Notion d’espèce dans le genre Mastomys (Rongeurs, Muridés)

Notion d’espèce dans le genre Mastomys
(Rongeurs, Muridés)

Description et origine du matériel biologique

Les individus référables à M. erythroleucus (figure 1 à droite) sont caractérisés par un pelage châtain clair à brun, plus sombre sur la partie dorsale que sur les flancs, et de couleur ventrale blanchâtre à beige. La séparation entre ventre et flancs est en général nette, la base des poils ventraux toujours gris-brun. La longueur « tête + corps » est en général légèrement supérieure à celle de la queue. Ils présentent un museau et des oreilles relativement longs. Le dessus des mains et des pieds est de couleur blanchâtre (GRANJON et DUPLANTIER, 2009). Les individus utilisés ici ont été capturés dans trois localités du département de Mbour (14°25’19’’N et 16°57’40’’O), Thiadiaye, Sandiara et Keur Balla, situées dans un rayon de 30km environ à l’est de Mbour-ville. Les captures datent de la période 04/02/2009 au 07/02/2009 (voir annexe I). Il s’y ajoute un spécimen de Sabodala capturé le 14/07/2009. Les sujets de M. natalensis (figure 1 à gauche) ont une couleur dorsale grise ou brun-gris tirant vers le noir, devenant gris-brun chez les individus âgés. Le pelage ventral, sans démarcation nette avec celui du dos, apparaît plus clair que ce dernier. On note une variation de coloration non négligeable, encore plus prononcée chez les spécimens non sahélo-soudaniens chez lesquels on peut observer des pelages allant jusqu’à des dos marron-jaune et des ventres blanchâtres. La longueur « tête + corps » est égale à celle de la queue. Le dessus des mains et des pieds est de couleur blanchâtre (GRANJON et DUPLANTIER, 2009). Les animaux de cette étude proviennent de localités situées dans le département de Kédougou : Fadiga, Samécouta ainsi que de différents quartiers de Kédougou-ville (12°33’77’’N et 12°10’23’’O). Les captures ont été faites entre le 14/07/2009 et le 16/07/2009 pour un premier lot et le 17/11/2009 pour un second (voir annexe I). Figure 1 : Photographie de M. natalensis et de M. erythroleucus II.2/ Etude d’identification (ou de caractérisation) L’identification des individus pour les rapporter à une espèce est faite à trois niveaux. Le premier repose sur la coloration du pelage (comme décrit plus haut) et est effectué par le collecteur sur le terrain qui 11 assigne en même temps un numéro (initiales du collecteur suivi de chiffres) à l’individu capturé. Les deux autres reposent sur des critères chromosomiques et moléculaires (voir ci-après). Au minimum, l’assignation spécifique sur le terrain a été doublée soit par une assignation cytogénétique, soit par une assignation moléculaire. 

Critère cytogénétique

L’étude caryologique s’effectue à partir de cellules de la moelle osseuse (voir annexe II). La manipulation commence par une injection sous-cutanée d’une solution de levure dans le but de déclencher une réaction immunitaire avec augmentation du nombre de globules blancs (donc divisions cellulaires). Dans les 24 heures suivantes, l’animal est sacrifié après avoir subi 45 minutes l’action d’une solution de sulfate de vinblastine qui bloque les divisions cellulaires au stade de la métaphase. Ensuite, la moelle du fémur et du tibia est recueillie dans une solution hypotonique de chlorure de potassium qui par choc osmotique provoque l’éclatement des membranes et libère le matériel cellulaire. Par la suite, l’extrait de moelle est repris dans du fixateur (préparé selon les proportions de 1 volume d’acide acétique glacial et 3 volumes de méthanol) qui inhibe les réactions chimiques. Enfin, la solution de moelle prête à être étalée sur lame est obtenue après 3 étapes de centrifugation dans du fixateur. Les lames ainsi préparées sont colorées par la méthode standard dans un bain de Giemsa à 6% durant 6 à 8 minutes. Les lames sont observées au microscope optique avec l’objectif à immersion (x1000). Selon la qualité des lames, un certain nombre de métaphases est retenu pour monter le caryotype et établir la formule chromosomique de l’individu, représentée par le nombre diploïde (2n = nombre total de chromosomes), le nombre fondamental autosomique (NFa= nombre total de bras des autosomes) et le nombre fondamental (NF = nombre total de bras chromosomiques des autosomes + gonosomes). 

