Les rapports entre les églises et l’état

Les rapports entre les églises et l’état

La non immixtion des Eglises dans la vie politique malgache

Dans le cadre de ses fonctions non religieuses, les Eglises ont été marginalisées par l’existence du principe de la laïcité de L’Etat (Chapitre 1), s’affirmant par le désintéressement des acteurs religieux dans les différents engagements politiques (Chapitre 2). Chapitre 1 : la marginalisation des Eglises par le phénomène de la laïcisation par rapport à ses fonctions non religieuses Du point de vue politique la religion est essentiellement une affaire privée (section 1). L’Eglise ne s’immisce pas dans les affaires de l’Etat, mais elle se concentre, plutôt, sur ses missions religieuses (section 2). Section 1 : le caractère privé de la religion à l’égard du pouvoir politique L’expulsion du religieux de l’espace public en l’enfermant dans la sphère privée s’affirme actuellement à Madagascar. Compte tenu du principe de la laïcité, la religion est devenue inconnue dans la cadre des affaires politiques de l’Etat et affirmer le caractère privé de la religion équivaut ici à dénier à la politique tout pouvoir sur la conscience pour sauvegarder la liberté de la conscience. A l’origine, les rapports entre l’Etat et les Eglises à Madagascar faisaient déjà l’objet de règlementation (paragraphe 1) pour ensuite se concrétiser et se matérialiser dans la Constitution (paragraphe 2). Paragraphe 1 : l’arrière-fond historique du processus de la laïcisation Madagascar, monarchie, colonie ou république, n’a connu que le régime de la séparation des Eglises et de l’Etat. Pour l’essentiel la séparation demeurait. Il n’y avait ni religion d’Etat, ni intervention, au moins officielle, du pouvoir dans la vie des Eglises, la nomination ou l’élection de leurs évêques ou de leurs pasteurs, ni même l’élaboration ou l’approbation de leurs statuts. Contrairement à la France qui avait une permanente inégalité 6 entre les cultes, Madagascar a toujours appliqué un même droit à ceux-ci. En traçant l’histoire Malgache, on pouvait clairement dégager l’existence de deux séparations : une séparation de fait et une séparation de droit. Jusqu’en 1913, la séparation est un fait c’est-à-dire qu’aucun texte ne la proclame, aucun règlement d’ensemble ne l’organise, aucun contentieux ne la sanctionne. Des mesures éparses règlent partiellement le sort des Eglises et des cultes. Mais avec le décret de 1913 qui donne aux cultes un statut, la séparation devient de droit. A- La séparation de fait de 1861 à 1913 : Etant plus axée dans la liberté des cultes, celle-ci a déjà été, bel et bien, appliquée dans la Grande Ile avant la colonisation. Proclamée par Radama II, la liberté religieuse fut consacrée par les accords internationaux et par la législation Merina. Sept traités, signés par le gouvernement Merina, la mentionnent expressément : traité franco-malgache du 12 septembre 1862, traité franco-malgache du 8 Août 1868, traité américano-malgache des 14 février 1867 et 13 Mai 1881 et traité franco-malgache du 17 décembre 1885, dont les premiers sont les plus importants. Il est ainsi évident que la Monarchie Merina mit sa législation en harmonie avec ses engagements internationaux. Au jour de son couronnement, le 3 septembre 1868, la Reine Ranavalona II promulgua le code des 101 Articles, par un kabary, dans lequel elle affirmait avec netteté le principe de cette liberté : « Et je vous le dit encore que les religions à adopter ne sont pas obligatoires pas plus qu’elles ne sont interdites. A vous donc, qui êtes des créatures de Dieu, de choisir ce que vous devez faire » 

