Generalites sur les facteurs antinutritionnels

Dans les pays en voie de développement, les rations alimentaires sont insuffisantes tant en quantité qu’en qualité. Ainsi à Madagascar, le problème alimentaire prévaut encore. Il se manifeste par l’insuffisance ou le déséquilibre des apports alimentaires, connu sous le terme : « malnutrition », surtout pendant la période de soudure. Concernant cette situation alimentaire, une récente synthèse de la FAO a révélé que 74% des Malgaches vivent en dessous du seuil de pauvreté, et 70% ne mangent pas convenablement (ANDRIANARISOA et RAJAONAH, 2000). D’une manière générale, toutes les productions agricoles sont en régression. Vers 1968, Madagascar avec ses quatre millions d’habitants environ a pu exporter du riz, mais depuis 1975, cette exportation a considérablement chuté (LEIPZIG, 1996). La consommation de riz, aliment de base des Malgaches, s’avère toujours incontournable jusqu’à maintenant.

Selon LEIPZIG (1996), différentes causes de cette insuffisance alimentaire peuvent être évoquées : de 1975 à 1985, la surface agricole cultivée est restée stationnaire (respectivement 3,4 et 3,6% de la surface totale) alors que la population a plus que doublé (respectivement 4 et 10 millions d’habitants) ; l’ensablement des grands aménagements rizicoles dû à l’érosion cause chaque année une perte en terres cultivables de 1 000 à 3 000 ha. Le même phénomène touche les grands barrages hydrauliques et les canaux d’irrigation et affecte la production à l’échelle régionale. Le rendement moyen à l’hectare reste faible et ne dépasse pas deux tonnes, etc.

GENERALITES SUR LES FACTEURS ANTINUTRITIONNELS

Les facteurs antinutritionnels (ou antinutritifs) sont des constituants qui provoquent des troubles de l’ingestion, de la digestion et de l’absorption des aliments (LEYRAL et VIERLING, 2001). Il s’agit de substances, qui interfèrent avec les processus normaux de la digestion.

LES DIFFERENTS TYPES DE FACTEURS ANTINUTRITIONNELS 

Selon leur nature chimique, il existe plusieurs types des facteurs antinutritionnels. On distingue :
➤ les composés de nature protéique comme les facteurs anti-trypsiques ayant la propriété d’inhiber les protéases et l’amylase, et les hémagglutinines ou lectines qui sont des glycoprotéines capables d’agglutiner les hématies des animaux supérieurs ;
➤ divers acides qui regroupent les substances fixatrices de minéraux, tels que l’acide phytique, l’acide oxalique ;
les composés de nature glycosidique ou les glycosides toxiques qui comprennent les substances goitrigènes (CHEFTEL et coll., 1977), les substances cyanogènes ou glycosides cyanogénétiques qui libèrent l’acide cyanhydrique à l’hydrolyse enzymatique ou chimique (CHEFTEL et coll., 1977 ; BEVAN, 1990), les saponines et les glycosides isoflavoniques ;
➤ les substances oxygénées comme les quinones ;
➤ les substances azotées où l’on trouve les alcaloïdes (CHEFTEL et coll., 1977 ; DERACHE, 1994) ;
➤ les composés benzéniques tels les safrols ou 4-allyl-1,2-méthylène dioxybenzène et les estragols ou 1-allyl-4-méthoxybenzène rencontrés dans les épices. Ils ont des activités cancérigènes (BEVAN, 1990) ;
➤ les composés de nature phénolique parmi lesquels on peut citer : les tannins, les flavonoïdes,… ;
➤ les dérivés ou analogues des acides aminés parmi lesquels on peut citer :
❖ les substances allergisantes telles que l’histamine et la sérotonine ;
❖ les analogues des acides aminés tels que le L-canavanine (analogue de l’arginine) provoquant des troubles dans le métabolisme des glucides (BEVAN, 1990 ; DERACHE, 1986).

Les substances antinutritives peuvent agir de diverses façons :
➤ détruire certains nutriments au cours de l’ingestion, par exemple, lorsqu’il s’agit d’enzymes libérés par la mastication ;
➤ inhiber les hydrolases digestives pendant la digestion ;
➤ entraîner la perte de molécules endogènes, au cours de leur détoxication.

Du point de vue nutritionnel, on peut aussi classer les substances antinutritives d’origine naturelle en fonction du type de nutriments avec lesquels elles interfèrent (DERACHE, 1986). On distingue ainsi :
✔ les substances interférant avec l’assimilation d’éléments minéraux, dont les antithyroïdiens (thio-oxazolidones, iso-thiocyanates, thiocyanates, glucosides cyanogénétiques), les oxalates et l’acide phytique ;
✔ les substances affectant l’utilisation digestive ou métabolique des protéines ;
✔ les substances supprimant ou augmentant les besoins en vitamines telles que les antithiamines, l’acide ascorbique oxydase, l’antibiotine et le niacinogène.

