L’influence du clavardage sur la maîtrise du français écrit des élèves

Le clavardage est une pratique très populaire au Québec et dans plusieurs autres pays. De nombreux adolescents le préconisent comme outil de conversation. Par le biais de ce récent mode de communication, les jeunes francophones transgressent les normes de la langue française , puisqu’ils utilisent une langue codée qui est très différente du français conventionnel. Cette recherche a pour objectif de vérifier l’influence du clavardage sur la maîtrise du français écrit des élèves du premier cycle du secondaire, et ce, au regard des particularités de la langue codée associée au clavardage et de l’ influence de la psychologie cognitive sur l’apprentissage.

Quelques études anglophones se sont attardées au phénomène du clavardage. Notamment, selon l’étude de Va.rnhagen, McFal!, Pugh, Routhledge et Sumida MacDonald (2009), le clavardage n’a pas d’ influence sur la maîtrise de la langue anglaise des adolescents de 12 à 17 ans. En revanche, cette recherche était basée sur des tests d’épellation, ce qui diffère complètement des épreuves d ‘ écritme. En effet, cette étude n’ a donc pas vérifié l’ influence du clavardage sur la maîtrise de la langue écrite. Du côté francophone, les connaissances sur le phénomène sont davantage du domaine des opinions. Effectivement, peu d’études se sont penchées sur la question. À notre connaissance, une seule recherche a étudié l’impact du clavardage sur la langue écrite au Québec. Il s’ agit de l’ étude de Lafontaine, Blouin Bradette, Cantin-Fontaine et Fortier (2005), qui a conclu que le clavardage n ‘ affecte pas la langue française écrite des élèves de cinquième secondaire, en comparant des tâches écrites requérant les mots codés du clavardage des clavardeurs et des non-clavardeurs. Par contre, la clientèle et la méthode ne sont pas les mêmes que pour la présente recherche, de même que les différentes variables ciblées, d’ où la contribution originale de celle-ci. De plus, de toute évidence, une seule étude sur le clavardage et son impact sur la langue française n’est pas suffisante pour le domaine éducatif, ce qui ajoute à la nécessité de mener une telle recherche sur le sujet.

Depuis plusieurs années, les communications ont subi des changements importants. Les gens explorent d ‘ autres avenues que les lettres écrites à la main, les conversations téléphoniques et les discussions orales entre personnes réunies dans un même lieu. L’avènement de l’ informatique et des nouvelles technologies fait en sorte que d’autres options sont a ujourd ‘hui offertes à l’ensemble des individus. Ceux-ci ont maintenant la possibilité de communiquer par le biais du cIavardage, c’est-à-dire par des discussions virtuelles en direct où les gens discutent avec les personnes de leur choix. Le clavardage est le thème à la base de la présente recherche, dont le but est de vérifier si son utilisation a une influence sur la maltrise du français écrit des jeunes du premier cycle du secondaire. La problématique est divisée en huit parties. Dans ce chapitre figurent une définition des concepts, un bref  historique concernant l’avènement de l’ informatique, ainsi qu ‘ une patiie définissant les caractéristiques de la clientèle associée à ce mémoire, soit les adolescents entre 12 et 16 ans. Par ai lieurs, il est pertinent de faire ressortir les aspects positifs et négatifs de ce média récent, de même que les liens qui ont été ciblés entre le clavardage et la langue orale. De plus, les statistiques quant à l’ utilisation de ce nouveau mode de commun ication, ses principales caractéristiques, qui sont sensiblement les mêmes que celles des textos, les opinions des acteurs de l’ éducation ainsi que les études menées sur le sujet seront abordées.

Les termes clavardage (issu de clavier et bavardage), bavardage clavier et cyber bavardage ont été nommés par l’Office québécois de la langue française (1997) pour désigner ce nouveau phénomène. Selon cet organisme, le clavardage est défini comme étant une « activité permettant à un internaute d’avoir une conversation écrite, interactive et en temps réel avec d’autres internautes, par clavier interposé» (Office québécois de la langue française, 1997). Les discussions par le biais du clavardage se font par l’intermédiaire de sites Internet (bavardoirs) ou de programmes comme Msn Messenger. Les individus se servent également des réseaux sociaux pour clavarder; Facebook et Myspace sont devenus des outils de clavardage très appréciés des internautes. En somme, le clavardage peut être défini comme une forme de bavardage en ligne (discussion virtuelle, discussion en direct, messagerie instantanée, discussion virtuelle, chat) où la langue codée y est la langue associée. Le terme privilégié dans le cadre de cette recherche pour désigner le phénomène est clavardage et le code reconnu pour en désigner son code écrit sera la langue codée. Des personnes d ‘âges variés et du monde entier sont touchées par le phénomène du clavardage, malgré le fait que les adolescents en sont les plus grands adeptes (Paré, 2001). En effet, plusieurs d’entre eux passent de nombreuses heures par jour à clavarder sur des sites Internet et sur des programmes ayant cette fonction. De même, les textos, cette nouvelle technologie où les individus peuvent s’envoyer des messages par le biais de leur téléphone cellulaire, sont aussi particulièrement populaires. Ce dernier terme (texto) sera employé lorsque les messages de ce type seront abordés. D’ailleurs, les utilisateurs des textos recourent aussi à la langue codée, ce qui fait en sorte que la majorité des caractéristiques de la langue codée sont les mêmes pour le clavardage et pour les textos. Un autre terme permet l’appellation des textos : il s’agit des SMS (short message service). Le clavardage demeure le principal phénomène à l’étude dans le cadre de ce mémoire, bien que les textos et le courrier électronique, des modes de communication connexes, seront aussi abordés en recension des écrits. En effet, les internautes ont la possibilité de communiquer par courrier électronique (mail, courriel), qui constitue un service d’envoi de messages électroniques se réalisant par l’intennédiaire d’Internet. La langue codée est un peu moins présente dans le courrier électronique. Le tenne courrier électronique sera préconisé dans cette recherche pour désigner ce mode de transmission de messages.

