LA RACE BOVINE VILLARD-DE-LANS

LA RACE BOVINE VILLARD-DE-LANS

 Les trois aptitudes de la race : race de travail, race à viande, race laitière
« Prendre une race façonnée qu’il faut seulement perfectionner est une grande avancée. Cet avantage, on le trouve amplement dans la race du Villard-de-Lans, qui possède, fait très rare, les trois qualités essentielles qu’on recherche dans l’espèce : aptitude pour le travail, laitière excellente, disposition à l’engraissement et chair estimée pour la boucherie ; nous en ajouterons une quatrième : sobriété précieuse ».

a) Aptitude au travail Au XIXe siècle, les propriétaires étaient majoritairement des petits cultivateurs aux moyens financiers limités. L’achat d’un cheval n’était pas envisageable, et ce sont donc les bovins de race Villard-de-Lans qui effectuaient tous les travaux agricoles [24]. A partir de 1930, le cheval, plus rapide et mieux adapté aux nouveaux outils (râteaux, faneuses, faucheuses), fait son apparition sur le plateau. Il ne détrônera cependant pas la vache qui, jusqu’à l’arrivée des premiers tracteurs dans les années 1950, restera l’animal le plus utilisé dans l’agriculture [19].
La force de l’animal servait également à l’exploitation des forêts. En attelage de quatre, six et même huit, les Villard étaient utilisées pour le débardage et le transport de bois. Leur robustesse leur permettait de cheminer le long des chemins d’exploitation au dénivelé important. Au moins une fois par an, la vache était ferrée : « pour les travaux les moins rudes, le ferrage de l’onglon externe
de chaque pied suffisait ; alors que pour le débardage et le transport de bois, le ferrage de chaque onglon était nécessaire ». Pour les travaux hivernaux, les vaches recevaient des fers cloutés [19].
Bien charpentées, dotées d’une musculature puissante, les vaches seules étaient attelées. La génisse destinée à l’attelage était préparée très jeune. Les bêtes mal cornées recevaient à un an un guide-cornes, sorte de petit joug. L’apprentissage du joug, commencé vers deux ans, était favorisé par l’accouplement à une bête plus âgée. Les vaches fournissaient leur force maximum vers 5 ou 6 ans..

Ces animaux étaient capables de travailler aussi bien dans la neige et le froid des hivers rigoureux que pendant les journées très chaudes de l’été (photos 6 et 7). Les pertes de lait étaient minimes par rapport aux autres races moins adaptées à l’attelage (la perte quotidienne a été évaluée à 2 ou 5 litres pour des vaches Villard attelées). De même, les vaches en état de gestation avancée pouvaient travailler sans dommage pour leur progéniture [37]. Cette aptitude des vaches au joug fit leur renommée dans toute la région. Les petits exploitants des régions voisines en achetaient chaque année aux foires d’automne pour avoir des bêtes à deux fins : lait et travail .
Si les bœufs n’étaient pas utilisés sur le plateau, les vaches produisaient pourtant des mâles très recherchés par les agriculteurs des plaines environnantes. Les taurillons en surnombre étaient donc vendus entre 8 et 11 mois, castrés ou non, puis dressés au joug, et engraissés vers 4 ou 5 ans [19]. Pour expliquer cet engouement, M. LAFFOND écrit : « la tête forte, les cornes solides et bien dirigées, l’encolure musclée, la côte ronde, le dos large et puissant, les fesses rebondies, les membres sains aux aplombs excellents, le caractère doux, tout concourt à faire de ces sujets des tracteurs de premier ordre. Ils atteignent, la bouche faite et après engraissement : 2 000 à 2 500 kilos la paire ». Le succès de la Villard dans les foires régionales était tel qu’entre les deux guerres, la demande dépassait l’offre. C’est ainsi que certains marchands peu scrupuleux amenaient alors des bouvillons garonnais, de même poil mais de conformation différente, qu’ils vendaient pour des Villard-de-Lans.

b) Production de viande
La production de viande de la race Villard-de-Lans est intimement liée à son aptitude au travail, celle-ci nécessitant à la fois une charpente osseuse importante et une bonne conformation musculaire.
En 1864, lorsque les pouvoirs publics s’intéressent à la Villard, ils insistent surtout sur son rendement en viande. En effet, à cette époque, l’Etat se préoccupe d’améliorer les races bovines pour la boucherie. Au milieu du XIXe siècle, le cheptel bovin était composé presque exclusivement de bêtes de trait fournissant à l’exploitation, et accessoirement à la région proche, le lait et la
viande. Face à la demande croissante des villes en viande de bœuf, le gouvernement va mettre en place une politique de sélection des races destinées à la boucherie [24]. Ainsi, à partir de 1860, si l’intérêt pour la race Villard-de-Lans s’amplifie, c’est sans doute parce que son rendement en viande était meilleur que celui des races voisines, comme en témoigne le rapport du Professeur TISSERANT : « d’après les indications prises à l’abattoir de Grenoble, des bœufs de cinq ans environ donnent un rendement net de 55 à 56 % ; les Fribourgeois, Schwitz, Tarentais … plus coûteux à engraisser, 53 %. La viande est très estimée et le commerce la recherche, il en donne de 5 à 10 francs de plus par 100 kg que les Suisses, il les paie un peu plus également que les Charolais, les Salers, les Bressans ».

c) Production laitière
Si la race est appréciée pour sa production de viande, elle l’est aussi pour ses qualités laitières. En 1864, le Professeur TISSERANT rapporte que « les qualités laitières de ces vaches sont incontestables ». Il évalue la production à 1 500 litres par animal et par an [55]. En 1913, DECHAMBRE, dans son traité de zootechnie, écrit : « la vache est passable laitière (1 800 litres) tout en étant utilisée pour les travaux agricoles » [23]. Les vaches ne produisent pas en général une très grosse quantité de lait. Il serait d’ailleurs surprenant d’avoir une production laitière développée chez ces animaux spécialisés pour le travail et ayant de bonnes dispositions pour l’engraissement. De plus, le travail soutenu et parfois intense ainsi que la ration presque uniquement composée de fourrages verts et secs ne sont pas favorables à un bon rendement laitier.

Après le vêlage, les bonnes femelles donnent quotidiennement de 12 à 15 litres de lait. Cependant, dans certaines familles laitières, les femelles arrivent à donner jusqu’à 18 litres de lait par jour. Certains éleveurs des environs de Grenoble n’hésitent donc pas à les exploiter uniquement pour la production de lait..

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