Couche de mélange compressible et zone de confluence

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Cadre de l’étude

L’aérothermodynamique des systèmes propulsifs est un des domaines de la mécanique des fluides où des progrès décisifs restent à réaliser pour améliorer les performances des ensembles moteurs, en terme de bilan de poussée, de stabilité, de fiabilité et de réduction de nuisances (bruit, émis-sion de polluants, etc.). Or, les systèmes propulsifs mettent en jeu des phénomènes physiques très complexes : interactions de chocs, jets supersoniques, décollements massifs, couches de mélange fortement compressibles, organisations tourbillonnaires complexes dans les cas tridimensionnels, instabilités à grande échelle…
En outre, la plupart de ces phénomènes se produisent dans des gaz de composition souvent mal connue, à très haute température, avec des mécanismes de transfert complexes (voir figure 1.1). Avec le vol aux vitesses supersoniques – et a fortiori hypersoniques – on a vite pris conscience de l’importance du comportement de la prise d’air, du bon fonctionnement de la tuyère propulsive et des interactions entre jet et écoulement externe se produisant au niveau de l’arrière-corps.
La diversité des phénomènes rencontrés dans ces systèmes constitue un vaste champ d’étude dont on se propose d’appréhender quelques uns des aspects. Ce travail de thèse s’inscrit donc dans une préoccupation forte des concepteurs de lanceurs spatiaux et de moteurs d’avions souhaitant augmenter les performances des moteurs.

Tuyères supersoniques

La propulsion de l’étage principal d’un lanceur est assurée par un moteur alimenté en oxygène et hydrogène liquides, également appelés ergols cryogéniques. Ces derniers sont brûlés dans une chambre de combustion pour produire des gaz qui sont ensuite accélérés dans une tuyère de détente et fournissant la poussée.
Lorsque la tuyère est amorcée (état sonique au col), le régime d’écoulement ne dépend que du rapport entre la pression ambiante Pa (supposée variable) et la pression statique en sortie Pe,vac (où vac fait référence au vide) que celle-ci a dans le vide. Dans la pratique, on distingue trois différents régimes de fonctionnement d’une tuyère, dépendant des niveaux de pression régnant juste en sortie et dans le milieu ambiant :
– Si Pa/Pe,vac = 1, on parle de régime adapté.
– Si Pa/Pe,vac < 1, les gaz achèvent de se détendre dans le milieu ambiant. On parle de régime de sous-détente. Dans ce cas, un faisceau de détente apparaît à la lèvre de sortie de la tuyère.
– Si Pa/Pe,vac > 1, les gaz sont recomprimés dans la tuyère ou à la sortie de celle-ci. On parle alors de régime de sur-détente. Une onde de choc (choc de recompression ou de décollement) se forme à la lèvre de la tuyère. La couche limite enregistre un gradient de pression adverse, s’épaissit, mais reste attachée à la paroi jusqu’à la lèvre de sortie de la tuyère. Différentes structures de choc (réflexion régulière, réflexion de Mach et choc en chapeau [38]), décrites plus en détails par la suite, peuvent être observées dans le jet.

Ecoulement avec décollement

Si la pression aval continue à augmenter et dépasse un certain seuil 1 (Pa/Pe,vac >> 1, régime de forte surdétente), il arrive un moment où la couche limite ne peut plus contrer le gradient de pression adverse devenu trop important et décolle (voir figure 1.2). Soulignons, à ce niveau, que la prédiction de ce seuil de pression est un enjeu important pour les motoristes puisque ceux-ci souhaitent souvent éviter ou maîtriser le décollement. Les critères de décollement ont pour objectif d’estimer ce seuil.
Comme évoqué ci-dessus, plusieurs types de structure de choc peuvent être observés dans le jet.
Lorsque l’évolution du profil de la tuyère est douce (cas des tuyères de moteurs fusée de type TIC), le choc de décollement se réfléchit sur l’axe de symétrie. Deux types de réflexion peuvent alors se produire :
– l’une dite « régulière »2 (figure 1.3.a) où le choc incident I se réfléchit directement sur l’axe de symétrie en un choc oblique réfléchi IR ;
– l’autre dite « singulière » ou « de Mach » où le choc incident I se réfléchit en formant un choc normal à l’axe appelé disque de Mach (figure 1.3.b). Du point triple TP, où se rencontrent le choc incident, le choc réfléchi et le disque de Mach, émane une ligne de glissement SL. Cette discontinuité isobare sépare la poche subsonique en aval du choc fort de la région supersonique en aval du choc réfléchi IR.
On pourra noter que l’obtention de l’une ou l’autre de ces réflexions dépend fortement du rapport de pression et du contour de la tuyère. D’autre part, le phénomène de transition entre ces réflexions peut faire intervenir un effet d’hystérésis [4, 11].
Lorsque l’évolution du profil de la tuyère est fortement optimisée en poussée (TOC et TOP), il se forme un choc interne de focalisation (IS). Ce choc est dû au changement de courbure de la paroi au niveau du col. L’interférence de ce choc interne avec le choc de décollement (I) peut conduire à une structure de choc complexe dite « en chapeau »3 (figure 1.3.c). Cette structure serait le résultat de l’interférence entre le choc de décollement et la réflexion de Mach inverse4 du choc interne sur l’axe de symétrie. Là encore, l’obtention de l’une ou l’autre de ces structures dépend du profil de la tuyère, du rapport de pression et fait également intervenir un effet d’hystérésis [24].
En dernier lieu, concernant le décollement lui-même, deux types de configurations ont été observés expérimentalement (voir figure 1.3), puis confirmés numériquement.
2 Ce type de réflexion est théoriquement impossible dans les tuyères axisymétriques [4, 11] mais il arrive que le disque de Mach soit si petit que la réflexion est apparemment régulière.
3 De l’anglais « cap-shock ».
4 Voir [24] pour plus de détails sur la réflexion de Mach inverse et les principales différences entre un disque de Mach et un choc en chapeau
a) Réflexion régulière b) Réflexion de Mach c) Choc en chapeau
Fig. 1.3 – Représentation schématique de la réflexion régulière, de la réflexion de Mach et du choc en chapeau. I : choc incident, IS : choc de focalisation, IR : choc réfléchi, J : jet, SL : ligne de glissement, TP point triple, D : point de décollement, V : tourbillon (en haut). Moteur Vulcain au banc d’essai – Photos Snecma (en bas).

