La durabilité: un concept né de la remise en cause du concept de marché autorégulateur

La durabilité: un concept né de la remise en cause du concept de marché autorégulateur

Le développement durable est un processus permettant de sauvegarder le capital naturel tout en améliorant les conditions de vie économiques et sociales. Le concept de durabilité est né de la remise en cause de la conception néoclassique fondée sur le concept du marché autorégulateur. Cette remise en cause repose sur l’existence des externalités négatives qui échappent au marché. Ce qui justifie la nécessité d’un autre mode de régulation, notamment du fait des spécificités du capital naturel.

Le rapport Brundtland : la genèse du développement durable

La plus connue des définitions du développement durable reste celle du Rapport Brundtland. Pour la Commission mondiale sur l’environnement et le développement (CMED), « le développement durable est un développement qui permet de répondre aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs » (CMED, 1989, p.51) . Deux concepts sont inhérents à cette notion. D’un côté, le développement durable préconise le concept de besoins. La plus grande priorité est le besoin essentiel des plus démunis. D’un autre côté, les techniques et notre organisation sociale font peser sur la capacité de l’environnement à répondre aux besoins actuels et à venir.

Le rapport Brundtland prend en compte les problématiques à l’origine du développement durable : limite des ressources et satisfaction des besoins. De plus, cette définition adopte une conception du développement priorisant l’humain. Ce rapport opte pour une approche du développement durable mettant un accent particulier sur la satisfaction des besoins.

En fait, la CMED associe à l’idée de développement durable des objectifs spécifiques :
o La reprise de la croissance
o La modification de la qualité de la croissance
o La satisfaction des besoins essentiels en ce qui concerne l’emploi, l’alimentation, l’énergie, l’eau et la salubrité
o La maitrise de la démographie
o La préservation et la mise en valeur de la base de ressources
o La réorientation des techniques et gestion des risques et,
o L’intégration des considérations relatives à l’économie et à l’environnement dans les prises de décision.

Selon ce rapport, la croissance économique est la condition nécessaire à l’élimination de la pauvreté dont la cause de la dégradation de l’environnement. Autrement, la répartition et l’accès inégal aux ressources conduisent à leur usage inadéquat ou excessif. Effectivement, des problèmes proviennent de l’inégalité de l’accès aux ressources. « L’existence d’un régime foncier inéquitable peut avoir comme effet la surexploitation des ressources sur les terres les plus petites, et l’environnement. Sur le plan international, le monopole des ressources peut forcer ceux qui en sont exclus à trop exploiter les ressources marginales » (CMED, 1989, p.57) .

Néanmoins, le rapport de Brundtland rejette la vision orthodoxe du progrès social. Dans ce rapport, « la problématique des besoins et du bien-être doit intégrer des variables non économiques telles l’éducation et la santé comme des fins en soi, la pureté de l’air et de l’eau, la protection de la nature dans toute sa beauté » (CMED, 1989, p.63) . Le progrès social est plutôt associé à la notion de besoins. Ici, les besoins sont limités par l’emploi et la capacité de consommation.

En fin de compte, le rapport Brundtland a soulevé l’ensemble des problématiques liées à la relation de l’homme à la nature. Mais ce rapport n’a pas autant invoqué le concept de la participation dans le développement durable.

Selon Theys, « le développement durable tel que défini par le rapport Brundtland représente une ambiguïté potentiellement très riche, mais extrêmement propice à la mauvaise foi » (Theys, 2001, p.271) . En effet, ce rapport a laissé en suspens la détermination des moyens pour venir à bout de la relation entre développement, croissance et environnement. Ainsi, ce débat a donné lieu à de multiples interprétations, à des approches très différentes. De ce fait, le concept de développement durable est confronté aux problèmes de la spécification de la norme et des acteurs qui y procèderont.

Le modèle néoclassique de soutenabilité faible 

L’approche néoclassique microéconomique
Dans l’approche néoclassique microéconomique, la dégradation de l’environnement est plutôt due à une sous-évaluation économique des ressources naturelles. Ce phénomène entraine la surutilisation de ces ressources. Pour cette approche, l’épuisement des ressources naturelles est formalisé avec le concept d’externalité. Ainsi, l’évaluation des ressources au marché permet une internalisation de ces externalités. Leur solution est donc la marchandisation de l’environnement en appliquant l’outillage économique aux problèmes environnementaux (Gendron, 2006) . Entre autre, cette solution vise à intégrer dans la sphère économique les éléments environnementaux (Vivien, 2005) . Cependant, l’évaluation économique de l’environnement rencontre des limites. En fait, les valeurs attribuées aux services écosystémiques ne sont que des prix fictifs (Harribey, 1997) .

