Etude dendroecologjque des peuplements riverains de cedre blanc (thuja occidentalis l.)

Depuis les annees 1970, on reconnalt que les perturbations naturelles jouent un role preponderant dans Ia dynamique des populations forestieres (White 1979, Pickett 1980, Pickett et White 1985, White 1987). Le type de perturbation dominant varie selon le climat regional, Ia composition et Ia structure de Ia vegetation, Ia topographie et bien d’autres facteurs. Dans Ia region de Ia foret boreale, les feux constituent Ia principale perturbation naturelle (Carleton et Maycock 1978, Johnson 1992, Payette 1 992, Bergeron e t a I. 1 998 ). U ne haute f requence e t i ntensite des feux mene generalement a une mosa’ique de cohortes equiennes alors qu’un regime de feu plus modere favorise le developpement de peuplements inequiens par des processus lies a Ia succession (Johnson 1992, Frelich et Reich 1995, Bergeron et al. 2001 ).

Comme Ia dynamique des populations est controlee par les perturbations, il devient tres important de bien identifier les changements temporels du regime des perturbations. Le regime de plusieurs types de perturbations importantes tels les feux de foret, les chablis et les inondations sont controles par le climat et ses fluctuations. C eci est i mportant dans I e contexte de I a d iscussion actuelle s ur I es consequences du rechauffement atmospherique que l’on observe depuis une centaine d’annees et qui est, seton toute vraisemblance, cause par !’emission excessive des gaz a effet de serre. Cette augmentation de Ia temperature planetaire s’eleve en moyenne a 0,6 ±0,2 oc pour le XXe siecle (Houghton et al. 2001 ). Les scenarios les plus recents du Groupe intergouvernemental d’experts sur /’evolution du cHmat prevoient meme un rechauffement additionnel entre 1,4 et 5,8 °C au XX:Ie siecle (Houghton et al. 2001 ). Plusieurs etudes laissent supposer que les effets directs de ce rechauffement atmospherique {une possible augmentation de Ia production primaire) sont moins importants que les effets indirects relies a une alteration du regime des perturbations naturelles (Warrick et al. 1986, Clark 1988, Overpeck et al. 1990, Schindler et al. 1990, Flannigan et Van Wagner 1991, Apps et al. 1995, Bergeron et al. 1998, Flannigan et aL 1998). 11 faut done essayer de comprendre les interactions dans ce systeme complexe forme par le climat, les perturbations naturelles et Ia dynamique forestiere si on veut evaluer les consequences du changement climatique dans l’avenir.

Des etudes effectuees au Quebec boreal et subarctique ant mis en evidence un changement du regime des perturbations naturelles et de Ia dynamique forestiere lie au rechauffement climatique depuis Ia fin du «Petit Age Glaciaire» au milieu du XIXe siecle. Depuis, le niveau lacustre ainsi que Ia fn§quence et !’amplitude des crues printanieres de plusieurs cours d’eau dans Ia region de Ia Baie d’Hudson ant augmente (Payette 1980, Begin et Payette 1988, 1991, Payette et Delwaide 1991, Payette et Filion 1993, Lepage et Begin 1996, Begin 2000a, 2000b, 2001 ). Ces changements du regime hydrologique s’expliqueraient par une augmentation des precipitations hivernales reliee au rechauffement climatique. Ces changements climatiques seraient a ussi r esponsables de I ‘expansion des populations d ‘epinette blanche a sa limite septentrionale (Payette et Filion 1985), du changement de Ia forme de croissance dorninante chez l’epinette noire de «krummholz» a une physionomie arborescente (Payette et al. 1985, 1989, Lavoie et Payette 1992, 1994) et de Ia frequence reduite des feux (Filion et al. 1991 ) .

Dans Ia region de Ia foret boreale mixte du Quebec, plusieurs etudes ecologiques ant analyse les effets du recent rechauffement climatique depuis Ia fin du «Petit Age Glaciaire» sur le regime des perturbations naturelles et Ia composition forestiere. La reconstitution de l’historique des feux de foret dans l’est de !’Ontario ainsi que I’ ouest et le centre du Quebec montre que le cycle des feux, c’est-a-dire le temps qui s’ecoule jusqu’a ce qu’une superficie egale a celle du territoire soit brOiee, a significativement allonge dans toutes ces regions (Bergeron 1991, Bergeron et Archambault 1993, Bergeron et al. 2001 ). Cette diminution de Ia frequence des feux, particulierement prononcee au cours du XXe siecle (Fig. 0.1A), fut responsable de l’abondance croissante d’especes de fin de succession (sapin baumier, cedre blanc) au detriment des especes pionnieres telfes le pin gris et les feuillus intolerants (Bergeron et Dubuc 1989, Bergeron et Dansereau 1993, Bergeron 1998). Ces changements semblent avoir eu un equivalent a !’Holocene moyen, une periode relativement chaude qui aurait ete caracterisee par une activite plus faible des feux et une dominance du cedre blanc (Richard 1980, Carcaillet et Richard 2000, Carcaillet et al. 2001, Flannigan et al. 2001).

