Etude ethnobotanique et chimique d’Euphorbia guyoniana Boiss. & Reut

Position systématique de la famille Euphorbiaceae

La position systématique des Euphorbiaceae et, plus spécifiquement le genre Euphorbia L. ayant déjà fait l’objet d’une étude au sein du laboratoire de Chimie et Chimie de l’Environnement (L.C.C.E), Département de Chimie, Faculté des Sciences, Université de Batna (Haba, 2008) , nous nous proposons de n’aborder que, très brièvement, ce thème, à travers quelques remarques inhérentes aux dernières classifications. La famille des Euphorbiaceae, avec ses 5000 à 10000 espèces regroupées dans près de 300 genres (Spichigera, 2000) est l’une des familles les plus vastes et les plus cosmopolites que compte le sous embranchement des Angiospermes. Paradoxalement, il s’agit de l’une des moins connue du point de vue systématique. Deux explications peuvent être apportées à cet état de fait : tout d’abord en raison de sa distribution, puisque principalement localisée en des zones tropicales, mais aussi en raison de l’existence de « fleurs minutes » chez certains de ses représentants ne facilitant évidemment en rien toute étude botanique (Webster, 1987) . Cependant, depuis un siècle et demi, quelques systématiciens se sont penchés et se penchent encore sur la classification de cette grande famille. En effet, la classification botanique, loin d’être statique, est une discipline en perpétuelle évolution. De nombreux travaux, intégrant un nombre toujours plus important de caractères tant morphologiques qu’anatomiques, conduiront à la création de nouveaux systèmes de classifications, ainsi qu’aux remaniements de certains d’entre eux. Jusqu’à ces vingt dernières années, aucunes de ces modifications n’a eu de répercutions directes sur la famille des Euphorbiaceae en ce sens que l’ensemble des auteurs se sont toujours accordés à penser que la principale famille, représentative de l’ordre des Euphorbiaceae, définie par Lindley en 1833, restait les Euphorbiaceae (Webster, 1987). Les modifications apportées aux différents systèmes de classifications ne l’étaient véritablement qu’en amont de l’ordre des Euphorbiaceae (Spichigera, 2000).
Ainsi, pour Engler (1896), la famille des Euphorbiaceae appartenait aux Spermaphytes, Angiospermes, Dicotylédones, Dialypétales, Thalamiflores et à l’ordre des Géraniales, sous ordre des Euphorbiaceae. Cronquist (1981), situait la famille des Euphorbiaceae dans le super-ordre des Rosidae et l’ordre des Euphorbiales.
Dahlgren (1989), pour sa part, classait cette même famille dans le super-ordre des Malviflorae et l’ordre des Euphorbiaceae.
Thorne (1992) proposait, quant à lui une classification situant les Euphorbiaceae dans le super-ordre des Malvanae et l’ordre des Euphorbiales.

Les plantes utiles de la famille des Euphorbiaceae

Considérant à l’origine polygénétique des Euphorbiaceae, leur distribution cosmopolite et leur grande diversité tant botanique que chimique, il n’est pas surprenant de constater que cette famille offrait et offre encore une grande quantité de plantes d’intérêt économique avec notamment (Schultes, 1987) : Des plantes oléagineuses, Des plantes alimentaires, Des plantes fournissant du bois, Des plantes fournissant du papier, Des plantes à fibres, Des plantes fournissant des poisons. A l’heure actuelle, un nombre de ces plantes jouent encore un rôle prépondérant dans la société. Ricinus Communis L. dont l’huile est utilisée depuis très longtemps comme purgatif (dangereux car violent) et est déjà citée dans un papyrus du XVIIe siècle av. J.-C. L’huile fut utilisée comme lubrifiant pour les moteurs au début du XXe siècle et l’est encore actuellement dans certaines applications (modélisme, moteurs à grande vitesse). Elle est également employée pour la fabrication de peintures et de vernis, ainsi qu’en cosmétologie (dentifrice).
Manihot esculenta Crantz est la seule plante toxique à travers le monde à présenter un intérêt alimentaire aussi fort. Toxique par la présence de cyanoglucosides, la consommation du zhizome (manioc) requiert au préalable une préparation adéquate. La farine de Manihot esculenta Crantz est également consommée; il s’agit du tapioca.
Les plantes à caoutchouc sont Euphorbia sp., Manihot glaziovii Müell Arg, Mabea sp. Et, la plus importante, Hevea brasilensis Mûell Arg. Cette dernière a, via sa domestication, profondément modifié, en moins d’un siècle, la vie de l’homme. Elle fournit, à elle seule, plus de 98 % de la production mondiale de caoutchouc naturel.
Parmi les plantes d’intérêt médicinal, citons Euphorbia cyparissias L. dont les graines, renferment des saponosides, sont utilisées en tant que purgatif et anti-inflammatoire, Jatropha curcas L. dont les graines sont, là encore, préconisées en tant que purgatif et Mercurialis annua L. dispensé en tant que laxatif.

