Antibiothérapie dans les infections des voies urinaires hautes

Protocole de service

Le protocole de service a été rédigé en suivant les recommandations de la SPILF de 2015, reprises par l’HAS en 2016  :
Le diagnostic se fait dans un premier temps lors de l’examen clinique du patient (classiquement douleur lombaire unilatérale et fièvre dans les suites d’une cystite non ou insuffisamment traitée), puis est complété par des examens complémentaires. Le diagnostic formel se fait par un ECBU retrouvant une bactériurie significative .
Le traitement ambulatoire est réalisable devant l’absence de signe de gravité clinique, l’absence de comorbidité sévère, de grossesse évolutive, de vomissement si traitement par fluoroquinolone per os, et en fonction du contexte socio-économique.
Pour les femmes :
Traitement probabiliste par Fluoroquinolone ou par Ceftriaxone puis relai en fonction des résultats de l’antibiogramme pour une durée de 7 jours . Pour les PNA à risque de complication : la durée est de dix à quatorze jours .
Pour les hommes : Le traitement probabiliste est similaire aux PNA à risque de complication de la femme.
Pour les deux sexes, une réévaluation de l’antibiothérapie et de l’évolution clinique doit être systématiquement faite à 48-72 heures avec l’antibiogramme.
L’échographie rénale doit être faite dans les 24h pour les formes hyperalgiques. Pour l’enfant, l’utilisation d’emblée par voie orale de la Céfixime (grade B) est envisageable dans les cas des pyélonéphrites aiguës sans signe de gravité et à bas risque définis par : âge supérieur à 3 mois, état général conservé, durée d’évolution de la fièvre inférieure à 4 jours, absence de comorbidité associée, d’antécédents d’infection urinaire, d’uropathie et d’antibiothérapie préalable dans les trois derniers mois .
Chez la personne de plus de 75 ans, ou de plus de 65 ans avec 3 critères de Fried : les signes urinaires peuvent être absents. Le traitement correspond au traitement de la pyélonéphrite à risque de complication, mais il faut adapter la posologie à la clairance de la créatinine et faire attention aux risques d’effets secondaires et d’interactions médicamenteuses.

Examens des urines, examens d’imagerie

Dans le groupe 1, 30 % des patients étaient allés voir leur MT avec un ECBU versus 60 % dans le groupe 2 (environ 16% des MT interrogés ne se souvenaient plus si les patients étaient venus avec leur ECBU). Ces résultats mettent en évidence l’un des principaux freins à l’adaptation par les MT : la difficulté des patients à disposer des données bactériologiques.
Dans notre étude, la BU avait été réalisée (en tout cas retrouvée dans le dossier) chez 90 % des patients dans le groupe 1, et 94 % dans le groupe 2 (pas de différence significative avec p>0,05). L’ECBU avait été réalisé pour 83 % des patients avant mise en place du protocole, et 100 % après protocole.
Un examen d’imagerie (échographie et/ou scanner rénal et des voies urinaires) avait été prescrit ou réalisé pour 41,7 % des patients dans le groupe 1, et 38,0 % dans le groupe 2 (pas de différence significative avec p>0,05).
Ces résultats vont dans le sens d’une amélioration des pratiques professionnelles : avec une augmentation de la réalisation de la BU, de l’ECBU et diminution des examens d’imagerie théoriquement non indiqué dans un tableau de PNA simple. De plus, une part plus importante de patients se présentaient avec le résultat de leur ECBU lors de la visite à 72 h.
Une étude prospective d’évaluation des prescriptions des antibiotiques au service des urgences d’un Centre Hospitalier et Universitaire [CHU] de la région parisienne en 2006, dans le cadre d’un audit clinique, montre un taux de prélèvement bactériologique à 87 %, ce qui a conduit à isoler un germe dans 61% des cas pour les IU .
Dans l’étude de Charra et al, la mise en place de nouvelles recommandations a permis de limiter l’utilisation des bandelettes urinaires, et de mieux identifier les situations justifiant la prescription d’un ECBU et d’une antibiothérapie : diminution annuelle des bandelettes urinaires [BU] de 34 % et des ECBU de 25 %. L’instauration d’un nouveau système de prélèvement des ECBU est corrélée à une augmentation de 21% des analyses concluantes. Le rendu des résultats des antibiogrammes a été optimisé. Les formations sur le bon usage des antibiotiques ont entraîné une baisse de 5,0 % des consommations globales .

