FORMULATION DES EMULSIONS

FORMULATION DES EMULSIONS

Le suivi et l’analyse des propriétés structurelles à l’échelle microscopique pour une optimisation simultanée de la stabilité d’une émulsion et de sa capacité naturelle à ne pas favoriser la prolifération de micro-organismes (c’est-à-dire à éviter l’emploi de conservateur) sont les buts visés par mes travaux. Ces objectifs supposent une bonne compréhension des interactions à cette échelle d’investigation entre la phase continue et la phase dispersée dans des émulsions cosmétiques et de leur organisation structurale. Pour cela, nous nous sommes appuyés sur des protocoles de recherches précis et judicieusement sélectionnés afin d’examiner au mieux les propriétés des émulsions. Ces protocoles incluent une validation par la mesure de plusieurs grandeurs physiques caractéristiques des milieux complexes considérés et de leurs évolutions à différentes échelles. En dépit de toutes les techniques disponibles, l’industrie cosmétique peine parfois à établir un lien entre le comportement macroscopique d’une émulsion et sa structuration microscopique. En effet les méthodes classiques de caractérisation des produits cosmétiques permettent d’obtenir des informations structurales à l’échelle du micromètre, voire du nanomètre, grâce à la microscopie optique ou la granulométrie par exemple. Outre les techniques rhéologiques classiquement utilisées, la méthode moins conventionnelle de mesure microrhéologique par ondes ultrasonores sera présentée dans ce chapitre. Dans le cas des émulsions, l’intérêt serait de pouvoir étudier les interactions intrinsèques entre les phases continues et dispersées à une échelle d’investigation microscopique et ainsi pouvoir suivre toute modification structurelle induite par des microorganismes présents et par instabilité. Pour mener à bien cette étude, nous avons fait le choix de travailler avec des formulations de compositions très simples afin de limiter les variables. Le support d’étude est une émulsion huile dans eau (H/E) composée uniquement d’une huile synthétique dispersée dans une phase aqueuse gélifiée. La dispersion est stabilisée par un système de deux émulsifiants seulement. Le gélifiant est un carbomère synthétique dont le réseau se déploie dans l’eau. Les formules ne contiennent ni conservateur, ni antioxydant, ni actif ou parfum, qui sont des constituants minoritaires en termes de proportion entrant dans la composition des crèmes ou des émulsions. 

Choix des matières premières

Le choix de matières premières synthétiques pour les émulsions repose sur la volonté de disposer d’ingrédients ayant des caractéristiques physico-chimiques stables contrairement aux ingrédients naturels. De plus, l’intérêt est également d’utiliser des matières premières qui entrent très largement dans la composition des émulsions commercialisées et connues par l’industrie cosmétique.

L’eau

Premier ingrédient et non des moindres puisqu’il est majoritaire en masse dans la quasi-totalité des produits cosmétiques. Le choix s’est porté sur une eau stérilisée de qualité milliQ® : eau de qualité constante et contrôlée.

Le gélifiant : les polymères et copolymères d’acide acryliques

Les polymères hydrophiles utilisés dans les émulsions cosmétiques jouent généralement le rôle d’épaississant, de gélifiants, permettant de stabiliser les formules [122], [123]. Lors des développements de formules, nous avons utilisé divers polymères ayant des structures et de propriétés variables. Le Carbopol ETD2050 (CETD) et le Carbobol Ultrez 10 (CU10), (noms INCI : carbomer), sont des homopolymères d’acide acrylique réticulé (Figure II.1-1) fournis par Lubrizol. Ils ont l’avantage, dû à leur groupement acide carboxylique, d’être faciles à disperser dans la phase aqueuse et ainsi d’augmenter les paramètres viscoélastiques pour de très faibles concentrations. Les concentrations usuelles pour une utilisation cosmétique sont de l’ordre de 0,3 à 1% (les pourcentages indiquent des proportions en masse, sauf mention contraire) dans les gels et comprises entre 0,2 et 0,6% dans les émulsions. Ces deux polymères se Davina Desplan page 63 différencient entre autres, par leur degré de réticulation plus élevé pour le CU10 que pour le CETD. Figure II.1-1. Structure du motif acide acrylique. Le Carbopol Ultrez 21 (CU21) et le Pemulen TR-1 (PEM-TR1), (noms INCI : Acrylate/C10-30 et alkyl acrylate crosspolymer respectivement) sont des copolymères dérivés de l’acide acrylique ou méthacrylique associé à une longue chaîne d’alkyl acrylate (Figure II.1-2). Leurs concentrations d’utilisation dans les émulsions varient entre 0,3 et 0,6%. Figure II.1-2. Structure des monomères d’acrylate et d’alkyl acrylate (R’ : groupes alkyl à longues chaînes). Pour les trois types de Carbopol, la formation d’un réseau tridimensionnel passe par une ionisation des fonctions carboxylates grâce à une neutralisation avec une base (ici, la soude) ; les fonctions carboxylates ainsi formées permettent de déployer le polymère par répulsions électrostatiques à travers toute la formulation. L’assemblage et l’empilement de tout ce qu’on appelle des « microgels22 » constituent le gel [122].

L’huile : le palmitate d’isopropyle

Le palmitate d’isopropyle (nom INCI : Isopropyl palmitate, IPP, numéro CAS : 142-91- 6) est une huile synthétique incolore et inodore fournie par BASF. Elle est obtenue par l’estérification de l’acide palmitique et de l’alcool isopropyle (Figure II.1-4). Figure II.1-4. Structure de l’IPP (densité à 20°C de 0,852 g.cm 3 et HLB requis = 11,5).

Les tensioactifs

Les tensioactifs utilisés pour la formation des émulsions cosmétiques sont généralement des tensioactifs non ioniques autrement appelés émulsifiants. Ils permettent alors la stabilisation des gouttelettes d’huiles (émulsions H/E) dans la phase aqueuse. Ils présentent l’avantage d’être plus doux pour la peau et par conséquent ils conviennent à une application cutanée sans rinçage. Les émulsifiants Eumulgin SMO 20 (nom INCI : polysorbate 80, P80, numéro CAS : 9005-65-6) et Cutina GMS (nom INCI : glyceryl monostearate, GMS, numéro CAS : 50825-78- 0) sont des tensioactifs non ioniques fournis par BASF. Il est important de noter que le P80 a une tête polaire volumineuse et joue le rôle d’émulsifiant tandis que le GMS, dont la tête polaire est moins volumineuse, vient renforcer l’action de l’émulsifiant principal sur les gouttelettes huileuses en s’intercalant entre les molécules de P80 et joue donc le rôle de coémulsifiant. Il est courant d’utiliser des couples d’émulsifiants pour stabiliser au mieux les émulsions [124] (Figure II.1-5).

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