Calcul du fluage propre par homogénéisation

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Les déformations spontanées

Le retrait thermique

Le dégagement de chaleur occasionné par la réaction d’hydratation est comprise environ entre 150 et 350 J/g de ciment. L’exothermie engendre une élévation de la température par rapport à la température initiale ; cette élévation peut atteindre 50 °C et plus en conditions adiabatiques. Elle est dépendante de la composition du ciment [84]. La chaleur dégagée augmente avec la quantité des phases les plus exothermiques du béton (C3A et C3S). L’hydratation de C3A conduit à un dégagement d’environ 750 J/g, tandis que l’hydratation de C3S à 500 J/g environ. L’accroissement de la finesse conduit également à l’augmentation du dégagement de chaleur. Les paramètres de composition agissant sur le retrait thermique sont examinés dans le paragraphe traitant des BHP. Pour les pièces libres de se déformer, le retrait thermique provoque des fissurations de peau par retrait empêché, dès que les épaisseurs dépassent quelques dizaines de décimètres [5]. Ces fissures sont la conséquence de gradients de contrainte, issus de gradients thermiques, entre la peau qui se refroidit rapidement par diffusion de la chaleur, et le coeur, qui reste pendant plus longtemps à des températures élevées. Poul-ies zones de reprise de bétonnage, des fissures peuvent être également provoquées par le refroidissement. Elles sont alors traversantes puisque le blocage de ces déformations affecte la totalité de l’épaisseur de l’élément. C’est le cas par exemple pour la reprise de bétonnage de voiles de forte épaisseur [6,2], Dans la phase de refroidissement de l’élément de structure, le vieillissement est parfois un facteur aggravant de la fissuration. Prenant l’exemple d’une poutre encastrée aux extrémités, constituée d’un matériau élastique non vieillissant, qui subit une élévation de température puis une baisse jusqu’à la température initiale. Des contraintes de compression s’y développent dans la phase montante puis s’annulent lors du retour à la température initiale, car le module n’a pas évolué. Au contraire, pour un béton en cours de durcissement, donc d’un caractère vieillissant, la même expérience va conduire à la création de contraintes de traction lors du retour à la température initiale, celles-ci étant provoquées par une augmentation du module.

Le retrait endogène (RE)

On a écrit ici les explications qui sont maintenant admises sur les origines du retrait endogène et qui ont été notamment abordées dans [34, 74, 2, 113].

