Les réactions interfaciales dans le couple de diffusion Ni/Sn

Les réactions interfaciales dans le couple de diffusion Ni/Sn

Absence des phases stables dans les couples de diffusion

L’absence des phases stables prévues par le digramme d’équilibre est révélée expérimentalement dans plusieurs systèmes [28-31]. Ceci est évidemment le seul inconvénient pour la méthode de détermination du diagramme d’équilibre par l’interdiffusion. L’absence d’une phase peut être due soit aux conditions de germination, soit aux conditions de croissance de cette phase.

Condition de germination

Les conditions de germination ne paraissent pas être responsables de l’absence de certaines phases, car elles semblent être toujours favorables dans les expériences de diffusion [32]. En particulier le fait que l’on observe rarement de période d’incubation dans la cinétique de croissance, lorsque les couples de diffusions sont bien soudés, semble indiquer que la germination des phases est toujours facile. Pour mettre en évidence le rôle des conditions de germination Castleman [18,33,34] a étudié le système Ni-Al. L’examen du diagramme d’équilibre permet de prévoir la formation de trois phases : Ni-Al, Ni2Al2 et NiAl3. En effet NiAl n’est jamais observée lorsque la diffusion est effectuée à partir de Nickel et d’aluminium. Comme cette absence peut être due à des conditions de germination défavorables, Castleman a déposé à l’interface des couples Al/Ni des « germes » constitués par de la poudre fine de NiAl. Les résultats obtenus avec ou sans germes sont identiques, ce qui montre bien que l’absence de NiAl n’est pas due aux conditions de germinations. D’Heurle [35] a étudié plusieurs systèmes de silicium où la germination est si difficile qu’elle domine le processus de formation des phases. Il montre que cette situation peut arriver pour les cas où la force motrice (variation de l’énergie libre ΔG) pour former la nouvelle phase est très petite et même égale à zéro. Mais un traitement à haute température peut favoriser la formation de la phase. I.3.2. Conditions de croissance Le terme Bj de l’équation (I.25) peut être positif, nul ou négatif ; selon les valeurs des gaps de miscibilité dans le diagramme d’équilibre et du terme DK. 1ier cas : Bj > 0  (I.76) Ainsi Bj > 0 signifie que le taux de la formation de la nouvelle phase j à partir de (j+1) est plus grand que la transition de la phase j a la phase (j-1) et par conséquent l’épaisseur de la phase j croit en fonction de la durée de diffusion ; ce qui est évidement, le cas général. Les interfaces peuvent tous les deux se déplacer vers la droite ou vers la gauche avec des taux différents ou peuvent se déplacer dans des directions opposées. Chapitre I Formation des phases intermédiaires par réaction d’interdiffusion – 44 – 2ème et 3ème cas : Bj ≤ 0 : De l’équation (I.76) : Bj = 0 � Jj,j+1−Jj+1,j Cj,j+1−Cj+1,j � = � Jj−1,j−Jj,j−1 Cj−1,j−Cj,j−1 � (I.77) Physiquement cette égalité implique que la formation d’une nouvelle phase j à l’interface (j/j+1) est exactement contrebalancée par la transition concurrente de j à la phase (j1) à l’interface (j-1/j). De tel équilibre dynamique peut engendrer l’absence de la phase j dans la zone de diffusion. De même le cas Bj < 0 implique que la vitesse d’apport de l’excès de matière apporté de la phase (j-1) à la phase j est très rapide comparé aux taux du flux dans la phase j. Il n’u a pas de temps pour que la phase j se forme à partir de (j+1). En effet l’excès de matière se montre suffisant pour engendrer la transition directe de la phase (j-1) à la phase (j+1); ainsi la phase j n’apparaît pas dans la zone de diffusion. Ces deux cas antérieurs sont rejetés sur un phénomène thermodynamique. Comme le potentiel chimique d’un constituant a la même valeur pour des phases en équilibre, Kidson en déduit que si une phase j est absente de la zone de diffusion le potentiel chimique présente une discontinuité à l’interface (j-1/j+1) et le gradient de potentiel chimique devient infini à cette interface. Ceci peut sembler en contradiction avec la condition d’équilibre qui impose aux potentiels chimiques des différents constituants une variation continue dans la zone de diffusion. Cependant on sait qu’il n’y a pas obligatoirement équilibre thermodynamique dans une expérience de diffusion. De plus si Bj est très petit mais non nul, l’absence de la phase j peut être due au fait qu’elle présente une épaisseur très faible et donc insuffisante pour être observée pratiquement. Dans ce dernier cas, il est possible de mettre en évidence la formation de la phase j de différentes manières. 