DESCRIPTION DE QUELQUES FACTEURS ANTINUTRITIONNELS

LES FACTEURS ANTI-TRYPSIQUES (LIENER, 1979) 

Ce sont des protéines qui ont la propriété d’inhiber les protéases (et l’α-amylases). Dans le tube digestif, elles forment des complexes très stables avec la trypsine et la chymotrypsine, inhibant l’action digestive de ces enzymes. Ces complexes (protéases digestives – facteurs anti-protéases) riches en acides aminés soufrés, sont excrétés intacts, augmentant ainsi les pertes endogènes des protéines, et diminuant fortement la digestibilité des protéines. La baisse de la concentration d’enzymes dans l’intestin grêle conduit à une hypersécrétion compensatrice de trypsine. Il s’ensuit une hypertrophie du pancréas, ce qui augmente les besoins en méthionine de l’animal. Ces facteurs anti-trypsiques provoquent de forts retards de croissance et une diminution des performances zootechniques (par exemple, le retard d’apprentissage pour les animaux vis-à-vis de certaines situations).

L’ACIDE OXALIQUE ET LES OXALATES

L’acide oxalique ou acide éthane dioïque est un diacide de structure HOOC-COOH. Il est présent dans de nombreuses plantes sous forme libre ou sous forme de sel de sodium, de potassium et de calcium. Les anions de l’acide oxalique ainsi que les sels et esters sont connus sous le nom d’oxalates (CARL, 1776). On distingue les oxalates solubles tels que les oxalates de sodium et de potassium, et les oxalates peu solubles ou insolubles tels que les oxalates de magnésium et de calcium. L’acide oxalique et les oxalates sont des substances toxiques dont le seuil de toxicité est assez bas, avec notamment une quantité minimale létale de 2 g d’oxalate pour l’homme adulte (LIBERT et FRANCESCHI, 1987). Parmi les aliments ayant une forte teneur en acide oxalique, on peut citer le cacao, le chocolat, les noix, les épinards, etc. Cet acide peut irriter les voies œsophagiennes ou gastriques lors de son ingestion et provoquer des dommages rénaux (calculs rénaux, oligurie, albuminurie, hématurie). Il est mortel à fortes doses, les précipités d’oxalate de calcium pouvant obstruer les canaux rénaux. Il apparaît dans l’urine animale et humaine sous forme d’oxalate de calcium et d’acide oxalurique (H2N CO-NHCO-COOH).

A cause de la capacité de l’acide oxalique à se lier à certains minéraux tels que le sodium, le potassium et le calcium, le fer ou le magnésium, la consommation d’aliments à fortes doses d’acide oxalique peut provoquer des carences alimentaires (CARL, 1776).

