PETITE ENTREPRISE ET PROBLÉMATIQUE DE SURVIE

 PETITE ENTREPRISE ET PROBLÉMATIQUE DE SURVIE

L’intérêt porté par les économistes à la petite entreprise ne s’est manifesté que tardivement. D’ailleurs, il est à noter que ce n’est qu’à partir des difficultés de fonctionnement des grandes entreprises, conséquentes au premier grand choc pétrolier, que la petite entreprise a connu son essor. Cependant, l’obstacle principal que doivent surmonter les entreprises de petite taille, est la survie. Ainsi, avant de nous projeter dans la problématique de la survie de la petite entreprise, il serait utile de cerner l’univers de ce qu’on appelle la petite entreprise, Il s’agit donc de savoir comment peut-on la définir. Comment cette entité économique a connu son développement à travers l’histoire économique ? Et comment s’est produit le passage de la grande entreprise à la petite. C’est ce qui fera l’objet de la première section de ce chapitre. Dans une deuxième section, nous allons recourir à une revue de la littérature, pour comprendre à travers la mise en perspective de certaines théories, les déterminants et les facteurs susceptibles d’affecter l’essor de la petite entreprise. Nous metterons l’accent sur le rôle du capital humain et du capital social, ainsi que sur l’environnement qui entoure l’entreprise en question. Ceci va nous servir de base pour engendrer nos hypothèses de recherche sur la survie de l’entreprise nouvellement créée. 

Le développement d’un entrepreneuriat axé sur les PE

Définition du concept de la PE Une revue de la littérature montre que plusieurs tentatives ont été faites pour définir la petite entreprise. Le critère de découpage sur lequel la différenciation a été faite, est relatif à la taille. Évidemment, les économistes ont discerné différentes tailles PETITE ENTREPRISE ET PROBLÉMATIQUE DE SURVIE Partie I- Chapitre 2 : Petite entreprise et problématique de survie 58 des entreprises, séparant celles très petites (les plus nombreuses, comprenant les travailleurs autonomes), des petites, des moyennes et des grandes. La première approche appelée quantitative, fait renvoi à des critères quantitatifs, tels que l’effectif, le chiffre d’affaires et les actifs de l’entreprise. Le critère de définition le plus couramment adopté est le nombre de salariés de l’entreprise. Toutefois, un petit problème surgit dans le fait, que ce critère relatif à l’effectif peut ne pas s’appliquer identiquement à tous les secteurs, étant donné les grandes disparités entre les entreprises pour ce qui est du degré d’intensité d’utilisation des facteurs de production capital et travail (Ferrier, 2002), ce qui a conduit à introduire d’autres critères comme, le chiffre d’affaire annuel22, les fonds propres, le total bilan… En effet, l’Union Européenne23 fixe des seuils pour les micro-entreprises, les petites entreprises et les moyennes entreprises (Commission européenne, 2006). Il retient le seuil de 9 salariés pour les micro-entreprises (et dont le chiffre d’affaire ou le total bilan n’excède pas 2 millions d’euros), de 49 pour les petites (et dont le chiffre d’affaire ou le total bilan n’excède pas 10 millions d’euros24), et de 249 pour les moyennes (et dont le chiffre d’affaire n’excède pas 50 millions d’euros ou le total bilan 43 millions25). En dehors de cette typologie avancée par l’Union Européenne, l’OCDE (1997) retient également la notion de très petite entreprise pour les unités qui comportent moins de 20 salariés. Elle définit alors, la mico-entreprise comme une unité qui emploie moins de 5 personnes, la très petite entreprise (TPE) comme celle qui emploie moins de 20, la petite entreprise (PE) : moins de 100, la moyenne entreprise (ME) : moins de 50026 et la grande entreprise (GE) : plus que 500 salariés.En Tunisie27, au regard de la législation tunisienne, sont considérées comme petites entreprises (PE) et petits métiers, les entreprises individuelles, ou les sociétés de personnes, ou les coopératives, dont le montant d’investissement ne dépasse 100 mille dinars fonds de roulement inclus28. Quant à la petite et moyenne entreprise (PME), elle est définie comme toute entreprise dont le montant de son investissement ne dépasse pas 10 millions de dinars fonds de roulement inclus29 . Néanmoins, construire une typologie des entreprises selon l’approche quantitative, présente certains problèmes. Un premier problème est relatif à la définition des effectifs : doit-on prendre en compte pour le calcul de l’effectif d’une entreprise le personnel employé à temps plein ou à temps partiel, de manière permanente ou de manière saisonnière… ? La réponse à ce problème a été donnée par l’Union Européenne30 , qui montre que l’effectif doit être exprimé en unités de travail par an (UTA). Toute personne ayant travaillé à temps plein pendant l’année considérée, correspond à une unité. Le personnel à temps partiel, les travailleurs saisonniers et ceux qui n’ont pas travaillé pendant toute la durée de l’année, correspondent à des fractions d’UTA.

