Le système national d’innovation en expertise transport

 Le système national d’innovation en expertise transport

Observation des compétences innovantes

Nous avons associé deux approches pour recueillir l’information auprès des BE et des réseaux de diffusion. D’une part, un questionnaire porte sur les conditions et facteurs d’innovation au sein du BE. D’autre part, un ensemble de fiches (une par compétence) indiquant les déterminants a été présenté à l’interlocuteur pour qu’il choisisse celles correspondant à l’activité de son BE, il précise alors les origines (en noir) des déterminants (en gris) déjà identifiés. Pour chaque compétence, nous avons rassemblé les informations recueillies, auprès des BE sur une même fiche présentée en annexe. Ces documents ont été exploités pour décrire le système national d’innovation dans le chapitre suivant. Des analyses plus fines feront l’objet de publications ultérieures.

Conditions et succès de l’innovation

L’émergence de l’innovation Motivations pour les BE et contraintes économiques

Le métier de planificateur des transports s’exerce individuellement. Les motivations personnelles à innover sont déterminantes : désir de créer, curiosité, attente de reconnaissance par les pairs, mais elles ne sauraient suffire car l’innovation doit aussi servir le BE en tant qu’entreprise. L’innovation nécessite du temps (veille, réflexion, mise au point, expérimentation, validation, commercialisation), il faut qu’elle soit rentable à court ou moyen terme, Du point de vue du BE, nous distinguons trois motifs à l’innovation: ƒ Améliorer la productivité du travail des études, ƒ Répondre à une demande nouvelle d’un client, ƒ Améliorer ou orienter l’image du BE (vers des créneaux considérés comme porteurs). En développant une innovation, les BE essaient de satisfaire un ou plusieurs objectifs tout en minimisant son coût. Améliorer la productivité des études Ces innovations sont les moins visibles car les BE les gardent en interne. Voici quelques exemples : ƒ Le recueil d’informations sur le terrain sous forme de base de données : Altermodal fait des comptages de trafic deux roues en saisissant plusieurs paramètres pour chaque cycliste (origine, direction, âge, type de vélo…) en quelques secondes grâce à un programme de saisie développé sur PSION. Pour les reconnaissances d’itinéraires, toutes les photos prises sont accolées à un positionnement par GPS. ƒ L’exploitation plus systématique, voire automatique des SIG pour qualifier le réseau ou l’offre de stationnement : plusieurs BE ont développé des savoir-faire mais ne semblent pas échanger ou diffuser sur ce sujet. Le système national d’innovation en expertise transport 48 /168 ƒ La mise au point de fiches sur les activités génératrices de trafic : un poignée de BE développent en interne des catalogues, pour chaque activité, par exemple gymnase, salle de spectacle, lycée, magasin de sport, des fourchettes sont mises au point pour quelques paramètres, tels que le nombre de places de stationnement ou le trafic à écouler, en fonction de l’environnement (présence de TC, densité du tissu urbain ….). A finalité interne, ces innovations révèlent la perception que les BE ont du marché futur puisqu’ils vont préférentiellement engager un investissement sur des techniques susceptibles d’être utiles à la demande future de leur client. Indépendamment des progrès technologiques (miniaturisation des équipements, convivialité des bases de données) qui les rendent possibles, les exemples cités montrent une attention à la mobilité et un positionnement sur les études micro notamment une capacité à analyser, à une échelle fine, les liens entre l’utilisation du sol et les déplacements. Ces innovations à finalité interne reposent essentiellement sur le volontarisme des responsables du BE, elles ne sont pas guidées directement par la demande. La veille technologique est plutôt organisée (par la hiérarchie) pour scruter les expériences des collectivités. Les BE, filiale de grands groupes, profitent de séminaires internes aux groupes pour des retours d’expériences d’autres filiales ou d’autres pays (Systra, ISIS et SEMALY avec EGIS/Dorsch). Les petits BE indépendants ont plus de facilité à imaginer l’innovation en s’appuyant sur les parcours personnels. Aucun des BE interviewés ne songent sérieusement à développer et vendre ses innovations à d’autres BE ou collectivités. Répondre à une demande nouvelle d’un client Comme nous l’avons vu plus haut, les collectivités locales ont des capacités d’orchestration des études très variables. Certaines sont en mesure de formuler des demandes d’études novatrices et d’inciter les BE à innover méthodologiquement. Plus souvent, la qualité des échanges sur des études passées entre un ingénieur de BE et un technicien68 de collectivité locale conduit à identifier des faiblesses et mettre au point un cahier des charges pour une nouvelle étude. L’interactivité repose sur une relation interpersonnelle de confiance, régulièrement entretenue. Elle s’instaure si le client est suffisamment important pour financer de nouvelles études et lorsque le BE se sait en avance sur ses concurrents. Quelques exemples : ƒ SARECO cite des études faîtes pour la ville de Dijon et la SEM des parcs de stationnement de la capitale qui lui ont permis d’expérimenter des nouvelles méthodes. ƒ CODRA parle de ses relations durables avec quelques responsables de services techniques de villes pour expérimenter et évaluer de nouveaux aménagements. ƒ Le BE MTI Conseil a été créé pour répondre à une demande de son principal client qui est aussi son actionnaire (SNCF). Malgré le cloisonnement –assez administratif- entre les filiales de la SNCF, les collaborations avec l’Agence des gares (AREP) et SCETA Parc permettent de mettre au point des méthodes pour réaménager les pôles d’échanges. 68 Le terme « technicien de collectivité » désigne ici les cadres, ingénieurs, techniciens des collectivités locales par opposition aux élus. 49 /168 ƒ SETEC, dont nombre de directeurs appartiennent à un grand corps de l’Etat, semble avoir développé des relations de confiance avec les DDE et les services techniques de nombreuses collectivités, elles lui permettent ainsi de proposer des méthodologies sur mesure. Les BE ayant une activité d’ingénierie (Systra, SEMALY, Thalès) semblent moins enclins à innover pour répondre à la demande d’un client. Comme nous l’avons vu plus haut, ils interviennent généralement plus en aval du processus de planification. Au stade des études de faisabilité et des études d’opportunité, l’innovation n’est pas recherchée puisqu’il s’agit plutôt de s’appuyer sur ce qui se fait ailleurs pour justifier le projet. La marge de manœuvre réside plus dans les études de définitions voir l’avant-projet (priorité au feux, aménagement des arrêts et des plates-formes de correspondance,…) mais l’innovation a un coût : la demande du client doit être précise et monnayée69 à moins que le BE en attende un bénéfice important en terme d’image70. Les collectivités jouent un rôle déterminant dans l’innovation dans la planification des transports. Le programme de recherche du PREDIT sur la « Gestion des déplacements urbains» en donne de nombreux exemples. Améliorer ou orienter l’image71 du BE (vers des créneaux considérés comme porteurs). Pour le BE, il s’agit de montrer son avance sur ses points forts ou bien sa maîtrise d’une nouvelle compétence (en général sur un créneau porteur). Ses innovations se doivent d’être visibles dans les réseaux fréquentés par les clients. Elles sont présentées lors d’un colloque ou de journées techniques (ATEC, GART) aussi bien que dans un article d’une revue. Parfois, ce sera la collectivité cliente qui se chargera d’assurer la diffusion de l’innovation72. L’innovation pour ce motif suppose quelques préalables : ƒ Avoir une connaissance de l’évolution du marché : plus un BE intervient en amont dans le processus de décision, plus il peut déceler les tendances futures. ƒ Avoir une stratégie : une fois les créneaux porteurs identifiés, il faut choisir sur lesquels s’engager. Les BE indépendants nous ont exprimé précisément leur orientation73. Les grosses structures ont évidemment plus d’inertie. Pour palier ceci, EGIS a instauré le prix de l’innovation pour encourager les initiatives de ses employés74. ƒ Connaître l’état de l’art : il n’y a pas de bénéfice à inventer quelque chose qui est déjà connu par les clients, il faut pouvoir mettre en évidence la « valeur ajoutée ».

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