1°) On peut montrer [7], que généralement Bj croît avec la température. Dans ces conditions, si une phase n’apparaît pas pour une valeur de Bj très faible, une élévation de température peut favoriser l’apparition de cette phase. 2°) La courbe C(x) correspondant à la diffusion à partir des métaux purs dépend des coefficients de diffusion D1, D2,…, Dn, qui caractérisent chaque phase. Il en est de même pour les coefficients K définis précédemment. Si la diffusion est étudiée à partir d’un couple constitué non pas par des métaux purs, mais par exemple, par la phase j et l’un des deux métaux, la courbe C(x) et le coefficient K seront modifiés. Une telle modification doit entraîner une variation du coefficient Bj d’après les équations (I.76) et (I.77). Chapitre I Formation des phases intermédiaires par réaction d’interdiffusion – 45 – Ainsi lorsqu’une phase j n’apparaît pas dans la zone de diffusion (Bj nul ou très faible) et que la diffusion est effectuée à partir des métaux purs, on peut faire apparaître cette phase en étudiant la diffusion entre deux phases i et k ou entre la phase i et l’un des deux métaux de base (Bj peut être devenir positif et relativement grand). Ceci a été le cas dans le couple Al-Mo pour la phase AlMo3. Cette phase n’apparaît pas même après 2000 h à 500°C mais dans le couple Al3No-Mo la phase croit très rapidement à 800°C. L’absence de cette phase à 500°C est due au faible coefficient de diffusion mais non pas à son instabilité. Beaucoup d’autres raisons peuvent être la cause de l’absence d’une phase en équilibre dans la zone de diffusion d’un couple binaire :  La présence d’une couche barrière à l’interface, par exemple une couche d’oxyde ou la présence des impuretés dans les métaux de départs. La présence d’une couche d’oxyde peut être la cause de l’existence d’un temps d’incubation. De luca et Sumson [36] trouvèrent que le temps d’incubation pour la croissance dans le couple U-Al à 250°C est de 20h. Mais l’application d’une pression suffisante permet à la réaction de commencer immédiatement par la cassure du film d’oxyde entre les deux métaux.  L’absence d’une phase peut être due à sa dissolution dans les phases adjacentes [8] après sa formation. Ceci a été observé expérimentalement dans le couple Ni-Al. Ce système à fait l’objet de nombreux travaux. Le diagramme d’équilibre du système Ni-Al prévoit la formation de quatre phases : Ni3Al/NiAl/Ni2Al3/NiAl3. Ces phases ont été toutes présentes dans le couple à 600°C [37]. Cependant, pour la même température Strocheim, Castleman et Seigle trouvèrent seulement les deux phases Ni2Al3/NiAl3 et dans les expériences de Hickl et Heckl [38] faites à 870°C et à 1000°C seules les phases Ni2Al3/NiAl/Ni3Al on été observées, et après trois heures de traitement seulement les phases NiAl et Ni3Al subsistent. La phase NiAl croît en consommant Ni2Al3. La ségrégation des impuretés peut faire passer le système binaire à un système ternaire, et par suite l’analyse de la zone de diffusion s’éloigne du diagramme d’équilibre du système binaire. Notons par exemples les carbures tels que Mo5SiC [39] ou Mo6Ni6C [40] qui peuvent être confondus avec les phases purement binaires Mo5Si3 et MoNi. De même pour les oxydes comme Ti4Ni2O et Ti4Fe2O qui peuvent être confondus avec les composés binaires Ti2Ni et un composé non existant Ti2Fe [41]. Chapitre I Formation des phases intermédiaires par réaction d’interdiffusion 

