L’APPRENTISSAGE : SES ÉVOLUTIONS ET SES IMPLICATIONS SUR LE TERRITOIRE

L’APPRENTISSAGE : SES ÉVOLUTIONS ET SES IMPLICATIONS SUR LE TERRITOIRE

Introduction

Le contrat d’apprentissage est un mode d’accès à une qualification, qui associe une formation chez un employeur et des enseignements dispensés dans un centre de formation des apprentis. Il lie un jeune âgé entre 16-25 ans à une entreprise, contre un salaire, et peut être conclu pour une durée d’un à trois ans, selon le diplôme préparé. L’apprenti est à la fois salarié et apprenant. Le principe de l’apprentissage a toujours existé. La transmission d’un savoir-faire, d’un métier s’est faite depuis très longtemps de manière informelle. C’est en 1928 que l’obligation d’un contrat écrit apparait. À partir des années 70, l’évolution de l’apprentissage s’accélère. En 1971, un « contrattype d’apprentissage » (salaire, durée, droits sociaux) est instauré, des centres de formation des apprentis (créés 10 ans plus tôt en remplacement des anciens cours relevant de la loi Astier) sont généralisés et la tutelle de l’Éducation nationale est renforcée. Ceci se traduit par une augmentation du temps de formation pour aligner les diplômes par apprentissage sur ceux de la voie scolaire. À cette époque, la politique d’éducation parie sur la voie scolaire (entre 1965 et 1975, 2 354 collèges sont bâtis). Comme le souligne Gilles Moreau, « Le salut de l’apprentissage n’été possible, dans les années 1960-1970, qu’en renforçant le peu d’école qu’il incorporait. Sortir l’apprentissage salarié de sa mauvaise passe supposait de l’inscrire dans le mouvement général favorable à la scolarisation qui touche alors le pays. »1 Les années 1970 sont également marquées par l’effondrement de l’industrie, le déclin du monde ouvrier et la crise pétrolière de 1974. L’Éducation nationale est priée de se rapprocher des entreprises à travers la mise en place systématique de stages et les dispositifs d’alternance sont de plus en plus nombreux. Depuis, l’apprentissage connait un essor important et s’il a été peu étudié jusqu’au milieu des années 1990, cela a bien changé. En effet, beaucoup de travaux ont vu le jour sur l’apprentissage depuis ces 25 dernières années. Les enquêtes Génération du Centre d’études et de recherche sur l’emploi et les qualifications (Céreq), les enquêtes d’insertion professionnelle dans la vie active des lycéens et des apprentis (IVA – IPA) de l’Éducation nationale sont des matériaux qui permettent de nombreuses analyses comparatives entre le vécu des apprentis et des jeunes issus de la voie scolaire. La dernière enquête Génération 2004 comportait un module spécifique sur les apprentis qui a permis de nombreuses publications ces derniers mois. 1 Moreau, 2008. LEST – Master recherche 2010-2011 A. Petrovitch 6 De nombreuses études se concentrent sur l’insertion des apprentis. Ainsi il a été confirmé que l’apprentissage permet une meilleure insertion que la voie scolaire (+ 7 points en moyenne). Le temps d’accès à l’emploi moyen est plus court à l’issue de la formation : 2,9 mois contre 4,4 mois pour les jeunes de même niveau non passés par l’apprentissage. Les rémunérations y sont légèrement plus élevées : + 3 points en moyenne. Les emplois occupés sont plus souvent en emploi temps complet2 : + 5,8 points en moyenne. En y regardant de plus près, les bénéfices de l’apprentissage sont cependant à nuancer. Sa plusvalue, versus la voie scolaire, varie fortement selon le niveau de diplôme préparé. Son rendement social est plus important pour les niveaux V (BEP-CAP) et IV (bac professionnel). En revanche, c’est « précisément aux niveaux de formation III et plus où le risque de chômage est le plus faible que la probabilité d’être embauché par son maître d’apprentissage est la plus forte »3 . Ces résultats varient selon les spécialités de formation, par exemple, les entreprises des secteurs de l’hôtellerierestauration ou de la coiffure embauchent rarement leurs apprentis. Il s’agit de l’apprentissage dit « traditionnel », les apprentis représentent une main-d’œuvre bon marché, complètement intégrée au bon fonctionnement de l’entreprise. Pour les diplômés de l’enseignement supérieur, il joue un rôle moins décisif en termes d’insertion. Les secteurs d’activité et les niveaux de formation s’étant emparé de l’apprentissage après la loi Séguin de 1987, utilisent souvent ce contrat comme un mode de pré-recrutement de leurs futurs salariés.