Origine et mécanismes du retrait endogène

La cause du retrait endogène est la variation négative du volume absolu du matériau, qui apparaît lors de l’hydratation. Le Chatelier observa (à la fin du siècle dernier) des diminutions du volume absolu de l’ordre de 8 % par rapport aux réactifs [821, et ce phénomène porte son nom. Il observa également, que la diminution du volume absolu de l’ensemble liquide plus solide n’empêche pas une augmentation du volume apparent. Cela est du à la poussée des cristaux, de portiandite (Ca(OH)2)- ou d’ettringite (combinaison des sulfates avec le l’aluminate tricalcique) [17]. la valeur de la contraction se situe, pour les ciments Portland actuels, entre 8 et 12 %. Ces variations du volume apparent, entraînées par « la contraction Le Chatelier », sont limitées lorsque le durcissement de la pâte commence. Les contacts entre les hydrates freinent par la rigidité ainsi créée la poursuite de cette contraction. Cependant la réaction chimique se poursuit pendant très longtemps, et comme elle s’effectue par consommation de l’eau présente dans le réseau poreux, le retrait gêné, décrit précédemment, génère des tractions dans l’eau interstitielle (dépression capillaire), qui provoquent une compression du squelette solide [74]. La dépression provoque ensuite une vaporisation locale, qui participe elle-même à la contraction du squelette solide, grâce aux forces dues la tension capillaire des membranes, aux interfaces liquide/vapeur. L’intensité de ces forces varie localement en fonction de la taille transversale des pores. Ce processus s’effectue au sein d’un matériau évolutif, car l’hydratation modifie en permanence la porométrie du système. Finalement le développement de l’autodessiccation évolue vers un séchage progressif des pores de plus en plus petits [74], avec dans les pores non saturés une humidité interne qui baisse progressivement. Cette dernière remarque, s’illustre en énonçant les lois de Kelvin et de Laplace :
– loi de Laplace pour les capillaires cylindriques
Pc = Pl – Pm= 2 Yl/gCose/r (1-2)
p c : dépression capillaire
P} : pression de l’eau liquide
p m : pression du mélange gazeux air + vapeur
: tension superficielle de l’interface eau/air (y.cosG = 0,0729 N/m)
8: angle de mouillage
r: rayon du capillaire en supposant qu’il soit cylindrique
Figure 1-2 : schéma représentant l’interface entre la phase liquide et gazeuse dans un capillaire, définition de l’angle 9.
– loi de Kelvin :
la forme de la loi de Kelvin présentée ici est obtenue dans le cas où l’équilibre des pressions partielles et totale de l’air est atteint, et dans des conditions isothermes. Elle n’est pas valable pour décrire le chemin entre les états initiaux et finaux. Elle s’écrit : Pc = PI – Pm = fl5ï|n(h) (1-3) expression dans laquelle les constantes sont définies comme suit
R : constante des gaz parfaits (R = 8,3144 J/mol/K)
T : température absolue du milieu (K)
Mv : masse molaire de l’eau (Mv = 18 IQ’3 kg/mol)
PI : volume massique de l’eau (p\ = 1000 kg/m^)
h : humidité relative (h = (Py/Pvs)atm)
En combinant les 2 lois on trouve une relation entre l’humidité relative et la taille de pores concernés : i lc o s e = – P £ I l n ( h ) (1_4)
Pour l’eau, on néglige souvent le terme cos0, en observant que l’angle G est petit. Lorsque l’humidité relative interne diminue, la taille des pores partiellement remplis d’eau diminue également en même temps que la dépression capillaire augmente. L’application de la formule (1-4) permet de calculer la taille des pores atteinte pour une hygrométrie donnée, en vérifiant que l’eau est encore « capillaire » et non pas entièrement adsorbée sur les surfaces des pores (cf. § 3.2). L’application numérique de la formule 1-4 donne pour l’eau r(h) = V~!— r est calculé en À et h est sans unité (1-5) !n(h)
• Autres mécanismes envisageables.
Bien que le mécanisme par dépression capillaire permette de prévoir quantitativement le retrait endogène, et que l’on admette couramment maintenant qu’il s’agit du mécanisme principal, il peut être intéressant de présenter brièvement les autres phénomènes physiques envisageables. Ces mécanismes sont décrits dans [34, 74, 113].
• Variation de tension superficielle des solides.
Du fait de la dissymétrie des forces d’attraction que subissent les molécules de la surface d’un corps solide (ou liquide), des variations de distances interatomiques provoquent des tensions à la surface de ce solide. Cette tension superficielle varie en fonction du nombre de couches d’eau adsorbées ; en fait, elle diminue lorsque le nombre de couches adsorbées augmente. Par conséquent dans l’hypothèse où les pores de la pâte de ciment subissent dans le processus d’autodessiccation une diminution du nombre de ces couches adsorbées, l’augmentation de tension superficielle de la phase solide engendrerait alors un retrait. Cette hypothèse n’a pas reçue à ce jour de développement rigoureux, bien qu’il ait été proposé de traiter ce problème empiriquement, au travers d’une relation linéaire entre la part de retrait provoquée par ce phénomène et la variation de tension superficielle de la phase solide [114].
• Variation de la pression disjunctive.
Ce mécanisme est décrit et analysé dans [30]. 11 est fondé sur le fait que le nombre de couches d’eau adsorbées dépend de l’humidité relative. Si on augmente l’humidité relative, l’augmentation du nombre de couches a tendance à écarter les surfaces solides qui sont proches (pression de disjonction). Inversement, lors d’un processus de désorption, les parties solides qui subissaient des pressions de disjonction vont se rapprocher et provoquer ainsi un retrait. Ce mécanisme n’a pas pour l’instant été invoqué pour prévoir quantitativement le retrait endogène de la pâte de ciment.

