LA PROBLEMATIQUE DES FRONTIERES EN SE1VEGAMBIE

LA PROBLEMATIQUE DES FRONTIERES EN
SEVEGAMBIE

LE TOURNANT : LE CONGRES DE BERLIN (1884-1885) OU LA FORMALISATION DES RAPPORTS ENTRE PUISSANCES COLONIALES

Plusieurs puissances coloniales se sont télescopées en Sénégambie méridionale notamment à partir de la seconde moitié du Xlr esiècle. Il s’agit de la France. de l’Angleterre., du Portugal et dans une moindre mesure l’Allemagne. Chacune d’entre elles cherchait tant bien que mal à contrôler une portion du littoral surtout dans ce secteur. La volonté de s’approprier des ressources naturelles et de zones d’influence commerciale et politique ne tarda pas à créer des rivalités aiguës entre les puissances occidentales. Dans cette atmosphère de crise généralisée et de changement de l’environnement international, Bismarck, le Chancelier Allemand convoqua le congrès de Berlin de Novembre 1884 à Février 1885. Celui-ci déclencha un peu partout en Afrique le processus de normalisation des rapports entre puissances colonisatrices. C’est dans ce contexte que la [rance et le Portugal acceptèrent de signer la convention franco-portugaise du 12 Mai 1886 consacrant le tracé de la frontière entre les deux colonies. Au XIX »‘ siècle, le continent noir suscita un regain d’intérêts immenses. Des facteurs variés motivèrent les puissances européennes à la redécouverte du continent africain. En effet. la curiosité scientifique qui a soutenu l’essor industriel de l’Europe du XIXèm siècle, l’action des missionnaires et des explorateurs conjuguées à l’émergence des mouvements anti-esclavagistes, ont favorisé l’invasion de l’Afrique par l’Europe. Dans cette panoplie de facteurs. on peut sans doute souligner la recherche de matières premières et de débouchés pour alimenter l’industrie naissante. Le partage fut établi en fonction du désir des forces européennes en présence.  A la conférence de Berlin « i/ s’agissait de fixer la règle du jeu et de djscipliner la curée »13() . Cette « course au clocher »31 a été surtout dictée par des raisons d’ordre économique. Le continent se transforme très vite en un immense marché tourné vers l’Europe. L’espace sénégambien fut partagé par la France qui se taille la part du lion. l’Angleterre qui occupe les enclaves comme la Gambie et le Portugal restait confiné en Guinée Bissau. En l’espace de vingt ans (1880-1900), toute l’Afrique est sous occupation européenne. Dams I. esprit des européens. « prend pure(‘ (pic (111)//’ be-soin pour protéger des prises antérieures. ; puis on prend parce que c’est à la porte(‘ de la main ; puis on prend pour devancer le voisin ; on finit par prendre pour prendre. comme en temps de pénurie, parcecela pourra toujours servir, ne serait-ce que pour monnaie (l’échange »32. Les méthodes utilisées dans cette occupation anarchique allaient de la diplomatie à la guerre en siutant des traités de toute sorte pour fixer son drapeau. Sous l’arbitrage du chancelier allemand. maître du jeu des relations internationales, un certain nombre de clauses furent affrétées. les fleuves dît Congo et Niger euren.t un caractère international. Des tnesures sur l’esclavage furent aussi adoptées et la notification aux autres puissances intéressées était suffisante pour l’acquisition. de souveraineté des territoires situés à l’intérieur du continent africain- . Les zones d’influence à l’échelle du continent, ont été tracées « ail CPC11)017 de couleur sur une carte presque blanche ».34 Dans cete ruée vers l’Afrique les mobiles n’étaient pas toujours les mêmes pour les puissances européennes. La France avait. en effet, des raisons particulières dans cette conquête de l’Afrique. Depuis le second empire, la France était présente en Afrique pour des raisons de prestige et de désir patriotique. Ce qui a poussé des conquérants; comme Faidherbe « d’aller planter le drapeau tricolore sur des terres lointaines »35 . En outre, la défaite de 1870 exacerba le nationalisme français. C’est dans ce sens que 13RUNSCHW1G H. soutient que « Compenser la délaite de 1871, affirmer la grandeur et la vitalité de la Nation qui n’accepterait pas sa défaite, imposer sa civilisation outre mer, en attendant le jour où la revanche et la réintégration des provinces perdues dans la république une et indivisible seraient possible, tel fut le nouveau rêve du peuple français » 3 ‘. Ce renouveau du sentiment patriotique, après la défaite de 1871, justifie la suprématie française en Sénégambie. Puisque dès les années 1880, la France coloniale chercha à unifier l’espace sénégambien nonobstant les obstacles que constituaient la Gambie et la Guinée Bissau. Ce qui fonde sa volonté d’échanger la Gambie avec ses possessions situées au Gabon et en Côte-d’Ivoa-e 37 . Pour le Portugal, les raisons se situaient dans les relations internationales en Europe. Vers 1880, le Portugal était une puissance affaiblie par rapport à la France et l’Allemagne. La colonie de la Guinée Portugaise. principale pourvoyeuse des îles du Cap Vert 38 et d’autres colonies africaines en esclaves, était plongée clans un véritable marasme économique après la suppression de l’esclavage 39 . L’agriculture et le commerce étaient loin de compenser cette perte. Ainsi. « deux défis conditionnant le maintien de la présence portugaise se posèrent : légitimer les droits coloniaux en soumettant les populations locales à ses exigences dont la principale était le paiement de l’impôt de paillote et contenir les revendications récurrentes de la France sur sa colonie »49 .Cette double tâche était d’autant plus abscons à relever que le Portugal lit appel à des mercenaires comme Abcloul NJAAY pour consolider sa présence en Guinée. Il en résulte des difficultés dans ses relations de voisinage avec la France. La conférence de I3erlin mettait lin au processus de restructuration interne des sociétés sénégambiennes. Les colonies nouvellement nées deviennent les futurs Fiais indépendants séparés par des frontières tracées selon la volonté des envahisseurs. Pour ce faire, la méthode de délimitation linéaire admise en Europe, fut reconnue et son utilisation était devenue la règle sur le continent42.•On recherCha les. cours d’eau. les montagnes et les fleuves pour délimiter les possessions coloniales sans tenir compte des groupements populations et des communautés linguistiques et culturelles. Parfois les puissances colonisatrices allèrent jusqu’a mettre en place des frontières rectilignes sans se référer aux tribus en place. FROELICH Jean a raison de dire que « le ré.yeau de frontière se superpo.sv à la mosaïque de tribus en place, sans la modifier mais SCM.S’ .V :1′ adapter »43. En utilisant les fleuves comme critère de délimitation des territoires africains, les aventuriers européens espéraient résoudre les conflits entre les populations locales. Ils n’ont jamais pu déceler que les axes fluviaux constituaient en Afrique le plus souvent. des espaces d’unités et d’échanges intenses cies populations riveraines. Ce l’ut le cas entre le Sénégal et la Mauritanie. Mais « l’existence de complexes fluviaux convne élément de délimitation des espaces conquis ne constitue en rien les base d’une territorialité dans la mesure où ces fleuves traversent souvent l’espace occupé par les mêmes groupes ethniques et dans. le ca.s. contraire .s•ont exploités à cies fins cle pêche et de communication de convnun accord avec les populations riveraines »

