Entre tempo qualitatif et arrangements

À partir de textes fondateurs sur la méthodologie en sciences de gestion et particulièrement des méthodologies qualitatives, nous justifierons tout au long de ce chapitre les différents choix que nous avons eus à faire avant de présenter le matériau récolté lors d’entretiens semi-directifs. La méthodologie de cette étude s’inspire d’autres études aux objectifs similaires (caractériser l’absence de réaction ou des réactions controversées) : la thèse de Grandclaude (2015) qui met en lumière certaines organisations ne portant pas de considération pour la croissance. ; Bendel (2017) I don’t want to be green, qui décrit pourquoi certaines organisations (des laveries) décident de ne pas adopter des innovations ayant comme conséquences un meilleur impact environnemental alors que celles-ci amènent une quantité certaine d’avantages ; et la thèse de Baccouche (2019), sur le mensonge dans les organisations. Dans ces études, les méthodologies sont qualitatives, basées sur des entretiens semi-directifs, sur lesquelles nous nous sommes appuyés pour construire le design de cette recherche. Ce chapitre présente le design méthodologique de ce travail (1.). Le design consiste à « mettre en cohérence tous les composants de la recherche afin d’en guider le déroulement et de limiter les erreurs d’inadéquation » (Royer et Zarlowski 2014 : 168).

Dans l’approche épistémologique interprétativiste, les liens entre le chercheur et son contexte sont forts et l’environnement est un facteur d’influence important. De plus, ce positionnement épistémologique vise à développer une compréhension fine des mécanismes d’un phénomène. Pour associer ces deux dimensions dans le design de recherche, l’entretien auprès de personnes impactées par le phénomène étudié est un moyen efficace d’en obtenir des détails (Thietart et al. 2014). Une enquête qualitative regroupe un vaste champ de méthodologies et d’approches, qui poursuivent le but de connaitre l’avis d’individus sur un sujet. L’enquête qualitative se trouve être particulièrement efficace pour « explorer les phénomènes complexes, tels que les motivations individuelles, l’apprentissage organisationnel ou les processus de décision » (Gavard-Perret et al. 2018 : 86). – objet de recherche dévoilé ou caché : dévoiler un objet permet plus rapidement au répondant de l’aborder, mais peut aussi inciter le répondant à donner une « bonne réponse ». Étant donné que nous avions vérifié avec le répondant sa présence sur une plateforme de streaming avant l’entretien pour répondre au critère de sélection, la révélation du sujet s’est faite de facto assez tôt dans la prise de contact. Pour limiter l’effet de « bonne réponse », la relance éventuelle autour du streaming ne se faisait qu’au milieu de l’entretien ; – relation chercheur-répondant : le chercheur peut choisir de rencontrer les personnes seules ou en groupe. Un groupe permet d’ « affiner un diagnostic ou la définition d’un problème » (idem p.95). Le cadre théorique nous amenant à comprendre des logiques de justifications individuelles, le groupe n’est pas apparu comme la méthode à privilégier ;

– la collecte de « signes » ou de « symboles » : la collecte de signes renvoie à la collecte de discours sous forme de réponses à des questions sans intermédiaire, tandis que la collecte de symboles passe par l’intermédiation de techniques projectives. La première méthode de collecte a été privilégiée. Toutefois, une question autour de l’objet d’écoute a été ajoutée à la suite de la phase de test. Sous forme de stimuli, le répondant était invité à décrire son support d’écoute le plus utilisé. Cette question permettait à la fois de relancer la discussion et d’inviter les répondants à aborder des sujets plus personnels, plus intimes, mais également d’aborder indirectement leur rapport au support audio, qu’il soit physique ou numérique. Parmi les formes d’entretiens, l’entretien semi-directif se positionne à l’équilibre entre un entretien libre qui prend le risque de ne pas aborder le sujet et un entretien directif qui ne laisserait pas suffisamment d’amplitude au répondant pour exprimer ses choix, ses positions, son fonctionnement. Différents entretiens semi-directifs ont ainsi été conduits auprès de personnes impliquées dans les labels (gérants, salariés et bénévoles).