents matériaux en
horizontale et en remplissage
3.2.3. Conclusion de l’étude d’efficacité de décontamination des mousses sur les biofilms bactériens
4. Conclusions et perspectives

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