Les études portant sur les déterminants d’une publication volontaire d’informations

Les études portant sur les déterminants d’une publication volontaire d’informations

LA CREDIBILITE COMME FONDEMENT DE L’EFFICIENCE DU PROCESSUS DE PUBLICATION VOLONTAIRE D’INFORMATIONS

La publication volontaire d’informations correspond à une gestion des relations que le dirigeant entretient avec les actionnaires, les créanciers et différents autres groupes d’intérêt. En publiant des informations de nature volontaire à propos de l’entreprise qu’il dirige, le dirigeant rend son action plus transparente. « La publication volontaire d’informations consiste donc pour le dirigeant à montrer de manière opportuniste que son action ne l’est pas » (Depoers, 1999). Mais l’analyse met alors en évidence l’apparition d’un nouveau niveau possible d’opportunisme : celui du contenu de l’information publiée. En effet, si le dirigeant peut opter pour une publication volontaire d’informations afin de réduire le problème d’asymétrie d’information en rendant son action plus visible, il peut également trouver un intérêt à taire certaines informations ou à mentir. Dans le cadre des relations d’agence, la possibilité d’une manipulation de l’information conduit à un problème de « risque moral » qui représente une source d’inefficience du processus de publication volontaire d’informations. Dans un premier temps, nous définissons le terme de « risque moral ». Les différents mécanismes qui vont permettre d’assurer généralement la crédibilité des informations publiées sur un mode volontaire sont présentés dans un second temps. 

RELATION D’AGENCE ET RISQUE MORAL (« MORAL HAZARD »)

Selon Holstrom (1979), « une situation de risque moral est susceptible de survenir dès lors que plusieurs individus sont engagés dans une situation de partage d’un risque sous des conditions telles que les actions de chacun de ces individus vont définir la probabilité de répartition des bénéfices ou des coûts qui seront issus de leur collaboration ». Dans des situations simples où il est possible de contrôler et d’évaluer les actions de chacun des participants, le problème de risque moral pourra être résolu par la mise en place de contrats de premier rang permettant de définir d’avance les responsabilités de chacun et la rémunération ou les sanctions correspondantes. Mais le plus généralement cependant, l’observation et la mesure de l’efficience des comportements de chaque individu seront soit impossibles à réaliser matériellement soit trop coûteuses. Holstrom (1979) montre alors que la publication volontaire d’informations, aussi imparfaite soitelle, va constituer un mécanisme qui va permettre de réduire le risque moral. Deux questions se posent alors : – premièrement, de quelle façon la publication d’informations de nature volontaire peut-elle être utilisée pour améliorer les relations contractuelles de premier rang ? – deuxièmement, comment le processus de publication volontaire pourrait-il être utilisé de façon optimale ? Un exemple simple permet de répondre à ces deux questions. En prenant le cas d’une relation d’agence où le principal ne peut observer l’action de l’agent directement, Holstrom (1979) montre qu’une publication d’informations de nature volontaire par l’agent, aussi imparfaite soit-elle, peut permettre d’augmenter la richesse des co-contractants. En effet, un tel processus va obliger l’agent à s’engager ex ante sur la réalisation d’un certain nombre d’objectifs dont le principal pourra mesurer ex post l’atteinte au moyen d’une nouvelle publication d’informations par l’agent. Mais l’agent pourrait alors être tenté de profiter de la situation d’asymétrie d’information qui lui est favorable pour communiquer des informations erronées. Holstrom (1979) montre alors que le processus de publication volontaire d’informations ne sera efficient que si des pénalités sont associées à la publication d’informations erronées, par la mise en place de contrats de second rang.  D’un point de vue théorique, les procédures qui visent à diminuer le risque moral existent donc. Elles consistent à aligner les intérêts des agents et des principaux mais ne peuvent cependant résoudre tous les problèmes. D’ailleurs, comme le notent Fama et Jensen (1983), les problèmes d’agence existent parce qu’il est coûteux de rédiger et de faire respecter les contrats. Si les clauses des contrats ne suffisent pas à garantir le transfert non biaisé d’information, d’autres mécanismes vont les compléter. 

LES MECANISMES QUI VONT ASSURER LA CREDIBILITE DES INFORMATIONS PUBLIEES SUR UN MODE VOLONTAIRE

Une partie de ces mécanismes est liée à l’intervention du législateur ou des normalisateurs ; une deuxième partie est liée à l’existence de phénomènes de réputation ; une troisième partie, enfin, est liée aux rôles joués par différents intervenants extérieurs à l’entreprise.

Le rôle du législateur ou des normalisateurs

Le législateur intervient à deux niveaux pour protéger les investisseurs (Depoers, 1999) : par la mise place d’un organisme de surveillance des marchés financiers d’une part, et par l’instauration d’un contrôle externe obligatoire des comptes, d’autre part.

Le rôle des organismes de tutelle des marchés financiers

D’importantes réglementations sont en vigueur au niveau international concernant le niveau minimum d’informations que les dirigeants doivent fournir dès lors que leur société est cotée. Aux Etats-Unis, dès lors qu’une entreprise a accès aux marchés financiers, elle est tenue de respecter les règles de publication imposée par l’organisme de tutelle, la Securities and Exchange Commission, sous peine de sanctions. En France, l’Autorité des Marchés Financiers, l’AMF, a vocation à contrôler l’information des sociétés faisant appel public à l’épargne afin de protéger les épargnants. Le règlement n° 90-02 indique que l’information donnée au public doit être exacte, précise et sincère. Le non respect de cette obligation peut être sanctionné par l’Autorité.

Le rôle des auditeurs

La vérification sur un plan légal des informations qui seront publiées au sein du rapport annuel d’une société relève de la mission des commissaires aux comptes. Si les dirigeants de l’entreprise sont les seuls responsables de l’édition et de la publication du rapport annuel, le commissaire aux comptes doit veiller à la sincérité des informations contenues dans ce document. De plus, la réputation professionnelle du cabinet d’audit semble jouer un rôle déterminant dans l’issue de cette vérification. La confiance des utilisateurs de cette information en l’indépendance du cabinet détermine cette réputation. Le cabinet n’a donc aucun intérêt à valider des informations imprécises ou erronées dans le rapport annuel, ce qui affecterait sa crédibilité et du même coup sa réputation. On peut donc s’attendre à ce que la probabilité d’émettre des réserves sur des informations du rapport annuel soit plus élevée pour les grands cabinets d’audit puisque d’après De Angelo (1981), la taille des cabinets d’audit est représentative de leur qualité.

Le coût des fausses déclarations

Plusieurs auteurs avancent que la publication volontaire d’informations est, par elle-même, un mécanisme qui favorise la crédibilité des informations, car les communications trompeuses peuvent être sanctionnées de différentes manières. Premièrement, la crédibilité de l’information est assurée par des phénomènes de réputation (Hyafil, 1990). Le dirigeant ne peut impunément faire de fausses déclarations surtout quand l’information est vérifiable par la suite. Le manque de confiance limiterait en outre les bénéfices attendus de communications non frauduleuses. Deuxièmement, des déclarations frauduleuses peuvent entraîner des coûts conséquents sur le plan de la réputation de l’entreprise (dénommés « coûts de litige » au sein de la littérature). En se basant sur une étude de ces coûts, Skinner (1994) montre d’ailleurs que les dirigeants des entreprises qui ont de mauvaises performances à annoncer fournissent cette information, avant qu’ils ne soient tenus de le faire, deux fois plus que celles qui ont de bons résultats à annoncer. 53 Enfin et troisièmement, les phénomènes de réputation concernent également le dirigeant par rapport au marché du travail. Fama (1980) suggère que sur une longue période les déclarations trompeuses des dirigeants sont peu probables. En effet, si l’information ne se matérialise pas, ou si elle se révèle fausse par la suite, la valeur du dirigeant sur le marché du travail diminuera (Depoers, 1999). 2.3 Le rôle joué par différents intervenants extérieurs En outre, différents intervenants extérieurs vont en général permettre d’assurer unecrédibilité aux informations publiées sur un mode volontaire (Healy et Palepu, 2001). Il s’agit des analystes financiers et de diverses institutions financières (comme par exemple les organismes de notation). La littérature existante s’est surtout intéressée au rôle joué par les analystes financiers dans le processus de publication volontaire d’informations. Le rôle des analystes financiers est de collecter de l’information auprès de sources publiques et privées dans le but d’évaluer la santé financière des entreprises et de recommander tel ou tel titre boursier à l’achat, à la conservation ou à la vente. Les recherches académiques existantes se sont intéressées à deux formes d’informations produites par les analystes financiers aux investisseurs : les prévisions de résultats et les recommandations. Les résultats de ces études ont montré l’influence des analystes financiers sur les marchés financiers. Leurs prévisions de résultats semblent en effet influencer fortement les marchés que les modèles longitudinaux de prévisions de résultats, ce qui semblerait s’expliquer par le fait qu’ils incorporent de façon plus réaliste et plus immédiate que ces modèles les données économiques (voir à ce sujet Brown et Rozeff, 1978 ; Brown et al., 1987 ; Givoly, 1982). Il a été ainsi démontré que les prévisions et les recommandations des analystes financiers avaient un impact réel sur le cours de Bourse des entreprises (Givoly et Lakonishok, 1979 ; Lys et Sohn, 1990 ; Francis et Soffer, 1997). D’autres études récentes portant sur le rôle joué par les analystes financiers au sein des marchés financiers ont montré que ces intermédiaires contribuent de façon positive à l’efficience des marchés. Par exemple, Barth et Hutton (2000) ont découvert que les cours de bourse des sociétés ayant un suivi plus actif de la part des analystes financiers 54 incorporaient de façon plus immédiate les informations concernant les performances de ces sociétés que ceux des entreprises disposant d’un suivi moins actif de la part des analystes. Ainsi, les analystes financiers vont jouer un rôle majeur dans le contrôle de la crédibilité de l’information publiée par les dirigeants d’entreprises à l’intention des investisseurs. Le contrôle opéré par ces intermédiaires va conduire les dirigeants à la prudence dans leur comportement de publication, d’autant que, là encore, des phénomènes de réputation vont être en jeu, les analystes financiers pouvant influer sur la réputation de telle ou telle entreprise ou de tel ou tel dirigeant. En conclusion, plusieurs mécanismes vont généralement assurer la crédibilité de l’information publiée sur un mode volontaire. Les règles et les sanctions mises en place par le législateur ou les normalisateurs, des phénomènes de réputation, ainsi que le rôle joué par des intermédiaires experts de l’information financière (analystes financiers, organismes de notation) et les coûts (de litige) auxquels sont exposés les entreprises dont les dirigeants auront mal informé les acteurs des marchés financiers, vont permettre de contraindre, le plus souvent, les dirigeants à ne pas publier de fausses informations à propos de l’entreprise qu’ils dirigent.

Table des matières

INTRODUCTION GENERALE
CHAPITRE 1 LE CONCEPT DE PUBLICATION VOLONTAIRE D’INFORMATIONS
ET SES SOUS-JACENTS THEORIQUES
A DEFINITION ET ANALYSE DU CONCEPT DE PUBLICATION VOLONTAIRE D’INFORMATIONS
B LES THEORIES PERMETTANT D’EXPLIQUER UN COMPORTEMENT DE PUBLICATION (OU AU CONTRAIRE DE RETENTION) VOLONTAIRE D’INFORMATIONS
1. Les théories justificatives d’un comportement de publication volontaire d’informations .
2. Les théories explicatives d’un comportement de rétention d’informations de la part des dirigeants d’entreprises
C LA CREDIBILITE COMME FONDEMENT DE L’EFFICIENCE DU PROCESSUS DE PUBLICATION VOLONTAIRE D’INFORMATIONS
1. Relation d’agence et risque moral (« moral hazard »)
2. Les mécanismes qui vont assurer la crédibilité des informations publiées
sur un mode volontaire
D CONCLUSION DU PREMIR CHAPITRE
CHAPITRE 2 LES PRINCIPALES DIFFICULTES STATISTIQUES RENCONTREES DANS LE CADRE DE LA REALISATION D’UNE ETUDE PORTANT SUR LES DETERMINANTS D’UNE PUBLICATION VOLONTAIRE D’INFORMATIONS AU SEIN DES RAPPORTS ANNUELS
A PRESENTATION DE LA METHODE DE RECHERCHE DITE HYPOTHETICO-DEDUCTIVE ET EXPOSE DES TESTS STATISTIQUES HABITUELLEMENT REALISES AU SEIN DES ETUDES RECENSEES
1. La méthode de recherche « hypothético-déductive »
2. Exposé des tests habituellement réalisés au sein des études recensées
3. Présentation des tests les plus souvent réalisés
B UNE PRESENTATION DES DIFFICULTES STATISTIQUES QUI PEUVENT ETRE RENCONTREES DANS LE CADRE DES ETUDES PORTANT SUR LES DETERMINANTS DE LA PUBLICATION VOLONTAIRE D’INFORMATIONS ET DES DIFFERENTS MODES DE RESOLUTION POSSIBLES DE CES DIFFICULTES
1. Problématique générale
2. Les problèmes posés par le non respect des hypothèses du modèle classique de régression
et les modes de résolution possibles de ces problèmes
3. Le problème de la validité externe des études recensées : l’intérêt d’opérer une analyse
multi-échantillons / multi-périodes .
C CONCLUSION DU SECOND CHAPITRE
CHAPITRE 3 REVUE DE LA LITTERATURE EMPIRIQUE
A RECENSEMENT DES PRINCIPAUX DETERMINANTS ETUDIES
1. Les facteurs explicatifs d’un comportement de publication volontaire d’informations
de la part des dirigeants d’entreprises
2. Les facteurs permettant d’expliquer un comportement de rétention d’informations
de la part des dirigeants d’entreprises
3. Les facteurs explicatifs étudiés dans le contexte d’une publication volontaire d’informations
à l’intention plus spécifique des investisseurs
B LES RESULTATS DES ETUDES EMPIRIQUES PORTANT SUR LES DETERMINANTS DE LA PUBLICATION VOLONTAIRE D’INFORMATIONS AU SEIN DES RAPPORTS ANNUELS
1. Les études portant sur les déterminants de la publication volontaire d’informations
au sein des rapports annuels dans un contexte de mesure d’un niveau général de publication 197
2. Les études portant sur les déterminants de la publication volontaire d’informations stratégiques au sein des rapports annuels
3. Les études portant sur les déterminants de la publication volontaire d’informations sectorielles ou segmentées au sein des rapports annuels
4. Les études portant sur les déterminants de la publication volontaire d’informations financières en format extra-local au sein des rapports annuels
5. Les études portant sur les déterminants de la publication volontaire d’informations spécifiques au sein des rapports annuels
6. Les études portant sur les déterminants de la publication volontaire d’informations à l’intention des investisseurs
C SYNTHESE GENERALE DES RESULTATS OBTENUS
CHAPITRE 4 CADRE D’ANALYSE DE LA RECHERCHE ET DEMARCHE METHODOLOGIQUE
A RAPPEL DE LA PROBLEMATIQUE ET DES QUESTIONS DE RECHERCHE
B DEMARCHE METHODOLOGIQUE
1. Le contexte réglementaire de notre etude
2. Les deux définitions opérationnelles retenues pour mesurer la variable dépendante
3. Hypothèses testées
4. Echantillons et modèles testés
CHAPITRE 5 PRESENTATION ET ANALYSE DES RESULTATS
A STATISTIQUES DESCRIPTIVES
1. Statistiques descriptives concernant les deux définitions operationnelles de
notre variable à expliquer
2. Statistiques descriptives concernant les variables indépendantes
3. La forme de distribution des variables de nature quantitative
B LES RESULTATS DES TESTS UNIVARIES
1. Les résultats des tests univariés réalisés à partir de l’ensemble des observations
disponibles
2. Les résultats des tests univariés réalisés à partir de l’ensemble des observations
complètes (échantillons non calibrés)
3. Les résultats des tests univariés réalisés à partir de l’ensemble des observations
complètes (échantillons calibrés)
4. Synthèse des résultats des tests univariés
C TEST DES HYPOTHESES EN ANALYSE MULTIVARIEE
1. Les resultats des six régressions multiples
2. Les résultats des deux modèles longitudinaux
3. Synthèse des résultats en analyse multivariée
D SYNTHESE GENERALE DES RESULTATS OBTENUS
CONCLUSION GENERALE
ANNEXES

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