L’anisotropie magnétique dans des complexes mononucléaires

Télécharger le fichier original (Mémoire de fin d’études)

Théories et méthodes

La compréhension des propriétés magnétiques des complexes de métaux de transition requiert différentes théories et modèles. Ce chapitre présente les outils nécessaires pour comprendre
1. Les méthodes ab initio qui calculent leurs spectres avec précision.
2. Le formalisme des hamiltoniens de spin qui donne une description simple des propriétés magnétiques.
3. Les modèles permettant l’analyse et la prédiction des propriétés magnétiques d’un complexe. L’application de ces différents outils est illustrée grâce à deux exemples de complexes mononucléaires de métaux de transition : les complexes [Co(TMC)N3]ClO4 (1) et [Ni(TMC)N3]ClO4 (2) où TMC est le ligand macrocyclique tétradente tetraméthylcyclam.1,2 Leurs synthèses ainsi que l’étude de leurs propriétés magnétiques ont été réalisées au laboratoire par Fatima Al-Kathib et Georges Zakhia pendant leurs thèses de doctorat. Leurs structures cristallines (Figure 2.1) ont été obtenues par diffraction de rayons X sur monocristal (Regis Guillot, , ICMMO-LCI, Orsay). Les propriétés magnétiques ont été étudiées par magnétométrie SQUID (Fatima Al-Kathib, ICMMO-LCI, Orsay), RPE à haut champ et haute fréquence (HF-RPE, Anne-Laure Barra, LNCMI, Grenoble) et par des mesures de magnétométrie torque (Roberta Sessoli et Mauro Perfetti, Laboratoire de Magnétisme Moléculaire, Florence). Dans la première partie, je développe le formalisme des hamiltoniens de spin utilisé pour la description du ZFS de ces complexes. Ensuite, je présente les méthodes de calculs ab initio permettant d’obtenir les énergies et les fonctions d’onde de ces complexes ainsi que la théorie des hamiltoniens effectifs permettant l’extraction des paramètres de l’hamiltonien de spin. La troisième partie présente les modèles permettant la lecture et l’analyse des résultats des calculs ab initio et dans une certaine mesure la prédiction simple des propriétés magnétiques des complexes. La dernière partie est consacrée aux résultats obtenus pour les deux complexes étudiés.
Figure 2.1:structures cristallines des complexes [Co(TMC)N3]+ (gauche) et [Ni(TMC)N3]+ (droite). Ni : vert, Co : bleu foncé,
N : bleu clair, C : gris. Les atomes d’hydrogène ne sont pas représentés pour la clarté.

Hamiltoniens de spin anisotropes

Hamiltoniens modèles et hamiltoniens de spins

La description des propriétés magnétiques de SMMs se fait généralement à l’aide d’hamiltoniens de spin. Le concept d’hamiltonien de spin peut être attribué à Heisenberg et van Vleck pour la description de l’échange isotrope entre deux atomes.3 Dans ces modèles, le magnétisme d’un système est considéré comme provenant exclusivement du spin du ou des centres magnétiques composant le système. La partie orbitalaire (électronique) est absente de la description. Ces hamiltoniens n’ont donc, à proprement parler, aucun contenu chimique et décrivent des interactions effectives. Cependant, ils permettent de reproduire les propriétés du système à l’aide d’un nombre très restreint de paramètres, et ainsi de comparer aisément différents systèmes. Les mesures d’aimantation en fonction du champ, de susceptibilité magnétique en fonction de la température ou les spectres RPE sont la plupart du temps décrits par les paramètres d’un hamiltonien de spin pertinent, permettant une comparaison directe entre des systèmes similaires. De la même manière, il est possible d’extraire de calculs ab initio un hamiltonien effectif (voir la partie 2.3.3) dont l’analyse permet de remonter aux paramètres de l’hamiltonien de spin, et ainsi de comparer les résultats expérimentaux aux calculs ab initio. Cependant l’utilisation des hamiltoniens de spin est limitée aux complexes mono- ou poly-nucléaires dont l’état électronique fondamental n’est pas dégénéré, c’est-à-dire que la contribution du moment orbitalaire <⃗ aux propriétés magnétiques est négligeable. Lorsque l’état fondamental est dégénéré, il n’est plus possible de négliger cette contribution et le formalisme des hamiltoniens de spin n’est plus adapté. Les complexes 1 et 2 relèvent de la première situation et pourront donc servir d’illustration tout au long de cette partie. Dans les deux parties suivantes, je présente les hamiltoniens de spin usuels utilisés pour décrire l’anisotropie de complexes mononucléaires ou binucléaires.

Hamiltonien de Spin pour un complexe mononucléaire

Cet opérateur permet de décrire la levée de dégénérescence des 2S+1 états MS provenant d’un état électronique non dégénéré orbitalairement de spin S. Le premier terme décrit l’anisotropie axiale (il n’implique que l’opérateur +,) et D est appelé le paramètre d’anisotropie axiale. Le second terme décrit l’anisotropie dans le plan xy et E est le paramètre d’anisotropie rhombique. Le dernier terme est l’opérateur Zeeman décrivant l’interaction du spin avec un champ magnétique externe, ̅étant le tenseur de rang 2 reliant ces 2 quantités. Les deux premiers termes de l’hamiltonien (2.1) peuvent s’écrire de façon plus générale comme « FG/ ⃗ H ⃗ (2.2) où I est un tenseur de rang 2 symétrique. Lorsque ce tenseur est diagonal, c’est-à-dire lorsque le système est étudié dans le système d’axes magnétiques, les paramètres D et E de l’équation (2.1) sont donnés par = ,, − 2 J 55 + 66K (2.3) = 2 J 55 − 66K où 55, 66 et ,, sont les trois composantes du tenseur I diagonal. Dans les conventions utilisées ici, ,, est la composante la plus éloignée des deux autres et 55 > 66. Ainsi E est toujours positif et le rapport E/D est toujours inférieur à 1/3. Selon cette convention, lorsque D est positif l’axe z est un axe de difficile aimantation et le spin sera préférentiellement dans le plan xy (les composantes | /⟩ avec les | / | les plus faibles seront les plus stables) tandis qu’un paramètre D négatif indique que l’axe z est un axe de facile aimantation, c’est-à-dire que les composantes | /⟩ avec les | /| les plus grands seront les plus stables. Le paramètre d’anisotropie rhombique E couple des états qui différent de / = ±2. Dans le cas de spins entiers, l’anisotropie rhombique lève toutes les dégénérescences des niveaux | /⟩, tandis que pour les spins demi-entiers les états restent toujours au moins doublement dégénérés à cause de la symétrie par inversion du temps (dégénérescence de Kramers). La Figure 2.2 illustre, pour les deux complexes [M(TMC)N3]+, les spectres des niveaux | /⟩ issus de l’état électronique fondamental causé par les paramètres D et E issus de l’ajustement des spectres RPE grâce à l’hamiltonien 2.1 et possédant tous les deux un paramètre D positif et une anisotropie rhombique non nulle.
Figure 2.2 : levée de dégénérescence des niveaux de spin MS sous l’effet d’une anisotropie axiale (avec un axe de difficile aimantation) et rhombique. L’absence de notation pour les niveaux MS indique un mélange entre états avec ΔMS = ±2.
Les hamiltoniens de spin reposent sur le formalisme des opérateurs de Stevens. Ces opérateurs sont également à la base de la théorie du champ cristallin. Ils permettent de décrire la levée de dégénérescence d’un multiplet Q ST où les opérateurs ]Z([) sont les opérateurs de Stevens et Z([) des coefficients réels. Les 2k+1 opérateurs d’ordre k forment une base pour la représentation ([) du groupe des rotations dans l’espace SO(3). La description d’un spectre revient donc à calculer les éléments de matrice b SQ « /UVWV&#Q c Sc T. Lorsque l’on s’intéresse à la levée de dégénérescence d’un multiplet ( = c), on peut montrer que les termes d’ordre impair n’interviennent pas. Ce n’est plus le cas quand ≠ c et dans ce cas le nombre de paramètres augmente considérablement et rend le formalisme de Stevens beaucoup moins facile à utiliser. De plus, les éléments de matrice avec > + c sont nuls. Pour les systèmes de spin étudiés ici, seuls les opérateurs d’ordre k pairs avec ≤ 2 sont donc à considérer. Pour des spins supérieurs à 3/2, il est nécessaire d’ajouter les opérateurs d’ordre 4 où (h) est un tenseur de rang 4 symétrique, pouvant être décrit à l’aide de 5 opérateurs de Stevens.
Les coefficients Z([) dans l’équation (2.4) dépendent de la symétrie, par exemple pour décrire la levée de dégénérescence des orbitales d ( = 2) dans une symétrie octaédrique, les seuls paramètres non nuls sont les coefficients a(a), a(h)et ±h(h). L’écart entre les orbitales eg et t2g (ΔO ou 10Dq) est alors proportionnel à 2 ±h(h). Dans le cas de l’hamiltonien de spin (2.1), le paramètre
D est associé au coefficient a(-) et E au coefficient ±(–).
De nombreuses conventions dans la définition de ces opérateurs existent,4 mais l’expression (2.4) est générale et permet de décrire n’importe quel spectre. Il est parfois stipulé que la trace du tenseur H doit être nulle. Il est néanmoins courant d’introduire le terme a(a) dans la trace du tenseur H. Cet ajout n’implique qu’un décalage énergétique identique pour toutes les composantes MS et n’impacte pas l’anisotropie d’un centre magnétique. En revanche, lors de l’étude d’un dimère non-symétrique, ce décalage peut être différent pour les deux centres magnétiques et il faut en tenir compte dans l’hamiltonien multi-spin qui sera présenté par la suite.
Les axes magnétiques sont les axes propres du tenseur H ; x, y et z étant distingués grâce aux conventions énoncées précédemment. Dans ce système d’axes, le tenseur est diagonal et les trois axes x, y et z peuvent être associés aux directions de forte, intermédiaire et faible aimantation. Dans certains cas, les axes magnétiques sont définis comme les axes propres du tenseur ̅(en général pour l’étude de complexes de lanthanide). Si l’interaction spin-orbite est traitée perturbativement à l’ordre 2, les tenseurs H et ̅auront les mêmes axes propres (associés à l’opérateur moment angulaire orbital <⃗) et des relations peuvent être données entre ces tenseurs.5 Pour des complexes peu symétriques ou à un niveau de calcul plus élevé, ces deux tenseurs n’ont pas de relation directe entre eux.6

Hamiltonien de spin pour un complexe binucléaire

Quand un système comprend plusieurs centres magnétiques, deux formalismes peuvent être employés pour décrire le spectre de basse énergie.
Lorsque l’interaction d’échange entre les électrons célibataires est forte, l’hamiltonien considérant un spin « géant » (Giant Spin (GS) en anglais) est plus adapté. Un couplage (ferro- ou antiferromagnétique) important implique que la séparation énergétique entre les états = 0, 1, … 1 + – est importante. A basses températures, les propriétés magnétiques peuvent être décrites en considérant seulement l’état fondamental résultant du couplage. La levée de dégénérescence de cet état fondamental est alors décrite grâce à l’hamiltonien (2.1), et les couplages entre les états ≠ c ne sont pas considérés explicitement. Un exemple célèbre est le complexe de Mn12 dans lequel les interactions d’échange sont fortes et la description de ses propriétés magnétiques peut se résumer en première approximation au ZFS de son état fondamental S = 10.7
Quand l’interaction d’échange est faible, elle peut être traitée comme une perturbation des différents centres magnétiques isolés et l’hamiltonien multi-spin (MS) s’écrit : « m/ ⃗n In ⃗n ⃗B IB ⃗B ⃗n ⃗B ⃗ ⃗n ⃗B ⃗n InB ⃗B (2.6)
Les deux premiers termes représentent les anisotropies locales des différents centres magnétiques. Le troisième terme est l’échange isotrope (hamiltonien de Heisenberg-Dirac-van Vleck). Le troisième terme est l’échange antisymétrique avec ⃗ le vecteur de Dzyaloshinskii-Moriya. Le dernier terme est l’échange anisotrope, avec InB un tenseur de rang 2 symétrique. Il existe un lien entre les tenseurs In, IB et InB de l’opérateur multispin avec le tenseur H apparaissant dans l’hamiltonien GS.8 Récemment, il a été montré, au moyen de calculs ab initio, qu’un tenseur de rang 4 est nécessaire afin de reproduire correctement le spectre d’un binucléaire et que ses interactions étaient d’intensité plus importante que celles du tenseur symétrique de rang 2.9 Dans certains cas des termes d’ordre supérieurs ou/et des termes à plusieurs corps doivent être pris en compte dans la description de l’échange.9-11
Dans la partie V, quelques complexes binucléaires où l’intensité de l’anisotropie locale est du même ordre de grandeur que l’interaction d’échange seront étudiés. Dans ce cas, l’hamiltonien MS est plus adapté.