Présentation d’Euphorbia

L’Euphorbia vient du nom Euphorbos le médecin du roi Juba II de Mauritanie au 1er siècle avant Jésus Christ, et conservé par Linné (Jassbi, 2006) .
Plantes herbacées, arbustes et de nombreuses plantes succulentes ressemblent à première vue à des cactées. Les tiges très courtes, couchées, très ramifiées, étalées en cercle sur le sol. Feuilles simples et opposées, rarement stipulées. Fleurs de ce genre ont une structure quasiment identique, se limitant à un stigmate et une étamine, toujours vert vif et paraissent généralement en petits bouquets, cyathe très petites (moins de 2mm), constitué par une fleur femelle centrale et cinq cymes exiguës de fleurs males, réduites en général à une étamine, le tout enveloppé dans un involucre cupuliforme à 4-5 lobes présentant une glande charnue de forme variable. Carpelles soudés en ovaire supère à 3 loges uniovulées. Capsule tricoque, très généralement déhiscente. Fruit (schizocarpe) capsule tricoque explosif. Les graines quadrangulaires, pourtant de petits tubercules et dépourvues de caroncule .
La majorité des Euphorbes sont connue par leur noms vernaculaires « bouhliba », qui signifie plante à sève laiteuse (Bellakhdar, 1997) , car les euphorbes contiennent un suc laiteux (liquide blanc) collant et irritant appelée latex. Ce latex provoque des irritations pour les peaux sensibles, et il est capable de provoquer des grave dégâts des muqueuses buccales et digestives, et qui peut causer, au contacte des yeux, une cécité temporaire .

Utilisations d’Euphorbia

Les Euphorbes ont de multiples utilisations, à titre médicinal, elles sont employées comme purgatif ou vésicant, contre les parasites intestinaux, l’asthme, les bronchites chroniques, la migraine (Chaabi, 2007) , pour traiter les morsures de serpent, dans le traitement de la dysenterie, du choléra, et de syphilis. Le latex des euphorbes est parfois employé pour pécher en le jetant dans l’eau pour empoisonner les poissons. Il a été aussi exploité pour produire du caoutchouc (Karharo, 1974) .
Dans cette étude nous abordons quelques espèces du genre Euphorbia et leurs utilisations : Euphorbia resinifera Berg : La résine de cette espèce endémique marocaine appelée communément Euphorbe résinifère, est utilisée en applications locales comme révulsives. Pétrie avec de la farine ou de la semoule et du blanc d’œuf, elle est utilisée contre les rhumatismes et les paralysies. Elle est également employée pour soigner les piqûres, les morsures venimeuses et les algies dentaires. Les femmes emploient aussi un mélange à base de la résine d’euphorbe comme abortif malgré ses dangers. Le latex frais de cette plante est recommandé par les berbères de Beni- Mellal, contre les verrues, on la trouve aussi dans la composition des peintures des coques de bateaux (Könemann, 1997) .
Euphorbia obtusifolia Poiret : Le latex de cette espèce est préconisé au Sahara occidental, en applications externes, en tant que remède contre les morsures de serpents et la gale animale. Euphorbia antiquorum L.: Cette plante originaire de l’Inde et du Sri Lanka, est utilisée entièrement pour traiter les infections cutanées. Le latex est employé contre la grippe et pour soigner les problèmes des voies respiratoires, principalement la bronchite.
Euphorbia kansui L. : Les racines séchées de cette plante, connues sous le nom de « Kan Sui » dans la médecine traditionnelle chinoise, sont préconisées comme remède contre le cancer. Euphorbia cyparissias L. : Les graines de cette espèce renfermant des saponosides, sont utilisées pour leurs propriétés purgatives et anti-inflammatoires .
Euphorbia hirta : occupe une place privilégiée dans diverses pharmacopées traditionnelles d’Asie orientale et d’Afrique tropicale. Selon les pays et les ethnies, les indications thérapeutiques traditionnelles les plus variées lui sont conférées. Ainsi, elle entre dans le traitement d’affections gastro-intestinales, hépatiques, cardiaques, respiratoires et génitales.
Diverses autres lui sont également attribuées, telles que des propriétés antalgiques, fébrifuges, anti-inflammatoires et cicatrisantes .