L’apprentissage et le territoire

 Interrogeons-nous, à présent, sur comment l’apprentissage, en tant que dispositif de formation, peut participer au développement du territoire. Dans un premier temps (1.1), nous considérerons que pour pouvoir participer au développement du territoire, l’apprentissage doit y être porteur d’une dynamique. Pour ce faire, nous allons mettre en parallèle l’évolution des effectifs de la voie scolaire et de l’apprentissage. Nous reviendrons également sur le changement législatif de cette dernière décennie et par la même occasion, sur les modalités de son financement. Nous verrons (1.2) que l’apprentissage a la particularité d’impliquer un grand nombre d’acteurs, que son organisation et son fonctionnement appellent une gouvernance locale reposant sur des proximités institutionnelle, organisationnelle et géographique qui l’inscrivent dans son territoire et lui permet de participer au développement de ce dernier. Nous observerons (1.3) que devant une dynamique globale et dans un cadre législatif commun à l’ensemble des régions, l’évolution de l’apprentissage n’est pas identique dans le territoire national, et ce notamment, du fait des structures de gouvernances locales. Dans un second temps, nous présenterons un exemple concret du lien entre ce dispositif et le territoire. Pour illustrer nos propos, nous prendrons comme terrain d’étude la région Provence – Alpes – Côte d’Azur. Nous avons dans cette optique, collecté des données, des documents et réalisé des entretiens avec des responsables régionaux de l’apprentissage. Ainsi nous tenterons de mettre en lumière comment l’apprentissage, incarné par la présence d’un centre de formation des apprentis, agit sur et pour le territoire, et comment est prise en compte la question du territoire dans son organisation ? (2.1) Ceci nous permettra de voir que tous les territoires infrarégionaux n’y jouent pas le même rôle (2.2). Pour finir, nous ferons le bilan de l’impact de l’apprentissage sur le territoire .

L’apprentissage : un outil dynamique au service du territoire

 Pour répondre la question de « comment l’apprentissage participe-t-il au développement du territoire ? », il est nécessaire de dresser un tableau actuel de cette voie d’accès à la qualification. Quelle est son évolution, comment l’expliquer ? Cette évolution s’observe-t-elle de manière homogène sur l’ensemble du territoire ? Quels sont les moyens alloués à l’apprentissage ? Comment est mis en œuvre l’apprentissage ? Qui est impliqué dans l’apprentissage ? Telles sont les questions auxquelles nous allons tenter de répondre dans les pages suivantes. Nous souhaitons ici montrer que l’apprentissage connait actuellement une dynamique forte et qui passe par un financement conséquent Sa mise en œuvre implique un nombre important d’acteurs et nécessite une coordination spécifique sur le territoire. Enfin nous souhaitons mettre en lumière que même si l’évolution de l’apprentissage est positive sur l’ensemble du territoire, des différences de dynamiques régionales existent. 

 L’évolution de l’apprentissage 

Au 31.12.2009, plus de 424 000 apprentis sont dénombrés en France métropolitaine. Depuis 1995, leur nombre a augmenté de 43 %, soit plus 127 000 jeunes de plus. En 2007, la part des jeunes signant un nouveau contrat d’apprentissage parmi la population des 16-25 ans9 est de 3,4 alors qu’elle était de 1,5 en 1993. En un peu moins de quinze ans, la proportion des apprentis chez les jeunes a doublé. Cette évolution est d’autant remarquable qu’entre 2004 et 200810, le nombre de jeunes âgés de 16 à 25 ans en France a diminué de 0,8 %. Dans la même période, leur nombre en formation professionnelle initiale a augmenté de 4,1 % : celle des inscrits sous statut scolaire évolué de + 1,6 %, celle des apprentis de + 15,9 %. En l’espace de quatre ans, la part des apprentis dans la formation professionnelle initiale est passée de 17,6 % à 19,6 %. L’apprentissage fait ainsi preuve d’un réel dynamisme qui dépasse une tendance générale à la hausse concernant la voie professionnelle.

Table des matières

Introduction
PARTIE 1 : L’apprentissage et le territoire
1. L’apprentissage : un outil dynamique au service du territoire
1.1 L’évolution de l’apprentissage
1.2 Un outil de développement territorial
1.3 Des dynamiques différentes selon les régions
2. L’apprentissage agit sur et pour le territoire – l’exemple de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur
2.1 La prise en compte du territoire dans la constitution de la carte régionale des formations en apprentissage
2.2 Des rôles différents pour les territoires infrarégionaux
2.3 L’impact de l’apprentissage sur le territoire
PARTIE 2 : Les apprentis et les territoires
1. La mobilité des jeunes en période d’insertion
1.1 Apprentis et sortants de la voie scolaire : des profils différents
1.2 Les comportements de mobilités
1.3 Les déterminants de la mobilité
2. La recherche du premier emploi : des apprentis privilégiés ?
2.1 Recours au réseau pour trouver leur premier emploi
2.2 La mobilité des apprentis recrutés par leurs entreprises
3. L’insertion professionnelle des apprentis : plus de richesses pour le territoire
3.1 Des situations professionnelles plus favorables
3.2 Des situations professionnelles plus satisfaisantes
Conclusion
Bibliographie
Annexes

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