Critère moléculaire

L’étude moléculaire a porté sur le gène mitochondrial du cytochrome b obtenu à partir de tissus internes (foie, rate et cœur) ou externes (phalange et oreille) conservés en éthanol 95%. L’intérêt du génome mitochondrial pour la génétique des populations réside dans son évolution rapide ; néanmoins il présente des inconvénients liés à sa transmission presque exclusivement maternelle d’une part et par le fait qu’il représente une partie infime du génome d’une espèce d’autre part. Il ressort de cette seconde remarque que l’ADN mitochondrial ne peut pas refléter la variabilité que peut présenter une espèce ou une population. Ainsi, il présente des limites pour les possibilités de discrimination. Dans notre cas, sa transmission uniquement maternelle entrave les possibilités d’identification des individus hybrides. De ce fait, tout individu typé n’est rattaché de façon certaine qu’à l’espèce à laquelle appartient sa mère. La technique mise en œuvre est la PCR-RFLP dont les différentes phases sont : une extraction par le protocole Quiagen DNeasy (voir annexe III). Le principe est basé sur l’interaction ionique entre l’ADN chargé négativement et une membrane de silice électropositive, 12 une PCR (Polymérase Chain Reaction), soit l’amplification par réaction de polymérase en chaîne, qui consiste en un doublement par cycle de la quantité d’ADN cible (pour notre cas le gène cytochrome b), par l’extension de la séquence visée via deux amorces spécifiques qui s’hybrident au niveau de zones d’ADN qui délimitent ce gène. L’extension assurée par une polymérase est réalisée dans un thermocycleur. Ce dernier est un appareil muni d’un bloc métallique à température variable, grâce à une unité centrale programmable. Pour les conditions et programmes d’amplification, voir annexe IV, une digestion du produit PCR par une enzyme de restriction, en l’occurrence la Bsm AI contenue dans un « mix » de digestion (voir annexe V), enfin, la lecture et l’assignation spécifique par comparaison à des profils de restriction d’individus connus. La lecture consiste en une révélation des bandes d’ADN après migration électrophorétique sur gel d’agarose et coloration au bromure d’éthydium (BET). Le BET est une substance chimique qui s’intercale dans la double hélice de l’ADN. Une excitation par des ultraviolets entraîne une fluorescence de la part du BET. C’est cette émission de lumière qui est captée lors de la prise de photo, et permet ainsi la mise en évidence des fragments d’ADN. Le gel est obtenu à partir d’une poudre d’agarose reprise dans du tampon. La concentration en agarose du gel dicte la taille des fragments que l’on peut discriminer. En effet, le gel en durcissant forme des mailles dont la taille diminue avec l’augmentation de la concentration en agarose. Nous avons utilisé deux gammes de concentration : une à 1,5% pour le contrôle des extractions et des produits PCR et l’autre à 2,5% pour la lecture des profils de restriction.

Etude reproductive

L’étude de la reproduction a été menée à deux niveaux : en enclos et en animalerie, tous situés sur le site IRD (Institut de Recherche pour le Développement) de la ville de Mbour. 

En enclos (condition de semi-captivité)

Les enclos sont des carrés clôturés de 20 mètres de coté totalement étanches pour les rongeurs. Ils sont constitués par un mur en ciment haut d’environ 80 centimètres et reposant en profondeur sur une dalle de béton. L’ensemble est surmonté et couvert par un grillage métallique soutenu par des poteaux hauts d’environ 80 centimètres à partir du mur (hauteur totale 1,6m environ). Chaque enclos est doté d’une porte d’entrée et de deux petites ouvertures permettant une communication entre enclos deux à deux (voir figure 2). De l’eau et des suppléments alimentaires (granulés pour lapin) sont fournis en quatre points de chaque enclos. Les expérimentations effectuées peuvent être résumées ainsi : « ensemencement » après marquage par amputation de phalanges d’individus de première génération nés en captivité. L’ensemencement est fait en introduisant dans deux enclos adjacents non communicants 6 individus (3 femelles et 3 mâles) pour l’espèce M. erythroleucus. Dans les 2 autres enclos, la même opération est faite pour M. natalensis dans les proportions 2 mâles et 4 femelles par enclos, M. natalensis montrant une structuration sociale en dèmes où le sex-ratio des adultes est significativement déséquilibré en faveur des femelles (GRANJON et al., 1987, GRANJON et 13 DUPLANTIER, 1993). Le choix des animaux introduits dans les enclos a été fait en évitant la consanguinité (donc individus non apparentés par enclos), sur des individus âgés au minimum de 2 mois et d’un poids de 20g au moins. piégeage avec marquage des nouveaux individus couplé à des mesures de poids, des relevés de l’état reproductif des femelles et d’assignation spécifique et sexuelle. Le piégeage est effectué lors de sessions espacées de 28 à 32 jours, à raison de 4 relevés (i.e. 4 jours) par session. Il est fait avec des pièges grillagés disposés selon une maille de 5 mètres suivant 4 lignes de piège (A, B, C et D) avec chacune 4 pièges (1, 2, 3 et 4), par enclos (soit 16 pièges). Les pièges sont appâtés avec de la pâte d’arachide l’après-midi entre 16 et 17h, et relevés le matin vers 7h. typage moléculaire systématique de l’ensemble des bêtes introduites initialement ou nées en enclos par la technique de la PCR-RLFP et éventuellement par caryologie. L’expérimentation a été divisée en deux grandes étapes. La première va de l’ensemencement (le 03/02/2010) à la mise en communication des enclos deux à deux (le 14/05/2010). Il s’agit dans ce premier temps de laisser les individus s’habituer à « leur » enclos, voire à s’y reproduire librement de façon intra-spécifique, chaque échantillon spécifique étant restreint à son enclos d’origine. La seconde période qui a commencé à la mise en communication des enclos deux à deux est en cours de déroulement. Lors de cette dernière, il s’agit de voir s’il y aura ou non une reproduction entre espèces à la suite d’éventuelles « migrations » d’individus entre enclos. La proportion d’individus de chaque espèce (plus exactement de chaque type de génome mitochondrial) par enclos est également suivie à l’aide des données moléculaires.

Table des matières

Introduction
I. / Synthèse bibliographique
I.1/ Systématique distribution géographique des espèces
I.1.1/ Systématique
I.1.2/ Distribution en Afrique
I.1.3/ Distribution au Sénégal
I.2/ Evolution dans le genre Mastomys
I.3/ Paramètres reproductifs chez Mastomy
I.4/ Importance sanitaire et économique des Mastomy
II. / Matériel et méthodes
II.1/ Description et origine du matériel biologique
II.2/ Etude d’identification (ou de caractérisation)
II.2.1/ Critère cytogénétique
II.2.2/ Critère moléculaire
II.3/ Etude reproductive
II.3.1/ En enclos (condition de semi-captivité)
II.3.2/ En animalerie (captivité)
III. / Résultats
III.1/ Caractérisation (identification) cytogénétique et moléculaire
III.2/ Reproduction en captivité
III.3/ Reproduction dans les enclos
IV. / Discussion
Conclusion

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