L’approche néoclassique macroéconomique
L’approche néoclassique macroéconomique représente l’extension au capital naturel de la problématique de la croissance initiée par Solow. Cette approche offre une analyse adoptant des conditions d’une croissance économique optimale en présence de ressources naturelles épuisables dans laquelle le capital global reste constant (Solow, 1993) . Selon leur hypothèse, l’augmentation du prix relatif des ressources naturelles non renouvelables permet de compenser l’épuisement progressif de ces ressources, selon le schéma optimal de Hotelling (1931) , en induisant un progrès technique qui conduit à la mise au point de substituts. Ainsi, la croissance peut ainsi se poursuivre indéfiniment. Et c’est le schéma même de la courbe en U inversé de Kuznets sur la relation entre la croissance et l’environnement. Le test empirique a été réalisé par Grossman et Krueger (1995) . Sur ce schéma, la croissance est considérée comme la condition pour que la relation entre croissance et pollution de l’environnement s’inverse.

En fait, cette école réduit la durabilité à la préservation des capacités productives des sociétés humaines : les équipements productifs, le savoir, les compétences et les actifs naturels. Et la nature est considérée comme une forme de capital (Godard, 1994) . Alors, leur réponse au rapport Halte à la croissance est qu’avec un taux d’épargne suffisamment élevé, le stock de capital reste intact d’une génération à l’autre (Vivien, 2004) . Leur hypothèse est la substituabilité quasi illimitée entre ces différents types de capital dont le capital, les ressources naturelles et le travail. C’est le scénario de faible soutenabilité. Pour eux, la nonsoutenabilité ne réside pas dans la consommation d’actifs non renouvelables, mais dans le fait que la rente qui en est retirée ne soit pas réinvestie (Vivien, 2004). Dans ce cas, les revenus issus de l’exploitation des ressources naturelles sont qualifiés de rente. Selon Hotelling (1931) , la rente de rareté est rendue possible par la quantité limitée de ressources non renouvelables. Cette rente est la différence entre le coût marginal de production d’une ressource non renouvelable et le prix du marché. Elle s’accroit au fur et à mesure que la ressource se raréfie. La rente optimale fait en sorte qu’à l’épuisement de la ressource, son prix est tellement élevé que sa demande est nulle. De ce fait, Hartwick (1977) propose que les rentes procurées par les ressources naturelles épuisables soient réinvesties dans du capital technique par un système de taxation ou un fonds d’investissement spécifique. Pourtant, cette approche se heurte à l’imperfection des systèmes de prix. Ce prix permet de déterminer la valeur des composantes du capital pour la détermination des équivalences entre types de capital et aux anticipations sur les préférences des générations futures (Belem, 2010) . De ce fait, l’analyse macro-économique implique donc l’intervention raisonnable des pouvoirs publics pour des innovations techniques et à la production d’informations relatives aux réserves de ressources naturelles (Belem, 2010) .

Table des matières

INTRODUCTION
CHAPITRE 1 : PARTICIPATION COMME PILIER DU DEVELOPPEMENT DURABLE
1.1. La durabilité: un concept né de la remise en cause du concept de marché autorégulateur
1.2. L’émergence de la participation comme alternative à la durabilité
CHAPITRE 2 : LES DISCOURS ET LA PRATIQUE DE LA GESTION COMMUNAUTAIRE DES RESSOURCES FORESTIERES
2.1. Le passage d’une gestion centralisée à une approche communautaire
2.2. L’assimilation de la gestion en commun des ressources naturelle dans la pratique
CHAPITRE 3 : LA GESTION COMMUNAUTAIRE DE LA FORET DE VOHIMANA
3.1. Paradoxe entre richesses naturelles et pauvreté de la population à Vohimana
3.2. La mise en place de l’approche communautaire à Vohimana
CHAPITRE 4: RETOUR SUR EXPERIENCE DE LA GESTION COMMUNAUTAIRE
4.1. Les difficultés dans la mise en œuvre de la gestion communautaire : la participation à demi-teinte
4.2. La participation: une condition nécessaire et non suffisante pour une gestion durable des forêts
CONCLUSION
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
WEBOGRAPHIE
ANNEXES

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