Au lac Duparquet, !’observation d’une augmentation a long terme depuis le milieu du XIXe siecle de Ia croissance radiale des peuplements de cedre blanc provenant de sites xeriques s’expliquerait par des precipitations estivates plus abondantes etlou plus regulieres qui auraient reduit les periodes de secheresse (Archambault et Bergeron 1992a; Fig. 0.1 B). De plus, l’etablissement d’une chronologie de cicatrices glacielles formees sur des troncs de cedre blanc riverain, causees par !’abrasion de Ia glace flottante pendant Ia debacle printaniere, revele une hausse et de Ia frequence des crues printanieres et de leur amplitude d’environ 1 m au cours de Ia meme periode (Tardif et Bergeron 1997; Fig. 0.1 C et D). Des analyses climatiques ont montre que les crues glacielles majeures coTnciderent avec des basses temperatures automnales et des precipitations abondantes pendant l’hiver et le printemps (Tardif et Bergeron 1997). Les niveaux d’eau plus eleves depuis Ia fin du «Petit Age Glaciaire» auraient aussi cause une modification du type de recrutement chez le fn§ne nair (Tardif et Bergeron 1992, 1999, Tardif et al. 1994; Fig. 0.1 E). Dans les sites fortement exposes aux inondations, Ia regeneration vegetative par des rejets de souche domine de plus en plus permettant a cette espece de persister malgre son taux de recrutement sexue faible. Les tiges d’origine sexuee prevalent dans les sites peu affectes par les hauts niveaux d’eau.

L’historique des feux, Ia composition changeante des fon3ts, Ia croissance du cedre blanc, les crues glacielles et le comportement de reproduction du frene nair indiquent done tous une augmentation des precipitations comme effet principal du rechauffement atmospherique dans Ia region du lac Duparquet depuis le milieu du XIXe siecle. Ce changement climatique pourrait etre cause par Ia migration vers le nord de Ia circulation generale de !’atmosphere permettant Ia penetration plus frequente de masses d’air meridionales chaudes et humides dans cette region (Archambault et Bergeron 1992a, Bergeron et Archambault 1993, Bergeron 1998, Flannigan et al. 2001 ).

La region du lac Duparquet se situe presque au centre de !’habitat principal du cedre blanc (Thuja occidentalis L.) qui s’etend du sud-est du Manitoba jusqu’aux provinces maritimes du Canada et de Ia pointe meridionale de Ia Baie James jusqu’au sud de Ia region des grands lacs (Johnston 1990). Cette espece est habituellement associee aux zones humides (Bergeron et al. 1983, Bergeron et Bouchard 1983, Johnston 1990), mais pousse aussi sur des sites mesiques et xeriques (Archambault 1989, Larson et Kelly 1991). Par consequent, elle occupe une grande variete de sols organiques et mineraux (Collier et Boyer 1989, Johnston 1990}. Le cedre blanc est tres susceptible a l’endommagement par les feux de foret a cause de son ecorce inflammable, d’ou sa plus grande abondance dans les sites proteges tels les marais, les bards des lacs et rivieres, ainsi que sur les 11es dans les regions ou les feux sont severes (Heinselman 1973, Ericsson et Schimpf 1986, Johnston 1990}. Dans les sites proteges des feux, cette espece peut atteindre des ages considerables au-dela de 500 ans (Thompson 1963, Wells et al. 1983, Archambault et Bergeron 1992a, 1992b, Kelly et al. 1994}.

Table des matières

INTRODUCTION GENERALE
0.1 Les perturbations naturelles so us !’influence du climat
0.2 Le cedre blanc
0.3 Objectifs
0.4 Structure de Ia these
CHAPITRE I AN ATTEMPT TO EXPLAIN THE DISTRIBUTION OF THE TREE SPECIES COMPOSING THE RIPARIAN FORESTS OF LAKE DUPARQUET, SOUTHERN BOREAL REGION OF QUEBEC, CANADA
1.1 Resume
1.2 Abstract
1.3 Introduction
1.4 Methods
1.4.1 Study area
1.4.2 Data collection
1.4.3 Environmental variables
1.4.4 Data analyses
1 Results
1.5.1 Analyses of species distribution according to geomorphological shore types
1.6 Discussion
1.6.1 Depositional flats
1.6.2 Floodplains
1.6.3 Beaches
1.6.4 Terraces
1.6.5 Rock outcrops
1.6.6 Overall data
1.6.7 Environmental factors
1. 7 Acknowledgements
1.8 References
CHAPITRE II FLOODING EFFECT ON TREE-RING FORMATION OF RIPARIAN EASTERN WHITE-CEDAR {THUJA OCCIDENTAUS L.), NORTHWESTERN QUEBEC
2.1 Resume
2.2 Abstract
2.3 Introduction
2.4 Methods
2.4.1 Study site
2.4.2 Dendrometer and environmental data
2.4.3 Data treatment and analysis
2.4.4 Ring-width analysis
2.5 Results
2.5.1 Basal area increment
2.5.2 Relationship with hydrological and meteorological data
2.5.3 Annual growth
2.6 Discussion
2.6.1 Initiation of radial increment and flooding
2.6.2 Intra-annual radial .increment and flooding
2.6.3 Inferences to annual increment
2. 7 Conclusion
2.8 Acknowledgements
2.9 References
CONCLUSION GENERALE

Cours gratuitTélécharger le document complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *