Cyclisation radicalaire hétéroaromatique

Cyclisation radicalaire hétéroaromatique

La question s’est tout particulièrement posée pour des composés azotés comme les pyridines, conduisant potentiellement aux azaindoles, azaindolines et azaoxindoles (cf. schéma VI-2). Le docteur Béatrice Sire a réalisé un premier exemple de cyclisation radicalaire aromatique sur un noyau pyridine263, permettant d’obtenir l’azaindoline BS7 (cf. schéma VI-3). Ces travaux ont ensuite été approfondis par le docteur El Qacemi lors de sa thèse41. Elle a ainsi étudié en profondeur la réaction de cyclisation sur le noyau pyridine, et synthétisé tout un ensemble d’hétérocycles, comprenant les 7-azaoxindoles, les 7-azaindolines, les tétrahydro[1,8]naphthyridines et les tétrahydro-5H-pyrido[2,3-b]azépin-8-ones264 (cf. schéma VI4).Nous allons dans la suite de ce chapitre détailler les principaux résultats relatifs aux 7-azaoxindoles et 7-azaindolines, ainsi qu’à ceux fortuits sur les dihydroimidazopyridones. 

Synthèse d’azaoxindoles 

La synthèse des 7-azaoxindoles commence avec soit la 2,6-dichloropyridine 1 soit la 2,4,6-trichloropyridine 2. Celle-ci est fonctionnalisée par substitution aromatique nucléophile par une amine telle que la tert-butylamine pour donner l’amine 3, qui est acétylée par du chlorure de chloroacétyle. Le chlore de l’amide est déplacé par du sel d’O-éthyl xanthogénate de potassium pour donner le précurseur xanthate 4. Celui-ci est traité dans des conditions de cyclisation radicalaire pour donner l’azaoxindole 5. Cette technique est applicable au départ d’autres substrats pour conduire par exemple aux 6-azaoxindole MEQ7, 5-azaoxindole MEQ8 et 4-azaoxindole MEQ9. Il est important de noter que la présence d’un chlore en position α de l’azote pyridinique est nécessaire pour mener la synthèse à bien. En effet, dans le cas contraire, l’étape d’acétylation conduit non pas à l’amide attendu, mais à une bétaïne 41,265 . 

Synthèse d’azaindolines 

La synthèse des 7-azaindolines (cf. schéma VI-6) commence elle aussi avec la 2,6-dichloropyridine 1. Celle-ci est fonctionnalisée par substitution aromatique nucléophile par l’allylamine pour donner l’amine 6, qui est protégée avec soit du chlorure d’acétyle, soit par du carbonate de di-tert-butyle. Le composé protégé 7 est ensuite traité dans des conditions d’addition radicalaire intermoléculaire avec un xanthate comme le xanthate d’oxazolidinone, puis le produit d’addition obtenu 8 est traité dans des conditions de cyclisation radicalaire pour donner l’azaindoline attendue 9 avec un rendement compris entre 63% et 66%. La synthèse globale est plutôt efficace puisque les rendements globaux sont compris entre 47% et 53%. Cette technique est applicable au départ d’autres substrats pour conduire aux 6-azaindoline MEQ14, 5-azaindoline MEQ15 et 4-azaindoline MEQ16, qui sont obtenues avec des rendements globaux du même ordre de grandeur (de 35% à 58%).Il faut noter que contrairement à la synthèse des 7-azaoxindoles présentée dans le paragraphe précédent, la présence d’un chlore en position α de l’azote pyridinique n’est pas nécessaire pour mener la synthèse à bien. En effet, il n’y a pas d’étape d’acylation par du chlorure de chloroacétyle et donc pas de risque de former de bétaïne41,265 . Cependant il s’est avéré que la présence du chlore présentait un autre intérêt majeur (cf. paragraphe 4b ci-dessous). 

Synthèse de dihydroimidazopyridones 

Mécanisme 

En effet dans la synthèse des 7-azaindoles, le docteur El Qacemi a remarqué que le changement du groupe protecteur acétyle en carbonate de tert-butyle modifie complètement l’issue de la réaction. On obtient alors non l’azaindoline 9, mais uniquement la pyridone 10 avec un rendement de 66%41,266 (voir schéma VI-6).Ce résultat est tout à fait original dans la mesure où il constitue le premier exemple connu de cyclisation radicalaire sur un azote pyridinique. L’explication avancée est liée à la différence de population des deux rotamères possibles 11a et 12a lors de l’étape de cyclisation (cf schéma VI-7). Dans le cas du rotamère 12a conduisant à l’azaindole 9, le groupe protecteur Boc souffre d’interactions électroniques et stériques déstabilisantes avec l’azote du noyau pyridine, qui empêchent la chaîne d’adopter une conformation s-trans nécessaire pour cycliser sur le carbone 3. Ces interactions favorisent donc le rotamère 11a et la cyclisation sur l’azote. L’intermédiaire 11b subit ensuite une oxydation par le DLP pour conduire à l’intermédiaire 11c, qui réagit alors soit avec les traces d’eau du milieu réactionnel, soit avec l’acide laurique présent (issu de l’oxydation par le DLP de l’intermédiaire de cyclisation 11b), pour conduire à la pyridone 10. 

Facteurs

favorisant l’obtention de la pyridone Le docteur El Qacemi a prouvé l’influence déterminante du groupe protecteur porté par l’azote (cf. tableau VI-1). Le groupe acétyle, trop petit pour avoir une interaction avec l’azote de la pyridine, conduit bien au produit azaindoline exclusivement. Le groupe tert-buylcarbonate conduit lui exclusivement à la pyridone, alors que le groupe méthyl ester, d’un encombrement intermédiaire entre les deux, conduit à un mélange des deux produits. Elle a aussi prouvé l’importance du groupe présent en α de l’azote pyridinique (cf. tableau VI-2) : le chlore, de part son électronégativité et sa polarisabilité, exerce un fort effet activateur électrophile sur l’azote, le rendant plus réactif face au radical nucléophile aliphatique généré par la rupture homolitique du xanthate. Le fluor, plus électronégatif mais beaucoup moins polarisable, a un effet moindre et le rendement en pyridone 10 chute. Enfin avec un méthyle ou un hydrogène, il n’y a plus aucune activation et la pyridone n’est plus obtenue.

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