Type d’antibiothérapie

Parmi les patients ayant reconsulté leur MT, dans le groupe 1, quatre patients ont bénéficié d’un changement d’antibiothérapie.
Sur les quatre patients, deux patients présentaient une culture négative, l’antibiothérapie a donc été arrêtée. Pour les deux autres, l’antibiothérapie initiale était la Ceftriaxone. Aucun des patients traités par FQ n’a eu de modification de l’antibiothérapie.
Parmi les patients ayant reconsulté leur médecin traitant, dans le groupe 2, vingt patients ont bénéficié d’un changement d’antibiothérapie.
Chez ces patients, sept avaient été traités par Ceftriaxone et certains ont bénéficié d’un relai par Amoxicilline. Chez les patients sous FQ (12 adaptations), deux ont présenté une augmentation de la durée de l’antibiothérapie, quatre ont arrêté l’antibiotique devant une culture négative, six ont bénéficié d’un relai de l’antibiothérapie.
Dans le groupe 2 : parmi les patients étant sortis sous Ceftriaxone, 4 patients sont sortis sous Ceftriaxone en intramusculaire pour 3 jours avec une information claire de la nécessité d’un traitement plus long après avoir récupéré l’antibiogramme. Dans ce cas, les 4 patients ont reconsulté leur MT et l’adaptation a alors été réalisée. Il semblerait donc opportun d’étendre cette analyse à plus de patients.
On constate que globalement, les médecins généralistes adaptent peu l’antibiothérapie, notamment si elle s’est faite avec des FQ, et ce malgré la récupération de l’ECBU. En effet ceux -ci préfèrent garder le traitement instauré aux urgences, en particulier pour les FQ, pour lesquelles la voie d’administration ne pose pas de problème.
Une étude sur l’évaluation de la qualité des prescriptions d’antibiotiques dans le SAU d’un CHU en région parisienne montre que 54% seulement des prescriptions d’antibiotiques concernant les infections pulmonaires, urinaires, cutanées et ORL réalisées au SAU étaient conformes aux recommandations du guide local, et qu’un tiers de ces prescriptions étaient discutables quant à l’indication et/ou au choix de l’antibiotique et/ou aux modalités d’administration .
L’étude de Gendrin et al sur l’amélioration de la prescription des fluoroquinolones dans les infections urinaires avant et après la mise en place de mesures correctrices (rappel des recommandations) a permis de montrer une augmentation du nombre de prescriptions entièrement conformes aux recommandations régionales (de 36% à 55%) .

Durée du traitement et posologie

Pour les femmes la durée de prescription des ATB est passée d’une moyenne avant protocole de 9,1 jours versus 7,4 jours après protocole se rapprochant de la durée préconisée dans les recommandations.
De nombreuses études montrent les erreurs fréquentes dans les durées de traitement antibiotique. L’étude de Desmots de 2011, au CHU de Nancy, qui étudie le bon usage des FQ dans des infections bactériennes diverses, montre une connaissance imparfaite des durées de prescription pour les FQ : seulement 17 % des durées de traitement sont justes . L’étude de Gendrin, pour les durées de traitement des IU, montre des taux de conformité de la durée du traitement de 64 %, puis de 78% après la deuxième évaluation des pratiques professionnelles .
Par ailleurs, une étude a démontré que 5 à 7 jours de FQ, sous forme de Ciprofloxacine (7 jours) ou Lévofloxacine (5 jours) étaient suffisant sur la pyélonéphrite .
Une étude a démontré qu’un traitement de 7 jours de C3G, avec un jour de Ceftriaxone en dose unique et 6 jours de Céfixime, pouvait être considéré comme efficace dans le traitement de la PNA simple chez la femme entre 18 et 65 ans .
En terme de posologie : une étude sur la prise en charge des PNA communautaires faite sur Lyon, les posologies des molécules utilisées étaient conformes au protocole du service dans 93% des cas .
Dans notre étude, la posologie des traitements était correcte dans 100 % des cas. De façon globale les médecins utilisent les antibiotiques à la bonne posologie dans les pyélonéphrites.