Effet de la pression sur l’interdiffusion

Un certain nombre d’expériences ont été effectuées pour préciser l’effet de la pression sur la croissance des phases intermétalliques [42]. Différents systèmes ont été étudiés : Al-Ni, U-Ni, U-Cu, Cu-Zn, Cu-Sb,… ; dans certains de ces couples la nature des phases formées semblent être modifiée par l’application d’une pression, mais dans la plupart des cas c’est l’étendue du domaine d’existence des phases qui est modifiée. L’application d’une pression ne modifie pas d’une manière radicale la nature des phases formées par diffusion. On constate par contre, la suppression de certaines phases sous l’effet de la pression, mais ceci s’explique facilement par une modification de la cinétique de croissance des différentes phases. Dans le couple Cu-Sb, des essais de diffusion effectués à 390°C devraient conduire, d’après le digramme d’équilibre, à la formation de trois phases intermétalliques qui sont δ (29% en poids Sb), χ (29 % en poids Sb) et γ (49 % en poids Sb). D’après [43], seule la phase γ apparaît dans les essais effectués à des pressions inférieurs à 25 et 65 kg/cm2 . Par contre des résultats sensiblement différents on été observés par Beyeler pour des essais effectués à la même température de 390°C lorsque la pression appliquée au cours de l’essai de diffusion est inférieur à 80 kg/cm2 , le domaine d’existence devient : 32,5 % à 34,5 % pour l’une et 48,6 % à 49,8 % pour l’autre. Une diminution de la vitesse de croissance de la zone de diffusion dans le couple Ni/Al en fonction de la pression dans la direction de diffusion a été observée [30,31]. Ce résultat a été confirmé et la nature des phases formés (les phases β et γ du système Ni-Al) ont été identifiées [44]. Par contre, une augmentation de la vitesse de croissance de la zone de diffusion dans le couple U/Al sous l’influence de la pression a été observée [30,42,45]. Dans le couple Cu/Sb, l’application d’une pression (de l’ordre de 60 Kg/cm2 ) ralentit la croissance d’une phase et accélère celle d’une autre [43]. Dans le couple Cu/Zn, la vitesse de formation des phases β et γ décroît en fonction de la pression tandis que celle de la phase ε croît [42]. On constate que les résultats concernant l’effet de la pression sur les produits d’interdiffusion dans les couples bimétalliques sont très dispersés et varient beaucoup pour le même système suivant les auteurs ; plusieurs tentatives d’interprétation ont été faites pour expliquer la variété de ces observations expérimentales [42]. Les résultats expérimentaux obtenus dans le système Ni/Al ne sont pas surprenants et s’interprètent facilement par une diminution sous l’effet de la pression du coefficient de diffusion dans la phase γ (Ni2Al3). L’accélération de la vitesse de diffusion sous l’effet de la pression s’interprète [44] par Chapitre I Formation des phases intermédiaires par réaction d’interdiffusion – 47 – l’augmentation de la section efficace disponible pour la diffusion qui résulterait d’une diminution du nombre de pores, très abondants dans le système U/Al, qui se forme dans la zone de diffusion. Une telle interprétation peut être mise en doute puisque la pression accélère la croissance dans le système U/Cu alors que dans ce couple les zones de diffusion sont toujours exemptes de porosité.

Table des matières

I.1. Les produits d’interdiffusion dans un couple
I.2.Théories de la formation des phases
I.2.1. Théorie de Shatynski, HirtRapp
I.2.1.1. Cas d’un produit singulier
I.2.2. Théorie de Kidson
I.2.2.1. Application de la première loi de Fick à un système de deux phases
I.2.2.2. Cas d’un système de trois phases
I.2.2.3. Cas général : système de n phases
I.2.3. Théorie de Philibert
I.2.3.1. Cinétique de croissance des phases
a) Cas d’une seule phase dans le système A/B
b) Cas où seulement deux phases A2B et AB apparaissent
I.2.4. Théorie de Dybkov
I.2.4.1. Croissance d’une couche singulière
a) Mécanisme de croissance
b) Cinétique de croissance d’une couche singulière
I.2.4.2. Croissance de deux et trois couches
a) Mécanisme de croissance de deux couches
b) Mécanisme de croissance de trois couches
Chapitre I : Formation des phases intermédiaires
par réactions d’interdiffusion
c) Cinétique de croissance de deux et trois couches
I.3. Absence des phases stables dans les couples de diffusion
I.3.1. Condition de germination
I.3.2. Condition de croissance
I.4. Effet de la pression sur l’interdiffusion
Références bibliographiques
II.1. Les matériaux utilisés
II.2. Propriétés des matériaux
II.3. Préparation des couples de diffusion Ni/Sn
II.3.1. Préparation métallographique des métaux
II.3.2. Présoudage
II.4. Traitement de diffusion
II.5. Préparation métallographique des couples Ni/Sn après recuits
II.6. Les moyens d’observation et d’analyse
II.6.1. Microscope optique
II.6.2. Le microscope électronique à balayage (MEB)
II.6.2.1. Principe de fonctionnement
II.6.2.2. Grandissement
II.6.2.3. Résolution
II.6.3. Analyse par EDX (EDAX)
II.6.3.1. Principe de l’opération
II.6.3.2. Analyse quantitative
Références bibliographiques
Chapitre II : Travail Expérimental
III.1. Microstructure de l’interface Ni/Sn
III.2. Cinétique de croissance de la phase Ni3Sn4
III.3. Effet de la pression
Références bibliographiques
Conclusion générale
Chapitre III : Résultats et Discussions

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