Les métabolites secondaires

Les Flavonoïdes : Le terme flavonoïdes désigne une large gamme de composés naturels qui appartiennent à la famille des polyphénols. Ils sont considérés comme des pigments quasi universels des végétaux. Ce sont des molécules aromatiques polysubstituées ayant un rôle des métabolites secondaires, très rependue dans le règne végétal, généralement hydrosolubles, et sont responsables des couleurs que l’on observe dans les pétales des fleurs.
Ils assurent la protection des tissus contre les effets nocifs du rayonnement ultra-violet. La capacité d’une espèce végétale à résister à l’attaque des insectes et des micro-organismes est souvent corrélée avec la teneur en composés phénoliques .
Plus de 4000 des flavonoïdes ont une origine biosynthétique commune et possède la même base regroupés en une douzaine de classes selon le degré d’oxydation du noyau pyranique . L’absorption quotidienne des flavonoïdes dans la nourriture habituelle, comme les fruits et autres légumes, est d’environ 1-2 g. Le thé vert est riche en catechine, et le contenu de ces composés peut atteindre 1 g/L. Selon les variations qu’on retrouve dans l’hétérocycle C (selon le degré d’oxydation du noiyau pyranique central) (Bruneton, 1999 ; D’archivio, 2007) et aussi selon la position de la liaison entre le cycle B et C, la classe des flavonoïdes peut être subdivisée, à son tour, dans des sous classes. Les composés de chaque sous-classe se distinguent par le nombre, la position et la nature des substituants (groupements hydroxyles, méthoxyles et autres) sur les deux cycles aromatiques A et B et la chaîne en C3 intermédiaire. A l’état naturel, on trouve très souvent les flavonoïdes sous forme de glycosides. Une ou plusieurs fonctions hydroxyles des flavonoïdes sont glycosylés. La partie du flavonoïde autre que le sucre est appelée aglycone.

