La consommation des sources d’énergie utilisations finales, efficacité et productivité

La consommation des sources d’énergie : utilisations finales, efficacité et productivité

Les chaînes de conversion : des sources d’énergie primaires à la satisfaction des services énergétiques.

Ce que l’on a pris l’habitude de qualifier « consommation d’énergie », et parfois même « besoins d’énergie » correspond à ce que les statistiques mesurent le plus facilement, à savoir les volumes de ressources naturelles qui entrent dans des chaînes de transformations et conversions successives, indispensables à la satisfaction des besoins en services énergétiques. Les chaînes peuvent être très courtes (paysanne africaine qui assure la cuisson de ses aliments à l’aide du bois de feu qu’elle a collecté autour de son village) ou très longues (européen s’éclairant avec une électricité issue de centrales nucléaires ou de turbines à gaz alimentées par des ressources sahariennes ou sibériennes). La Figure 1 décrit les principales étapes d’une chaîne énergétique type dans les économies industrialisées.

De la consommation primaire à la consommation finale

La consommation primaire correspond à la somme des sources d’énergie à l’état brut (bois, charbon, pétrole ou gaz à la tête du puit), avant transformation physique (raffinage pétrolier ou liquéfaction du gaz) et éventuelle conversion en électricité dans une centrale thermique conventionnelle. Une totale cohérence voudrait que l’on inscrive ici l’uranium des centrales nucléaires, la chaleur géothermique captée, la force des cours d’eau ou du vent convertie en électricité : les limites des méthodes de comptabilité énergétique ont conduit à remplacer ces sources d’énergie par les kWh qu’elles fournissent , mesurés aux bornes des centrales. On parle à leur propos d’ électricité primaire, par opposition à celle, secondaire, issue de la combustion des énergies fossiles ou de la biomasse. Toutes ces sources d’énergie primaire sont comptabilisées en unités spécifiques (tonnes, m3, stères, kWh et ses multiples), avant d’être additionnées sur la base de leur pouvoir calorifique. Les conventions auxquelles l’on recourt pour la biomasse et les sources fossiles sont discutables, mais relativement simples : l’énergie de chaque source est mesurée par la chaleur de combustion qu’elle dégage à une température de flamme conventionnelle de 2200° K : sur cette base, « une calorie vaut toujours une calorie, quelle que soit sa température »1. Cette convention s’applique aussi à l’électricité dite primaire lorsqu’on l’additionne aux autres sources sur la base de la chaleur que dégage un kWh dans une résistance, soit 860 kcal. La recherche d’une équivalence thermique de l’électricité se complique lorsqu’on préfère l’établir sur la base de la chaleur nécessaire à produire ce même kWh dans une installation thermique de référence (2150 kcal pci), peu utilisable dans la reconstitution de séries statistiques longues, car les rendements chaleur-électricité ont considérablement augmenté au cours du temps, cette seconde équivalence exprime cependant mieux que la première le poids effectif de l’électricité dans les bilans énergétiques actuels et l’intérêt de la substituer aux sources fossiles dans un certain nombre d’usages.
Les ressources utilisées à l’état brut sont de plus en plus rares. La plupart sont au minimum lavées et calibrées (charbons), désulfurées voire liquéfiées (gaz naturel), carbonisées (bois), gazéifiées (biomasse humide), raffinées (pétrole brut). Une partie des volumes issus de ces transformations physiques, chimiques ou biochimiques, est en outre convertie en électricité dans des centrales thermiques conventionnelles. Les sources d’énergie qui en sortent sont dites secondaires. Leur pouvoir calorifique ne représente plus, en moyenne, que 75% de celui des sources primaires, car transformations et conversions occasionnent des pertes. En contrepartie, les sources secondaires sont mieux adaptées aux demandes des utilisateurs finals. La diversité des produits pétroliers à la sortie du raffinage (essence, gas-oil, fuel-oil) l’illustre.
Techniquement adaptées, les sources secondaires ne sont pas forcément disponibles chez le consommateur final (industriel, agriculteur, transporteur, commerçant ou particulier) pour des raisons de localisation spatiale des installations ou de modulation temporelle des productions. Elles n’ont plus besoin d’être transformées physiquement, mais elles doivent être transportées et stockées. Principalement imputables au réseau électrique, les pertes réduisent le contenu énergétique des sources finales à environ 70% de celui des sources primaires. En revanche, ces sources ont une valeur économique beaucoup plus élevées car elles sont rendues à la porte de l’utilisateur final au moment choisi pour satisfaire ses besoins. La différence de prix entre un kWh de base et un kWh de pointe mesure cette valorisation. Ventilée entre groupes d’utilisateurs, cette consommation dite finale est la dernière connue statistiquement, alors qu’elle ne correspond pas encore aux diverses formes d’énergie (thermique, mécanique, spécifique) qui vont en être tirées, après un éventuel stockage plus ou moins long.

