Analyse et enseignements du processus d’institutionnalisation de la GRI

Analyse et enseignements du processus d’institutionnalisation de la GRI

L’analyse du processus d’institutionnalisation de la GRI comporte au moins deux séries d’enseignements. Une première série est relative aux processus d’institutionnalisation et aux formes d’entrepreneuriat institutionnel dans les champs émergents et faiblement cadrés (section A). A un second niveau, l’expérience de la GRI comporte une série d’enseignements concernant le degré de maturité du modèle de pilotage du développement durable comme contrôle externe (section B). processus d’institutionnalisation générative et de développer des perspectives théoriques nouvelles pour l’étude de leur pilotage. Par rapport aux approches traditionnelles, l’analyse de la GRI suggère des formes plus distribuées, coopératives, et génératives d’entrepreneuriat institutionnel (1). De même, l’existence des phases entrepreneuriale et managériale du développement de la GRI tend à remettre en question l’idée d’une entrepreneur institutionnel omnipotent, structurant l’ensemble du processus d’institutionnalisation (2). Nous montrons alors que le rôle de l’entrepreneuriat institutionnel apparaît plus clairement comme un rôle de pilotage du processus d’institutionnalisation (3). Nous analysons ensuite la manière dont les travaux néo institutionnalistes prennent en compte les deux variables critiques du processus d’institutionnalisation de la GRI : la légitimité et la faisabilité des standards. Nous discuterons de la pertinence de ces variables et de la manière dont leur articulation peut permettre de rendre compte de différents processus d’institutionnalisation (4). concernant les formes d’entrepreneuriat institutionnel à l’œuvre dans des processus d’institutionnalisation générative. Comme nous l’avons souligné, ces processus se distinguent d’autres situation dans la mesure où le processus d’institutionnalisation est indissociable d’un processus d’apprentissage et de conception de nouvelles pratiques. Si l’expérience de la GRI est partiellement convergente avec les analyses traditionnelles de l’entrepreneuriat institutionnel, elle s’en distingue aussi de manière notable, à différents niveaux.

L’histoire de la GRI est partiellement convergente avec les approches traditionnelles de l’entrepreneuriat institutionnel. Ainsi, on retrouve l’importance de la dimension politique de l’action des entrepreneurs initiaux. A travers l’étude de la phase entrepreneuriale, nous avons par exemple montré qu’une des dimensions cruciales de l’action des entrepreneurs institutionnels a consisté à mobiliser un réseau soutenant la démarche, à problématiser et théoriser le projet afin de le rendre acceptable et attractif pour les différentes parties prenantes, à obtenir des fonds permettant de développer le projet, etc. Premièrement, ces approches sont fondées sur l’hypothèse selon laquelle les entrepreneurs institutionnels ont des intérêts clairs et définis qu’ils cherchent à promouvoir à travers leurs projets institutionnels. Cette hypothèse apparaît contestable dans le cas de la GRI : les contours du projet sont particulièrement flous au début du projet ; de même, les termes du débat ne sont pas encore définis et il est impossible d’identifier plusieurs projets en compétition, qui correspondraient à des projets stratégiques différents, spécifiques à chaque entrepreneur. Il semble que les acteurs soient plus proches d’une situation « d’incertitudes partagées » (Aggeri, 1999) dans lesquels les entrepreneurs institutionnels, plutôt que de faire valoir leurs solutions, cherchent à coopérer pour faire émerger les termes du débat. Selon Franck Aggeri, une situation d’incertitude partagée se différencie des situations d’asymétries d’information par le fait qu’aucun acteur n’a de vision claire de son intérêt et de l’issue du processus. Il existe alors un intérêt mutuel à coopérer pour générer des apprentissages collectifs qui permettront aux acteurs de découvrir leurs intérêts.

Dans ce cadre, l’objet de l’entrepreneuriat institutionnel dans des situations d’institutionnalisation générative est de cadrer et de guider des processus d’apprentissages collectifs dans des voies qui ne peuvent être définies à l’avance. Ainsi, dans le cas de la GRI, l’action des entrepreneurs institutionnels a consisté à organiser l’exploration collective d’un nouvel espace d’action en matière de reporting développement durable. A travers leur action, les entrepreneurs institutionnels créent le champ du reporting environnemental et social plus qu’ils ne le capturent. Ils structurent ainsi les apprentissages collectifs mais ne prescrivent pas la forme finale des standards de la GRI. Comme le montrent les formes d’organisation identifiées au cours de la phase entrepreneuriale, l’action des entrepreneurs institutionnels vise à stimuler des apprentissages rapides (par l’expérimentation et l’identification des meilleures pratiques) et à concevoir rapidement un premier prototype d’un référentiel testable. GRI sont plus distribuées et coopératives que ne le suggèrent les études traditionnelles sur l’entrepreneuriat institutionnel. Plutôt que de chercher à promouvoir des projets concurrents, les quatre entrepreneurs institutionnels ont choisi d’unir leur forces dans un projet commun visant moins à définir un référentiel exhaustif qu’à créer les conditions d’émergence d’un nouveau champ du reporting sociétal. Dans cette perspective, aucun acteur n’est en position de prescrire l’ensemble du processus et la forme des institutions. On observe plutôt différents entrepreneurs institutionnels, conscients des lacunes de leurs savoirs, et engagés dans une démarche d’exploration collective. Plus que des représentants d’un projet institutionnel clair, ils cherchent à faire exister et à structurer ces explorations et ces apprentissages collectifs. Un des traits centraux de cette activité réside dans son caractère « génératif » : ainsi, la décision de positionner la démarche sur le reporting développement durable ouvre un espace de conception, permettant à différent acteurs de s’engager dans des relations de prescriptions réciproques, plus qu’elle ne ferme et qu’elle ne capture le processus.

 

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