HISTORIQUE

Dans le cadre de l’actuelle recherche, un bref historique du clavardage pennettra de mieux comprendre l’origine de ce mode de communication en pleine effervescence.

Internet a vu le jour en 1969 et a été développé par le département américain de la défense. À vrai dire, plusieurs centres scientifiques militaires, publics et privés ont contribué à sa création. Suite à la conception de ce nouveau média qui a révolutionné complètement la circulation de l’infonnation dans le monde, le courrier électronique est né en 1971, année lors de laquelle deux pro grammes de cette nature ont été créés par Tomlinson. Par contre, les programmes de courrier électronique ont été nonnalisés plusieurs années plus tard, en 1977. En 1979, les forums de discussion ont été mis au point, utilisables par l’intennédiaire du réseau « Usenet ». Par la suite, dans le but d’offrir un moyen fonctionnel de transmission de l’infonnation, le « World Wide Web» a été conçu en 1984 (Marcoccia, 2003). IRC (Internet Relay Chat) a été quant à lui inventé en 1988 et constitue le premier système de clavardage sur Internet. Il s’agit de pages web où plusieurs personnes communiquent entre elles. Leurs commentaires sont alors à la vue de tous, autant les utilisateurs que les visiteurs. IRC a suscité rapidement l’ intérêt des internautes, ce qui fait en sorte que ce logiciel a été très populaire dès son entrée dans le domaine infonnatique. Par la suite, des systèmes de clavardage pennettant la communication en duo ont également été mis au point. ICQ (I seek you) a été créé en 1996 et constitue l’un des premiers programmes de clavardage pennettant la communication en dyade (Fuks, Piment el et De Lucena, 2006). Suite à l’apparition d’ICQ, d’autres logiciels ont été créés, par exemple Msn Messenger, qui est toujours très populaire en temps actuel (Bouffard et Pouliot, 2007). D’ailleurs, il est maintenant possible de clavarder avec un nombre de personnes illimitées. Selon Bouffard et Pouliot (2007), le nombre d’utilisateurs du clavardage se compte à 360 millions dans le monde entier, et ce nombre serait en constante augmentation. De nos jours, approximativement 74 % des jeunes utilisent le clavardage pour communiquer selon ces auteurs.

LA GENERATION INTERNET

Il est de circonstance de faire ressortir quelques caractéristiques communes aux adolescents d’aujourd’hui à l’égard de l’utilisation qu’ils font de l’informatique, cela dans le but de se familiariser avec leur réalité.

La clientèle de jeunes étudiée par l’intermédiaire de ce mémoire est en quelque sorte née avec Internet. Paré (2001) a intitulé cette génération comme étant justement la génération Internet. Cette expression distingue bien les adolescents d’aujourd’hui de ceux des précédentes générations, étant donné qu’Internet est au centre de leur vie. En effet, ils utilisent souvent Internet pour, bien entendu, communiquer, mais également pour apprendre et pour jouer à des jeux de diverses catégories. Le rapport Bourgogne, rédigé par Paré (2001), a ressorti toutes les particularités associées aux adolescents de la présente génération, toujours par rapport aux cybercommunications. En fait, la génération Internet compte toutes les personnes nées entre 1977 et 1997, ce qui fait en sorte qu’elle est échelonnée sur une période de 20 ans. Paré précise que l’une des caractéristiques distinctives de cette génération est la présence accrue des technologies de l’information et de la communication, qui font partie intégrante de la vie de la grande majorité de ces individus.

