Etude de l’interface lamellaire-éponge des systèmes lyotropes gonflés

Etude de l’interface lamellaire-éponge des systèmes
lyotropes gonflés

Etudes de formes dans les lyotropes

 L es molecules amphiphiles  sont les éléments de base des systèmes lyotropes. Ces molécules qui peuvent ˆetre chimiquement très différentes, présentent des caractéristiques communes. Ainsi, elles sont généralement de forme allongée et possèdent au moins deux parties ayant des affinités fortes pour des solvants différents (Fig. 1.1- a). Les molécules les plus courantes sont constituées d’une partie polaire hydrophile et d’une partie hydrophobe apolaire, généralement une chaˆıne carbonée. Mises en solution (par exemple dans un solvant polaire tel que l’eau), ces molécules se regroupent spontanément afin de diminuer le contact défavorable entre les chaˆınes carbonées et le solvant. Les structures supramoléculaires qui apparaissent (voir exemples Fig. 1.1) s’organisent également à plus grande échelle. Pour comprendre les propriétés physiques de ces phases, il est souvent nécessaire, en première approximation, de décrire la morphologie des agrégats et des structures supra-moléculaires. Cette approche géométrique ne concerne pas seulement la description microscopique des phases de surfactants. En effet, trois thèmes importants de la physique des lyotropes traitent de la forme d’objets: – la description des agrégats donne les symétries des phases et permet une modélisation plus aisée de celles-ci en occultant les aspects moléculaires; – les défauts des phases organisées ont un rˆole d’autant plus important que des défauts macroscopiques sont présents en plus des défauts microscopiques. A priori, tous ces défauts jouent un rˆole important dans la mécanique et la rhéologie de ces phases, qui sont des sujets florissants; – l’observation des transitions de phases lyotropes sous microscope révèle des formes de gouttes complexes. Ces problèmes de croissance ont été peu étudiés dans les lyotropes 1 , mais de nombreux problèmes voisins ont été abordés dans les 1. C’est ainsi que la formation des filaments myéléniques dont les premières observations datent de 1854 a été étudiée récemment cristaux liquides thermotropes et ont fourni un solide point de départ à notre étude. Ces trois thèmes seront abordés dans l’étude de l’interface des phases lamellaire et éponge des systèmes lyotropes. Servant de trame à l’ensemble de l’exposé, ils sont précisés dans les sections suivantes et illustrés par l’exposition des principaux résultats utilisés dans la suite de l’exposé.

 Auto-organisation des molécules amphiphiles

La séparation des régions hydrophiles et hydrophobes des amphiphiles est satisfaite dans des organisations supra-moléculaires de symétries très différentes (Fig. 1.1). Les systèmes (molécules + solvant) sont appelés lyotropes car, à la différence des cristaux liquides thermotropes, la température ne joue pas un rˆole déterminant dans les transitions entre ces différentes mésophases. Ce sont les concentrations relatives des différents constituants (molécules amphiphiles, solvants…) qui déterminent la phase du système. Ainsi, le gonflement (fraction volumique de solvant) peut ˆetre le paramètre d’ordre des transitions (cas des systèmes lyotropes binaires). De mˆeme, lorsque plusieurs molécules amphiphiles sont présentes en solution, les transitions de phase peuvent ˆetre obtenues en modifiant la composition à gonflement constant. L’étude de ces phases peut se faire par dynamique moléculaire, mais il est souvent avantageux de ne considérer que les agrégats pour modéliser les phénomènes physiques aux grandes échelles devant les tailles moléculaires. Seule cette dernière approche, appliquée aux phases micellaire, lamellaire et éponge, sera utilisée dans ce travail. 

La phase micellaire L1 

Dans la plupart des systèmes, une concentration suffisante de surfactants 2 permet la formation de micelles. Ces objets (voir fig.1.1-b) sont sphériques ou allongés. Ils sont représentés ici en solution dans un solvant polaire mais on peut également les obtenir dans un milieu hydrophobe et apolaire, on parle alors de micelles inverses. Dans tous les cas, la phase micellaire peut se décrire par des agrégats de molécules amphiphiles se dépla¸cant librement dans le solvant. Le liquide obtenu est donc isotrope pour les phénomènes physiques caractérisés par des échelles grandes devant la taille 2. la concentration micellaire critique (c.m.c.) désigne la concentration en surfactants au-delà de laquelle les molécules ne sont plus isolées dans le solvant mais forment des micelles. Fig. 1.1 – Les molécules amphiphiles (a) placées en solution donnent naissance à des structures supramoléculaires variées: micelles (b), phase lamellaire (c), phase hexagonale (d) . . . des micelles (typiquement quelques nanomètres). Ces phases ne présentent ainsi pas de biréfringence optique. 

La phase lamellaire

 Lα Présentation La phase lamellaire a pour élément constitutif une bicouche plane ou membrane, formée de deux monocouches de molécules amphiphiles. Cette phase est représentée Fig. 1.2 et Fig. 1.1-c dans un solvant polaire, mais on peut également gonfler la bicouche en utilisant un second solvant apolaire. Chaque bicouche étant un liquide bidimensionnel, les lamelles présentent un ordre quasi-cristallin à une dimension dans la direction normale au couches. La périodicité smectique d varie selon le gonflement: en première approximation d = δ/(1 − φw) = δ/φs o`u φw et φs sont les fractions volumiques respectives de solvant et de membrane et δ l’épaisseur constante de la membrane.Fig. 1.2 – La phase lamellaire Lα dans un solvant unique est formée de bicouches, en moyenne planes, d’épaisseur δ. Un changement de gonflement se traduit par une variation du pas smectique d. Fig. 1.3 – Les courbures principales c1 et c2 sont les inverses des rayons de courbures principaux R1 et R2. Phases lamellaires gonflées Contrairement aux smectiques-A (Sm-A) thermotropes dont la périodicité est fixée par la taille des molécules, la périodicité lamellaire est donnée par la composition du mélange et non par la taille des molécules. Or des interactions attractives de Van der Walls sont présentes entre ces surfaces parallèles. Les phases lamellaires sont donc stabilisées par des interactions répulsives entre les membranes. Une partie de ces interactions est généralement de nature électrostatique (surfactants ioniques chargés dans un solvant polaire), mais ces dernières n’expliquent pas la stabilité de phases lamellaires gonflées dont les distances caractéristiques peuvent atteindre le micron, ni la stabilité de phases lamellaires dans lesquelles les interactions électrostatiques entre membranes sont fortement écrantées par un sel en solution. En fait, il existe une interaction de nature entropique, due aux fluctuations thermiques des membranes. Le milieu étudié n’est pas continu aux échelles mésoscopiques comme peut l’ˆetre un smectique thermotrope et les lamelles sont des objets individualisés que l’on peut prendre comme objets de base dans une description thermodynamique. En considérant les déformations d’une membrane plane, Helfrich [2] a ainsi introduit un hamiltonien de déformation élastique des membranes: H = Z Z S  κ 2 (c1 + c2) 2 + ¯κc1c2  dS (1.1) o`u c1 et c2 sont les courbures principales de la surface représentant la membrane (Fig. 1.3). On appellera désormais c = c1 + c2 la quantité double de la courbure moyenne et g = c1c2 la courbure gaussienne de la membrane, κ et ¯κ étant les modules de rigidité de courbures moyenne et gaussienne. A partir de cet Hamiltonien et en utilisant des ` interactions de type surfaces dures, Helfrich montra que la présence des lamelles voisines limitant l’amplitude des fluctuations d’origine thermique, se traduit par un potentiel effectif répulsif valant par unité de surface 3 [3]: V (d) = 3π 2 (kT) 2 128κ(d − δ) 2 (1.2) qui traduit une énergie libre par unité de volume, lorsque δ/d → 0: fHel = 3π 2 (kT) 2 128κd3 (1.3) Cette description permet d’expliquer l’étonnante stabilité de phases dans lesquelles la distance interlamellaire est supérieure à 1000˚A et o`u toutes les autres interactions peuvent ˆetre négligées. Rˆoles des fluctuations L’étude des fluctuations des membranes montre les limites de l’approximation géométrique des phases lamellaires gonflées. En effet, de grandes périodicités impliquent des amplitudes de fluctuations importantes et la loi de gonflement expérimentale s’écarte de la relation géométrique d = δ/φs. La surface réelle des membranes est en effet plus grande que l’aire du plan moyen utilisé pour décrire les membranes. On montre alors [4, 5, 6] que la loi de dilution des membranes fluctuantes est : d = δ φs  » 1 + kT 4πκ ln c r κ kT δ aφs !# (1.4) o`u a est une taille moléculaire et c une constante numérique voisine de l’unité. Outre cette modification de la loi de gonflement, les fluctuations renormalisent les rigidités comme nous le verrons en section 1.2.2. 

Table des matières

Introduction générale
I Présentation du sujet
1 Etudes de formes dans les lyotropes
1.1 Auto-organisation des molécules amphiphiles
1.1.1 la phase micellaire L1
1.1.2 La phase lamellaire Lα
1.1.3 La phase éponge L3
1.2 Les défauts de la phase lamellaire
1.2.1 Défauts microscopiques des phases lamellaires
1.2.2 Elasticité d’un smectique
1.2.3 Défauts macroscopiques de la phase lamellaire
1.3 Formes des gouttes de phase smectique
1.3.1 Approche générale statique
1.3.2 Construction de Wulff
1.3.3 Ancrage tangentiel
1.3.4 Le facettage volumique smectique
1.3.5 Aspects dynamiques
2 Aspects expérimentaux de l’étude
2.1 Le quasi-ternaire CPCl/hexanol/saumure
2.1.1 Composants et notations
2.1.2 Diagramme des phases et transition Lα-L3
2.1.3 Domaine de coexistence L3 − Lα
2.1.4 Effets de la température
2.2 Etude expérimentale de la transition
2.2.1 Préparation des échantillons
2.2.2 Etude en microscopie optique
2.2.3 Diffusion X aux petits angles
3 Métastabilité des textures
3.1 La phase éponge: un simple liquide isotrope?
3.2 Textures métastables des lamellaires
3.2.1 Défauts de courbure gaussienne positive
3.2.2 Rhéologie de la phase Lα du système étudié
3.2.3 Textures et méthodes de préparation
3.3 Textures au voisinage de la phase éponge
II Aspects macroscopiques
Introduction de la 2e partie
4 Textures dans la zone biphasique
4.1 Les bâtonnets Lα: étude expérimentale
4.2 Principales caractéristiques des bâtonnets
4.2.1 Généralités sur les bâtonnets
4.2.2 Ancrage des couches à l’interface Lα − L3
4.2.3 Les défauts de la phase lamellaire
4.2.4 Aspects dynamiques
5 Anisotropie de l’énergie interfaciale
5.1 Obtention de gouttes à l’équilibre
5.1.1 Echantillons minces
5.1.2 Cristaux inverses
5.2 Analyse de la forme des gouttes 66
5.2.1 Solution exacte . 66
5.2.2 Une construction de Wulff modifiée
5.2.3 Pertinence du terme de courbure
5.3 Etude expérimentale
5.3.1 Protocole expérimental
5.3.2 Résultats
5.4 Les formes simples d’équilibre
5.4.1 Formes des gouttes proches de l’équilibre
5.4.2 Interface Lα-L3 libre
5.4.3 Facettage surfacique et volumique
5.5 Conclusion
6 Les défauts de la phase Lα
6.1 Observations en microscopie optique
6.1.1 Techniques expérimentales
6.1.2 Le bâtonnet ((glaive I))
6.2 Les parois de courbure dans la phase Lα
6.2.1 Modélisation des parois
6.2.2 Les parois de courbure en microscopie optique
6.2.3 Application
6.3 Le rˆole des parois dans le facettage volumique
6.4 Association DCFs -parois
6.4.1 Faits expérimentaux
6.4.2 Géométrie proposée et aspects énergétiques
6.5 Approximation géométrique des smectiques
6.5.1 Approximation géométrique et conditions aux limites
6.5.2 Extension de l’approximation géométrique aux parois de courbure
6.5.3 Application
6.6 Conclusion
7 Empilements de DCFTs non-congruents
7.1 Formulation précise du problème
7.1.1 Différents modèles
7.1.2 Aspects énergétiques
7.2 Propriétés générales des empilements
7.2.1 Densité d’énergie
7.2.2 Domaine de variation des ωi
7.2.3 Stabilité sous dilatation
7.3 Solutions partielles du problème
7.3.1 Solution exacte aux petites épaisseurs
7.3.2 Solutions locales et globales
7.3.3 Expression des paramètres géométriques de σT
7.3.4 Résultats
7.4 Observations expérimentales
7.4.1 les défauts du réseau RH
7.4.2 Les différents réseaux hexagonaux
7.5 Conclusion : ((Facettage Volumique)) et pavage d’Apollonius
8 Croissance et forme des bâtonnets
8.1 Expériences de contact
8.1.1 Réalisations expérimentales
8.1.2 Analyse rapide
8.2 Croissance libre et formation des bâtonnets
8.2.1 Aspects expérimentaux
8.2.2 Phénomènes de croissance dans une solution à plusieurs composants
8.2.3 Croissance lente en quasi-équilibre
8.2.4 Croissance rapide dendritique
8.2.5 Relaxation des dendrites : le rˆole-clé des parois transitoires
8.2.6 Régime intermédiaire : couplage du facettage volumique et des instabilités de fronts
8.3 Conclusion
9 Estimation expérimentale de la tension interfaciale
9.1 Données et méthodes présentes dans la littérature
9.1.1 Estimation de σ0 à partir du ((facettage volumique))
9.1.2 Mesures indirectes lors de la transition Lα-L3 en géométrie confinée
9.1.3 Mesures des faibles énergies interfaciales
9.1.4 Mesure de la tension interfaciale entre deux fluides isotropes Newtoniens
9.2 Etude expérimentale
9.2.1 Préparation des échantillons et étude de la relaxation
9.2.2 Mesures expérimentales
9.3 Discussion
9.3.1 Tension interfaciale effective σef f
9.3.2 Discussion des hypothèses
9.3.3 Conclusion
Conclusion de la 2e partie
III Aspects microscopiques
Introduction de la 3e partie
10 Epitaxie des phases ´ Lα et L3
10.1 Ajustement géométrique des distances d3 et dα 189
10.1.1 Approche qualitative
10.1.2 Application au système étudié
10.1.3 Illustration du phénomène
10.1.4 Epitaxie de la phase  Lα et de la phase P
10.2 Obtention des distances caractéristiques en DXAP 194
10.2.1 Aspects expérimentaux
10.2.2 Suivi de la transition en température
10.2.3 Effets de la dilution
10.3 Lois de gonflement
10.3.1 Excès de surface
10.3.2 Origines ((géométriques)) de l’écart à la loi gonflement
10.4 Conclusion sur le modèle de l’épitaxie des phases Lα et L3
11 Modèles microscopiques
11.1 Estimation de la tension interfaciale
11.1.1 Approche ((mécanique))
11.1.2 Utilisation de lois d’échelles
11.2 Estimation de l’anisotropie de tension interfaciale
11.2.1 Déviation des conditions épitaxiales
11.2.2 Périodicité imposée par la phase éponge .
11.2.3 Phase lamellaire rigide
11.2.4 Dislocations de Frenkel-Kontorova, d’après [95]
11.2.5 Discussion – Comparaison avec les mesures expérimentales
11.3 Ancrage tangentiel et épitaxie
11.3.1 Observations expérimentales
11.4 Transition d’interfaces dans les ferrolyotropes
11.4.1 Description du système étudié
11.4.2 Observation des formes de gouttes en microscopie optique 
11.4.3 Discussion – Origine de la transition
11.4.4 Effets des champs magnétiques
11.5 Conclusion
Synthèse et Conclusion
Références Bibliographiques

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