Evolution des prescriptions d’antibiotiques

Le thème du bon usage des antibiotiques a fait l’objet de nombreuses recommandations en France. C’est un domaine dans lequel les comportements sont très difficiles à changer. Les recommandations de 2014 par la SPILF renforcent l’idée d’une épargne des FQ dans les pyélonéphrites à risque de complication, notamment en soulignant la nécessité de les éviter en cas d’antécédent de prise de FQ dans les 6 mois précédents, et en les plaçant en troisième ligne pour la cystite avec une réactualisation début 2018 (arrêt des FQ pour les cystites à risque de complication ).
Selon le dernier rapport de l’ANSM de 2017  : la consommation d’antibiotique en France se situe à un niveau plus élevé que la moyenne européenne. En 2016, la France se situait au troisième rang pour le secteur ambulatoire et au quatrième rang pour le secteur hospitalier.
Même si l’on constate une amélioration en comparaison du rapport de 2015 qui décrivait la France au premier rang concernant la consommation d’antibiotique en ambulatoire, la marge d’amélioration est encore importante puisque la France est passée du quatrième rang au troisième entre le rapport de 2016 et de 2017.
Après une baisse importante pendant quelques années (2000-2010), la consommation d’ATB remonte avec une croissance de 1,3% entre 2015 et 2016. 93 % de cette consommation d’antibiotiques provient du secteur de ville.
La dynamique de baisse de consommation du début des années 2000 s’est essoufflée et justifie les actions entreprises depuis trois ans, dans un contexte d’augmentation de la consommation, de faible innovation thérapeutique et d’émergence de nouvelles souches bactériennes résistantes, l’ANSM a publié en 2013, à la demande du Ministère de la Santé, une première liste d’antibiotiques dits «critiques». Il s’agit, d’une part, d’antibiotiques particulièrement générateurs de résistances bactériennes (parmi lesquels on retrouve les C3G et FQ, traitements probabilistes de choix dans les PNA) et, d’autre part, d’antibiotiques dits de «dernier recours», dont la prescription ne doit jamais être envisagée en première intention.

Table des matières

1 INTRODUCTION
2 MATERIELS ET METHODES
2.1 Objectifs de l’étude 
2.1.1 Objectif principal
2.1.2 Objectifs secondaires
2.2 Caractéristiques de l’étude
2.3 Critères d’inclusion et d’exclusion 
2.4 Recueil de données
2.5 Protocole de service
3 RESULTATS
3.1 Caractéristiques des deux échantillons étudiés
3.1.1 Nombre de sujets
3.1.2 Répartition selon le sexe et l’âge
3.2 Critère de jugement principal 
3.3 Evaluation des pratiques
3.3.1 Réalisation de la BU
3.3.2 Réalisation de l’ECBU
3.3.3 Antibiothérapie initiale
3.3.4 Durée de l’antibiothérapie chez les femmes
3.3.5 Prescription d’examen d’imagerie en externe
3.4 Modification de l’antibiothérapie par le MT
3.5 Enquête épidémiologique 
3.5.1 Enquête sémiologique
3.5.2 Enquête bactériologique
4 DISCUSSION 
4.1 Résultat principal
4.2 Intérêt de notre étude
4.3 Limites et biais
4.3.1 Caractéristiques de l’étude
4.3.2 Sélection de l’échantillon étudié
4.3.3 Limites du suivi des dossiers et des définitions
4.4 Résultats secondaires
4.4.1 Epidémiologie dans la littérature versus échantillons étudiés
4.4.2 Examens des urines, examens d’imagerie
4.4.3 Type d’antibiothérapie .
4.4.4 Durée du traitement et posologie
4.4.5 Germes et résistances
4.5 Evolution des prescriptions d’antibiotiques 
4.6 Changement observé et grands axes d’amélioration
CONCLUSION 
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES 
ABREVIATIONS 

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