Décollements libre, restreint et transition

Le plus souvent, le décollement rencontré est libre (i.e. le jet décolle de la tuyère avant sa lèvre de sortie et s’en éjecte librement). Cependant, pour certains types de tuyères,

Table des matières

Table des matières
1 Introduction
1.1 Cadre de l’étude
1.2 Tuyères supersoniques
1.2.1 Ecoulement avec décollement
1.2.2 Décollements libre, restreint et transition
1.2.3 Charges latérales
1.3 Arrière-corps propulsifs
1.3.1 Couche de mélange compressible et zone de confluence
1.4 Organisation du mémoire
I Equations et Modélisation
2 Modélisation statistique de la turbulence
2.1 Introduction
2.2 Equations de Navier-Stokes instantanées
2.3 Equations du mouvement moyen
2.4 Modélisation des flux turbulents
2.5 Récapitulatif
2.6 Modèles de turbulence à équations de transport
2.6.1 Modélisation de proche paroi
2.6.2 Modélisation bas Reynolds
2.6.3 Modèle SST-Menter
2.6.4 Vers une nouvelle formulation du modèle SST
2.7 Effets de compressibilité
2.8 Mise au point des modèles de turbulence dans N3S-Natur
2.8.1 Limitation sur la production d’énergie cinétique turbulente
2.8.2 Limitation de la vorticité
2.8.3 Traitements des solutions non-physiques en phases transitoires
2.8.4 Conditions de réalisabilité
2.9 Validation partielle des modèles : Plaque plane de Mabey
2.10 Conclusions
3 Modélisation instationnaire de la turbulence
3.1 Modèles instationnaires
3.2 Equations filtrées
3.2.1 Modèle de paroi en LES
3.2.2 Approche DES (Detached Eddy Simulation)
3.2.3 Approche MILES (Monotonically Integrated Large Eddy Simulation)
3.3 Conclusions
4 Méthodes numériques
4.1 Mise en forme des équations
4.2 Corrections axisymétriques
4.3 Présentation du logiciel N3S-Natur
4.3.1 Formulation mixte éléments finis / volumes finis
4.3.2 Evaluation des flux convectifs
4.3.3 Evaluation des flux diffusifs
4.3.4 Couplage avec la turbulence
4.4 Remarques sur l’intégration en temps
4.4.1 Discrétisation explicite
4.4.2 Discrétisation implicite
4.5 Conditions aux limites
4.6 Décomposition de domaine et calcul parallèle
4.7 Conclusions
II Validation des modèles RANS
5 Ecoulements dans les tuyères supersoniques
5.1 Contextes scientifique & technologique
5.2 Tuyère DLR TIC
5.2.1 Courbure du disque de Mach
5.2.2 Exploration des régimes de fonctionnement de la tuyère DLR-TIC pour les
faibles rapports de pression
5.3 Tuyère à contour parabolique – R2Ch
5.3.1 Comparaison de l’écoulement avec et sans film
5.3.2 Analyse de l’écoulement en aval de l’injection secondaire
5.4 Conclusions
6 Ecoulements d’arrière-corps propulsifs
6.1 Introduction
6.2 Arrière-corps RTO 2D
6.2.1 Simulation numérique
6.2.2 Conditions aux limites et initiales
6.2.3 Sensibilité au maillage
6.2.4 Analyse des résultats
6.2.5 Pression sur le rétreint
6.2.6 Coefficient de traînée
6.2.7 Grandeurs moyennes et turbulentes le long du jet
6.3 Tuyère AGARD 3D
6.3.1 Simulation numérique
6.3.2 Description phénoménologique de l’écoulement
6.3.3 Profils de pression pariétale
6.4 Conclusions
III Validation des modèles instationnaires
7 Interaction onde de choc/couche limite
7.1 Introduction
7.2 Présentation du cas-test
7.3 Paramètres de la simulation
7.4 Résultats et discussions
7.4.1 Topologie de l’écoulement
7.4.2 Evolution des variables aérothermodynamiques
7.4.3 Evolution longitudinale de la pression pariétale et du coefficient de frottement
7.5 Conclusions
8 Conclusions & perspectives
IV Annexes
A Implicitation des termes source turbulents
A.1 Implicitation des termes source
A.2 Implicitation des termes de compressibilité
B Effets de redécoupage du maillage
B.1 Influence du sens de découpage du maillage
B.2 Maillage 1, non surcontraint
B.2.1 Calcul sur T1
B.2.2 Calcul sur T2
B.2.3 Calcul du gradient de vitesse axiale u au noeud de coin
B.3 Maillage 2 surcontraint
B.4 Analyse
C Anisotropie du maillage
D Phénomène de carbuncle
E Article présenté au « 5th Eur. Symp. on Aerothermodynamics for Space Vehicules »
F Article présenté au « 41st AIAA/ASME/SAE/ASEE/Joint Propulsion Conference »
G Article présenté au « 3rd Flow Control Conference, AIAA Paper 2006-3029 »

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