Hamiltoniens modèles : résumé

La description d’un système magnétique consiste généralement à donner les valeurs des paramètres de l’hamiltonien de spin considéré. Pour un complexe mononucléaire cela revient à préciser les valeurs de D et E (le tenseur ̅pouvant être qualitativement déduit du tenseur H). Pour un complexe polynucléaire dans le cadre du formalisme du spin géant, il suffit d’avoir les valeurs de D et E ainsi que les termes d’ordre supérieur décrivant le ZFS de l’état de spin S fondamental. Pour l’hamiltonien MS, il faut préciser les paramètres apparaissant dans l’hamiltonien (2.6). Pour un dimère sans symétrie il faudrait 21 paramètres pour déterminer complètement l’hamiltonien multi-spin et au minimum 30 si l’on considère le tenseur de rang 4. Expérimentalement les données magnétiques ou les spectres RPE sont ajustés afin d’extraire ces paramètres. Afin de rendre l’extraction possible, certains termes sont souvent négligés, en général l’échange anisotrope et antisymétrique étant plus faibles que l’échange isotrope, ils ne sont pas considérés bien que pouvant influer sur les propriétés magnétiques.
Hormis la symétrie qui permet de prédire si les termes d’un hamiltonien modèle sont nuls ou non nuls, seuls les mesures expérimentales et les calculs quantitatifs permettent de déterminer les valeurs de ces divers paramètres.

Origine physique de l’anisotropie magnétique

A basse température, les propriétés magnétiques des molécules dépendent des niveaux spin-orbites les plus bas en énergie. Dans le cas des complexes de métaux de transition, ces états sont généralement issus de la levée de dégénérescence des niveaux issus du terme fondamental. Lorsque l’état électronique fondamental n’est pas dégénéré, le ZFS est de l’ordre de quelques dizaines de cm-1, tandis que pour un état électronique dégénéré, le couplage spin-orbite (pris au premier ordre de la théorie des perturbations) conduit à des ZFS plus grands de l’ordre de 100-1000 cm-1.
Les principales interactions magnétiques ainsi que les corrections relativistes influant sur le ZFS sont :
i. Le couplage spin-orbite
ii. Le couplage spin-spin
iii. Les interactions dipolaires magnétiques entre différentes molécules
Les interactions intermoléculaires modifiant les propriétés magnétiques doivent être nulles (ou négligeables) dans l’étude des propriétés des SMMs ; cela est réalisé expérimentalement en diluant les molécules dans une matrice diamagnétique. Notons que, sinon, il est nécessaire de les introduire dans les calculs ab initio en traitant l’environnement de manière explicite ou effective. En général, les métaux paramagnétiques sont remplacés par un atome chimiquement proche mais diamagnétique. Ainsi la structure cristalline et la géométrie des complexes sont préservées. Pour les métaux 3d le ZnII (d10, S = 0) est couramment utilisé. La distance statistique entre les centres magnétiques est donc très grande et les interactions dipolaires peuvent être négligées.
Le couplage spin-spin décrit l’interaction entre les spins de deux électrons ; il comprend deux termes. = – X r −16 ⃗ . ⃗ J K + 1 y ⃗ . ⃗ − 3J ⃗%. ⃗%vKJ ⃗v. ⃗%vK z{ (2.7)
Le premier terme est généralement appelé le contact de Fermi et ne lève pas la dégénérescence des niveaux MS.12 Le second terme est le couplage dipolaire magnétique entre les différents électrons et contribue au ZFS.
La principale contribution au ZFS vient du couplage spin-orbite et son effet sera étudié plus en détail dans la partie II.3.2.
Dans la majorité des complexes, l’état électronique fondamental n’est pas dégénéré (notamment à cause de l’effet Jahn-Teller) et l’effet du couplage spin-orbite apparaît au deuxième ordre de la théorie des perturbations. Le couplage spin-spin en revanche est un effet du premier ordre. Dans les complexes de métaux de transition, le couplage spin-orbite est bien plus intense que le couplage spin-spin.13. Lorsque le ZFS est faible, par exemple pour un octaèdre faiblement distordu, l’effet du couplage spin-orbite peut être du même ordre de grandeur que le couplage spin-spin. Dans ce cas, il n’est plus possible de négliger l’effet de ce dernier si l’on souhaite une description quantitative du ZFS.14 Dans la suite, tous les complexes étudiés ont un ZFS relativement grand (pour des métaux de transition), et le couplage spin-spin a été négligé.
Bien que les propriétés magnétiques soient principalement gouvernées par le spin de la molécule, le moment angulaire orbital a également une influence. Ce moment orbitalaire apparaît dans l’hamiltonien Zeeman et créé une anisotropie dans la réponse d’une molécule à un champ magnétique. Cependant cette correction diamagnétique est très faible et est généralement considérée comme isotrope et modélisée à l’aide des constantes de Pascal.15

Calculs ab initio

Le calcul des propriétés magnétiques des SMMs nécessite une description précise de la structure fine de la molécule, en particulier pour les états de basse énergie qui seront peuplés à basses températures. Il faut donc un traitement le plus exact possible de la corrélation électronique, mais également la prise en compte des effets relativistes et notamment du couplage spin-orbite. L’hamiltonien relativiste pour un système polyélectronique peut s’écrire :16 où i et j sont les électrons du système, ℎ]~( ) l’hamiltonien de Dirac pour un électron évoluant dans le potentiel coulombien créé par les noyaux et le dernier terme décrit la répulsion coulombienne entre électrons. Pour un seul électron, la solution de ℎ]~ est un spineur de rang 4, dont 2 composantes décrivent les états d’énergies positives (électroniques) et 2 composantes les états d’énergies négatives (positronique). Pour un système à N électrons, l’état est donc décrit par spineur de dimension 4N. L’approche la plus rigoureuse consisterait à résoudre l’équation (2.8) dans un formalisme permettant de prendre en compte la corrélation électronique. Cependant le couplage entre les petites et grandes composantes du spineur rend cette méthode très coûteuse numériquement et ne permet l’étude que de systèmes de petite taille. Le découplage des petites et grandes composantes peut se faire par différentes méthodes, les plus utilisés étant DKH (Douglas Kroll Hess)17 et ZORA (Zeroth Order Regular Approximation).18 Les détails mathématiques de ces transformations de l’hamiltonien de Dirac peuvent se trouver dans la référence 16.
Le formalisme utilisé dans les calculs présentés utilise l’hamiltonien DKH à l’ordre 2. Lorsque les termes dépendant du spin dans ce hamiltonien sont négligés, le calcul devient un calcul à une composante. Les intégrales mono-électroniques sont cependant modifiées par rapport à l’hamiltonien coulombien classique pour prendre en compte les effets relativistes dits scalaires. Le choix des bases d’orbitales atomiques revêt une importance cruciale pour prendre en compte les effets relativistes scalaires, qui peuvent être très importants. Enfin, nous ne nous limitons pas aux termes relativistes scalaires. Les effets du couplage spin-orbite sont pris en compte par la méthode Spin-Orbit State-Interaction (SO-SI) qui consiste à coupler les différentes composantes MS des états de spin de basse énergie par le spin-orbite puis à diagonaliser la matrice résultant de ses interactions. Les effets des corrélations dynamiques et non dynamiques sont aussi pris en compte, comme expliqué dans la partie II.3.1.
Les méthodes ab initio présentées dans la suite prennent donc en compte i) les effets relativistes scalaires (négligeant le spin) et les fonctions d’ondes obtenues sans la prise en compte du couplage spin-orbite sont qualifiés de « spin-free », c’est-à-dire qu’elles sont fonctions propres des opérateurs + – et +,, et que leur énergie ne dépend pas de la valeur de MS et ii) le couplage spin-orbite. Le calcul de la structure fine d’un complexe de métal de transition se fait donc en 2 étapes :
i. Calcul de la structure électronique de l’état électronique fondamental et d’états excités choisis incluant les effets relativistes scalaires.
ii. Calcul et diagonalisation de la matrice de l’hamiltonien SO dans la base des différentes composantes MS de ces états.
La partie suivante présente d’abord les méthodes de calcul permettant de prendre en compte la corrélation électronique puis la prise en compte du couplage spin-orbite a posteriori à partir des fonctions d’onde et des énergies spin-free.