Développement du retrait endogène

Le phénomène est fonction de la maturité puisqu’il se développe grâce à la contraction Le Chatelier, qui est elle même la conséquence directe de l’hydratation. Une définition de la maturité de la pâte de ciment est le rapport, à un temps donné, de la quantité d’eau effectivement consommée, à celle consommée pour l’hydratation totale du ciment. Des travaux théoriques récents [111], fondés sur une approche thermodynamique, ont démontré qu’il existe une relation, entre le retrait endogène de la pâte de ciment et le degré d’hydratation, du type :
ere = ß(x)x (1-6)
où x est le degré d’hydratation et ß(x) un coefficient qui dépend de x, et que l’on peut en première approche prendre constant : ß(x)=ß.
Conséquences du RE sur le comportement des structures
Le retrait endogène agit de manière homogène au sein du matériau ; s’il est empêché dans une direction (poutre ancré à deux extrémités par exemple), il produira des contraintes de traction uniformes dans la section perpendiculaire au déplacement empêché. Le béton fissure à des déformations voisines de 150 10″^. Une fissuration pourra se produire si la déformation de retrait endogène dépasse cette valeur, et affectera toute la section (fissuration de bloc [6]). Il est bien entendu que la présence d’acier diminue de manière significative le retrait macroscopique des pièces [67], et que la relaxation des contraintes dans le béton limite aussi la fissuration.
Le retrait de dessiccation (RD)
Mécanismes
L’Hermite et Mamillan [77] ont effectué, grâce à des sondes capacitives insérées dans le béton, des mesures de teneur en eau (fig. 1-3) en fonction de la profondeur, pour un échantillon dont l’une des faces pouvait sécher. Ils ont ainsi mis en évidence les gradients de teneur en eau qui accompagnent le retrait de dessiccation. Celui-ci résulte en effet d’un déséquilibre hygrométrique entre le béton et le milieu extérieur. Dans le cas où l’humidité relative extérieure est inférieure à celle interne, un processus de séchage se déclenche, et génère une diminution de volume. Dans le cas contraire on obtient un gonflement. Les mécanismes induits par le départ de l’eau des pores ont été discutés notamment dans [117] et [113] et regroupent les mécanismes décrits dans le paragraphe précédent. En effet, dans le cas du retrait endogène, la diminution de la quantité d’eau vient de sa consommation par le ciment, alors qu’il s’agit de son départ vers l’extérieur pour le retrait de dessiccation. Les deux mécanismes ont alors les mêmes effets à l’échelle microscopique (dépression capillaire). Ce dernier a été bien expliqué dans [45] et nous trouvons intéressant d’en reproduire ici un extrait traduit en français : « Soit un échantillon saturé par de l’eau liquide et, par un mélange formé de sa. vapeur et d’air (sec), ce mélange étant à la. pression atmosphérique. L’échantillon est soudain mis en contact avec l’extérieur, contenant le même mélange à la pression atmosphérique, mais d’une humidité relative plus basse que celle régnant initialement dans l’échantillon. Ceci engendre un déséquilibre thermodynamique, l’échantillon échange alors de la vapeur d’eau avec l’extérieur de telle manière que la. pression de vapeur dans l’échantillon décroisse, pour se rapprocher de celle de l’extérieur. Pour que l’eau liquide et sa vapeur restent en équilibre, la.pression du liquide doit aussi décroître.
Ceci entraîne une evaporation de l’eau, Puisque la pression du liquide décroît et que la. pression du mélange reste constante (atmosphère), la pression capillaire augmente. Le squelette est soumis à des compressions internes de plus en plus fortes qui ont pour effet de contracter l’échantillon : c’est le retrait de dessiccation.  »
De plus, pour un échantillon donné, on constate une proportionnalité entre le retrait de dessiccation et la perte de masse [34], Sur la figure 1-4, extraite de [112], la corrélation est traduite pour des pâtes de ciment de rapport e/c = 0,5, La proportionnalité n’est ici valable que dans un domaine de perte inférieure à 15 %, car ensuite la pente s’accentue et le retrait devient plus grand pour une perte donnée. En faisant remarquer qu’une perte de 15 % de la masse totale correspond, pour ce dosage, à une perte de 45 % de l’eau totale, on peut imaginer que le comportement bilinéaire est ici dû à un changement de mécanisme, après que tous les capillaires ont été « vidés ». Des essais du même type sur béton ont montré également la proportionnalité entre la déformation macroscopique et la perte en poids, du moins dans un certain domaine [66] (fig. 1-5). La droite de régression ne passe pas ici par l’origine, ce qui est interprété par l’auteur comme une fissuration de peau au début du séchage, qui retarde le début des déformations. Ce phénomène a été également décrit dans [36].