La séparation de droit de 1913 à 1968

La loi du 9 décembre 1905 sur la séparation des Eglises et de l’Etat ne concerne uniquement que la France. Madagascar étant l’une de ses colonies vint, par la suite, avec le décret du 11 mars 1913 qui avait pour objet d’appliquer et d’adapter dans le pays la loi de 1905. Mais, à l’époque coloniale, l’idée d’une séparation des affaires religieuses et des affaires politiques commence à surgir dans le paysage politique malgache, même si les rapports entre l’Etat et la religion restent ambigus et complexes. Selon Henri Vidal « respecter la liberté en maintenant l’ordre reste, en matière de police, un idéal toujours proclamé, parfois souhaité, plus rarement atteint ». Cet équilibre, ajoute-t-il, « est encore plus délicat encore dans le domaine religieux, en présence de confessions vigoureusement rivales et de défenseurs d’une laïcité vétilleuse et militante », « la difficulté grandit encore dans une colonie quand l’ordre paraît plus urgent que la liberté et que les religions risquent de servir de support aux nationalismes » . Mais il est à remarquer que les articles reproduits textuellement ou presque ont été peu appliqués et, dans la pratique, les différences l’emportent. Paragraphe 2 : le principe constitutionnel de la séparation des Eglises et de l’Etat Inscrite à Madagascar dans les différentes lois fondamentales, la laïcité a une valeur constitutionnelle. La constitution Malgache de la IVe république énonce deux grands principes qu’est la liberté de conscience et de culte et la séparation des Eglises et de l’Etat. Concernant la Séparation des Eglises et des Etats, la constitution Malgache énonce clairement dans son article 2 que « L’Etat affirme sa neutralité à l’égard des différentes religions. La laïcité de la république repose sur le principe de la séparation des affaires de l’Etat et des institutions religieuses et de leurs représentants. L’Etat et les institutions s’interdisent toute immixtion dans leurs domaines respectifs ». Autrement dit, la constitution reconnait la distinction entre l’ordre spirituel et l’ordre temporel, ce qui implique que chacun est absolu dans sa propre sphère, ce qui signifie encore que le temporel tombe sous la juridiction du spirituel et que le spirituel sous celle du temporel. Ici donc, du point de vue de certaines doctrines, on peut les considérer comme des forces antagonistes (Eglises et Etat, sacré et séculier, Dieu et César). Selon Raimundo Panikkar, « cette séparation affaiblit la religion en lui laissant un rôle de plus en plus insignifiant » . L’Eglise s’occupe uniquement de tout ce qui concerne la vie spirituel et la vie éternelle, et non des choses terrestres qui sont l’apanage de la politique ; elle a pour rôle de promouvoir l’unité, or, la politique divise et suscite des rivalités. Ainsi la constitution voit la séparation comme une non-ingérence réciproque (article 2 alinéa 3). Quant à l’Ordonnance de 1962, elle reconnait l’existence des Eglises et tire les conséquences juridiques de cette reconnaissance. Les deux principes, susmentionnés,  dominent également l’ordonnance du 1er octobre 1962, qui est plus libérale que le décret de 1913, accordant une entière liberté aux réunions du culte. Mais elle est assortie de restrictions : ces réunions sont libres « à condition qu’elles ne troublent en aucune façon l’ordre public et que les pratiques religieuses qui y sont exercées, ne portent atteinte ni à la morale ni aux bonnes mœurs »  . L’Etat respecte l’autonomie des Eglises ainsi reconnues. En d’autres termes, l’Etat n’impose aucun modèle de statut, aucune structure juridique, aucun contrôle dans la vie interne de l’Eglise. En reconnaissant l’existence juridique et la personnalité morale de l’Eglise, il accepte, par le même fait, son droit, ses propres règles d’organisations : « sous réserve des mesures d’ordre public, […], les églises se gouvernent elles-mêmes et sont seules qualifiées pour interpréter et faire appliquer leurs propres règles d’organisation » 6 . De plus, l’Etat accepte également ses statuts organiques, mais par contre il réserve les litiges pouvant survenir entre eux, sur des points précis, à la chambre administrative de la Cour suprême : « les litiges pouvant survenir entre les églises et l’Etat portant sur des questions domaniales ou de propriétés ou de jouissance d’édifices cultuels devront être portés devant la chambre administrative de la Cour suprême. Les mêmes litiges s’élevant entre membres de la même église à propos de la jouissance d’édifices cultuels et du mobilier qui en dépend sont réglés souverainement par les statuts organiques de l’église »  . Le régime juridique des cultes à Madagascar se définit ainsi comme une expérience de séparation des Eglises et des Etats. Section 2 : l’Eglise: « concentrée sur » et non pas « réduite à » sa mission spirituelle Comme on vient de l’évoquer, les institutions religieuses et le pouvoir politique ont chacun leur propre sphère dont chacun s’interdisent toute immixtion dans leurs domaines respectifs. « La claire affirmation d’une sphère religieuse propre constitue l’arme la plus puissante contre les déviations du pouvoir politique et le danger continuel d’usurpation des consciences » 8 . Le rôle politique des religions chrétiennes est de rappeler que le meilleur des mondes n’est pas de ce monde. Telle est, en quelque sorte, sa vocation au sein de la société. Les vicaires et Préfets Apostoliques de Madagascar, réunie à Antananarivo le 18 juillet 1948 à l’occasion du sacre de Monseigneur Sartre a donné les directives suivantes : « l’Eglise  n’a pas à prendre parti dans les questions d’ordre purement politique ; qu’ils ne s’étonnent donc pas de la voir se cantonner dans une attitude de discrète réserve et garder le silence sur des points qui pourtant agitent les esprits en ce moment. Qu’ils se souviennent par contre que l’Eglise a, non seulement le droit, mais le devoir d’intervenir dans toutes les questions où la religion et même simplement la morale sont intéressée »  . Certes dictée par la conjoncture de l’époque, cette affirmation démontre clairement la réticence de l’Eglise dans la participation à la vie politique malgache ; elle ne propose ni ne recommande aucune idéologie politique. Pour rester fidèle à sa mission, elle ne cessera donc pas de recommander en toute occasion le respect des valeurs morales essentielles.

Table des matières

TITRE I : La non immixtion des Eglises dans la vie politique
malgache
Chapitre 1 : la marginalisation des Eglises par le phénomène de la laïcisation par
rapport à ses fonctions non religieuses
Chapitre 2 : le désintéressement des acteurs religieux dans les engagements politiques
TITRE II : L’imbrication du religieux et du politique à
Madagascar
Chapitre1 : la recherche d’une démocratie effective : le dénominateur commun aux Eglises et à l’Etat
Chapitre 2 : le rejet de la théorie d’une séparation ultime
CONCLUSION

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