La PE : un survol dans la théorie économique

Le rôle économique des petites entreprises est passé d’une phase d’ignorance absolue qui remonte à la révolution industrielle, à une nécessité vitale dans l’économie d’aujourd’hui, et qui a favorisé à son tour, l’émergence de l’économie entrepreneuriale. En effet, la taille des entreprises était négligée, pour ne pas dire effacée chez les économistes purs (les classiques). Ils considèrent les firmes comme des agents économiques, quelle que soit leur taille, en vertu du principe de la main invisible qui défend la thèse que chaque entreprise n’agit que pour son propre intérêt particulier, en vue de maximiser son profit et favoriser le développement économique. Ce n’est qu’avec les néo-classiques, que ce problème de la taille s’est posé. Ces derniers se sont concentrés massivement sur les grandes entreprises cherchant à réaliser d’importantes économies d’échelle, car plus la taille de la firme s’accroît, plus celle-ci réalise des économies d’échelle et plus le coût de revient de sa production diminue, ce qui améliore sa compétitivité. Dans ce contexte, et à l’issu de ce processus, l’importance accordée aux nouvelles et petites entreprises était pratiquement complètement négligeable. Ces dernières n’ont manifestement joué un rôle important dans l’économie, dite « économie du capital », et donc, sont considérées même comme une source d’inefficacité dans l’économie. Ainsi, la petite entreprise, même si elle est présente dans le système économique, ne peut que disparaître à terme. Julien et Marchesnay (1988) ont expliqué que l’entreprise individuelle ou familiale est considérée à cette époque comme dépassée, et ont même pensé qu’elle est appelée à périr. La disparition des petites entreprises, par voie de conséquence, aurait comme effet une guerre des prix entre les grandes entreprises présentes sur le marché. Dès lors, le  pouvoir financier et l’aversion aux risques poussent les firmes à grandir et à acquérir des positions monopolistiques, ou du moins oligopolistiques, si la guerre des prix devient trop dangereuse (Robinson, 1969)32 . D’ailleurs, dans la théorie marxienne, le système économique joue au profit des grandes entreprises. Il pousse les capitalistes à accumuler du capital, ce qui conduit à la croissance des investissements, leur permettant de produire à plus grande échelle, mais à plus bas prix. Ceci amènera à la disparition des petites entreprises, au profit des grandes entreprises concentrées. La distinction entre petite et grande entreprise remonte historiquement aux écrits de Marshall (1890-1892), qui analyse les avantages et les inconvénients des petites entreprises, et souligne en effet que : « les petites firmes sont encore placées sous un grand désavantage, même dans une industrie localisée » 33 Marshall (1892, Livre IV, p. 177). Ici, Marschall, évoque la notion de la « localisation de l’industrie », connue aussi sous le nom de « district industriel », définie dans son ouvrage Principes d’économie politique comme la concentration d’un grand nombre de petites entreprises dans certaines localités (1906 [1890], Livre IV, p. 115). Ces dernières tirent avantage d’avoir accès à des biens intermédiaires et des services spécialisés à moindre coût, à une maind’œuvre spécialisée et qualifiée, et à un réservoir de connaissances techniques communes, reposant sur l’apprentissage collectif et le partage des informations (Daumas, 2007, p. 135). Cependant, ces petites entreprises sont encore désavantagées comme le mentionne Marshall (1892), car, seules les entreprises de grande taille sont en mesure de consentir les investissements en capital risqué, nécessaires à la réduction de certains coûts par économies d’échelle internes, et à l’innovation de produit, qui à son tour supporte la croissance (Picory, 1994). En effet, les petites entreprises n’étant que marginalement impliquées dans l’activité d’innovation. Il existait de fait des barrières à l’entrée, jouant en défaveur de ces dernières. Étant donné que les innovations de produits supposent des financements importants en R&D, les grandes entreprises seraient donc mieux placées pour engager de telles dépenses et bénéficier des économies d’échelle qui leur sont liées (Cohen et Klepper, 1992). Dès lors, plus le facteur de la connaissance gagnait en importance, plus le rôle des petites et nouvelles firmes se marginalisait dans la contribution à l’innovation et à la croissance. C’est ainsi, que Audretsch (2006) met l’accent sur le fait que, quand bien même les petites et nouvelles firmes étaient confrontées à des désavantages inhérents à la taille dans « l’économie du capital », leur incapacité à engendrer de larges investissements en connaissance, les empêchait apparemment de développer un avantage compétitif dans « l’économie de la connaissance ». La supériorité des grandes firmes et leur capacité à mobiliser les moyens nécessaires à l’innovation de produits et/ou de procédés, confirment la thèse selon laquelle, les petites ou les moyennes ne peuvent être vues que comme une phase transitoire, constituant par la suite un stade particulier de la vie de l’entreprise dans son processus de croissance. A cet égard, Julien (2008) expose trois scénarios : un premier scénario dans lequel les petites firmes vont disparaître pendant leurs premières années d’existence ; dans un deuxième scénario elles grandissent et deviennent efficaces ; et enfin dans un troisième, ces unités économiques vont être au service des grandes firmes et finissent par être absorbées par elles. C’est ainsi que jusqu’à la fin des années soixante, le rôle des petites entreprises n’a pas été pratiquement considéré par les économistes, en tout cas, pas à sa juste mesure. Il faut attendre Schumacher (1973) pour que les prémisses d’une théorie économique de la PME puis de la TPE, prennent enfin racine (Ferrier, 2002)

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