Généralités concernant l’émergence du langage

Généralités concernant l’émergence du langage

Prérequis au langage

Plusieurs conditions sont nécessaires au développement du langage chez l’enfant : Les capacités réceptives : Les capacités réceptives de l’enfant sont perceptibles dès son plus jeune âge. En effet, durant le premier mois de vie, il peut diriger son regard vers la provenance d’un son. Puis, à 4 mois l’enfant est capable de distinguer certains éléments acoustiques comme son prénom auquel il réagit (Van der Horst, 2010). Entre 6 et 11 mois, il discrimine des sons et mots appartenant à sa langue maternelle grâce à l’enveloppe prosodique de la parole à laquelle il est sensible. Il se focalise alors sur les composantes de sa langue maternelle et ne discerne plus les phonèmes n’en faisant pas partie (Touzin, 2014). L’enfant assimile certains mots et leur attribue un sens avant même d’être capable de les produire. De fait, de 11 à 14 mois, l’enfant comprend et commence à mémoriser entre 40 et 50 mots de son quotidien, principalement des substantifs et des verbes. Ses capacitésréceptives ne cessent de croître, ainsi, à 24 mois il peut comprendre des phrases et ordres simples liés au contexte. Les concepts de cause, de conséquence, de but, ainsi que les différenciations de nombre, de genre et de temps sont généralement compris à 3 ans (Van der Horst, 2010). Le contact avec un environnement sonore a une forte incidence sur le développement langagier. Par conséquent, s’assurer de l’intégrité de l’audition est une priorité chez un enfant ne présentant pas de langage (Touzin, 1996). L’intégrité des organes phonateurs : La production langagière dépend également de l’intégrité des organes phonateurs : lèvres, langue, voile, pharynx, larynx, appareil respiratoire (Touzin, 1996). Le contrôle moteur : Les voies motrices centrales et périphériques doivent être indemnes (cortex moteur, nerfs crâniens et structures de contrôle et d’automatisation telles que le cervelet et le système extrapyramidal) afin de permettre l’accès au langage (Touzin, 1996). L’efficience intellectuelle : Les capacités intellectuelles sous-tendent l’émergence du langage. Un enfant avec une déficience intellectuelle sera limité dans son développement langagier, tant au niveau expressif que réceptif. Certains précurseurs au langage trouvent leur origine au sein des situations communicationnelles : Le regard : Outre leur rôle important dans l’attachement affectif, les échanges de regards entre la mère et le bébé permettent également à ce dernier d’accéder à la communication. Les regards prolongés entre la mère et son enfant, propices à l’émergence de vocalisations, constituent l’étape initiale de l’attention conjointe (Touzin, 2014). A 3 mois, les regards concomitants aux émissions vocales sont ancrés dans la relation mèreenfant. Ces deux êtres vont alors engager ou suspendre le contact visuel à tour de rôle. De cette alternance d’interactions visuelles va progressivement naître l’attention conjointe. Par conséquent, vers l’âge de 12 mois, l’enfant pourra orienter son regard de façon à suivre la direction désignée par le geste de son interlocuteur. Si le contact visuel ne s’installe pas, le développement de l’attention conjointe ainsi que l’ajustement mèreenfant s’en trouveront impactés (Leroy et Masson, 2010). 

Normes attendues concernant la mise en place du langage 

Durant le premier mois de vie, le bébé produit des vocalisations réflexes sans valeur communicative. Ces sons végétatifs s’expliquent par l’immaturité de l’appareil phonatoire de l’enfant, ne lui permettant pas d’émettre une large panoplie de sons (Martel et Leroy-Collombel, 2010 ; Touzin, 2014 ; Van der Horst, 2010). De 1 à 4 mois le bébé gazouille, il émet des sons vocaliques, la voyelle retentit : « aaah », « ooh » (Martel et Leroy-Collombel 2010 ; Touzin 2014). De 4 à 6 mois le babillage rudimentaire se met en place, l’enfant produit alors des syllabes par association de sons vocaliques et consonantiques. Il explore ainsi ses capacités phonatoires en émettant des sons dont il fait varier la hauteur, allant du très grave au très aigu (Martel et Leroy-Collombel 2010 ; Touzin 2014). Le babillage canonique s’installe entre 6 et 12 mois. Le bébé produit des suites syllabiques ayant les caractéristiques prosodiques de sa langue maternelle (rythmes, accents, allongements…). En effet, alors qu’il était prédisposé à acquérir n’importe quelle langue, le bébé se spécialise dans les sons de sa langue maternelle et abandonne ceux qui n’en font pas partie (Touzin, 2014). Les syllabes répétées contiennent principalement des bilabiales (/p/, /b/, /m/) associées à des voyelles (Van der Horst, 2010). Cette conduite vocale se manifeste par des cycles d’oscillation de la mandibule. Le babillage est d’abord canonique ou simple : il s’agit de redoublements de séquences de type consonne-voyelle /CVCVCV/. Plus tard, ce babillage devient varié : l’enfant ne se contente pas de redoubler des séquences consonnevoyelle, il construit aussi des segments /VC/, /CVC/, /CºVºC¹V¹/, etc. Une fois cet acte vocal maîtrisé, l’enfant va l’adapter selon les situations. Ainsi, lorsque l’enfant est seul, il émet des sons de hauteur variée présentant d’importantes fluctuations mélodiques dans le but de se familiariser avec ses compétences vocales. Cependant, quand il est en présence d’un adulte et qu’il interagit avec lui, il produit des syllabes de fréquence moyenne, phonétiquement proches de celles de la langue adulte (Martel et Leroy-Collombel, 2010). Le babillage représente une étape charnière du développement langagier, entre la période prélinguistique et linguistique. L’émission des premiers mots de manière isolée se situe entre 12 et 16 mois, il s’agit souvent du doublement d’une même syllabe : « papa », « tata », « dodo ». Ils sont d’abord très liés au contexte puis, plus tard, sont produits dans des situations variées, preuve de l’aptitude de l’enfant à décontextualiser. Il est alors capable de se décentrer du contexte initial d’apparition d’un mot (« chien » : le chien de la maison) en cernant ses caractéristiques sémantiques afin de faire émerger un concept (« chien » : animal ayant quatre pattes et des poils, qui aboie…) (Martel et Leroy-Collombel 2010 ; Touzin 2014). En moyenne, un enfant produit 10 mots à 13 mois, principalement des substantifs. Ces mots se réfèrent généralement aux personnes, animaux et objets appartenant à sa vie quotidienne (Van der Horst, 2010). Vers 20-24 mois, on assiste à un brusque accroissement du vocabulaire. L’explosion lexicale surviendrait lorsque l’enfant possède une cinquantaine de mots dans son répertoire et se traduirait par l’apprentissage de 4 à 10 nouveaux mots par jour (Van der Horst, 2010). On note d’abord une abondante production de noms puis de verbes. A 24 mois l’enfant produirait plus de 200 mots. L’étendue du lexique favorise l’apparition de combinaisons de mots (Touzin, 2014). Entre 2 et 3 ans, les assemblages de mots apparaissent. L’enfant produit d’abord des énoncés composés de 2 mots qui s’enrichissent progressivement. Dans un premier temps, les productions contiennent des mots porteurs de sens tels que les noms, les adjectifs et les verbes. Elles sont cependant dépourvues de déterminants, pronoms, adverbes ou prépositions (Touzin, 1996). Cette étape est également marquée par le début de l’utilisation des pronoms personnels (d’abord « moi » puis « je, tu/toi, il/elle ») et des marqueurs d’appartenance (« pour », « à ») (Van der Horst, 2010). Vers 3 ans et demi, l’enfant maîtrise le code de sa langue maternelle et parvient à agencer les structures grammaticales entre elles. Ses productions demeurent parfois imparfaites : il peut commettre des erreurs de « surrégularisation » en appliquant une règle de façon inappropriée (par exemple il applique le suffixe «é» à tous les participes passés : « elle a metté » pour « elle a mis ») (Van der Horst, 2010). Il peut également déformer phonologiquement les mots dans le sens d’une simplification. Grâce à une commande motrice des lèvres et de la langue plus performante, la phonologie va progressivement s’améliorer (Touzin, 1996). Vers l’âge de 4-5 ans, l’enfant utilise un langage adulte pour communiquer (Touzin, 2014). Son lexique va s’accroître progressivement et la syntaxe va s’enrichir avec l’acquisition des marqueurs temporels et spatiaux et des propositions (Touzin, 1996). Ces étapes abordent le développement langagier d’un point de vue neurolinguistique. Des divergences peuvent exister en raison de variations interindividuelles pouvant être liées à de multiples facteurs tels que l’environnement linguistique, culturel et relationnel de l’enfant (Billard, 2007).

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