Développement du retrait de dessiccation

Le retrait de dessiccation ayant pour origine une diffusion de la vapeur d’eau, on peut montrer par une analyse dimensionnelle que la variable gérant le processus a la dimension de T/L^. Il s’avère ainsi que beaucoup de modèles empiriques qui calculent le retrait prennent en compte le rayon moyen, r, de l’élément de structure, par une fonction dont la variable est du type t/rA Appliquons par exemple le règlement CEB, dans lequel le modèle donne le retrait total, la cinétique étant décrite par une fonction du type :
•\0,5
0,035h2 + t – t s
expression dans laquelle :
t-tg est la durée du séchage ;
hg est le rayon moyen tel qu’il est défini dans le CEB c’est à dire hg = 2.Ac/u, où Ac est l’aire de la section soumise au séchage naturel et u le périmètre de cette section.
Appelons x la valeur de cette fonction à un temps de mesure donné, tel que : 0,035h02x2
On calcule le temps correspondant à différentes valeurs de x pour une éprouvette 16×32, c’est à dire d’un rayon moyen de 80 mm, ainsi que pour un mur de 20 cm d’épaisseur séchant par ses 2 faces (rayon moyen de 200 mm). Les résultats figurent dans le tableau 1-1 suivant. Ainsi, une structure courante en béton ordinaire aura atteint 98 % de son retrait potentiel, après 93 ans, ce qui correspond à 15 ans de mesure sur une éprouvette de 16 cm de diamètre.
valeur de x
090 095 096 0,97 0,98
t-ts pour ho = 80 mm 2,6 5,7 7,2 10 15
en années
t-ts pour ho = 200 mm 1 M 35,5 49 61 93~
en années
Tableau 1-1 : Application du modèle du CEB (applicable aux BO) au calcul du temps nécessaire, en années, pour atteindre une fraction x de l’amplitude finale du retrait, pour 2 rayons moyens différents.

Conséquences du retrait de dessiccation sur le comportement des structures

Une des conséquences majeures de cette description est l’existence d’un effet d’échelle du retrait de dessiccation, puisque celui ci est directement Hé à la perte d’eau. Si l’amplitude finale n’est théoriquement pas affectée par la taille des pièces, en supposant que celles ci puissent « sécher » totalement, la cinétique est d’autant plus lente que la pièce de béton est de forte épaisseur [2] (fig. 1-6). Comme le séchage est non uniforme dans le volume de l’échantillon, cette variation dans l’espace du degré hygrométrique interne est responsable de gradients de contraintes, mis en évidence dans [4], qui génèrent des tractions en peau et des compressions à coeur. Ces gradients conduisent la plupart du temps à des fissurations de peau [6, 21] (fig. 1-7).
Perte en eau (X du poide total)
Figure 1-4 : relation entre le retrait et la perte en poids pour des éprouvettes de pâte de ciment de rapport e/c = 0,5. Graphique de [112] reproduite dans [2].

Table des matières

Introduction générale
Chapitre 1 : Synthèse bibliographique
Chapitre 2 : Etude expérimentale
Chapitre 3 : Un modèle d’homogénéisation à deux phases pour
le calcul du module instantané du béton
Chapitre 4 : Calcul du fluage propre par homogénéisation
Chapitre 5 : Calcul du retrait endogène par homogénéisation
Chapitre 6 : Un modèle simplifié pour le calcul des déformations
Conclusion générale
Annexe 1 : Propriétés des matériaux utilisés
Annexe 2 : Courbes de retrait endogène des bétons BO à BIO
Annexe 3 : Courbes de fluage propre des bétons BO à BIO
Annexe 4 : Comparaison du modèle simplifié avec des données expérimentales

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