Table des matières

Introduction générale
1- Partie Bibliographie
Chapitre –I- Euphorbiaceae
I-1-Position systématique, données botaniques et chimiques
I.1.1. Position systématique de la famille Euphorbiacées
I.1.2. Les plantes utiles de la famille des Euphorbiacées..
I.1.3. Chimie des Euphorbiacées
I.2. Le genre Euphorbia
I.2.1. Présentation d’Euphorbia
I.2.2. Toxicité d’Euphorbia
I.2.3. Utilisation d’Euphorbia
I.2.4. Etudes phytochimiques antérieures du genre Euphorbia
I.3. L’espèce Euphorbia guyoniana Boiss.& Reut
I-3-1- systématique botanique
I.3.2. Toxicité d’Euphorbia guyoniana Boiss. & Reut
I.3.3. Utilisation d’Euphorbia guyoniana Boiss. & Reut
I.3.4. Travaux antérieurs et les composés isolés des Euphorbia guyoniana Boiss. & Reut
I.4. Conclusion
Références bibliographiques
Chapitre –II- Les métabolites secondaires phénoliques
II. Les métabolites secondaires
II.1. Les flavonoïdes
II.1.2. Les sous-classes des flavonoïdes
II.1.2.1. Les chalcones et les aurones
II.1. Flavones et flavonols
II.1.2.3. Flavanones et dihydroflavonoles
II.1.2.4. Anthocyanes
II.1.3. La biosynthèse des flavonoïdes
II.1.4. Rôle des flavonoïdes chez l’homme et les plantes
II.1.5. RMN des flavonoïdes
II.1.5. 1. Les déplacements chimiques du cycle C pour les différents types de flavonoïdes
II.1.5. 2. RMN1H des flavonoïdes
II.1.6. La spectrométrie de masse
II.2. Les coumarines
II.2.1. Répartition, localisation et classification
II.3. Les tanins
II.3.1. Tanins hydrolysables
II.3.1.1. Structure des tanins hydrolysables
II.3.2. Tanins condensés
II.4. Conclusion
Références bibliographiques
Chapitre –III- Chromatographie de partage
III.1. Chromatographie de partage (CPC)
III.2. Principe de la Chromatographie de Partage Centrifuge (CPC)
III.3. Instrumentation utilisée
III.3.1. Pompe
III.3.2. Injecteur
III.3.3. Colonne chromatographique
III.3.3.1. Rotor
III.3.3.2. Détecteur et Enregistreur
III.3.3.3. Collecteur de fractions
III.4. Choix des solvants et diagrammes de phase
III.5. Les avantages et les inconvénients
III.5.1. Avantages
III.5.2. Inconvénients
III.6. Grandeurs chromatographiques
III.6.1. Coefficients de distribution KD
III.6.2. Volume de rétention Vr
III.6.3. Taux de rétention de phase stationnaire Sf
III.6.4. Sélectivité α
III.6.5. Nombre de plateaux théoriques N
III.6.6. Résolution Rs
III.6.7. Perte de charge
III.6.8. Débit et vitesse de rotation
III.7. Caractéristiques importantes en CPC
III.8. Conclusion
Références bibliographiques
Chapitre –IV-Antioxydants
IV.1. Généralité
IV.2. Définition d’un antioxydant
IV.2.1. Les antioxydants
IV.3. La capacité d’antioxydant
IV.4. Classification des antioxydants
IV.5. L’évaluation de la capacité antioxydante par le DPPH
Références bibliographiques
2- Partie Résultats et discussions
V.1. Préparation des extraits bruts
V.2. Criblage chimique général préliminaire par CCM
V.2.1. Interprétation des CCM préliminaires
V.3. Criblage chimique général et analyses LC/DAD-UV préliminaires
V.2.2. Résultats et discussions
V.3. Investigation phytochimique de l’extrait acétate d’éthyle
V.3.1. Analyse de l’extrait acétate d’éthyle par la chromatographie de partage centrifugeuse (CPC)
V.3.2. Fractionnement du bloc CPC (4b) par CLHP préparative
V.3.3. Identification du produit isolé de l’extrait acétate d’éthyle
V.3.3.1. Elucidation structurale du composé I
V.3.4. Identification des produits isolés de la première extraction
A. L’extrait butanol
V.3.4.1. Elucidation structurale du composé II
V.3.4.2. Elucidation structurale du composé III
V.3.5. Identification des produits isolés de la deuxième extraction
V.3.5.1. Elucidation structurale du composé IV (Cristaux) (l’escultine)
V.4. Conclusion
Références bibliographiques
Test antioxydant
V.5. Pouvoir antioxydant des produits isolés
Références bibliographiques
3- Partie Expérimentale
VI.1. Matériel végétal
VI.2. Recherche de quelques principes actifs
VI.2.1 Recherche des alcaloïdes
VI.2.2. Flavonoïdes (test à la cyanidine)
VI.3. Les protocoles des extractions
VI.3.1. (a) Extraction 1
VI.3.2. (b) Extraction 2
VI.4. Séparation et purification
VI.5. Méthodes chromatographiques analytiques
VI.5.1.Chromatographie sur couche mince (CCM)
Réactif de Chlorure de fer III (Révélateur des tanins)
Réactif au sel de Bleu Solide B (pour la détection des phénols et des tanins)
Réactif de Neu ou NP/PEG (Révélateur des flavonoïdes)
VI.5.2. Chromatographie liquide haute performance (CLHP)
VI.6. Méthodes chromatographiques préparatives
VI.6.1. Chromatographie d’adsorption sur colonne ouverte
VI.6.2. Chromatographie liquide à haute pression préparative
VI.6.3. Chromatographie de partage centrifuge (CPC)
VI.7. Méthodes Physico-chimiques
VI.7.1. Point de fusion (P.F.)
VI.7.2. Pouvoir rotatoire
VI.7.3. Spectrophotométrie Ultraviolet (UV)
VI.7.4. Spectrophotométrie infrarouge (IR)
VI.7.5. Spectrométrie de masse (MS)
VI.7.6. Spectrométrie de résonance magnétique nucléaire (RMN)
RMN monodimensionnelle (RMN-1D)
– RMN de proton (1H)
– RMN carbone (13C) : DEPT et J-MODULE
RMN bidimensionnelles (RMN-2D)
– Corrélations homonucléaires
– Corrélations hétéronucléaires
VI.7.7. Réactivité avec le 2,2-diphényl-1-picrylhydrazyle (DPPH)
– La courbe de calibration
– Courbe cinétique
VI.8. Conclusion 
Références bibliographiques
Conclusion générale et perspective
Références bibliographique

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