Structure électronique

La méthode la plus basique en chimie quantique est la méthode Hartree-Fock (HF). Dans ce formalisme, la fonction d’onde est exprimée comme un unique déterminant de Slater : produit antisymétrisé d’orbitales moléculaires (elles-mêmes combinaisons linéaires d’orbitales atomiques). La méthode HF calcule exactement la totalité des intégrales bi-électroniques mais néglige l’interaction des différents déterminants entre eux. En ce sens, chaque électron évolue dans le potentiel électrostatique moyen créé par les autres électrons. Il est alors possible d’optimiser les orbitales en considérant une somme d’opérateurs purement mono-électroniques (opérateur de Fock) grâce à une procédure itérative, dite de champ auto-cohérent (Self Consistent Field, SCF). Les orbitales optimales, qualifiées de canoniques, sont obtenues par diagonalisation de l’opérateur de Fock ; cette méthode est donc variationnelle. L’énergie est ensuite calculée comme la valeur moyenne de l’hamiltonien électronique exact (incluant donc toutes les intégrales bi-électroniques) sur le déterminant de Slater exprimé avec les orbitales moléculaires obtenues à convergence de la procédure SCF. Bien que cette méthode inclue de nombreux effets physiques, souvent rassemblés sous le nom de « trou de Fermi », l’ordre de charge est inapproprié pour de nombreux systèmes. Notons en particulier que la probabilité de trouver deux électrons dans une orbitale magnétique est égale à celle de n’en trouver qu’un, ce qui est très préjudiciable à la description des systèmes magnétiques qui nous intéressent ici. Enfin, rappelons que l’énergie de corrélation électronique est définie comme la différence entre l’énergie non-relativiste exacte et celle du déterminant Hartree-Fock.

Table des matières

I Introduction
II Théories et méthodes
II.1 Hamiltoniens de spin anisotropes
II.1.1 Hamiltoniens modèles et hamiltoniens de spins
II.1.2 Hamiltoniens modèles : résumé
II.2 Origine physique de l’anisotropie magnétique
II.3 Calculs ab initio
II.3.1 Structure électronique
II.3.2 Couplage spin-orbite
II.3.3 Extraction des résultats et hamiltoniens effectifs
II.4 Rationalisation
II.4.1 Structure électronique / champ de ligands
II.4.2 Couplage Spin-Orbite
II.5 Les complexes [Ni(TMC)N3]+ et [Co(TMC)N3]+
II.5.1 Les différentes orientations des axes magnétiques
II.5.2 Le complexe [Ni(TMC)N3]+
II.5.3 Le complexe [Co(TMC)N3]+
II.6 Conclusion
II.7 Références
III L’anisotropie magnétique dans des complexes mononucléaires : application aux complexes de CoII pentacoordonnés
III.1 Problématique
III.2 Influence de la symétrie moléculaire
III.2.1 Symétrie et couplage spin-orbite
III.2.2 Analyse orbitalaire
III.3 Conséquence de la nature quasi-atomique du métal au sein d’un complexe
III.4 Règles de sélection : résumé
III.5 Illustration : le complexe [Co(DABCO)Cl3]-
III.6 Conclusion
III.7 Réferences
IV Influence de la nature des ligands sur l’anisotropie magnétique
IV.1 Influence du ligand axial
IV.2 Influence des ligands équatoriaux
IV.2.1 Les composés [Co(NS3iPr)X](BPh4)
IV.2.2 Les composés [Co(NS3tBu)X](ClO4)
IV.3 Vers un contrôle de l’anisotropie locale par un champ électrique
IV.3.1 Ordres de grandeurs
IV.3.2 Ionisation
IV.3.3 Effet du champ électrique seul
IV.3.4 Effet du champ électrique sur la structure
IV.4 Le complexe [Co(cage)N3]4+ : influence de la seconde sphère de coordination
IV.5 Conclusion
IV.6 Annexe : liste des complexes étudiés
IV.7 Références
V Composés Binucléaires
V.1 Le complexe [Co2(cage)N3]3+
V.1.1 Etude de l’interaction d’échange par DFT
V.2 Le complexe [Ni2(cage)Im]3+
V.2.1 Etude de l’interaction d’échange
V.2.2 Etude de l’anisotropie locale
V.3 Le complexe [Ni4(cage)(NO3)3(OH2)2]5+
V.3.1 Etude de l’interaction d’échange
V.3.2 Etude de l’anisotropie locale
V.4 Conclusion
V.5 Références
VI Conclusion générale

Télécharger le rapport complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *