Les politiques publiques

Les politiques publiques

Il est évidemment impossible de résumer en quelques lignes une histoire qui continue aujourd’hui encore à susciter de nombreuses controverses. Dans la perspective qui nous intéresse ici, à savoir l’émergence des politiques publiques, deux évolutions fondamentales sont à souligner. La première prend la forme d’un processus de monopolisation [1] au profit du roi d’un certain nombre de pouvoirs concernant la fiscalité, la monnaie, la police ou la guerre. Ces fonctions régaliennes vont constituer le socle de l’État moderne tout en permettant au roi de s’affirmer face aux féodaux. La seconde évolution est moins visible mais tout aussi importante. Il s’agit de la constitution de ce que l’on appelle à la suite de Michel Foucault les savoirs de gouvernement [2], c’est-à-dire l’ensemble des « technologies » qui vont permettre à l’État de gouverner les territoires et les populations. Cette « gouvernementalisation » change la relation entre le pouvoir et la société parce que, désormais, l’État fait reconnaître sa légitimité à travers sa capacité à produire de l’ordre par la mise en œuvre de savoirs (comme la statistique par exemple) et de dispositifs efficaces (lutte contre les épidémies, organisation du commerce).

Mais ce passage de la souveraineté au gouvernement est inséparable d’une évolution plus générale : la remise en cause du principe de territorialité. Dans les sociétés traditionnelles, comme la France de l’Ancien Régime, c’est le territoire qui confère aux individus leur identité. Or, le passage d’une société agraire à une société industrielle avec l’émergence du marché transforme la place des individus dans l’espace public. Désormais « libres », ces individus ne se définissent plus par leur inclusion dans une communauté locale, mais par des liens plus complexes. De nouvelles formes de regroupements des rôles économiques, non plus fondées sur l’inclusion dans la communauté villageoise, mais sur des filières professionnelles, transforment le rapport des individus à leur travail. Enfin, l’émergence d’une citoyenneté personnelle définit de nouvelles formes d’inclusion des individus dans la sphère publique.

A) Dans les pays où le phénomène est le plus précoce (en Europe, il s’agit de la France et de l’Angleterre), c’est d’abord pour lutter contre les effets du marché que vont être mises en place les premières politiques publiques. Karl Polanyi souligne les effets de « dislocation » que l’extension du marché et l’industrialisation entraînent sur la société [3]. C’est pourquoi les premières politiques publiques eurent d’abord pour objet de prendre en charge la question sociale. Comme le montre Robert Castel [4], cette notion n’a pas véritablement de sens dans une société territoriale car le problème des pauvres et des indigents y est « encastré » dans des relations de proximité. Il est traité localement par l’intermédiaire de la charité ou de l’assistance. Mais avec l’émergence du salariat se développent de nouvelles formes de solidarité qui déboucheront, à terme, sur ce que l’on appellera l’État providence [5]. Le « social » se développe alors comme secteur spécifique faisant l’objet de politiques spécifiques. D’autres politiques vont apparaître à la même époque en fonction de la situation spécifique de chaque pays, comme la politique agricole en France.

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