Table des matières

INTRODUCTION GENERALE
POINT BIBLIOGRAPHIQUE
1. GENERALITES SUR LES FACTEURS ANTINUTRITIONNELS
1.1. LES DIFFERENTS TYPES DE FACTEURS ANTINUTRITIONNELS
1.2. DESCRIPTION DE QUELQUES FACTEURS ANTINUTRITIONNELS
1.2.1. LES FACTEURS ANTI-TRYPSIQUES
1.2.2. L’ACIDE PHYTIQUE
1.2.3. L’ACIDE OXALIQUE ET LES OXALATES
1.2.4. LES HEMAGGLUTININES OU LECTINES
1.2.5. LES TANNINS
1.2.6. LES FLAVONOÏDES
1.2.7. LES ALCALOÏDES
1.3. LES METABOLITES SECONDAIRES
2. GENERALITES SUR LES IGNAMES
2.1. HISTOIRE DE L’IGNAME A MADAGASCAR
2.2. DESCRIPTION BOTANIQUE DE L’IGNAME
2.3. VARIETES D’IGNAMES CULTIVEES SELON LA PERCEPTION DES CULTIVATEURS
2.4. UTILISATIONS ALIMENTAIRES DES IGNAMES
2.5. UTILISATIONS THERAPEUTIQUES ET PHARMACOLOGIQUES DES IGNAMES
2.6. UTILISATIONS DES IGNAMES TOXIQUES
2.7. COMPOSITIONS CHIMIQUES DES TUBERCULES D’IGNAMES
MATERIELS ET METHODES
1. ETUDE CHIMIQUE
1.1. MATERIELS UTILISES
1.1.1. MATERIELS VEGETAUX
1.1.1.1. Classification
1.1.1.2. Noms vernaculaires
1.1.1.3. Date et lieu de récolte
1.1.1.4. Présentation des échantillons récoltés
1.1.1.5. Préparation et conservation des échantillons et des extraits
1.1.2. PRODUITS CHIMIQUES
1.2. METHODES
1.2.1. PREPARATION DES EXTRAITS A TESTER
1.2.1.1. Extraction à froid
1.2.1.2. Extraction aqueuse à chaud
1.2.2. METHODES D’ANALYSES CHIMIQUES
1.2.2.1. Méthodes de détection ou détermination des grandes familles chimiques
1.2.2.1.1. Détection des alcaloïdes
1.2.2.1.1.1. Test préliminaire
1.2.2.1.1.2. Test de confirmation
1.2.2.1.2. Détection des flavonoïdes et des leucoanthocyanes
1.2.2.1.2.1. Détection des flavonoïdes : Test de WILSTATER (test à la cyanidine)
1.2.2.1.2.2. Détection des leucoanthocyanes : Test de BATE-SMITH
1.2.2.1.3. Détection des saponines
1.2.2.1.4. Détection des triterpènes et stéroïdes
1.2.2.1.4.1. Test de LIEBERMANN-BURCHARD
1.2.2.1.4.2. Test de SALKOWSKI
1.2.2.1.5. Détection des tannins et polyphénols
1.2.2.1.6. Détection de désoxyoses : Test de KELLER-KILIANI
1.2.2.1.7. Détection des composés cyanogénétiques
1.2.2.1.8. Détection des irridoïdes
1.2.2.2. Dosage des facteurs antinutritionnels
1.2.2.2.1. Détermination de la teneur en phytate
1.2.2.2.1.1. Principe
1.2.2.2.1.2. Mode opératoire
a. Extraction de l’acide phytique
b. Précipitation du phytate ferrique
c. Obtention d’hydroxyde ferrique
d. Titration des ions ferreux
1.2.2.2.1.3. Calcul et expression des résultats
1.2.2.2.2. Détermination de la teneur en oxalates
1.2.2.2.2.1. Extraction des oxalates
1.2.2.2.2.2. Précipitation en oxalate de calcium (oxalate insoluble)
1.2.2.2.2.3. Titration de l’oxalate insoluble
1.2.2.2.2.4. Expression des résultats
2. ETUDE BIOLOGIQUE OU TOXICOLOGIQUE
2.1. MATERIELS
2.1.1. ANIMAUX D’EXPERIMENTATION (SOURIS)
2.1.2. GERMES UTILISES, MILIEUX DE CULTURE ET DISQUES D’ANTIBIOGRAMME
2.1.2.1. Germes utilisés
2.1.2.2. Milieux de culture
2.1.2.3. Disques d’antibiogramme
2.1.3. MATERIELS D’ETUDES
2.2. METHODES UTILISEES
2.2.1. PREPARATION DES MATERIELS D’ETUDE
2.2.1.1. Préparation des extraits bruts
2.2.1.2. Préparation des tubercules traités
2.2.1.2.1. La farine crue sous forme de provende (granule)
2.2.1.2.2. Le tubercule cuit
2.2.2. ETUDE DES EFFETS TOXIQUES SUR SOURIS
2.2.2.1. Administration par voie intrapéritonéale
2.2.2.2. Administration par voie orale
2.2.2.2.1. Administration de farine sous forme de provende (granules)
2.2.2.2.2. Administration des extraits à tester par gavage
2.2.2.2.3. Administration de tubercules cuits
2.2.3. ETUDES DES EFFETS SUR LA CROISSANCE DES BACTERIES
2.2.3.1. Stérilisation
2.2.3.2. Identification et caractérisation des souches par la méthode de coloration de Gram
2.2.3.2.1. Principe
2.2.3.2.2. Mode opératoire
2.2.3.2.2.1. Préparation et fixation du frottis microbien
2.2.3.2.2.2. Coloration
2.2.3.3. Etude de l’activité antibactérienne des extraits par la méthode de diffusion
2.2.3.3.1. Principe
2.2.3.3.2. Mode opératoire
2.2.3.3.2.1. Repiquage de la souche et préparation de l’inoculum
2.2.3.3.2.2. Ensemencement du milieu
2.2.3.3.2.3. Mise en culture
RESULTATS
1. ETUDE CHIMIQUE
1.1. EXTRAITS BRUTS
1.2. CRIBLAGE PHYTOCHIMIQUE
1.2.1. CRIBLAGE PHYTOCHIMIQUE DES FEUILLES
1.2.2. CRIBLAGE PHYTOCHIMIQUE DES TUBERCULES
1.3. TENEUR EN PHYTATE ET EN OXALATES DES IGNAMES
1.3.1. TENEUR EN PHYTATE
1.3.1.1. Teneur en phytate des feuilles
1.3.1.2. Teneur en phytate des tubercules
1.3.2. TENEUR EN OXALATES
1.3.2.1. Teneur en oxalates des feuilles
1.3.2.2. Teneur en oxalates des tubercules
2. ETUDE BIOLOGIQUE
2.1. EFFETS DES EXTRAITS BRUTS SUR LA SOURIS
2.2. EFFETS DES EXTRAITS BRUTS SUR LES BACTERIES
2.2.1. IDENTIFICATION ET CARACTERISATION DES SOUCHES BACTERIENNES
2.2.2. SENSIBILITE DES SOUCHES BACTERIENNES AUX DIFFERENTS EXTRAITS BRUTS
DISCUSSION ET CONCLUSIONS
CONCLUSION GENERALE ET PERSPECTIVES
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
ANNEXES

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