LA CONVENTION DU 12 MAI 1886 OU LE REBUT DE NORMALISATION DES RELATIONS FRANCO-PORTUGAISES 

Elle intervint dans un contexte de normalisation des rapports entre puissances coloniales en Afrique. Les clauses issues de la conférence de Berlin recommandaient aux puissances européennes présentes en Afrique la signature de traités et de conventions pour délimiter les sphères d’influence. En Sénégambie méridionale. la convention du 12 Mai 1886 établit une ligne de séparation des possessions françaises et portugaises. Ce traité entre dans le cadre de la « normalisation coloniale » en Guinée selon René PELISSIER. En effet, dès les années 1880, le Portugal commençait à triompher progressivement des peuples qui étaient jusque•à récalcitrants à sa domination. On observe une accalmie dans les relations lusitano-africaines, l’économie vit une période prospère grâce au développement du caoutchouc très demandé au Portugal. Du côté de la France, elle vit son redressement économique mais aussi politique après le débâcle de 1871. Les questions coloniales sont classées au premier plan des discussions au parlement et au sein de l’opinion publique. Il apparaît de grands défenseurs de la politique coloniale comme Jules Ferry. La France voulait faire de la Sénégambie sa « chasse gardée ». Elle n’entendait pas être devancée par une puissance européenne quelconque dans la conquête de cette partie de l’Afrique. Mieux, les autorités coloniales de Saint Louis avaient émis l’idée d’échanger la possession anglaise de Gambie 45 et celle portugaise de Ziguinchor pour parachever la «francisation » de la Sénégambie. Pour cette dernière, les commerçants français de dirigera ensuite au sud-ottest à travers la passe de.s• pilotes pour gagner la 10′) -IO de latitude Nord avec lequel elle se confondra jusqu’au mérictien du Cap Roxo »48. Ce traité du 12 Mai 1886 mettait un terme aux difficultés de voisinage quii advenaient souvent entre la France et le Portugal. Cet accord délimitait cl’un côté des possessions françaises et portugaises en Afrique Occidentale et déterminaient les zones d’influence des deux puissances en Afrique Centrale entre l’Angola et le Mozambique, de l’autre côté. Au début des négociations, les prétentions du Portugal furent énormes car il voulait contrôler aussi bien la rive gauche de la Casamance que la rive droite du Rio Nunez. Mais, la commission française était loin de catutionner ces propositions portugaises. En fin de compte, les Portugais à l’exception de leur liberté d’action en Afrique Centrale et Australe «perdront sur toute la ligne »49 . Cette convention fut ratifiée par la chambre des députés française le 20 Juillet 1887 et par celle-ci le 25 Août 1887. A l’issue des pourparlers, la France concéda au Portugal le Rio Cassini en échange de Ziguinchor. Elle obtint également le contrôle des deux rives de la Casamance. Lisbonne fut la grande perdante de ces négociations. Puisqu’elle restait confinée dans une bande essentiellement maritime. C’est ce que PELISSIER exprime en ces termes « Désormais privée de profondeur continentale. la Guinée « portug-aise » Ciii7Si rabotée reste ce qu’elle était antérieurement tisve colonie fluviale et maritime »5′). On peut ainsi constater que l’article I du traité exprime clairement le tracé de la frontière SI.117 la carte. Mais, cette apparence clarté confrontée à la réalité du terrain crée un flou immense durant les opérations de délimitation. Aux yeux de certains « limite en Afrique précède la frontière ce qui revient à dire que les limites ont d’abord été fixées sur les caries avard cie pouvoir être reconnttes avec une certaine exactitude sur le terrain »51 il en résulte souvent des divergences de vue et de méthodes entre les membres des différenteS commissions de délimitation. La démarcation de là frontière dans cet espace prit un chemin difficile en raison de l’exubérance des forêts,des conditions pluviométriques et de l’abondance des marigots. Ce qui explique dans une large mesure la durée des opérations de délimitation et les changements fréquents du personnel administratif’. 

Table des matières

INTRODUCTION GENERALE
I-Problématique
II-Revue critique des sources
là’ Partie : La Sénégambie méridionale au XIX’ siècle : Approche géopolitique
I. Bref aperçu des relations franco-portugaises avant 1886
II. Le tournant : Le congrès de Berlin (Novembre 1884 – Février 1885) ou la formalisation des rapports entre puissances coloniales
2′ Partie : La Frontière Franco-portugaise :Genèse et Formation(1886-1906)
I. La. convention du 12 Mai 188’6 ou le début de normalisation des relations franco-portugaises
II. Les différentes commissions de délimitation
3′ Partie: Gestion de la frontière et enjeux politiques et économiques
I. Les implications politico-administrativesv décompositions et recompositions territoriales
II. Les implications socio-économiques : Marginalité et mobilité des populations locales
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE

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