De la consommation finale aux services énergétiques

Cette partie aval des chaînes énergétiques est difficile à explorer parce qu’on ne sait pas mesurer la consommation d’énergie utile (usefull energy) et moins encore les services énergétique, dès que l’on traite un grand nombre d’utilisateurs. La première correspond à la sortie (output) des dispositifs assurant la transformation de n’importe quelle source en formes d’énergie (chaleur basse ou haute température, énergie mécanique, lumière, froid) répondant à la satisfaction d’un besoin en service énergétique. Devrait donc être mesurés la chaleur cédée par le combustible au circuit d’eau chaude, le travail mécanique fourni réellement par l’arbre du moteur ou la lumière émise par une ampoule électrique. Dans les conditions précises de fonctionnement d’une installation donnée et moyennant certaines conventions, cette mesure ne soulève pas de difficultés particulières. En revanche, sa généralisation à une habitation, un atelier ou un véhicule sur une période de temps significative, et plus encore son extension à toute la société, relèvent de la gageure. A ce niveau, on doit donc se contenter d’une mesure très approximative obtenue en multipliant la consommation finale par une estimation de l’efficacité moyenne des chaudières, moteurs et autres appareils de conversion en usage dans une économie donnée. Les chaînes énergétiques ne s’achèvent pas avec la consommation d’énergie utile. Une même quantité de chaleur cédée au circuit d’eau chaude peut en effet procurer un confort thermique très différent selon que le système de chauffage a été installé dans une maison bien ou mal conçue pour conserver la chaleur et la répartir harmonieusement entre toutes les pièces. Des relations comparables peuvent être établies entre le travail d’un moteur et le service de transport d’un véhicule, entre la lumière d’une ampoule et l’éclairage d’une pièce, entre la chaleur d’une résistance électrique et la cuisson d’un aliment, entre le froid d’un compresseur et la réfrigération d’une boisson. Constitué de toutes les techniques mobilisées pour rendre un service énergétique, ce dernier maillon est difficile à caractériser et plus encore à exprimer par une mesure d’efficacité. On ne saurait cependant le négliger car il est le lieu de nombreux choix à forte incidence sur la consommation d’énergie finale.

Efficacité énergétique et exergétique, constatée et potentielle.

Quelle est la part de la consommation finale d’énergie qui est finalement incorporée dans les services énergétiques demandés par une économie nationale ? Jusqu’à quel point et à quelles conditions cette part pourrait-elle être accrue ?
A l’échelle d’un dispositif particulier de conversion (chaudière, automobile, ampoule, frigidaire), le rapport consommation utile/consommation finale résulte du rendement théorique de l’appareil et de ses conditions d’utilisation (durée, fréquences, entretien…). Il est d’une extrême diversité dans une économie industrielle qui convertit de nombreuses sources finales en de nombreuses formes d’énergie dans des usages très différenciés. La moyenne nationale que l’on peut tirer d’une observation de ces derniers ne peut donc qu’être une approximation. L’étude la plus récente et la plus complète du sujet2 avance une efficacité moyenne de conversion utile/finale à l’échelle mondiale de 53% (soit 37% pour la conversion utile/primaire). L’adjonction des conditions souvent médiocres d’incorporation de l’énergie utile aux services énergétiques (habitat mal isolé, par exemple) abaisse vraisemblablement cette efficacité autour de 40%. Des économies nationales très soucieuses de conservation de l’énergie font certainement mieux, mais bien d’autres (anciennes économies socialistes d’Europe ou pays producteurs de pétrole) ne dépassent certainement pas 20 à 30%.Encore ne s’agit-il là que d’une notion d’efficacité énergétique qui s’appuie sur l’énergie utile et non sur l’énergie utilisable ou exergie. Toutes les estimations ci-dessus reposent en effet sur la convention comptable selon laquelle une calorie contient toujours la même énergie, quelle que soit sa température. Mais, depuis l’avènement de la thermodynamique comme science, on sait qu’une calorie à 2000° C vaut plus qu’une autre à 80° C puisqu’elle permettra d’actionner un moteur thermique et d’en tirer une énergie mécanique « noble ». Pour quantifier cette propriété, on a introduit l’exergie, grandeur apparentée à « l’énergie libre » des physiciens, qui ne diffère de l’énergie que pour les sources thermiques et ce d’autant plus que la température de la source est plus faible. Sous la forme d’un coefficient d’utilité énergétique (e), l’énergie utile consommée par un pays est transformée en exergie utile, comme l’illustre le cas de la Suisse en 19753.

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