Les jeunes et jeunes adultes ayant vécu avec l’ère des nouvelles technologies n’ont pas vécu avec l’attrait de la nouveauté qu’elle a apportée; ils sont nés à l’intérieur de celleci. Les adolescents de cette génération ont plusieurs points communs, peu importe leur nationalité. Internet a fait en sorte qu’ils peuvent communiquer ensemble et connaître les cultures des uns et des autres. Il y a donc maintenant une certaine homogénéité entre les différentes cultures, surtout chez les plus jeunes. De plus, de nos jours, les jeunes font preuve d’une certaine impatience; ils désirent tout, et tout de suite (Paré, 2001). Il est ici possible de faire un lien avec le clavardage, puisque par le biais de ce média, ils ont accès à une réponse de l’internaute avec qui ils communiquent de façon quasi-instantanée. Ils misent sur la rapidité en coupant des parties des mots employés. Internet favorise donc cette notion d’instantanéité, étant donné que les jeunes ont accès à une réponse immédiate, autant lorsqu’ils communiquent en ligne que lorsqu’ils recherchent une information sur le réseau virtuel. Il est donc prévisible que les adolescents, qui ont pris l’habitude de l’instantanéité, généralisent celle-ci à d’autres aspects de leur vie. Effectivement, c’est ce que laisse entendre Paré en précisant que les jeunes font aujourd’hui preuve d’impatience.

Table des matières

CHAPITRE 1 INTRODUCTION GÉNÉRALE
CHAPITRE 2 PROBLEMATIQUE
2.1 INTRODUCTION
2.2 DEFINITlONS DES CONCEPTS
2.3 HISTORIQUE
2.4 LA GENERATlON INTERNET
2.5 ASPECTS POSITIFS ET NEGATIFS DU CLAVARDAGE
2.6 CARACTERISTIQUES PRlNCIPALES DE LA LANGUE ECRITE CODEE UTILISEE LORS DE SEANCES DE CLAVARDAGE
2.6.1 Les réductions graphiques
2.6.2 Les réductions et transformations avec variantes phonétiques
2.6.3 Particularités de ce mode de communication
2.7 CLAVARDAGE ET ORALlTE
2.8 OPINIONS SUR L’EFFET DU CLAVARDAGE SURLA MAITRISE DE LA LANGUE FRANÇAISE ECRITE
2.9 ÉTUDES SUR L’lNFLUENCE DU CLAVARDAGE SUR LA LANGUE
2.10 DIFFERENCES ENTRE LES SEXES AU NIVEAU DES PERFORMANCES EN ECRITURE
2.11 CONCLUSION
2.12 PROBLEME DE RECHERC1IE
CHAPITRE 3 CADRE THEORIQUE
3.1 INTRODUCTION
3.2 PSYCHOLOGIE COGNITIVE
3.3 STRATEGIES METACOGNITIVES ET COGNITIVES
3.4 CONNAISSANCES
3.5 MEMORJSATlON
3.6 AUTOMATISATION DES CONNAISSANCES
3.7 ATTENTION
3.8 TRANSFERT DES APPRENTISSAGES
3.9 VARIATIONS LINGUISTIQUES
3.10 LE RECOURS AU VERLAN ET LA MAITRlSE DE LA LANGUE FRANÇAISE ORALE
3.11 ÉCRITURE ET STRATEGIES D’ECJUTURE
3.12 CONCLUSION
CHAPITRE 4 METHODOLOGIE
4.1 INTRODUCTION
4.2 PROCEDURE
4.3 ÉCHANTILLON
4.4 INSTRUMENTS DE MESURE
4.4.1 Séances d’observations sur les sites consacrés au c1avardage
4.4.2 Dictée
4.4.3 Questionnaire sur les habitudes informatiques
4.5 METHODE D’ANALYSES STATISTIQUES
4.5.1 Méthodologie et recherche quantitative
4.5.2 Position épistémologique
4.5.3 Statistiques descriptives
4.5.4 Statistiques corrélationnelles
4.6 CONCLUSION
CHAPITRE 5 RÉSULTATS
5.1 INTRODUCTION
5.2 QUESTION DE RECHERCHE ET HYPOTHESES
5.3 STATISTIQUES DESCRlPTIVES
5.3.1 Âge de début du clavardage
5.3.2 Temps hebdomadaire consacré au c1avardage
5.3.3 Le fait que l’élève c1avarde ou non
5.3.4 Erreurs de français associées au c1avardage
5.4 ST A TISTIQUES CORlŒLA TlONNELLES
5.4.1 Lien entre l’âge de début du c1avardage et les erreurs de français associées au clavardage
5.4.2 Lien entre le temps hebdomadaire consacré au c1avardage et les erreurs de français associées au clavardage
5.4.3 Lien entre le fait que l’élève c1avarde ou non et les erreurs de français associées au clavardage
5.5 DISCUSSION DES RESULTATS
CHAPITRE 6 CONCLUSION GÉNÉRALE

Cours gratuitTélécharger le document complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *