Gourette et Seignosse-Océan, les enjeux de la requalification

Le présent chapitre expose les modalités structurelles et conjoncturelles ayant présidées au choix des terrains étudiés dans cette recherche, à savoir les stations touristiques de Seignosse- le-Penon (devenue Seignosse-Océan) et de Gourette (fig.21 et 22). Il semble important de préciser qu’on ne prétend pas proposer une analyse comparative, restant conscient des diversités qui séparent nos objets d’étude, qu’il s’agisse des pratiques touristiques dont ces stations sont le support ou encore de leur envergure, à la fois en termes d’emprise urbaine et de fréquentation. Ces deux stations, l’une balnéaire, l’autre de sports d’hiver, font toutefois l’objet d’une présentation et d’une analyse conjointe afin de mettre en exergue les similitudes qui structurent leur création et leur devenir. D’un point de vue structurel, les stations au cœur de cette recherche ont toutes deux été construites ex nihilo dans les années 1960-1970 sur le modèle urbanistique fordien, avec le soutien non négligeable des Conseils généraux concernés (des Landes et des Pyrénées-Atlantiques). D’un point de vue conjoncturel, ces destinations sont aujourd’hui « en tension », confrontées à la question du changement climatique, à l’évolution des pratiques de loisirs et de vacances et, plus largement, aux enjeux d’une requalification urbaine. Ce chapitre aborde successivement les modalités de leur création et les enjeux auxquels elles sont actuellement confrontées.

Des stations fordo-keynésiennes en Aquitaine

La station balnéaire de Seignosse-le-Penon et la station de sports d’hiver de Gourette ont été conçues ex nihilo selon une conception fordo-keynésienne en vigueur dans les années 1960-1970. On se propose de revenir sur les fondements de ces initiatives, en présentant les similitudes ayant présidé à l’aménagement de ces différents territoires, du littoral et de la montagne. Marquées par une volonté locale (communale puis départementale) de développer le tourisme dans ces territoires en déclin, ces stations aquitaines ont été créées en deux décennies selon un modèle urbanistique d’inspiration taylo-fordo-keynésio-corbusienne (chapitre 1). L’idée d’un aménagement de la côte aquitaine est issue d’une volonté locale qui a devancé l’intervention étatique de la « mission ». D’initiative communale, puis rapidement départementale, la création de la station du Penon est entreprise avant la mise en place du Schéma d’aménagement de la Côte Landaise. Face à la situation économique préoccupante dans laquelle se trouve la commune de Seignosse dans les années 1950, le conseil municipal décide de se lancer, en 1959, dans la création d’une station touristique au lieu-dit du Penon (NOAILLES, 2008). Ce véritable défi pour une commune de 539 habitants (en 1954) conduit la collectivité à solliciter et attirer des investisseurs extérieurs pour participer à cette grande entreprise. Premier lotisseur de la station, la commune lance l’initiative en aménageant six hectares dans le quartier des Estagnots (LABORDE, 1973, p.260). Elle poursuit son action de 1962 à 1966 en constituant un véritable quartier de villégiature aux Estagnots sur 16 hectares (121 lots), complété par un aménagement du bord de mer (lotissement de 51 lots, dont 12 commerciaux)

Dans le même temps, le Conseil général des Landes devient un des partenaires clefs de la commune pour l’aménagement de Seignosse-le-Penon. Face aux difficultés économiques que rencontrent les communes côtières et face à l’engouement qui se fait jour pour le tourisme dans les années 1960, il s’engage dans la promotion touristique du département en encourageant l’accessibilité au plus grand nombre. Devançant les mesures de la DATAR pour l’aménagement et le développement touristique du littoral, le Comité départemental du tourisme des Landes (C.D.T.L.), créé en 1959, propose la mise en place d’une Société d’économie mixte pour la réalisation de deux stations nouvelles : Seignosse-Le-Penon et Moliets. La Société d’aménagement touristique et d’équipement des Landes (SATELcréée le 18 octobre 1962 pour exécuter les projets du C.D.T.L. en matière de développement touristique. L’objectif est de réaliser, en 10 ans, 28 000 lits touristiques dans ces deux stations afin de doubler la capacité de la côte landaise (NOAILLES, 2008, p.295). Après un premier rachat, à l’amiable, de 120 hectares de terrain pour accueillir les premières opérations, la SATEL prévoit à Seignosse un aménagement sur 400 hectares en front de mer. Par l’intermédiaire de la SATEL, la commune reçoit également le soutien financier de plusieurs organismes publics landais qui lui permettent de contribuer plus activement à l’aménagement de sa station.