La famille Altemps entre l’Autriche et Rome

La famille Altemps entre l’Autriche et Rome

 Généalogie et histoire de la famille Hohenems Illustre et ancienne dynastie originaire de la Souabe 3 (Schwaben), au sud de l’Allemagne, à l’ouest de la Bavière, la famille Hohenems (Altemps), s’installe au début du XVIe siècle en Italie, à Rome, où Marco Sittico Hohenems (l’oncle du dédicataire de D’India, fait baron par l’empereur d’Autriche) est nommé cardinal et évêque de Constance en 15614 . Son fils naturel, Roberto Altemps 5 (1565-1586, cousin du dédicataire), premier duc de Gallese6 , de Soriano et de la Rocchetta – au nord de Rome –, établit sa descendance dans la Ville éternelle7 . Le cardinal Marco Sittico ou Siticus, Sedunensis ou Seducensis, qui vivra longtemps à Rome, peut donc être considéré, à travers son fils Roberto, comme le fondateur de la branche Altemps de cette ville8 . La famille Altemps était donc à la fois allemande et romaine et excellait dans l’art de la négociation et de la guerre9 . Le château de Hohenems se trouvait dans la région autrichienne de Vorarlberg, à l’extrême ouest de l’Autriche, près de la frontière suisse. La famille Hohenems a italianisé son nom au milieu du XVIe siècle à partir de la dérivation latine « Ad alta Emps » ou (Embs), devenu Altemps (ou Altaemps)10.Voici l’arbre généalogique de Marco Sittico, le dédicataire de D’India : Wolfgang Altemps ∞ Chiara Médicis (sœur du pape Pie IV11)  Marco Sittico Altemps (1533-1595, cardinal et oncle du dédicataire12), le comte Iacopo Annibale (frère du cardinal et père du dédicataire) ∞ Ortensia Borromeo (sœur de Carlo Borromeo13)  Marco Sittico Altemps (archevêque de Salzbourg et dédicataire du Troisième livre de D’India) Le dédicataire de D’India, le comte Marco Sittico von Hohenems14 – à ne pas confondre avec son homonyme, oncle et cardinal –, prince-archevêque de Salzbourg depuis 161215, était donc le neveu de Carlo Borromeo et le cousin de Carlo Gesualdo et du cardinal Federico Borromeo de Milan16 – dont on parlera longuement dans un autre chapitre. L’influence de Carlo Borromeo sur le cardinal Sittico est certaine. En témoigne le séjour du jeune Federico, dans ses années de formation culturelle et spirituelle, au palais romain du cardinal Altemps à la fin du XVIe siècle. Palais qui se trouve place Saint-Apollinaire en plein centre de Rome et qui fut acquis en 1568 par le cardinal Sittico19. Le cardinal Altemps était lié à l’église de Santa Maria in Trastevere dont il était le titulaire depuis 1580 ; s’y trouve d’ailleurs la chapelle familiale où il a été inhumé en 1595 en présence du Tasse. Il est également, avec Carlo Borromeo, l’un des protagonistes de la construction de la Chiesa Nuova à Rome, dédiée à Grégoire XIII et aux Oratoriens de Philippe Néri23. Quant à son neveu, le prince-archevêque dédicataire du Troisième livre de D’India, il a été formé dans les années 1580 au Collège des Nobles de Milan puis au Collège germanique de Rome, avant de retourner à Salzbourg, ville qui a vu sous son règne « la première floraison du baroque ». Son activité d’archevêque fut courte (1612-1619) mais culturellement fructueuse et d’une importance cruciale.

 La circulation de la musique italienne dans le monde germanique au début du XVIIe siècle, D’India et l’archiduc

Ferdinand II d’Autriche Ainsi que le souligne Herbert Seifert , le début de l’italianisation de la cour d’Autriche, marquant un tournant culturel à l’époque baroque, a été impulsé par deux impératrices de la famille Gonzague. La première, Eleonora Gonzaga 28 (1598-1655), deuxième femme de l’archiduc Ferdinand II29 (1578-1637), nièce de Marie de Médicis et la plus jeune fille de Vincenzo Gonzaga, se rendit en Autriche en 1622 et scella ainsi l’alliance entre le duché de Mantoue et la maison d’Autriche30. Elle joua un rôle de premier plan en tant que médiatrice dans l’introduction des nouveaux genres (opéra, ballets) dans ce pays31. La seconde fut Eleonora de Nevers-Mantoue (1630-1686), mariée à Ferdinand III (1608-1657), successeur de son père Ferdinand II à la tête du Saint-Empire romain. Ferdinand II, dédicataire du Deuxième livre des motets de 1610 de D’India32, était un fervent catholique. Avec son gendre et ami, Maximilien de Bavière, il était un personnage clé du front catholique-romain dans le monde germanique  et était proche des Jésuites. Une profonde piété caractérisait la philosophie de sa cour à Vienne concernant la musique sacrée34. En effet, parmi les vingt motets du recueil que D’India lui a dédié , nous trouvons des pièces avec des « textes destinés à la dévotion de provenance ecclésiastique » où prédomine le nouveau style monodique36. L’archiduc d’Autriche était considéré par le compositeur comme faisant partie des « princes pour qui la musique est l’art le plus agréable37 » et dont la protection d’artistes était magnanime et durable38. Il est intéressant de remarquer que la musique sacrée de D’India circule dans le monde germanique à partir de 1610. Il s’agit de la diffusion d’une musique catholique dans un monde protestant. Ainsi, quatre motets du livre que le compositeur a dédié à Ferdinand II ont été publiés dans deux importantes anthologies à Strasbourg : la Pars altera de 1612 et la Pars tertia de 162739. Même la dévotion religieuse se retrouve renouvelée par le nouveau style monodique et D’India fait partie de ces compositeurs qui participent à cette transformation. Le règne de Ferdinand II a également vu l’introduction de l’opéra et d’autres genres dramatiques. Il a marqué un tournant pour l’histoire de la musique à la cour impériale ; les musiciens italiens qui circulaient de la cour de Graz à Vienne entre 1615 et 1620, ne faisaient pas que transmettre la musique italienne, ils véhiculaient également un nouvel état d’esprit : celui de l’essor de la musique baroque40. L’archevêque Marco Sittico était en contact avec la famille de Gonzague et plus particulièrement avec le cardinal Ferdinand, par ailleurs duc de Mantoue à partir de 1612.

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